Le Quotidien du 9 décembre 2020 : Fiscalité des entreprises

[Brèves] Prix de transfert : une insuffisante facturation par une entreprise établie en France à une entreprise établie hors de France est constitutive d’un transfert indirect de bénéfices

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 23 novembre 2020, n° 425577, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A379637Q)

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[Brèves] Prix de transfert : une insuffisante facturation par une entreprise établie en France à une entreprise établie hors de France est constitutive d’un transfert indirect de bénéfices. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/61684866-breves-prix-de-transfert-une-insuffisante-facturation-par-une-entreprise-etablie-en-france-a-une-ent
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par Marie-Claire Sgarra

le 01 Décembre 2020

Une présomption de transfert indirect de bénéfices qui ne peut utilement être combattue par l'entreprise imposable en France que si celle-ci apporte la preuve que les avantages qu'elle a consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties ;

► Peut constituer une telle pratique l'insuffisante rémunération perçue par une entreprise établie en France qui expose des charges contribuant au développement de la valeur d'une marque appartenant à sa société mère établie hors de France.

Les faits. Une société, alors détenue à 100 % par une société hollandaise, elle-même détenue par une société italienne, et qui distribuait quasi exclusivement les produits de la société italienne, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2009 et 2010, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a estimé qu'elle avait indirectement transféré des bénéfices à la société italienne. Le tribunal administratif de Paris a déchargé la société française de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2009, de la retenue à la source au titre des années 2009 et 2010 ainsi que des compléments de cotisation minimale de taxe professionnelle et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre respectivement de l'année 2009 et de l'année 2010, résultant de cette rectification (TA Paris, 28 mars 2017, n° 1516641 N° Lexbase : A4711YGL). La cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé contre ce jugement (CAA Paris, 27 septembre 2018, n° 17PA02617 N° Lexbase : A6964YEN).

Définition : selon la définition de l’OCDE, les prix de transfert sont « les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées ». Ils se définissent plus simplement comme étant les prix des transactions entre sociétés d’un même groupe et résidentes d’États différents : ils supposent des transactions intragroupes et le passage d’une frontière.

Principe. Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités.

Le vérificateur a mis en évidence que le montant des salaires et des charges externes supporté par la société française de 2005 à 2010, était sensiblement supérieur à celui qui était exposé par dix-neuf entreprises comparables, exerçant la même activité de distribution de produits de luxe, mais de manière «  indépendante », au sens des principes définis par l’OCDE, sans que ce surcroît de charges soit entièrement compensé par le surcroît de marge brute dont bénéficiait, par rapport à ces mêmes entreprises, la filiale française.

La société, immatriculée depuis 1992, a été continûment déficitaire depuis au moins 1996 jusqu'en 2009. Par suite, le vérificateur a regardé cette insuffisance de marge brute comme un avantage octroyé par la société française à la société italienne, constitutif d'un transfert indirect de bénéfices au sens de l'article 57 du Code général des impôts (N° Lexbase : L9738I33).

Le Conseil d’État censure l’arrêt de la cour administrative d’appel :

« En jugeant que l'administration n'établissait pas l'existence d'un avantage consenti à la société italienne au motif que les résultats de la société française au titre des exercices clos de 2010 à 2015 avaient été bénéficiaires sans changement de la politique des prix de transfert de l'entreprise, alors pourtant qu'elle avait relevé que l'exposition de charges supplémentaires de salaires et de loyers par rapport à des entreprises indépendantes visait à accroître, sur un marché stratégique dans le domaine du luxe, la valeur de la marque italienne qui n'avait pas encore la même notoriété que ses concurrents directs, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

En outre, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration fiscale avait établi l'existence d'une pratique entrant dans les prévisions de l'article 57 du Code général des impôts, en démontrant que la rémunération accordée par la société italienne ne permettait pas de couvrir les charges de prestige qui contribuaient à valoriser la marque Salvatore Ferragamo exposées par la filiale française et en faisant valoir que cette dernière avait été continûment déficitaire depuis au moins 1996 jusqu'en 2009, la cour a dénaturé les faits et pièces versées au dossier.

En écartant, dans ces conditions, l'existence d'un transfert indirect de bénéfices devant être réintégré à ses résultats imposables alors que la société n'établissait pas, en se bornant à se prévaloir d'une situation bénéficiaire entre 2010 et 2015, avoir retiré une contrepartie de l'avantage en cause, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce ».

Pour rappel, le Conseil d’État a eu l’occasion de se prononcer sur la caractérisation d’un transfert indirect de bénéfices en jugeant que le lien de dépendance nécessaire à l’application des dispositions de l’article 57 du CGI n’est pas seulement subordonné à l’existence d’un lien capitalistique ou d’une communauté de dirigeants, mais peut se déduire de l’existence d’une dépendance de fait d’une société étrangère à l’égard de la société française (CE 9° et 10° ssr., 15 avril 2016, n° 372097, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7095RIM).

Lire sur cet arrêt, D. Chrétien, Prix de transfert France/Suisse : une dépendance de fait peut surgir entre deux sociétés et caractériser un transfert indirect de bénéfices, Lexbase Fiscal, mai 2016, n° 654 (N° Lexbase : N2639BWN).

 

 

 

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