Réf. : Cass. com., 27 octobre 2022, n° 21-15.026, F-B N° Lexbase : A20988R7
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par Vincent Téchené
le 15 Novembre 2022
► En cas de contestation sérieuse, le juge-commissaire demeure seul compétent pour statuer sur la régularité de la déclaration de créance et admettre ou rejeter la créance, de sorte qu’excède ses pouvoirs la cour d’appel statuant sur l'appel du jugement du tribunal compétent pour trancher une contestation sérieuse portant sur une créance déclarée retenant que la déclaration de créance est irrégulière pour défaut de justification du pouvoir de son signataire.
Faits et procédure. Après qu’une banque a consenti un prêt professionnel à une société, cette dernière a été successivement mise en redressement puis liquidation judiciaires. La banque a alors procédé, au titre du prêt, à deux déclarations de créance successives, qui ont été contestées. Par une ordonnance du 15 octobre 2012, le juge-commissaire a admis la créance. Par un arrêt du 11 juin 2015, la cour d'appel a infirmé cette ordonnance, dit que le juge-commissaire était dépourvu de pouvoir juridictionnel pour trancher la contestation qui opposait les parties, sursis à statuer sur l'ensemble des demandes jusqu'à la décision définitive de la juridiction compétente et ouvert aux parties un délai d'un mois pour saisir la juridiction compétente à peine de forclusion.
La banque a assigné la société débitrice et les liquidateurs devant le tribunal pour trancher la contestation. À la suite de la décision du tribunal, la cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 11 février 2021, n° 17/15774 N° Lexbase : A49894GU) a notamment retenu que les déclarations de créance sont irrégulières er rejeté les demandes de la banque. Cette dernière a donc formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 622-24 du Code civil N° Lexbase : L8803LQ4. Elle rappelle qu’il résulte de ce texte que lorsque le juge-commissaire constate qu'une contestation de créance ne relève pas de son pouvoir juridictionnel, sursoit à statuer sur l'admission de la créance et invite les parties à saisir le juge compétent sur cette contestation, ou lorsque, s'estimant incompétent pour trancher la contestation, il renvoie les parties à saisir le juge compétent, le juge-commissaire demeure seul compétent pour statuer sur la régularité de la déclaration de créance et admettre ou rejeter la créance.
Or, la Haute juridiction relève que pour dire que les déclarations de créance sont irrégulières et rejeter les demandes de la banque, l'arrêt d’appel a retenu qu'il n'est pas justifié que le signataire des déclarations successives avait reçu délégation de pouvoir d'ester en justice de la part du représentant légal de la banque ou d'un délégataire ayant reçu lui-même le pouvoir de subdéléguer.
La Cour de cassation en conclut qu’en statuant ainsi, alors que la cour d'appel, statuant par son arrêt du 11 juin 2015 avec les pouvoirs du juge-commissaire, était seule compétente pour statuer sur la régularité de la déclaration de créance, la cour d'appel, qui a excédé ses pouvoirs de juge compétent pour trancher la contestation sérieuse, a violé le texte visé.
Observations. L’arrêt est rendu au visa de l’article L. 622-24 dans sa version antérieure à l’ordonnance du 12 mars 2014 (ordonnance n° 2014-326 N° Lexbase : L7194IZH), mais la solution est pleinement applicable sous l’empire des nouvelles dispositions. Le principe de la compétence exclusive du juge-commissaire, et à sa suite de la cour d’appel (que l’on peut nommer plus généralement « le juge de la vérification du passif »), pour statuer la régularité de la déclaration de créance et l’admettre ou la rejeter est ici un rappel (v. not., Cass. com., 11 mars 2020, n° 18-23.586, FS-P+B+I N° Lexbase : A12583IG ; Cass. com., 23 septembre 2014, n° 13-22.539, F-P+B N° Lexbase : A3142MXN).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La décision du juge-commissaire en matière de déclaration et de vérification des créances, Les modalités procédurales en cas de contestation sérieuse, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E3556E4H. |
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