L'ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale, garanti par l'article 8 CESDH (
N° Lexbase : L4798AQR), que constitue l'annulation d'un mariage entre alliés en ligne directe est prévue par les articles 161 (
N° Lexbase : L8846G9I) et 184 (
N° Lexbase : L7237IAB) du Code civil et poursuit un but légitime en ce qu'elle vise à sauvegarder l'intégrité de la famille et à préserver les enfants des conséquences résultant d'une modification de la structure familiale. Il appartient toutefois au juge d'apprécier si, concrètement, dans l'affaire qui lui est soumise, la mise en oeuvre de ces dispositions ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par la Convention une atteinte disproportionnée au regard du but légitime poursuivi. Tel n'était pas le cas dans l'affaire soumise à la Cour de cassation le 8 décembre 2016 (Cass. civ. 1, 8 décembre 2016, n° 15-27.201, FS-P+B+R+I
N° Lexbase : A1552SP8). En premier lieu, après avoir relevé que le droit de Mme X et M. Y de se marier, garanti par l'article 12 de la CESDH (
N° Lexbase : L4745AQS), n'avait pas été atteint, dès lors que leur mariage avait été célébré sans opposition et qu'ils avaient vécu maritalement jusqu'au décès de l'époux, la Cour suprême retient qu'en annulant le mariage, la cour d'appel (CA Aix-en-Provence, 2 décembre 2014, n° 13/17939
N° Lexbase : A7167M49) n'a pas méconnu les exigences conventionnelles résultant du texte susvisé. En second lieu, ainsi qu'il a été énoncé ci-dessus, il appartenait au juge d'apprécier si, en l'espèce, l'annulation du mariage ne portait pas au droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard du but légitime poursuivi. La réponse est négative. La Cour suprême approuve l'appréciation des juges d'appel qui avaient relevé, d'abord, que Mme X avait 9 ans quand M. Y avait épousé sa mère en troisièmes noces, qu'elle avait 25 ans lorsque ces derniers avaient divorcé et 27 ans lorsque son beau-père l'avait épousée. Ils en déduisaient que l'intéressée avait vécu, alors qu'elle était mineure, durant neuf années, avec celui qu'elle avait ultérieurement épousé et qui représentait nécessairement pour elle, alors qu'elle était enfant, une référence paternelle, au moins sur le plan symbolique. L'arrêt constatait, ensuite, que son union avec M. Y n'avait duré que huit années lorsque les consorts Y avaient saisi les premiers juges aux fins d'annulation et relève, enfin, qu'aucun enfant n'était issu de cette union prohibée (cf. l’Ouvrage "Mariage - Couple - PACS"
N° Lexbase : E4868EXL ; à rapprocher de Cass. civ. 1, 4 décembre 2013, n° 12-26.066, FS-P+B+I
N° Lexbase : A5510KQ7, ayant retenu, au contraire, que le prononcé de la nullité du mariage d'un beau-père avec sa belle-fille, divorcée d'avec son fils, revêtait à l'égard de cette dernière, le caractère d'une ingérence injustifiée dans l'exercice de son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que cette union, célébrée sans opposition, avait duré plus de vingt ans).
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