Réf. : CEDS, CGT c/ France, 15 mars 2019, réclamation n° 154/2017
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N8152BX9
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par Blanche Chaumet
le 20 Mars 2019
► Est contraire à l’article 4 § 2 de la Charte sociale européenne (N° Lexbase : L1676HDG) les dispositions des articles L. 3121-41 (N° Lexbase : L6872K9E) et L. 3121-44 (N° Lexbase : L6869K9B) du Code du travail permettant, en matière d’aménagement du temps de travail, de fixer une période de référence pouvant aller jusqu'à trois ans en cas de convention collective et neuf semaines en cas de décision unilatérale de l'employeur, une période de référence supérieure à un an et pouvant atteindre trois ans pour le calcul de la durée moyenne du travail, n’étant pas raisonnable.
Telle est la règle dégagée par le Comité européen des droits sociaux dans une décision publiée le 15 mars 2019.
A la suite d’une réclamation déposée par la Confédération générale du travail (CGT) contre France (n° 154/2017), le Comité européen des droits sociaux a adopté une décision sur le bien-fondé de cette réclamation le 18 octobre 2018. Cette décision a été rendue publique le 15 mars 2019.
La CGT alléguait, dans sa réclamation, que la loi n° 2016-1088 (N° Lexbase : L8436K9C) prévoyant l’organisation/l’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine et pouvant atteindre trois ans porte gravement atteinte au droit des salariés à une rémunération équitable, en violation de l’article 4 § 2 de la Charte (droit à une rémunération équitable). Il était soutenu qu’un tel aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, qui peut s’étendre sur de longs mois, voire sur une année et jusqu’à trois ans, n’est pas compatible avec la Charte en ce que qu’il prive le travailleur de ses droits à une rémunération équitable et en particulier à un taux de rémunération majoré pour les heures de travail supplémentaire.
En énonçant la règle susvisée, le Comité conclu :
- à l’unanimité qu’il y a violation de l’article 4 § 2 de la Charte en ce qui concerne le caractère raisonnable de la période de référence ;
- à l’unanimité qu’il n’y a pas violation de l’article 4 § 2 de la Charte en ce qui concerne le droit des travailleurs d’être informés de tout changement d’horaires de travail.
Il considère qu’une période de référence n’excédant pas douze mois pourrait être acceptable dans des circonstances exceptionnelles sous réserve qu’elle soit justifiée par des motifs objectifs ou techniques ou des raisons tenant à l’organisation du travail. Il estime, cependant, qu’une période de référence d’une durée supérieure à douze mois et pouvant atteindre trois ans a pour effet de priver les travailleurs du droit à un taux de rémunération majorée pour les heures de travail supplémentaires étant donné que la durée de travail hebdomadaire peut être augmentée durant une longue période sans majoration de la rémunération pour les heures supplémentaires. En pareil cas, l’effort accru des salariés ne serait pas compensé par une majoration de salaire et l’on ne saurait considérer que le temps de repos accordé constitue une compensation adéquate, vu la durée potentielle des heures supplémentaires. Cela pourrait aussi avoir des effets négatifs sur la santé et la sécurité ainsi que sur l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée des salariés.
Pour rappel, le CEDS est une instance de contrôle du Conseil de l’Europe chargée d’examiner le respect de la Charte sociale européenne par les Etats parties, ses décisions, n’ont pas en elles-mêmes, d’effet contraignant direct en France.
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