Le Quotidien du 7 octobre 2022 : Actualité judiciaire

[A la une] La Cour de cassation sauve Richard Ferrand en confirmant la prescription du dossier des Mutuelles de Bretagne

Réf. : Cass. crim., 5 octobre 2022, n° 21-82.428, FS-D

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par Vincent Vantighem

le 19 Octobre 2022

             Un rayon de soleil dans le ciel sombre de la Macronie. Deux jours après le renvoi d’Éric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, devant la Cour de justice de la République pour prise illégale d’intérêts et la mise en examen d’Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Élysée, pour le même motif, la Cour de cassation est venue donner une bouffée d’air aux fidèles d’Emmanuel Macron. La Haute juridiction française a, en effet, confirmé, mercredi 5 octobre, la prescription de la procédure visant Richard Ferrand, dans le dossier dit des « Mutuelles de Bretagne ». Ce qui devrait, in fine, entraîner la fin des poursuites pour l’ancien ministre et président de l’Assemblée nationale.

             Dans ce dossier aussi, il est question de prise illégale d’intérêts. Agé de 60 ans aujourd’hui, Richard Ferrand est soupçonné d’avoir profité de sa situation de directeur général des Mutuelles de Bretagne, de 1998 à 2012, pour favoriser sa compagne, l’avocate Sandrine Doucen, en lui permettant d’acheter un bien sans débourser le moindre centime. Dévoilée en 2017 par Le Canard enchaîné, l’affaire avait coûté à Richard Ferrand son poste de ministre de la Cohésion des territoires, un mois à peine après sa nomination. Elle ne l’avait toutefois pas empêché de devenir président de l’Assemblée nationale, en novembre 2018.

Un achat immobilier adossé à la location du bien

             D’après l’enquête, l’ancien député de la 6e circonscription du Finistère – qui a d’ailleurs été battu aux dernières élections législatives – a signé, fin 2010, un compromis pour acheter un immeuble à Brest (Finistère), au nom de sa compagne. Au moment même où les Mutuelles de Bretagne, qu’il dirigeait alors, cherchaient des nouveaux locaux. Le compromis avait alors été signé et étant assorti d’une clause conditionnant l’achat du bien à la promesse de sa location par les Mutuelles de Bretagne.

En clair : la martingale permettait à l’avocate d’emprunter les 375 000 euros nécessaires à l’achat de l’immeuble en les finançant grâce à un loyer annuel de 42 000 euros sur neuf ans, permettant d’autofinancer l’opération. Ce n’est effectivement qu’une fois la location approuvée que Sandrine Doucen avait monté une SCI, domiciliée à l’adresse du couple, afin de finaliser la transaction. Les lieux avaient ensuite été totalement rénovés par les Mutuelles de Bretagnes, à hauteur de 250 000 euros, alors que cet organisme bénéficie de subventions publiques. La question était donc de savoir si l’opération aurait pu avoir lieu si Richard Ferrand n’avait pas été responsable des Mutuelles de Bretagne.

Le délai de trois ans après les faits ou leur révélation en débat

             Après un premier classement sans suite par le parquet de Brest, l’association Anticor avait déposé une plainte avec constitution de partie civile à Paris en 2017, entraînant l’ouverture d’une information judiciaire. Le dossier avait été logiquement dépaysé à Lille où trois juges d’instruction avaient mis en examen Richard Ferrand plaçant, dans le même temps, sa compagne sous le statut moins contraignant de témoin assisté.

             C’est à ce moment-là que les avocats de l’ancien député avaient saisi la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Douai pour faire valoir la prescription de l’action publique, le délai étant de trois ans dans ce genre de dossier. Les magistrats de la cour d’appel leur avaient donné raison, considérant que les faits étaient bien prescrits soit depuis 2014 (c’est-à-dire trois ans après la signature du bail), soit depuis 2015 (c’est-à-dire trois ans après la démission de Richard Ferrand des Mutuelles de Bretagne). Dans les deux cas, avaient-ils argué, c’était bien avant que la justice ne soit saisie.

« Il n’en reste pas moins que les faits sont constitués »

             Raison pour laquelle l’association Anticor avait formé un pourvoi en cassation. L’association, à la pointe de la lutte pour la probité en politique, avait fait valoir que le délai de prescription aurait pu démarrer à la révélation des faits, soit en 2017 lorsque Le Canard enchaîné avait révélé l’affaire. Pour l’association, avant cette date, ils étaient dissimulés. Notamment parce que tous les administrateurs des Mutuelles de Bretagne n’avaient pas connaissance de la relation entretenue par Richard Ferrand avec Sandrine Doucen au moment de l’opération.

             Mais la Cour de cassation a donné tort à Anticor. Ce qui a réjoui la défense de Richard Ferrand : « C’est une satisfaction, a ainsi déclaré Emmanuel Piwnica, l’avocat de l’ancien ministre. C’est bien la preuve que cette affaire, qui dès le départ avait été classée, n’aurait jamais dû être rouverte. Je considère que c’est fini aujourd’hui… » Son contradicteur, avocat d’Anticor, aussi : « La Cour de cassation a fait une interprétation très stricte du droit, faisant échapper Richard Ferrand à sa responsabilité pénale, a ainsi déploré Jérôme Karsenti. Il n’en reste pas moins que les faits sont constitués et qu’il n’échappe au procès que par un moyen procédural ».

             En effet, le dossier doit désormais repasser dans les mains du juge d’instruction qui devrait prononcer un non-lieu en faveur de Richard Ferrand.

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