Lexbase Contentieux et Recouvrement n°1 du 30 mars 2023 : Baux commerciaux

[Brèves] Congé délivré par le preneur par LRAR : quelle est la date de la notification ?

Réf. : Cass. civ. 3, 16 mars 2023, n° 21-22.240, FS-B N° Lexbase : A80129H9

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N4751BZY

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par Vincent Téchené

le 27 Mars 2023

► Le congé délivré par le preneur par lettre recommandée avant l'entrée en vigueur du décret n° 2016-296, du 11 mars 2016 est régi par l'article 668 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6845H7N. Par conséquent, la lettre envoyée le dernier jour du délai dans lequel la notification doit être réalisée, est régulière si elle est présentée par les services de La Poste au destinataire habilité à la recevoir, peu important la date de réception par le destinataire.

Faits et procédure. Un bail commercial à effet du 1er août 2001 a été consenti à une société. Cette dernière a donné congé pour l'échéance triennale du 31 juillet 2016, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, expédiée le 31 janvier 2016.

Les bailleurs ont contesté la validité du congé reçu le 5 février 2016. Ils ont alors délivré, le 29 mars 2017, un commandement de payer visant la clause résolutoire, puis ont assigné la locataire en paiement de loyers et charges.

Déboutés de leurs demandes (CA Versailles, 10 juin 2021, n° 18/08227 N° Lexbase : A62254U4), les bailleurs ont formé un pourvoi en cassation. Ils soutenaient que le délai de préavis applicable au congé court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée ou de la signification de l'acte d'huissier de justice et non de la date de son envoi.

Décision. La Cour de cassation approuve toutefois l’arrêt d’appel et rejette en conséquence le pourvoi.

Elle retient en effet qu’ayant été délivré avant l'entrée en vigueur du décret n° 2016-296, du 11 mars 2016 N° Lexbase : L9982K4H, le congé était régi par l'article 668 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6845H7N, en sorte qu'une lettre envoyée le dernier jour du délai dans lequel la notification doit être réalisée, est régulière si elle est présentée par les services de La Poste au destinataire habilité à la recevoir, peu important la date de réception par le destinataire. Tel était bien le cas en l’espèce : la lettre recommandée expédiée le 31 janvier 2016 pour le 31 juillet suivant a respecté le délai de préavis de six mois.

Pour rappel l’article 668 visé précise que « sous réserve de l'article 647-1 N° Lexbase : L0172IP3, la date de la notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre ».

Observations. Rappelons que la loi « Pinel » (loi n° 2014-626, du 18 juin 2014 N° Lexbase : L4967I3D) avait modifié le dernier alinéa de l'article L. 145-9 du Code de commerce pour introduire la possibilité de notifier un congé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par acte extrajudiciaire « au libre choix de chacune des parties » (C. com., anc. art. L. 145-9 N° Lexbase : L5043I38). Mais la loi « Macron » de 2015 (loi n° 2015-990, du 6 août 2015 N° Lexbase : L4876KEC) a modifié de nouveau l'article L. 145-9 du Code de commerce pour supprimer toute référence à la notification du congé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception qui doit donc de nouveau, en principe, « être donné par acte extrajudiciaire » (v. C. com., art. L. 145-9, mod. N° Lexbase : L2009KGI).

Cependant, parallèlement, la loi « Macron » a également modifié l'article L. 145-4 du Code de commerce N° Lexbase : L9957LMQ pour permettre au preneur « de donner congé à l'expiration d'une période triennale, au moins six mois à l'avance, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par acte extrajudiciaire » (al. 2).

La faculté de donner congé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception a donc été maintenue, mais au seul profit du preneur. C’était le cas dans l’affaire rapporté. À propos du congé du preneur, il a été jugé que les dispositions applicables à sa forme sont celles en vigueur au jour où il est notifié, même si le bail a été conclu antérieurement (Cass. civ. 3, 24 octobre 2019, n° 18-24.077, FS-P+B N° Lexbase : A4722ZSP, J. Prigent, obs., Lexbase Affaires, novembre 2019, n° 615 N° Lexbase : N1381BYS).

Quant à la date de notification à prendre en compte, le décret du 11 mars 2016 cité par la Cour a créé un nouvel article R. 145-38 du Code de commerce N° Lexbase : L0177K7P prévoyant désormais que « lorsqu’[…] une partie a recours à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la date de notification à l'égard de celui qui y procède est celle de l'expédition de la lettre et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de première présentation de la lettre. Lorsque la lettre n'a pas pu être présentée à son destinataire, la démarche doit être renouvelée par acte extrajudiciaire » (v. J.-P. Dumur, Baux commerciaux - Notification des actes : nouvel article R. 145-38 du Code de commerce, Parcours du combattant - Chemin de croix - Retour à la case départ !, Lexbase Affaires, mai 2016, n° 465 N° Lexbase : N2580BWH).  

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La résiliation du bail commercial, Le délai du préavis et la date d'effet du congé du preneur, in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E8606AEH.

 

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