Réf. : Cass. com., 24 avril 2024, n° 22-15.958, F-B N° Lexbase : A782528C
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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)
le 03 Mai 2024
► Si la qualité de partie au contrat peut être cédée, c’est à la condition que le cédé donne son accord (C. civ., art. 1216), lequel n’est pas subordonné à l’exigence d’une forme particulière mais doit cependant être non équivoque ; à défaut, la cession lui est inopposable.
Contexte. La cession de contrat a été clairement consacrée en droit commun par l’ordonnance du 10 février 2016 N° Lexbase : L4857KYK aux articles 1216 et suivants du Code civil N° Lexbase : L0929KZG, et les arrêts rendus sous l’empire de ces textes se multiplient. C’est ainsi que la Chambre commerciale a eu à se prononcer sur les effets de la cession de contrat à l’égard du cédé, considérant qu’ils ne se produisent que si la cession lui a été notifiée ou s’il en prend acte, ce qui peut résulter du paiement effectué par le cédé entre les mains du cessionnaire (Cass. com., 9 juin 2022, n° 20-18.490, F-B N° Lexbase : A793274K).
C’est aujourd’hui sur l’accord du cédé, exigé par l’article 1216, alinéa 1er (« un contractant, le cédant, peut céder sa qualité de partie au contrat à un tiers, le cessionnaire, avec l’accord du cocontractant, le cédé » ; v. préc. Cass. com., 6 mai 1997, n° 94-16.335 N° Lexbase : A1519ACA), que cette même chambre est amenée à se prononcer. Cet accord doit-il revêtir une forme particulière ? Comment faire la preuve de celui-ci ? Telles étaient les questions soulevées par l’arrêt.
Faits et procédure. En l’espèce, une cession de contrat avait été conclue et le cessionnaire avait assigné le cédé en paiement des sommes dues par lui. La cour d’appel avait rejeté sa demande, considérant que l’acceptation du cédé ne satisfaisait pas à la règle posée par l’article 1216, alinéa 3, du Code civil selon laquelle « la cession doit être constatée par écrit, à peine de nullité », ni aux règles de preuve, et en particulier à l’article 1359 N° Lexbase : L1007KZC imposant une preuve écrite.
Solution. L’arrêt est cassé pour violation de la loi au visa de l’article 1216, alinéa 1er, du Code civil. La Chambre commerciale précise que « d'une part, que l'accord du cédé à la cession du contrat peut être donné sans forme, pourvu qu'il soit non équivoque, et peut être prouvé par tout moyen, d'autre part, que le défaut d'accord du cédé n'emporte pas la nullité de la cession du contrat, mais son inopposabilité au cédé ». Ainsi, l’accord du cédé n’est soumise à aucune forme particulière. Ce faisant, la preuve de celui-ci peut se faire par tous moyens.
Mais faute d’accord, quel sort faut-il réserver à la cession de contrat ? La Cour de cassation considère que la cession demeure valable, mais elle est inopposable au cédé. La précision ainsi formulée permet à la Cour de cassation de lever un doute qui existait en l’absence d’accord. Le doute était jusqu’alors permis (sur le débat, v. O. Deshayes, Th. Génicon, Y.-M. Laithier, Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, 2e éd., 2018, ss. art. 1216, p. 520). Il n’est plus de mise. La cession demeure valable.
Pour aller plus loin : à noter que l'arrêt fera l'objet d'un commentaire approfondi par le Professeur Louis Thibierge, à paraître prochainement dans la revue Lexbase Droit privé. |
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