Réf. : Cass. com., 27 mai 2021, n° 19-17.676, F-P (N° Lexbase : A47934TP)
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par Vincent Téchené
le 02 Juin 2021
► La recevabilité d'une action en annulation d'une marque fondée sur les articles L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3712ADT), dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 (N° Lexbase : L5296LTC), et R. 5141-1-1 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L8652LTM) n'est pas subordonnée à l'interdiction préalable de la marque par les autorités de santé.
Faits et procédure. La société Merial, société pharmaceutique diffusant des médicaments destinés aux animaux, est titulaire de la marque verbale « Frontline » désignant les « insecticides et produits antiparasitaires à usage vétérinaire », sous laquelle elle commercialise un antiparasitaire à base d'un principe actif dénommé « fipronil ». Une société concurrente, la société Virbac, a déposé la marque française « Fiproline » désignant également en classe 5, les « préparations vétérinaires, en particulier un antiparasitaire externe ». Depuis que le brevet qui couvrait le fipronil est tombé dans le domaine public, en mai 2009, elle commercialise sous cette marque un antiparasitaire pour chiens et chats à base de ce principe actif, fabriqué par la société Alfamed.
La société Merial, devenue la société Boehringer, a assigné les sociétés Virbac et Alfamed en paiement de dommages-intérêts et annulation de la marque « Fiproline » pour atteinte à la renommée de sa marque « Frontline », subsidiairement, pour contrefaçon de celle-ci, ainsi qu'en annulation de la marque « Fiproline » sur le fondement des articles L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle et R. 5141-1-1 du Code de la santé publique.
Déboutée de sa demande pour atteinte à la renommée de sa marque « Frontline » sur le fondement de l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L5812LTG) et de sa demande d'annulation de la marque française « Fiproline », la société Boehringer a formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation répond donc aux deux moyens.
La Cour de cassation rappelle, en premier lieu, que l'usage d'un signe qui ne présente aucune similitude avec une marque n'est pas de nature à permettre de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque ou à leur porter préjudice, au sens de l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019.
En l’espèce, l'arrêt d’appel retient que la comparaison des signes selon une approche globale écarte toute similitude entre les marques « Frontline » et « Fiproline », qu'elle soit visuelle, auditive ou intellectuelle.
Il en résulte ainsi, selon la Haute juridiction, que l'usage de la marque « Fiproline » n'a pas pu porter atteinte à la renommée, à la supposer établie, de la marque « Frontline ». Dès lors, par ce motif de pur droit, l’arrêt d’appel se trouve légalement justifié, en ce qu’il a débouté la société titulaire de la marque de sa demande en atteinte à la renommée de cette dernière.
En second lieu, la Cour de cassation rappelle qu’aux termes des articles L. 711-3, b) et L. 714-3 (N° Lexbase : L3736ADQ) du Code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque contraire à l'ordre public ou aux bonnes mœurs, ou dont l'utilisation est légalement interdite. En outre, il résulte de l’article R. 5141-1-1 du Code de la santé publique que, lorsque le nom d'un médicament vétérinaire est un nom de fantaisie, celui-ci ne peut se confondre avec une dénomination commune.
Or, pour débouter la société Merial de sa demande d'annulation de la marque « Fiproline », l'arrêt d’appel énonce que cette marque n'a fait l'objet d'aucune interdiction d'utilisation par les autorités de santé, de sorte qu'elle ne saurait être considérée comme contraire à l'ordre public et que la société Merial est irrecevable à se prévaloir des dispositions combinées des articles R. 5141-1-1 du Code de la santé publique et L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle.
La Cour de cassation censure, sur ce point, l’arrêt d’appel : en statuant ainsi, alors que la recevabilité d'une action en annulation d'une marque fondée sur les articles L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle et R. 5141-1-1 du Code de la santé publique n'est pas subordonnée à l'interdiction préalable de la marque par les autorités de santé, la cour d'appel a violé les textes visés.
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