La lettre juridique n°975 du 29 février 2024 : Responsabilité

[Brèves] Accident de la circulation : exclusion de l'événement volontairement provoqué par le conducteur ou un tiers

Réf. : Cass. civ. 2, 15 février 2024, n° 21-22.319, FS-B N° Lexbase : A31172ME

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N8535BZ7

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par Hélène Nasom-Tissandier, Maître de conférences HDR, Université Paris Dauphine-PSL, CR2D

le 28 Février 2024

Ne constitue pas un accident au sens de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, celui qui, volontairement provoqué par le conducteur ou un tiers, ne présente pas, de ce fait, un caractère fortuit.

Alors que la notion d’accident est centrale pour la mise en œuvre du régime prévu par la loi loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 N° Lexbase : L7887AG9, elle n’est pas définie par le texte. Il est cependant acquis que le caractère accidentel de l’événement dommageable est une condition nécessaire à l’application de la loi « Badinter ». Par cette décision, la Cour de cassation précise que la qualification d’accident est exclue lorsqu’il est volontairement provoqué par le conducteur ou un tiers.

Faits et procédure. En l’espèce, lors de la sortie de route d’un véhicule, une passagère a été blessée. La victime assigne l’assureur du véhicule aux fins d'obtenir la désignation d'un expert ainsi que le versement d'une provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices. La cour d’appel fait droit à la demande de provision formée par la victime en énonçant que « la conductrice du véhicule est volontairement sortie de la route mais qu'aucun élément du dossier ne laisse penser qu'elle ait entendu attenter à la vie de sa passagère » (CA Nouméa, 8 juillet 2021, n°20/00450 N° Lexbase : A03237MW. Elle en déduit que le sinistre est « un accident de la circulation dans lequel a été impliqué un véhicule terrestre à moteur ». L’assureur du véhicule forme un pourvoi en cassation. Il soutient que « ne subit pas un accident de la circulation au sens de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 le passager dont le dommage est la conséquence directe de l'action volontaire du conducteur ». Il affirme également que « l'assureur de responsabilité civile du conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne couvre pas les dommages résultant de la décision de ce dernier de précipiter son véhicule en dehors de la chaussée ».

Solution. La Cour de cassation casse et annule la décision des juges du fond. Elle rappelle, au visa de l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, que « les dispositions du premier chapitre de cette loi s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres ».

Elle affirme alors que « ne constitue pas un accident l’événement qui, volontairement provoqué par le conducteur ou un tiers, ne présente pas, de ce fait, un caractère fortuit ». Par voie de conséquence, elle désapprouve la cour d’appel d’avoir fait droit à la demande de provision formée par la victime alors que la conductrice du véhicule est volontairement sortie de la route. Un autre fondement de responsabilité doit alors être mobilisé.

La Cour de cassation n’avait encore jamais aussi clairement posé cette condition dont la portée est large. La qualification d’accident de la circulation dépend du comportement du conducteur ou d’un tiers. En revanche, la Haute juridiction n’exige pas que l’acte volontaire du conducteur ait été commis avec l’intention de commettre le dommage, il suffit que le dommage soit la conséquence directe de l'action volontaire du conducteur.

Cet arrêt vient préciser les contours d’une notion non définie par la loi. La jurisprudence avait jusqu'alors écarté les accidents résultant d’une infraction volontaire (Cass. civ. 2, 30 novembre 1994, n° 93-13.399 N° Lexbase : A6349AHM ; Cass. civ. 2, 12 décembre 2002, n° 00-17.433 N° Lexbase : A4096A4H). Au contraire, dans un arrêt rendu le 24 octobre 2019, elle avait admis qu’« en dépit de ce que sa démarche constitue un acte volontaire, la personne qui se blesse en relevant un véhicule terrestre à moteur est victime d’un accident de la circulation au sens de l’article 1er de la loi du 5 juillet 1985 » (Cass. civ. 2, 24 octobre 2019, n° 18-20.910, F-P+B+I N° Lexbase : A4718ZSK). Elle en avait déduit l’application du régime spécial d’indemnisation en présence d’un fait volontaire commis sans intention de provoquer le dommage revêtant le caractère d’accident.

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