Réf. : Cass. civ. 1, 22 janvier 2020, n° 19-12.492, F-D (N° Lexbase : A59073CR)
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N2035BYZ
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par Manon Rouanne
le 29 Janvier 2020
► La renonciation, par un débiteur faisant l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire, au profit de son fils, à la succession de son père portant sur la moitié d’une maison dont il avait hérité de la propriété de l’autre moitié au décès de sa mère, ayant pour effet de créer une indivision successorale entre ce dernier et lui, est réalisée en fraude des droits du créancier et est, dès lors, du fait de l’action paulienne, inopposable au liquidateur qui peut, ainsi, demander la vente du bien immobilier.
Tel est l’un des remèdes qu’offre le droit commun des contrats au créancier pour lutter contre l’organisation frauduleuse, par son débiteur, de son insolvabilité dont l’efficacité est illustrée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 22 janvier 2020 (Cass. civ. 1, 22 janvier 2020, n° 19-12.492, F-D N° Lexbase : A59073CR).
En l’espèce, un débiteur faisant l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire, qui avait hérité, au décès de sa mère, de la propriété de la moitié d’un bien immobilier, a renoncé, à la succession de son père, propriétaire de l’autre moitié de cet immeuble, laquelle a, de ce fait, été transmise à son fils ayant pour conséquence la mise en indivision du bien. Le mandataire liquidateur a, alors, engagé une action paulienne aux fins que cette renonciation soit déclarée frauduleuse à son égard. Le juge ayant fait droit à sa demande en déclarant frauduleuse la renonciation à la succession, ce dernier a, dès lors, demandé en justice la vente du bien immobilier.
La cour d’appel, sans remettre en cause le bien-fondé de l’action paulienne, a, néanmoins, rejeté cette demande en affirmant, d’une part, que, même si la renonciation à la succession dont la validité est mise en cause au titre de l'action paulienne, est frauduleuse à l’égard du créancier, elle demeure, cependant, valable entre le débiteur et le tiers qui en bénéficie et, d’autre part, que l'inopposabilité n'entraîne pas la réintégration des biens aliénés dans le patrimoine du débiteur. Aussi, les juges du fond en ont déduit que l'immeuble est indivis entre le débiteur et son fils faisant, ainsi, échec à sa vente demandée par le créancier.
Contestant la position adoptée par la cour d’appel, le liquidateur a formé un pourvoi en cassation alléguant que lorsque l'acte frauduleux consiste en une renonciation à une succession au préjudice du créancier, créant une indivision sur un immeuble qui n'aurait pas existé en l'absence de la fraude, le créancier ne peut se voir opposer les conséquences de cette renonciation et peut faire saisir l'immeuble en totalité.
Adoptant le même raisonnement que le demandeur au pourvoi, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la cour d’appel, laquelle, en rejetant la vente du bien immobilier en donnant validité, entre les parties, à l’indivision créée par la renonciation frauduleuse, a vidé l’action paulienne de sa substance. A l’instar du créancier, la Haute juridiction redonne force aux effets de l’action paulienne en affirmant que, dans la mesure où l’indivision successorale créée sur le bien immobilier est la conséquence de la renonciation frauduleuse opérée par le débiteur, celle-ci est inopposable au liquidateur et ne peut produire aucun effet à son égard, de sorte que ce dernier peut demander la vente de l’immeuble.
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