Le Quotidien du 21 mars 2019 : Bancaire

[Brèves] Sanction automatique du défaut de mention du taux effectif global : QPC rejetée par la Cour de cassation

Réf. : Cass. civ. 1, 14 mars 2019, n° 18-21.567, FS-P+B (N° Lexbase : A0184Y4L)

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par Gözde Lalloz

le 20 Mars 2019

Si tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à une disposition législative, sous la réserve que cette jurisprudence ait été soumise à la juridiction suprême compétente, il résulte tant des dispositions de l'article 61-1 (N° Lexbase : L5160IBQ) de la Constitution et de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 (N° Lexbase : L0276AI3) modifiée que des décisions du Conseil constitutionnel, que la contestation doit concerner la portée que donne à une disposition législative précise l'interprétation qu'en fait la juridiction suprême de l'un ou l'autre ordre : la question posée, sous le couvert de critiquer l'article 1907 du Code civil (N° Lexbase : L2132ABL), l'article L. 313-2 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, et l'article L. 313-4 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L6403DIY), dans sa rédaction issue de la loi n°2010-737 du 1 juillet 2010 (N° Lexbase : L6505IMU), porte exclusivement sur la règle jurisprudentielle, énoncée au visa de ces textes, selon laquelle le défaut de mention du taux effectif global ou l'inexactitude de celui-ci, équivalant à un défaut de mention, dans tout écrit constatant un contrat de prêt, est sanctionné par l'annulation de la clause stipulant l'intérêt conventionnel et la substitution consécutive à celui-ci de l'intérêt légal ; il s'ensuit que la question prioritaire de constitutionnalité n'est pas recevable.

 

Telle est la solution énoncée par la Cour de cassation dans sa décision datée du 14 mars 2019  (Cass. civ. 1, 14 mars 2019, n° 18-21.567, FS-P+B N° Lexbase : A0184Y4L).

 

La question posée à la Cour de cassation par la cour d'appel de Versailles (CA Versailles, 7 juin 2018, n° 16/07813 N° Lexbase : A4702XQ9) était la suivante : 

 

"Les dispositions des articles 1907 du Code civil, L. 313-2 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 et L. 313-4 du Code monétaire et financier, telles qu'interprétées par une jurisprudence constante, qui sanctionnent, de manière automatique, le défaut de mention du taux effectif global, dans tout écrit constatant un contrat de prêt, par l'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts et le remplacement du taux contractuel prévu par le taux légal, privant l'établissement de crédit prêteur des intérêts contractuellement dus et l'obligeant dans les termes d'un contrat qu'il n'a pas conclu, méconnaissent-elles les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L6813BHS), pour porter une atteinte excessive au droit de propriété et à la liberté contractuelle ?".

 

Il est utile donc de revenir sur les faits pour appréhender la question dans sa globalité.

 

En matière de crédit à la consommation, toute publicité doit mentionner le TEG, de même que l'information précontractuelle remise à l'emprunteur. Ces documents doivent en outre comporter les éléments essentiels du crédit listés dans les articles susmentionnés.

 

En l'espèce, l'emprunteur avait accepté dans un premier temps une offre de crédit par le biais d'une télécopie qui ne faisait pas mention du TEG.  Le même jour, mais postérieurement à l'engagement par télécopie. il signa un instrumentum faisant cette fois-ci état de ce dernier. Or, au regard des textes, l'emprunteur devait être informé au moment de s'engager sur ce taux, en l'absence duquel il n'était pas en mesure d'opérer une comparaison entre les propositions de crédit qui lui auraient été faites.  Dans ces conditions, l'établissement de crédit avait donc obtenu l'engagement irrévocable de l'emprunteur sans l'avoir préalablement informé du taux effectif global.

 

C'est à juste titre, qu'il a été jugé que la télécopie valait contrat de prêt et qu'en application de l'article L. 313-4 du Code monétaire et financier, le TEG devait y être mentionné.

 

Si après signature de la télécopie les parties ont signé un nouvel accord constatant un nouvel échange de leur consentement en signant l'acte de prêt lui-même, qui lui faisait mention du TEG, il ne s'agit pas pour autant de la réfection de la télécopie irrégulière. Il s'ensuit que la stipulation de l'intérêt conventionnel est nulle pour défaut de mention du TEG dans la télécopie valant contrat de prêt et que le taux légal devait être substitué au taux contractuel depuis la conclusion du contrat de prêt.

 

L'établissement de crédit a soutenu que cette sanction est critiquable et disproportionnée. en se prévalant des termes de l'article 23 de la Directive 2008/48/CEE (N° Lexbase : L8978H3W), mais également de la Directive 17/CE (N° Lexbase : L1895DYT), selon lesquels "Les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la présente directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

 

Mais il résulte en réalité de ces dispositions qu'il incombe au juge de prendre en considération l'ensemble des règles du droit national et de les appliquer, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la Directive pour aboutir à une solution conforme à l'objectif poursuivi par celle-ci, de sorte que non seulement le taux légal doit être substitué à l'intérêt conventionnel, mais encore, que le juge, peut même, le cas échéant, vérifier que le droit de la banque à percevoir néanmoins les intérêts au taux légal ne doit pas lui permettre de bénéficier de sommes d'un montant équivalent à celui des intérêts conventionnels dont il est privé et en cette hypothèse écarter l'application du taux d'intérêt légal et la majoration du taux d'intérêt légal prévue par l'article L. 313-3 alinéa 1er (N° Lexbase : L7599HIB) du Code monétaire et financier.

 

En l'espèce, la cour d'appel de Versailles a jugé que la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel était bien proportionnée et a confirmé le jugement sur ce point.

 

C'est dans ce contexte-là, que la Cour de cassation a été saisie de la question précitée. 

 

 

 

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