Réf. : Cass. crim., 13 avril 2023, n° 22-85.907, F-B N° Lexbase : A02329PB
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par Adélaïde Léon
le 26 Avril 2023
► Il n’existe pas de compétence concurrente pour recevoir l’avis de placement en garde à vue entre le procureur de la République du lieu où est exécutée la mesure et celui sous la direction duquel l’enquête est menée. Cet avis, qui n’est soumis à aucune condition de forme, ne doit être adressé qu’au procureur de la République responsable de la direction de l’enquête ;
Si une mesure de garde à vue, notifiée par un service d’enquête, est poursuivie par un autre, la reprise de cette mesure n’a pas à donner lieu à un nouvel exercice des droits, lesquels n’ont pas non plus à être à nouveau notifiés.
Rappel de la procédure. Le 1er juillet 2021 à 15 heures, sur réquisitions du procureur de la République d’Orléans, des fonctionnaires de police du commissariat de Tours ont interpellé un homme afin de le placer en garde à vue des chefs de violences habituelles sur mineurs de quinze ans par ascendant et menaces de mort sur conjoint.
Le début de la garde à vue était fixée à l’heure de l’interpellation et les droits de l’intéressé lui ont été notifiés à 15 heures 38.
À 15 heures 50, le procureur d’Orléans a été informé du placement en garde à vue et un avis en a été adressé au procureur de Tours à 16 heures 10.
Le procureur d’Orléans ayant alors saisi la police judiciaire de l’enquête, à 17 heures 45, le même jour, un officier de police judiciaire de ce service a établi un procès-verbal de reprise de garde à vue, faisant rétroagir la mesure depuis le même jour à 15 heures.
Une information a ensuite été ouverte et l’individu interpellé a été mis en examen.
Par requête du 3 janvier 2022, ce dernier a sollicité l’annulation de la procédure.
En cause d’appel. La chambre de l’instruction a écarté le moyen de nullité de la garde à vue tiré de l’absence d’avis de cette mesure donné au procureur de la République compétent. La juridiction d’appel a dit n’y avoir lieu à l’annulation d’actes et pièces de la procédure à l’exception de la seule mise en examen de l’intéressé du chef de menaces de mort réitérées sur conjoint ?
Les juges ont constaté que le procureur près le tribunal judiciaire d’Orléans, sous la direction duquel l’enquête était menée, avait été avisé à du placement en garde à vue qu’il avait lui-même requis et pour des motifs qu’il connaissait 50 minutes après le début de cette mesure.
Ils soulignaient également que le procureur de Tours, lieu où était exécutée la garde à vue, disposait d’une compétence concurrente par application de l’article 63-9 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L9638IPN et avait dans ces conditions reçu l’information prévue par la loi.
La chambre de l’instruction écarte également le moyen de nullité de la garde à vue tiré de l’impossibilité pour l’intéressé d’exercer de nouveau ses droits lors de la reprise de garde à vue. Les juges ont considéré que cette reprise est seulement due au changement de service en charge mais que la qualification, la date et le lieu présumés des infractions et les motifs des placements n’avaient pas changé.
Le mis en examen a formé un pourvoi contre l’appel de la chambre de l’instruction.
Moyens du pourvoi. Il était fait grief à l’arrêt d’appel d’avoir écarté le moyen de nullité de la procédure alors que :
Décision. La Chambre criminelle rejette le pourvoi.
La Haute juridiction affirme dans un premier temps qu’il n’existe pas de compétence concurrente pour recevoir l’avis de placement en garde à vue entre le procureur de la République du lieu où est exécutée la mesure et celui sous la direction duquel l’enquête est menée. L’article 63-9, alinéa 2 du Code de procédure pénale ne prévoit de compétence concurrente que pour contrôler et ordonner la prolongation de la garde à vue. L’avis de placement ne doit quant à lui être adressé qu’au procureur de la République responsable de la direction de l’enquête.
La Cour considère toutefois que l’arrêt n’encourt pas la censure car l’avis de placement, lequel n’est soumis à aucune condition de forme, a, en l’espèce, bien été donné sans délai au procureur de la République compétent, la mesure ayant, par ailleurs, été prise conformément à ses instructions.
S’agissant du moyen tiré de l’impossibilité pour le gardé à vue d’exercer ses droits lors de la reprise de garde à vue, la Chambre criminelle estime que celui-ci n’est pas fondé. Si une mesure de garde à vue, notifiée par un service d’enquête, est poursuivie par un autre, la reprise de cette mesure n’a pas à donner lieu à un nouvel exercice des droits, lesquels n’ont pas non plus à être à nouveau notifiés.
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