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par Sylvian Dorol, Commissaire de justice, Directeur scientifique de la revue Lexbase Contentieux et recouvrement, Expert près l’UIHJ, Intervenant ENM/EFB
le 29 Mars 2023
Mots-clés : PV 659 • annuaire papier • lieu de travail • expédition • assignation • Covid 19 • message vocal • intérêt légal • saisie-conservatoire • aéronef • saisie-vente • saisie véhicule terrestres à moteur • absence préalable amiable • SIV • saisie-attribution • mainlevée • restitution des clés • expulsion • procès-verbal d'expulsion • preuve • tiers assistant au constat • ordonnance sur requête
La revue Lexbase Contentieux et recouvrement vous propose de retrouver la première chronique illustrée par les plus récentes décisions jurisprudentielles sous la forme d’un contenu original rédigé par Sylvian Dorol, correspondant également à l’évolution du Bulletin d’informations de Vénézia & Associés, édité en partenariat avec les éditions juridiques Lexbase
Sommaire
I. Signification et PV 659 : un peu, beaucoup, passionnément, à la folie !
CA Caen, 7 février 2023, n° 22/00723
CA Aix-en-Provence, 5 janvier 2023, n° 22/01628
CA Bordeaux, 16 février 2023, n° 22/02273
CA Aix-en-Provence, 2 mars 2023, n° 22/05647
CA Orléans, 15 mars 2023, n° 22/01915
II. Expédition d’une assignation
CA Paris, 4, 9-A, 1er décembre 2022, n° 20/15424
III. Point de départ de l’intérêt légal majoré
Cass. civ. 2, 12 janvier 2023, n° 20-20.063, F-B
IV. Saisie-conservatoire d’aéronef : envole-moi loin de cette fatalité ?
Cass. civ. 2, 2 février 2023, n° 21-17.459, FS-B
V. Saisie-vente, saisie des véhicules terrestres à moteur : ça marche
CA Paris, 1, 10, 16 février 2023, n° 22/08052
CA Bordeaux, 27 octobre 2022, n° 22/00888
CA Nancy, 26 janvier 2023, n° 22/01654
CA Paris, 1, 10, 16 février 2023, n° 22/01073
Cass. civ. 2, 12 janvier 2023, n° 20-16.800, F-B
VII. Fin du bail et restitution des clés
Cass. civ. 3, 18 janvier 2023, n° 21-23.309, F-D
IX. Paiement de la dette cause de l’expulsion avant celle-ci
CA Lyon, 19 janvier 2023, n° 22/02914
X. Procès-verbal d’expulsion : de l’exhaustivité de l’inventaire
CA Paris, 1, 10, 2 février 2023, n° 22/08170
XI. Preuve contraire d’un procès-verbal dressé par les douanes
Cass. com., 4 janvier 2023, n° 19-21.884, FS-B
XII. Mention relative au tiers assistant au constat
CA Paris, 5, 2, 27 janvier 2023, n° 22/03973
CA Aix-en-Provence, 1er décembre 2022, n° 21/13222
Cass. civ. 2, 12 janvier 2023, n° 21-10.469, F-B
I. Signification et PV 659 : un peu, beaucoup, passionnément, à la folie !
Contexte général. Les dispositions de l’article 659 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6831H77 constituent le canot de sauvetage du droit de la signification, l’ultime recours quand toutes les tentatives pour remettre l’acte à son destinataire ont pris l’eau. C’est principalement son alinéa 1er qui concentre le contentieux puisqu’il dispose « Lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte ». En témoignent les cas du trimestre écoulé.
Il est fréquent que, parmi les diligences effectuées par les commissaires de justice en vue de contacter le destinataire de l’acte, il est indiqué « qu’aucune nouvelle adresse n’a été trouvée après consultation des pages blanches internet. »
Dans l’affaire tranchée par la cour d’appel de Caen le 7 février 2023, l’huissier de justice avait écrit « Le débiteur n'habite plus à ladite adresse, le nom de [Ab] ne figure plus sur aucune des boîtes aux lettres ni sur les interphones. Nous avons tenté de le joindre téléphoniquement, en vain. Celui-ci n'a laissé aucune adresse où le contacter et il n'a ni résidence ni lieu de travail connus. Les recherches effectuées sur les pages jaunes et les pages blanches sont restées vaines, tout comme l'enquête de voisinage ».
La partie adverse conteste ces mentions et verse aux débats, « en original, les annuaires téléphoniques (pages blanches) des années 2015/2016 et 2017/2018, documents qui, tous deux, mentionnent l'adresse qui était alors celle de l'intéressée, soit le [Adresse], à quelques centaines de mètres seulement de son ancien domicile ».
La cour annule l’acte au motif que, si l’huissier avait réellement consulté l'annuaire téléphonique, du moins s'il l'avait fait correctement, il n'aurait pas manqué de découvrir la nouvelle adresse de l’intéressée, ce qui lui aurait permis de signifier son acte à la personne de l'intéressée.
Dans quelles circonstances le commissaire de justice est-il tenu de se rendre sur le lieu de travail pour remettre un acte à son destinataire ?
Le 8 décembre dernier, la Cour de cassation l’a fermement rappelé: avant de recourir aux dispositions de l’article 659 du Code de procédure civile, le commissaire de justice doit rechercher le lieu de travail du destinataire de l’acte (Cass. civ.2, 8 décembre 2022, n° 21-14.145, F-B N° Lexbase : A10288YQ) et effectuer de sérieuses diligences en appelant le numéro de téléphone qui figure sur une enseigne plutôt que de se limiter à chercher dans un annuaire téléphonique (CA Paris, 5, 9, 2 février 2023, n° 22/16784 N° Lexbase : A89529B8).
Pour autant, signifier sur un lieu de travail peut être délicat, notamment car le commissaire de justice brise alors la frontière vie privée/vie professionnelle dans les locaux de l’employeur du destinataire de l’acte. C’est ainsi que la cour d’appel d’Aix-en-Provence rappelle que le déplacement du commissaire de justice sur le lieu de travail n’est exigé qu’en dernier recours avant l’établissement du procès-verbal de recherches infructueuses de l’article 659 du Code de procédure civile (CA Aix-en-Provence, 5 janvier 2023, n° 22/01628 N° Lexbase : A3339888)
Il est peu fréquent que quelqu’un se plaigne de ne pas avoir de message d’un huissier/commissaire de justice ! C’est pourtant le cœur du contentieux tranché par la cour d’appel de Bordeaux, dans lequel une partie critique un acte d’huissier/commissaire de justice.
En l’espèce, elle reproche à l’huissier de justice d’avoir signifié un acte selon les modalités de l’article 659 du Code de procédure civile (pas d’adresse, résidence, lieu de travail connus), alors que l’officier public et ministériel indique dans son procès-verbal avoir appelé son numéro de téléphone, vainement.
L’article 659 du Code de procédure civile impose au commissaire/huissier de justice d’effectuer toutes diligences pour trouver la nouvelle adresse du destinataire de l’acte et le contacter. C’est pourquoi lorsque l’huissier dispose du numéro de téléphone du destinataire de l’acte, il ne doit pas hésiter à l’appeler et lui parler pour obtenir sa nouvelle adresse. En cas de refus, cette précision est appréciée par les magistrats qui sont très exigeants en la matière. Dans l’hypothèse où l’huissier tombe sur la messagerie vocale du destinataire de l’acte, doit-il lui laisser un message en espérant être rappelé ? L’absence de message vocal laissé doit-elle se comprendre comme une insuffisance de diligences ?
Comme le juge de l’exécution bordelais, la cour d’appel de Bordeaux valide le procès-verbal de l’huissier/commissaire de justice en estimant que ses diligences sont suffisantes.
Elle juge qu’il ne peut aucunement être reproché à l’huissier de ne pas avoir consulté les pages blanches d’un autre département ni (…) de ne pas avoir laissé de message sur le numéro appelé, alors que rien ne permettait de dire qu'il s'agissait toujours du numéro de téléphone de l'intéressé. Elle en conclut, entre autres motifs, à la validité de l’acte attaqué.
Cet arrêt rappelle que les diligences de l’huissier de justice doivent être réelles, mais qu’il n’a pas à attendre un comportement positif du destinataire de l’acte, comme un rappel après un message téléphonique, pour exercer son ministère.
Un boulanger poursuivi par l’Urssaf fait l’objet d’une saisie-vente de ses biens meubles corporels sur le fondement d’un jugement signifié le 20 avril 2020, durant le premier confinement. L’huissier de justice qui se rend sur place le 19 janvier 2021 procède à la saisie de 4 frigidaires et meubles vitrés froids, une lampe et une panetière. Le boulanger, pour contester la signification de la décision de justice, invoque l'absence de diligences suffisantes de l'huissier de justice pour une remise à personne.
En période de confinement, l’huissier de justice devait-il absolument tenter la signification à personne, ou la Covid-19 est-elle une excuse pour limiter cette tentative ?
Le juge de l’exécution toulonnais ayant annulé la saisie-vente, la cour d’appel d’Aix-en-Provence infirme son jugement. Pour ce faire, la Cour juge que l'impossibilité d'une signification à personne résulte de la période de confinement liée à l'épidémie de Covid-19 ordonnée par le gouvernement à compter du 17 mars 2020, en cours à la date de la signification litigieuse.
L’affaire est une nouvelle fois relative à une signification effectuée selon les modalités de l’article 659 du Code de procédure civile.
L’huissier de justice instrumentaire avait pourtant réalisé des diligences très concrètes : il avait vérifié sur place qu'il n'y avait pas de nom à cette adresse, que les nouveaux locataires depuis trois ans ne connaissaient pas les destinataires de l’acte, comme les voisins et la mairie, et que la consultation de l’annuaire électronique était vaine.
Le destinataire de l’acte reproche à cet officier ministériel de n'avoir pas consulté l'administration fiscale, et de n'avoir pas fait des recherches sur 'Internet' pour obtenir des informations permettant de localiser, en particulier son profil 'LinkedIn'.
Pour statuer, la Cour d’appel d’Orléans rappelle tout d’abord que si l'article 659 du Code de procédure civile impose à l'huissier de relater « avec précision les diligences qu'il a accomplies », ce texte ne comporte aucune liste desdites diligences qui seraient ainsi imposées.
Pour valider l’acte et juger que les recherches faites ont été suffisantes au regard des exigences légales, la cour retient « qu'il ne peut être exigé d'un huissier de rechercher le destinataire de l'acte sur l'ensemble des réseaux sociaux, dont la fiabilité est toute relative, différents utilisateurs faisant usage de pseudonymes, les renseignements pouvant être obtenus ayant été mentionnés et diffusés sur les réseaux par les intéressés eux-mêmes sans aucun contrôle, alors qu'il est de notoriété publique que de nombreuses personnes utilisent lesdits réseaux sociaux en y faisant figurer des renseignements fantaisistes, et ce outre les difficultés que pose la présence de nombreux homonymes ».
II. Expédition d’une assignation (CA Paris, 4, 9-A, 1er décembre 2022, n° 20/15424 N° Lexbase : A15948YP)
L’expédition d’une assignation remise au requérant peut porter la signature d’un autre commissaire de justice que celui qui a signé la copie remise au destinataire. L’assignation ainsi placée n’encourt pas l’irrecevabilité.
Faits. Un couple a contacté un entrepreneur pour terminer et reprendre des travaux de rénovation de l'appartement dont ils sont propriétaires, et précédemment réalisés par un autre entrepreneur lequel ne leur avait pas donné satisfaction. L’entrepreneur a contacté une société X. pour des travaux dans la cuisine. La société X. a réalisé ces travaux et adressé une facture au couple. Non réglée, elle mandate un huissier de justice pour délivrer une assignation en paiement. L’assignation est délivrée par un clerc assermenté. Comme la loi le prévoit, l’acte porte la signature d’un huissier exerçant dans l’office. Détail qui a son importance : l’huissier qui a signé la copie de l’acte remis aux époux n’est pas le même que celui qui a signé l’exemplaire remis au client, lequel est remis au juge.
Problème de droit. L’expédition et la copie d’un acte signifié par un clerc assermenté doivent-ils être signées par le même huissier ?
En théorie, les mentions d’un acte de huissier/commissaire de justice doivent être identiques sur l’original et ses expéditions.
L’article 648 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6811H7E prévoit notamment que l’acte doit porter, à peine de nullité, « Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice [du commissaire de justice] ».
Cependant, les textes sont silencieux sur la question de savoir si, bien que l’acte signifié par clerc assermenté soit signé par un huissier, un des exemplaires peut ou non être signé par un autre huissier du même office. Une assignation ainsi réalisée peut-elle être remise au tribunal ? Le tribunal judiciaire de Paris avait répondu par l’affirmative le 21 octobre 2020, mais c’est ce jugement qui est critiqué.
Quelle est la réponse de la cour d’appel de Paris ?
Solution. Qu’importe le signataire, pourvu que l’acte soit signé. La cour d’appel parisienne juge que « Le nom de l'huissier signataire n'est pas le même sur l'acte délivré et la copie remise mais l'acte a été délivré par clerc assermenté et la signature de l'huissier atteste ce qu'a fait le clerc.
Le fait que sur la copie remise au greffe les diligences du clerc soient attestées par un autre des huissiers de l'étude n'est pas davantage de nature à permettre de considérer que la copie qui a été déposée au greffe pour saisir le premier juge présente des différences telles qu'elles soient de nature à rendre l'assignation caduque et ce d'autant que ce qui est sanctionné par la caducité est le non-respect du délai ».
Elle en conclut que l’assignation est valable, non susceptible d’encourir une caducité.
Comment, en pratique, un tel cas peut se poser ?
Comme l’indique la cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 2 juin 2022, n°21/09699 N° Lexbase : A84417YB), « l'acte à signifier est préalablement signé par l'huissier de justice qui, après la signification, a visé les mentions faites par le clerc assermenté, permettant d'établir que la diligence a été accomplie par ce dernier ».
L’acte est donc signé en deux temps : à l’arrivée et à la sortie de l’office. Le changement de signataire peut donc intervenir a posteriori de la remise de l’acte, si l’huissier qui a signé le départ de l’acte est alors absent par exemple.
Même si le changement de signataire peut arriver, cela reste exceptionnel. Pour preuve, à notre connaissance, il s’agit de l’unique décision sur cette question puisque nous n’avons pas trouvé de précédent jurisprudentiel.
III. Point de départ de l’intérêt légal majoré (Cass. civ. 2, 12 janvier 2023, n° 20-20.063, F-B N° Lexbase : A647187S)
Problématique. Comme c’est souvent le cas, le texte est simple, mais non la pratique. En témoigne la lecture de l’article L. 313-1 du Code monétaire financier N° Lexbase : L7599HIB qui dispose que le taux d’intérêt légal est majoré de cinq points deux mois après que la décision de justice soit devenue exécutoire.
La doctrine (Verdun, Une question d'intérêt : les intérêts des dommages-intérêts, Bull. Ch. Avoués 1986, 2e trim. p. 33 à 45 ; R. Perrot, RTD civ. 1991 p. 409 ; J. Cl. proc. civ., fasc. 515, Y. Lobin et J. Miguet) a pointé très tôt les difficultés soulevées par ce texte lorsque la décision de justice en question est un arrêt d’appel : faut-il compter la majoration à compter de son prononcé, ou de sa signification effectuée en application de l’article 503 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6620H7C ?
Solution. Il y a plus de trente ans, partant du principe qu’une condamnation civile prononcée par un arrêt d'appel est immédiatement exécutoire ; la Cour de cassation courir le délai de majoration des intérêts légaux à compter de son prononcé (Cass. civ.2., 13 mars 1991, n° 89-11.896 N° Lexbase : A4348AHI). Tout à fait fondée dans sa logique juridique, cette position prêtait le flanc à critique dans certaines situations, notamment lorsque le greffe submergé rend l’arrêt un certain temps après son prononcé. La Cour de cassation a donc changé de position, faisant de la notification de l'arrêt d'appel une condition de la force exécutoire (Cass. civ.3, 3 juin 1992, n° 90-16.792 N° Lexbase : A5044ACS), confirmant sa position en 2002 et 2003.
C’est donc sans surprise que la Cour de cassation, le 12 janvier 2023, la Cour de cassation a à nouveau confirmé sa position (Cass. civ. 2, 12 janvier 2023, n° 20-20.063, F-B N° Lexbase : A647187S): la majoration de l’intérêt égal ne peut intervenir que deux mois après la signification de la décision de justice.
IV. Saisie-conservatoire d’aéronef : envole-moi loin de cette fatalité ? (Cass. civ. 2, 2 février 2023, n° 21-17.459, FS-B N° Lexbase : A25989BT)
Faits. La saisie d’un aéronef est d’une redoutable efficacité, proportionnelle à sa délicate mise en œuvre.
Souvent effectuée pour de très importantes sommes, elle peut être réalisée à titre d’exécution ou de mesure conservatoire, comme ce fut le cas dans l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 2 février 2023.
Dans cette affaire, une saisie conservatoire d’un aéronef, immatriculé en Grande-Bretagne et appartenant à une société de droit hongrois, a été pratiquée sur ordonnance du juge de l’exécution. Le procès-verbal a été dénoncé à la société saisie dans les délais.
Problématique. Celle-ci conteste la mesure au motif de l'incompétence du juge de l'exécution pour autoriser une telle mesure. Elle évoque en effet l’article R. 123-9 du Code de l'aviation civile N° Lexbase : L4950LTI qui prévoit en son premier alinéa que « Lorsque le propriétaire de l'aéronef n'est pas domicilié en France ou que l'aéronef est de nationalité étrangère, tout créancier a le droit de pratiquer une saisie conservatoire avec l'autorisation du juge du tribunal judiciaire du lieu où l'appareil a atterri ».
La cour d’appel de Nîmes rejette son argumentation en retenant la compétence du juge de l’exécution pour autoriser une telle mesure (CA Nîmes, 31 mars 2021, n° 20/03071 N° Lexbase : A99514MI).
Solution. Les Hauts magistrats rejette le pourvoi et valide la décision de la Cour d’appel. Cette décision est fondée puisque, par décision du 14 octobre 2022, le Conseil d’État (CE, 2°-7° ch. réunies, 14 octobre 2022, n° 462518 N° Lexbase : A68448P8), « a jugé que le législateur a conféré au juge de l'exécution une compétence exclusive en matière d'autorisation des saisies conservatoires, y compris en matière de saisie des aéronefs étrangers, sous réserve de la compétence concurrente du président du tribunal de commerce prévue par les dispositions de l'article L. 721-7 du Code de commerce N° Lexbase : L2063KGI». Elle écarte donc les dispositions de l'article R. 123-9 du Code de l'aviation civile.
Une solution à saluer, qui conforte le droit commun des mesures conservatoires.
V. Saisie vente, saisie des véhicules terrestres à moteur : ça marche
Dans une affaire somme toute classique, une personne conteste la mesure de saisie-vente dont il a fait l’objet. Parmi les éléments contestés, il émet un doute sur l’existence du serrurier ayant assisté l’huissier de justice puisque, malgré sa porte blindée et codée, l’officier public et ministériel a pu pénétrer dans son appartement sans dégât !
A cette contestation, la cour parisienne indique qu’il n’appartient pas à l’huissier de justice les modalités d’intervention et technique d’ouverture de la porte, mais simplement de préciser l’assistance d’un serrurier.
Le 28 janvier 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Libourne a ordonné la mainlevée d’une saisie de véhicule au motif, notamment, qu’aucun préalable amiable n’avait été diligentée. Pourtant, le créancier saisissant avait usé de plusieurs voies de recours préalables, infructueuses...
La cour bordelaise rappelle d’abord que l'article L. 111-7 du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L5795IR3 dispose que le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance. Toutefois, l'exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour assurer l'exécution de l'obligation.
Elle relève ensuite que, si les mesures d'exécution concernant les véhicules terrestres à moteur sont soumises à ce principe de proportionnalité, leur validité n'est pas subordonnée à la mise en œuvre par le débiteur de démarches amiables de recouvrement.
La cour bordelaise conclut donc qu’il ne peut être tiré aucune conséquence juridique de ce qu'aucune démarche amiable n'a été mise en œuvre par le créancier avant la signification d'un commandement de payer intervenue le 27 décembre 2019.
Tout commissaire de justice chargé de l’exécution peut interroger directement le Service d’Immatriculation des Véhicules (SIV). Par arrêt du 26 janvier 2023, la cour d’appel de Nancy rappelle que le modèle du véhicule saisi n’est pas une mention obligatoire de la déclaration valant saisie de véhicule prévue par l’article R. 223-2 du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L2669ITZ.
Après la réalisation d’une saisie-attribution, l’huissier/commissaire de justice doit la dénoncer dans un délai de huit jours, qu’elle soit créditrice ou non. Le code des procédures civiles d’exécution prévoit alors que l’acte doit indiquer clairement que le débiteur saisi dispose d’un délai d’un mois pour élever une contestation.
Pour des motifs légaux, notamment en cas de prorogation de délai (Cass. civ.2, 4 juin 2020 n° 19-12.260, F-P+B+I N° Lexbase : A95723MH), le délai indiqué peut être supérieur à un mois. Mais quelle est la validité de l’acte si l’huissier de justice a indiqué par erreur un délai supérieur à un mois ?
La cour d’appel parisienne apporte une réponse de bon sens en validant l’acte puisque l’irrégularité n’a causé aucun grief, le saisi ayant pu former sa contestation.
Faits. Dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière et à la suite de l’audience adjudication, la société adjudicataire a fait pratiquer sur le fondement d’une ordonnance de référé lui octroyant une indemnité d’occupation, une saisie-attribution entre les mains du Bâtonnier.
Par jugement du 15 novembre 2016, un juge de l’exécution a prononcé la mainlevée de la saisie-attribution. Par ordonnance du 18 mai 2017, un juge des référés a ordonné au séquestre de remettre le solde du prix d’adjudication à la mandataire successorale.
La demanderesse fait grief à l’arrêt (CA Versailles, 21 avril 2020, n° 19/03937 N° Lexbase : A93393K4) rendu sur renvoi après cassation (Cass. civ. 2, 19 mai 2022, n° 20-16.800, F-D N° Lexbase : A14997Y8) d’avoir rejeté la demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée entre les mains du Bâtonnier, en recouvrement d’une certaine somme et dire que cette saisie était privée de son effet attributif. L’intéressée fait valoir la violation des articles 561 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7232LEL et R. 121-22 du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L6806LES.
Elle énonce notamment que l'infirmation de la décision de mainlevée fait retrouver à la saisie-attribution sa validité et autorise le débiteur à se voir remettre la chose objet de la saisie.
En l’espèce, la cour d’appel a conclu qu’en l’absence de décision de sursis à exécution, et après avoir constaté que le jugement ordonnant la mainlevée de la saisie-attribution a été signifié l'effet d'indisponibilité et d'attribution de la saisie-attribution avait cessé. Dès lors la saisie était privée de son effet attributif. Dans le cas présent, le jugement de mainlevée ayant été signifié au Bâtonnier de l’Ordre des avocats en qualité de séquestre des fonds, ce dernier s’était dessaisi des fonds.
La Cour de cassation, valide le raisonnement de la cour d’appel, déclare le moyen non fondé et rejette le pourvoi. Les Hauts magistrats rappellent qu’aux termes des dispositions de l’article R. 121-18 du Code des procédures civiles d’exécution, « la décision de mainlevée des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires emporte, dans la limite de son objet, suspension des poursuites dès son prononcé et suppression de tout effet d'indisponibilité dès sa notification ».
VII. Fin du bail et restitution des clés (Cass. civ. 3, 18 janvier 2023, n° 21-23.309, F-D N° Lexbase : A339589M)
Contexte. C’est bien souvent le moment tant attendu par le bailleur, celui où le locataire lui rend les clés du logement. Mais, dans certaines situations, le bailleur fuit cet instant...
Dans cette situation, la loi autorise le locataire à restituer les clés à son bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (LRAR). Mais quelques questions se posent en pratique :
En l’espèce, le bailleur avait attendu quinze mois pour reprendre les lieux, prétendant a posteriori avoir bien reçu une LRAR de l’occupant, mais que l’enveloppe était vide.
La cour d’appel d’Agen (CA Agen, 26 juillet 2021, n° 20/00121 N° Lexbase : A36534ZC) avait fait droit à la demande du bailleur et condamné le locataire au paiement d'une indemnité d'occupation jusqu'à la date de la reprise des lieux par le bailleur, quinze mois plus tard…
Le locataire critique cet arrêt et reproche au bailleur d'avoir attendu quinze mois pour procéder à la reprise des lieux, alors que les clés de l'appartement lui avaient été adressées par LRAR, et qu’il lui appartenait, en supposant que les clés ne fussent pas jointes au courrier recommandé, de se manifester auprès du locataire.
Relevant que le bailleur ne contestait pas avoir reçu la LRAR, l’argument trouve écho auprès de la Cour de cassation.
IX. Paiement de la dette cause de l’expulsion avant celle-ci (CA Lyon, 19 janvier 2023, n° 22/02914 N° Lexbase : A7701894)
Il est assez fréquent que le juge conditionne l’acquisition de la clause résolutoire au non-respect d’un échéancier par le débiteur.
C’était ainsi le cas dans l’espèce tranchée par la cour d’appel de Lyon le 19 janvier 2023. Dans cette affaire, la société avait finalement réglé la totalité de l'arriéré visé dans l'ordonnance de référé, mais pas dans les délais fixés judiciairement, et le bailleur avait donc fait procéder à son expulsion.
Plus encore, la société expulsée soutenait que le bailleur avait consenti à l'octroi de délais de paiement qui valait renonciation à mettre en œuvre la procédure d'expulsion, en se fondant sur un courriel de l'agence gestionnaire de la location qui stipulait 'avoir indiqué à l'étude d'huissier en charge du dossier de la mise en place d'un échéancier et de la suspension des poursuites jusqu'à nouvel ordre'.
La cour d’appel valide la mesure, rappelant l’efficacité de l’acquisition de la clause exécutoire et indiquant que le courriel « ne caractérise pas une renonciation, même implicite, à reprendre la procédure d'expulsion. Il se comprend, au contraire, comme suspendant cette poursuite pour une période indéterminée en « fonction du respect de l'échéancier à mettre en place ».
X. Procès-verbal d’expulsion : de l’exhaustivité de l’inventaire (CA Paris, 1, 10, 2 février 2023, n° 22/08170 N° Lexbase : A88199BA)
Il est constat qu’en matière d’expulsion, le procès-verbal doit contenir un inventaire des biens laissés sur place ou déposés par l'huissier de justice en un lieu approprié (CPCEx, art. R. 433-1 N° Lexbase : L5601LTM).
Cette disposition doit-elle être comprise comme instituant une obligation pour le commissaire de justice d’inventorier tous les biens laissés sur place, y compris ceux qui se trouvaient dans des meubles ?
C’est la question que pose une personne expulsée, contestant la validité du procès-verbal d’expulsion réalisé à son encontre notamment parce que « l'huissier de justice ne s'était pas donné la peine d'ouvrir les meubles pour dresser une liste de leur contenu ».
Pour écarter cet argument et admettre la validité du procès-verbal d’expulsion, la cour d’appel de Paris relève que l’expulsé étant présent lors des opérations, « il ne tenait qu'à lui, pour le cas où, comme il le prétend, les meubles et valises contenaient des papiers et documents administratifs ou biens de valeur, ou qu'il souhaitait transporter, de les ouvrir lui-même ». Les magistrats relèvent également qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose que l’inventaire du procès-verbal d’expulsion soit parfaitement exhaustif et recense l'intégralité des objets présents. Le juge de l'exécution avait d'ailleurs relevé que s'agissant, notamment, de ceux présents en quantité tels que livres ou produits d'hygiène, il ne pouvait être exigé de l'huissier de justice d'en dresser une liste complète !
XI. Preuve contraire d’un procès-verbal dressé par les douanes (Cass. com., 4 janvier 2023, n° 19-21.884, FS-B N° Lexbase : A009187I)
C’est un arrêt qui est passé inaperçu qui a été rendu le 4 janvier 2023 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation.
En l’espèce, une société avait, à la suite d'un contrôle de ses entrepôts, été notifié par l'administration des douanes plusieurs infractions à la réglementation en matière de contributions indirectes le 1er octobre 2015 et a émis à son encontre un avis de mise en recouvrement (AMR) le 19 octobre 2015.
Elle conteste le contrôle, relevant une erreur de l’agent des douanes, comme il ressortait de la consultation des images de vidéosurveillance de l’entrepôt où s’était déroulée l’inspection. Cette vidéo est constatée par huissier. Pourtant, l’administration des douanes conteste la recevabilité de cette preuve au motif que la production de ces images enregistrées sans preuve du consentement tacite, certain et non équivoque de ses agents est irrecevable comme contraire aux dispositions des articles 9 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1123H4D, 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ainsi qu'au principe de loyauté dans l'administration de la preuve.
La Cour de cassation écarte cependant cet argument au motif que qu'aucune atteinte aux droits de la personnalité des agents de l'administration des douanes pouvant résulter de l'utilisation de ces images à titre de preuves n'était alléguée.
XII. Mention relative au tiers assistant au constat (CA Paris, 5, 2, 27 janvier 2023, n° 22/03973 N° Lexbase : A19359BB)
Le tiers au constat d’huissier continue à concentrer les critiques en matière de propriété intellectuelle.
Pourtant, il est constant que l’identité du tiers doit être précisée dans l’acte d’huissier de justice, au contraire de sa qualité dont l’absence ne suffit pas à invalider un procès-verbal de constat. Cela est justifié par le fait que, bien souvent, l’anonymat est le nid de suspicions quant à la dissimulation de la vérité.
Les modalités d’identification du tiers auxiliaire du constat varient selon le cadre judiciaire ou non du procès-verbal de constat. Dans le cas d’un constat extrajudiciaire, c’est-à-dire à la requête d’un particulier, aucun texte ne précise comment le tiers auxiliaire du constat doit être désigné.
En toute hypothèse, la désignation du tiers doit être suffisante pour pouvoir l’identifier : la seule mention de sa qualité est insuffisante à cette fin.
Cela étant, une question demeure : incombe-t-il au commissaire de justice de préciser quel rôle le tiers joue dans le cadre des constatations, même s’il ne fait qu’assister aux opérations ?
C’est cette nouvelle question qui a été posée et tranchée par la cour d’appel parisienne le 27 janvier dernier. Dans cette affaire, un huissier de justice avait instrumenté en présence d’un tiers neutre et indépendant selon les déclarations de ce dernier.
La partie adverse conteste cette mesure en faisant valoir que le constat a été réalisé en présence d'un tiers dont le rôle ne serait pas clairement déterminé.
La Cour d’appel parisienne juge l’argument sans portée, tout en soulignant que la nullité du constat n'est pas sollicitée, et que cette personne a déclaré “agir en qualité de tiers neutre et indépendant“.
Plus que de valider le procès-verbal de constat, la vertu de l’arrêt commenté est qu’il confirme qu’il existe une présomption simple d’indépendance du tiers dans le constat, de sorte que sa déclaration suffit.
XIII. Preuve du bruit (CA Aix-en-Provence, 1er décembre 2022, n° 21/13222 N° Lexbase : A16158YH)
Pour prouver une nuisance sonore constituant un trouble de voisinage, le commissaire de justice n’a pas obligation d’utiliser un sonomètre homologué. Son acte n’a pas non plus à faire état de l'émergence globale et des valeurs résiduelles.
Faits. Un homme habite près de la plage de Pampelonne, haut-lieu touristique limitrophe de la mythique ville de Saint-Tropez.
Il subit d’importantes nuisances sonores de la part d’un établissement recevant du public qui exerce une activité de restauration, bar, piscine avec animation par un DJ et club pour enfants.
Il fait appel à un huissier de justice pour constater ce trouble de voisinage. Ce dernier dresse cinq constats avec un sonomètre en une semaine.
Notamment sur cet élément de preuve, le juge des référés ordonne à la société de cesser sans délai toute diffusion de musique au-delà des limites prévues par le Code de la santé publique, et ce sous astreinte de 5 000 € par infraction constatée conformément à la règlementation en vigueur et avec un matériel homologué.
Problème de droit. La société conteste la sanction prononcée par le juge des référés, en ce qu’elle considère comme inefficaces à prouver un trouble les constats dressés par l’huissier de justice.
En plus de ne jamais avoir reçu de contravention pour nuisances sonores (amende de 5ème classe), elle relève que l’officier public et ministériel n’a pas respecté les prescriptions du Code de la santé publique. Il aurait ainsi dû utiliser un sonomètre homologué et faire état des émergences (différences entre le bruit critiqué et le bruit ambiant) dans son acte. Le particulier conteste en évoquant le fait que, s’agissant d’un trouble anormal de voisinage, c’est le Code civil qui s’applique, et non le code de santé publique. Selon lui, l’utilisation d’un sonomètre homologué n’est donc pas obligatoire.
Qu’en pense la cour d’appel d’Aix-en-Provence ?
Solution. La cour retient tout d’abord que la responsabilité de l’établissement festif est recherchée sur le plan civil, et non sur le plan pénal, ce qui explique que la juridiction civile soit compétente et ne se fonde pas sur les dispositions du code de la santé publique.
Elle juge ensuite que la qualité du sonomètre employé pour relever les bruits environnants et la méthode employée par l'huissier de justice ne peut être celle d'un expert ; elles sont discutables au même titre qu'un autre élément de preuve de même valeur. Elle retient que la validité du procès-verbal de constat n'est pas conditionnée par le respect des formes du code de la santé publique.
Dans ces conditions, la Cour conclut que les procès-verbaux de constat de l’huissier sont des éléments de preuve valables et recevables devant la juridiction civile.
XIV. Ordonnance sur requête (Cass. civ. 2, 12 janvier 2023, n° 21-10.469, F-B N° Lexbase : A645987D)
En matière d’ordonnance sur requête, le Code de procédure civile impose que copies de la requête et de l’ordonnance soient remises à la partie qui subit les mesures, avant le constat.
Dans le cas où l’ordonnance a été refusée, puis acceptée en appel, la remise de l’ordonnance infirmée est prudente.
Faits. Une société soupçonne un de ses anciens salariés de violer son obligation de confidentialité chez son nouvel employeur. Elle demande au président du tribunal de commerce une ordonnance sur requête (CPC. art. 145 N° Lexbase : L1497H49) afin de prouver la matérialité de ces faits, ce qui lui est refusé. Elle interjette donc appel, et obtient gain de cause. L’ordonnance de rejet est infirmée, et la mesure de constat a lieu quelques semaine après. Au début de la mesure d’instruction, l’huissier de justice ne remet que l’arrêt ayant autorisé la mesure, sans la requête initiale et sans l’ordonnance de rejet. Par la suite, et après les opérations, il transmet copie de la requête initiale.
Problème de droit. À quel moment la requête doit-elle être remise ? Une ordonnance de rejet doit-elle être remise ?
L’article 495 alinéa 3 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6612H7Z dispose en son troisième alinéa que « Copie de la requête et de l'ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée ».
Problème : rien n’est dit dans le texte au sujet du moment de la remise de ces documents…
Pire encore, rien n’est prévu lorsque la mesure d’instruction a lieu sur le fondement d’un arrêt ayant annulé une ordonnance de rejet…
Pour le bénéficiaire de la mesure, la remise de la requête « peut être accomplie à tout moment pourvu que les droits de la défense ne s'en trouvent pas compromis, ce qui est le cas lorsque la personne qui subit la mesure est mise à même de former un recours en rétractation de cette ordonnance ».
Quelle est la position de la Cour de cassation ?
Solution. L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 janvier 2023 est très clair : dès lors qu’il est établi que la requête et l’ordonnance n’ont pas été remises avant les opérations, celles-ci sont entachées de nullité, qu’importe que la requête ait été remise par la suite.
Quant à la question de la remise de l’ordonnance de rejet, elle ne se prononce pas plus sur ce point. La cour d’appel de Nancy, dont l’arrêt est confirmé (CA Nancy, 9 septembre 2020, n° 19/01013 N° Lexbase : A09693T3), avait estimé que l’ordonnance ayant rejeté la requête initiale aurait dû être remise. Sa motivation était que « le but poursuivi est en effet de permettre, dès avant l'exécution de la mesure d'instruction, le rétablissement du principe de la contradiction en portant à la connaissance de celui qui subit la mesure ordonnée à son insu, ce qui a déterminé la décision tant du juge que, le cas échéant, de la cour d'appel, et partant, d'appréhender immédiatement l'opportunité d'un éventuel recours ».
La remise préalable de la requête et de l’ordonnance fondant la mesure est traditionnellement exigée, étant ici précisé que la personne à qui est opposée l’ordonnance n’a pas à se prévaloir d’un grief pour obtenir la nullité d’un constat sur ordonnance dressé sans que l’huissier de justice ne remette copie de la requête (Cass. civ. 2., 1er septembre 2016, n° 15-23.326, F-P+B N° Lexbase : A9374RYT). C’est donc une confirmation en ce sens.
Il est possible de regretter l’absence de précision concernant la nécessité de la remise de l’ordonnance de rejet, ce que la prudence peut commander. Pourtant, la production de celle-ci peut affecter le bon déroulement de la mesure d’instruction, la partie la supportant étant encline à se concentrer davantage sur ce document que sur l’arrêt qui autorise la mesure. Il appartient alors à l’huissier/commissaire de justice de faire preuve de pédagogie !
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