Le Quotidien du 16 juin 2023 : Actualité judiciaire

[A la une] Lutte anticorruption : l’association Anticor risque de perdre son agrément lui permettant d’agir en justice

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par Vincent Vantighem

le 15 Juin 2023

La lutte contre la corruption va-t-elle perdre l’un de ses plus fervents soutiens ? Un peu plus de deux ans après une première menace, l’association Anticor risque, en effet, de perdre l’agrément qui lui permet, aujourd’hui, d’ester en justice. La décision revient au tribunal administratif de Paris qui a été saisi de cette question et tranchera le débat le 23 juin prochain. À l’origine du litige se trouve une lutte de pouvoir au sein même de l’association anticorruption. Ce sont en effet deux membres dissidents de la structure qui ont porté l’affaire en justice. Ils contestent en réalité l’arrêté du 2 avril 2021 signé par l’ex-Premier ministre Jean Castex qui avait renouvelé l’agrément de l’association pour une durée de trois ans. À l’époque déjà, une polémique politique avait éclaté pour savoir si l’association méritait vraiment son agrément. Aujourd’hui, c’est donc la justice qui s’en mêle…

Pour les deux membres dissidents, l’agrément de 2021 n’aurait en réalité jamais dû être accordé. Selon eux, les conditions n’étaient pas remplies. Quelles conditions ? Le caractère « indépendant » et « désintéressé » de l’association et l’information de ses membres sur la gestion de la structure, notamment financière.

Signé par Jean Castex après des mois de débats, l’arrêté mentionne, en effet, « l’absence de transparence » concernant un don reçu par l’association et qui a représenté environ 17 % de ses ressources en 2020, soit 64 000 euros. Le problème, c’est que le même arrêté précisait que cela était « de nature à faire naître un doute sur le caractère désintéressé et indépendant » de la structure. Paradoxalement, et après avoir pointé ce problème du doigt, l’arrêté finissait par accorder le précieux agrément, en précisant qu’Anticor avait « manifesté l’intention d’accroître la transparence de son fonctionnement financier » et prévu « une refonte de ses statuts et de son règlement intérieur ».

Les promesses d’Anticor n’étaient pas suffisantes pour la rapporteuse publique

Pour les deux membres dissidents à l’origine de la procédure administrative, un tel arrêté n’est autre que caduc. Ils estiment que Jean Castex n’aurait pas dû ou pas pu renouveler l’agrément en raison justement de ce manque de transparence… Défendus par le brillant avocat Frédéric Thiriez, l’un des plus grands spécialistes de la procédure administrative, ils ont ainsi reçu le soutien de la rapporteuse publique dans leur analyse.

Celle-ci a, en effet, conclu dans leur sens, demandant au tribunal d’annuler l’arrêté et, par voie de conséquence, de suspendre les activités de l’association. Car, selon elle, « la loi ne prévoit nullement la possibilité pour l’administration de passer outre le non-respect » des conditions nécessaires pour obtenir le précieux sésame. Y compris « au prétexte que l’association prendrait l’engagement de s’y conformer par l’avenir ». Et oui, en matière de justice administrative, les promesses n’engagent que ceux qui y croient.

160 procédures menacées par la décision ?

Montant au créneau pour la défense de l’association, l’avocat Vincent Brengarth a dénoncé, de son côté, une « analyse rigoriste et partielle ». Pour lui, les conditions pour qu’Anticor bénéfice de l’agrément étaient, à l’époque, « parfaitement remplies ». Car le décret ne fait part de rien d’autre que d’un doute sur un des dons reçus par la structure.

Évidemment, l’avocat a aussi basculé sur le terrain politique en rappelant le rôle « primordial » d’Anticor dans la lutte anticorruption. Et il a pointé du doigt le risque pour les 160 procédures en cours dans lesquelles l’association est déjà plaignante ou partie civile. En cas de perte de l’agrément, certaines de ces procédures risquent-elles de s’effondrer ? Pour l’avocat, c’est une certitude.

Mais la rapporteuse publique se veut, elle, beaucoup plus pragmatique. Selon elles, les procédures « se poursuivraient » et « l’intérêt général » ne serait donc pas affecté. Réponse donc le 23 juin.

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