La lettre juridique n°960 du 12 octobre 2023 : Procédure pénale

[Brèves] Irrégularités connues après la clôture de l’instruction : inconstitutionnalité de l’absence d’exception au mécanisme de purge des nullités

Réf. : Const. const., décision n° 2023-1062 QPC, du 28 septembre 2023 N° Lexbase : Z1975628

Lecture: 5 min

N6942BZ7

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Irrégularités connues après la clôture de l’instruction : inconstitutionnalité de l’absence d’exception au mécanisme de purge des nullités. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/100470292-breves-irregularites-connues-apres-la-cloture-de-linstruction-inconstitutionnalite-de-labsence-dexce
Copier

par Adélaïde Léon

le 18 Octobre 2023

► Lorsque des faits sont renvoyés devant le tribunal correctionnel à la suite d’une instruction, l’absence d’exception au mécanisme de purge des nullités dans le cas où le prévenu n’a pu avoir connaissance de l’irrégularité avant la clôture de l’instruction méconnait le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense.

Rappel de la procédure. Par arrêt du 28 juin 2023 (Cass. QPC, 28 juin 2023, n° 22-83.466, F-D N° Lexbase : A0681994) la Cour de cassation a saisi le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le premier alinéa de l’article 385 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L3791AZG.

Objet de la QPC. Les dispositions en cause prévoient que « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction ».

Il était fait grief à cet alinéa de priver le prévenu de la possibilité d’invoquer devant le tribunal correctionnel un moyen tiré de la nullité de la procédure antérieure, quand bien même le prévenu n’aurait pu en avoir connaissance que postérieurement à la clôture de l’instruction.

De ce fait, ces dispositions méconnaitraient le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense.

En outre certaines parties faisaient valoir que, à la différence d’autres hypothèses dans lesquelles une exception au mécanisme de purge des nullités est prévue lorsque le prévenu a pu ignorer un élément de la procédure ou n’a pas été mis en mesure d’ignorer ses droits, les dispositions en cause ne prévoient pas une telle exception en cas de connaissance tardive par le prévenu des moyens de nullité.

Enfin le fait que le prévenu ne bénéficie pas de la même possibilité d’invoquer des nullités devant le tribunal selon que celui-ci est saisi à la suite d’une enquête ou d’une information judiciaire porterait atteinte au principe d’égalité devant la loi et devant la justice.

Pour les mêmes motifs, certaines parties intervenantes considèrent que ces dispositions méconnaîtraient le droit à un procès équitable et le « principe de sécurité juridique ».

État du droit.

  • Les nullités durant l’instruction. Au cours de l’instruction, la chambre de l’instruction peut être saisie par le magistrat instructeur, le procureur de la République, les parties ou le témoin assisté aux fins d’annulation d’actes ou de pièces de la procédure. Les articles 173-1 N° Lexbase : L5031K8T et 174 N° Lexbase : L8646HW7 du Code de procédure pénale prévoient les conditions de recevabilité des demandes de nullités. Il existe toutefois des exceptions lorsque les parties n’auraient pu avoir connaissance du moyen.
  • L’avis de fin d’information. Lorsqu’il estime que l’instruction est terminée, le juge d’instruction communique le dossier au procureur de la République et en avise les parties et leurs avocats. À compter de l’envoi de cet avis, le procureur et les parties disposent alors d’un certain délai pour présenter des nullités (C. proc. pén., art. 175 N° Lexbase : L7482LPS).
  • Effets de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel rendue par le juge d’instruction. Lorsque le juge d’instruction estime, à la fin de l’information, que les faits dont il est saisi constituent un délit, il prend une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. Cette ordonnance couvre les vices de la procédure qui ont pu advenir jusqu’alors (C. proc. pén., art. 179 N° Lexbase : L8054LAK). Les parties ne sont dès lors plus recevables à soulever des nullités de la procédure antérieure devant le tribunal.
  • Exception à la purge des nullités. Par dérogation, lorsque l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel a été rendue sans que les conditions de l’article 175 précité aient été respectées, les parties demeurent recevables à soulever des nullités devant le tribunal correctionnel.

Décision. Le Conseil constitutionnel souligne que si cette dernière dérogation permet au prévenu de soulever les moyens de nullité dont il a pu avoir connaissance avant la clôture de l’instruction, le droit ne prévoit pas d’exception au mécanisme de purge des nullités permettant au prévenu de soulever devant le tribunal correctionnel une irrégularité dont il n’aurait eu connaissance que postérieure à la clôture de l’instruction.

Dans ces conditions, les mots « sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction » figurant au premier alinéa de l’article 385 du Code de procédure pénal ont été déclarées contraires à la Constitution en ce qu’elles méconnaissent le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense.

L’abrogation des dispositions en cause est reportée au 1er octobre 2024.

Le Conseil prévoit par ailleurs que jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou, au plus tard, au 1er octobre 2024, la déclaration d’inconstitutionnalité pourra être invoquée dans les instances en cours ou à venir lorsque la purge des nullités a été ou est opposée à un moyen de nullité qui n’a pu être connu avant la clôture de l’instruction.

Pour aller plus loin : N. Catelan, ÉTUDE : La clôture de l’instruction, La décision de renvoi, Procédure pénale (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E85323CY.

newsid:486942

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus