Ne constitue pas un trouble manifestement illicite justifiant une mesure d'expulsion le fait pour des salariés d'occuper des locaux de l'entreprise, par roulement, lorsque, d'une part, l'employeur, qui a décidé l'arrêt des activités et fermé une unité de production sans information ni consultation préalable des institutions représentatives du personnel, a interdit aux salariés l'accès à leur lieu de travail en leur notifiant, sans autre explication, leur mise à disponibilité et que, d'autre part, cette occupation s'était effectuée sans dégradation de matériel, de violence ou d'autre comportement dangereux à l'égard des personnels se trouvant sur le site. Telle est la solution d'un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation, en date du 9 mars 2011 (Cass. soc., 9 mars 2011, n° 10-11.588, FS-P+B
N° Lexbase : A2543G93).
Dans cette affaire, après le transfert de leurs contrats de travail à la société X, les anciens salariés de l'entreprise Y se sont vus proposer une modification de leur lieu de travail dans des nouveaux locaux. Monsieur Z et vingt-huit salariés, n'ayant pas accepté cette modification, se sont vus refuser l'accès à l'usine, après décision de l'employeur de procéder à la cessation de l'activité de cette unité de production, et ont été mis en disponibilité avec maintien de leur rémunération. Des salariés ont alors décidé d'occuper ces locaux par roulement pour protester contre la fermeture brutale du site. La société conteste l'arrêt de la cour d'appel de Riom (CA Riom, 4ème ch., 8 décembre 2009, n° 09/02566
N° Lexbase : A3320GPN) qui avait jugé que l'occupation de l'usine ne constituait pas un trouble manifestement illicite, estimant que "
que l'occupation, par les salariés, des locaux d'une entreprise lors d'un mouvement social sui generis
non spécialement protégé par la loi porte atteinte au droit de propriété de l'employeur et constitue, en tant que telle, un trouble manifestement illicite dont ce dernier est fondé à exiger la cessation sous astreinte, sans avoir à démontrer une quelconque entrave au fonctionnement de l'entreprise ou une atteinte à la sécurité des personnes ou des biens". La Haute juridiction rejette sa demande, l'occupation, intervenue en réaction à la fermeture sans consultation préalable des institutions représentatives du personnel, ne caractérisait pas un trouble manifestement illicite (sur l'exercice du droit de grève rendu abusif par l'occupation des locaux, cf. l’Ouvrage "Droit du travail
N° Lexbase : E2551ETN).
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