Réf. : Cass. civ. 1, 16 novembre 2022, n° 21-15.936, F-D N° Lexbase : A83158T7
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N3406BZ8
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par Laure Florent
le 24 Novembre 2022
► Les parents biologiques d’un enfant ayant sciemment laissé s’appliquer la présomption de paternité qui attribuait à l’enfant une filiation à l’égard de l’ex-époux de la mère, dans l’ignorance de ce dernier, sont coupables d’une inertie fautive à l’origine de l’établissement tardif de la vérité concernant la filiation biologique, justifiant leur condamnation à verser des dommages et intérêts à l’époux initial.
Faits et procédure. Du mariage d’un couple est issu un enfant, déclaré comme tel. Après leur divorce, l’épouse a épousé un autre homme.
Par la suite, un jugement a énoncé que l’ex-époux n’était pas le père de l’enfant, et établi la paternité du nouveau mari. L’ex-époux a alors agi en responsabilité contre son ex-épouse et son nouveau mari, parents de l’enfant.
La cour d’appel (CA Lyon, 2 mars 2021, n° 17/08658) les a condamnés à lui verser la somme de 6 000 euros, jugeant qu’un préjudice moral pour l’ex-époux avait résulté de « l’inertie fautive » des parents biologiques. Les conseillers reprochaient effectivement à la mère de ne pas avoir écarté la présomption de paternité de son ex-époux en n’inscrivant que son nom à la naissance, et aux parents biologiques de n’avoir pas engagé d’action en contestation de paternité.
Les parents biologiques considéraient toutefois qu'aucun texte ne les obligeait à le faire, même en cas de relation extra-conjugale au moment de la conception.
Ils estimaient qu'au surplus, leur inaction ne pouvait d'autant moins leur être reprochée lorsqu'il n'était pas établi qu'ils auraient été certains de la non-paternité de l'époux.
Les parents biologiques reprochaient par ailleurs au juge de n’avoir pas respecté le principe de la contradiction prévu à l’article 16 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1133H4Q, en jugeant qu'un préjudice moral pour l’ex-époux avait résulté de « l'inertie fautive » des parents biologiques, quand celui-ci sollicitait la réparation d'un tel préjudice à raison d'un prétendu mensonge des exposants.
Rejet. La Cour de cassation rejette toutefois le pourvoi des parents biologiques. Elle considère effectivement que, d’une part, ayant soutenu, dans leurs conclusions d'appel, avoir, dès le début de la grossesse de la mère, informé l’ex-époux de ce qu'il n'était pas le père de l'enfant à naître, les parents biologiques ne sont pas recevables à présenter devant la Cour de cassation un moyen incompatible avec leurs propres écritures.
D’autre part, ayant retenu que les parents biologiques avaient sciemment laissé s'appliquer la présomption de paternité qui attribuait à l'enfant une filiation à l'égard de l’ex-époux, la Haute juridiction énonce que la cour d’appel a pu en déduire, sans introduire aucun élément qui ne soit déjà dans le débat, une inertie fautive à l'origine de l'établissement tardif de la vérité concernant la filiation biologique.
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