Réf. : Cons. const., décision n° 2018-768 QPC, du 21 mars 2019 (N° Lexbase : A3247XYW)
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 27 Mars 2019
► Il résulte des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6821BH4), une exigence constitutionnelle de protection de l'intérêt supérieur de l'enfant ;
► cette exigence impose que les mineurs présents sur le territoire national bénéficient de la protection légale attachée à leur âge ; il s'ensuit que les règles relatives à la détermination de l'âge d'un individu doivent être entourées des garanties nécessaires afin que des personnes mineures ne soient pas indûment considérées comme majeures ;
► tel est le cas des règles prévues par les deuxième et troisième alinéas de l'article 388 du Code civil (N° Lexbase : L0260K7R), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016, relative à la protection de l'enfant (N° Lexbase : L0090K7H), qui sont dès lors déclarés conformes à la Constitution.
Tel est le sens de la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 21 mars 2019 (Cons. const., décision n° 2018-768 QPC, du 21 mars 2019 N° Lexbase : A3247XYW).
Par cette décision, le Conseil constitutionnel déduit, pour la première fois (ainsi que cela est précisé dans son communiqué), des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946, une exigence de protection de l'intérêt supérieur de l'enfant, imposant que les mineurs présents sur le territoire national bénéficient de la protection légale attachée à leur âge. Il s'ensuit que les règles relatives à la détermination de l'âge d'un individu doivent être entourées des garanties nécessaires afin que des personnes mineures ne soient pas indûment considérées comme majeures.
Au regard du cadre ainsi établi, le Conseil constitutionnel relève que les dispositions contestées autorisent le recours à un examen radiologique osseux aux fins de contribuer à la détermination de l'âge d'une personne, et qu’en l'état des connaissances scientifiques, il est établi que les résultats de ce type d'examen peuvent comporter une marge d'erreur significative.
Le Conseil relève que, toutefois, en premier lieu, seule l'autorité judiciaire peut décider de recourir à un tel examen.
En deuxième lieu, celui-ci ne peut être ordonné que si la personne en cause n'a pas de documents d'identité valables et si l'âge qu'elle allègue n'est pas vraisemblable. La décision de ce jour précise qu'il appartient à l'autorité judiciaire de s'assurer du respect du caractère subsidiaire de cet examen.
En troisième lieu, cet examen ne peut intervenir qu'après que le consentement éclairé de l'intéressé a été recueilli, dans une langue qu'il comprend. A cet égard, la majorité d'une personne ne saurait être déduite de son seul refus de se soumettre à un examen osseux.
En dernier lieu, le Conseil constitutionnel relève que le législateur a pris en compte, dans les garanties qu'il a établies, l'existence de la marge d'erreur entourant les conclusions des examens radiologiques. D'une part, la loi impose la mention de cette marge dans les résultats de ces examens. D'autre part, elle a exclu que ces conclusions puissent constituer l'unique fondement dans la détermination de l'âge de la personne. Il appartient donc à l'autorité judiciaire d'apprécier la minorité ou la majorité de celle-ci en prenant en compte les autres éléments ayant pu être recueillis, tels que l'évaluation sociale ou les entretiens réalisés par les services de la protection de l'enfance. Enfin, si les conclusions des examens radiologiques sont en contradiction avec les autres éléments d'appréciation susvisés et si le doute persiste au vu de l'ensemble des éléments recueillis, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l'intéressé (précisément, sur la mise en application des garanties selon lesquelles, d’une part, les conclusions des examens radiologiques osseux ne permettent pas à elles seules de déterminer si l'intéressé est mineur, et d’autre part, le doute doit lui profiter, cf. l’arrêt rendu le 20 mars 2019 par la première chambre civile de la Cour de cassation, Cass. civ. 1, 20 mars 2019, n° 18-16.261, F-D N° Lexbase : A8855Y4Q, et notre brève N° Lexbase : N8296BXK).
Le Conseil constitutionnel juge alors qu'il appartient aux autorités administratives et judiciaires compétentes de donner leur plein effet à l'ensemble de ces garanties.
Au total, compte tenu des garanties entourant le recours aux examens radiologiques osseux à des fins de détermination de l'âge, le Conseil constitutionnel juge que le législateur n'a pas méconnu l'exigence de protection de l'intérêt supérieur de l'enfant découlant des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946.
A noter également qu’au regard de ces garanties, est également écarté le grief tiré d'une méconnaissance du droit à la protection de la santé, précision étant faite qu'il doit être tenu compte d'un avis médical qui déconseillerait l'examen osseux à raison des risques particuliers qu'il pourrait présenter pour la personne concernée (cf. l’Ouvrage «La protection des mineurs et des majeurs vulnérables», La définition de la minorité N° Lexbase : E4779E77).
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