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N5786BI7
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par Fany Lalanne - Rédactrice en chef Lexbase Hebdo - édition sociale
le 07 Octobre 2010
I - ANI du 7 janvier 2009, sur le développement de la formation tout au long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la sécurisation des parcours professionnels
Le 7 janvier 2009, les partenaires sociaux signaient l'Accord national interprofessionnel sur le développement de la formation tout au long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la sécurisation des parcours professionnels. Si le nouvel accord s'inscrit dans la continuité de celui du 20 septembre 2003 et de celui du 11 janvier 2008, relatif à la modernisation du marché du travail, plusieurs objectifs lui sont assignés et, notamment, simplifier et clarifier les modalités de mise en oeuvre de certains dispositifs initiés par l'ANI du 5 décembre 2003. A retenir, parmi les principales modifications :
Concernant le plan de formation, seules deux catégories d'action subsistent et seront présentées lors de la consultation du comité d'entreprise : les actions d'adaptation au poste de travail et d'évolution ou au maintien dans l'emploi dans l'entreprise, qui seront réalisées pendant le temps de travail ; et les actions liées au développement des compétences, qui pourront être réalisées hors temps de travail.
Les entreprises sont incitées à conclure des contrats de professionnalisation. Un tuteur externe à l'entreprise pourra être nommé, en accord avec l'employeur et sous la forme d'un accompagnement, pour traiter des problématiques distinctes de la formation. La prise en charge de ces actions se fera sous forme de convention entre les organismes paritaires collecteurs agrées (OPCA), Pôle Emploi, l'Etat, les Régions ou les départements.
Les partenaires sociaux ont convenu la mise en place d'un groupe de travail paritaire, chargé de formuler des propositions pour optimiser les dispositifs du DIF et du CIF, afin que "chaque salarié puisse être davantage acteur de son évolution professionnelle". Ce groupe rendra ses conclusions le 30 avril prochain.
Un mécanisme de financement de la portabilité du droit individuel à la formation est mis en place par le nouvel accord pour les ruptures de contrat de travail ouvrant droit à une prise en charge par le régime d'assurance-chômage.
Un dispositif de formation initiale différée mis en oeuvre, notamment, dans le cadre du CIF est ajouté. Les salariés, qui ont arrêté leur formation initiale avant ou au terme du premier cycle de l'enseignement supérieur, et, en priorité, ceux qui n'ont pas obtenu de qualification professionnelle reconnue, pourront accéder à une formation qualifiante ou diplômante d'une durée totale maximale d'un an. Les partenaires sociaux souhaitent que les salariés concernés puissent bénéficier, au moment de leur départ en formation, d'un abondement financier des pouvoirs publics correspondant au coût moyen d'une année de formation. A cette fin, ils demandent l'ouverture d'une concertation avec les pouvoirs publics.
Les partenaires sociaux souhaitent amplifier les actions au bénéfice des personnes fragilisées sur le marché de l'emploi. Le financement de ces actions pourra venir, notamment, du Fonds Paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), par le biais des OPCA. Les demandeurs d'emploi, pour lesquels une action de formation s'avèrerait nécessaire pour favoriser leur retour à l'emploi, pourront bénéficier d'un nouveau dispositif de préparation opérationnelle à l'emploi (POE).
Au-delà de leurs missions traditionnelles de collecte, de gestion, de mutualisation et de financement des actions, les missions des OPCA sont de nouveau précisées, l'accord insistant particulièrement sur leur rôle d'information et de conseil auprès des entreprises.
Les partenaires sociaux ont, ici, distingué les instances qui ont la responsabilité du suivi et de la mise en oeuvre des politiques de celles qui ont la responsabilité de l'application de ces modalités auprès des entreprises et des salariés.
L'ANI souhaite, également, la création du Conseil national d'évaluations de la formation, pour mener ou faire réaliser les travaux d'évaluation concernant les politiques paritaires de formation professionnelle ; mesurer le niveau de formation des publics concernés par les politiques de formation professionnelle ; et évaluer la satisfaction des entreprises et des différents publics bénéficiaires.
II Une proposition originale : la formation comme objectif stratégique d'amortissement de la crise
Pour Gérard Lenoir, président d'AGEFOS PME, l'objectif principal reste de proposer des solutions aux PME et TPE dans un contexte économique difficile et d'encourager les entreprises à profiter de la période de ralentissement économique pour former leurs salariés. Il s'agit, pour cela, d'amorcer un plan anti-crise en créant un "fonds d'amorçage", afin de soutenir l'investissement formation. S'il a conscience que la formation ne crée pas l'emploi, Gérard Lenoir soutient, cependant, qu'elle pourrait permettre de mettre à profit l'employabilité des salariés. En effet, comme le souligne Philippe Rosay, vice-président de l'organisme, dans les TPE, la difficulté majeure reste celle du financement des salariés qui partent en formation. En effet, ce sont les coûts pédagogiques qui sont pris en charge par les OPCA, comme l'Agefos et non, ou très peu, les salaires.
Le "fonds d'amorçage" concernerait, également, les branches susceptibles de proposer des reconversions et des passerelles externes d'emploi. L'idée est, ici, d'accompagner les branches professionnelles qui rencontrent des difficultés ou qui sont concernées par le chômage partiel, en recherchant des co-financements publics et en construisant des parcours de formation combinant DIF et période de professionnalisation. L'objectif est, ici, de maintenir les salariés dans l'emploi et de développer leurs compétences.
En revanche, concernant les PME, la formation ne peut résoudre à elle seule le problème.
Si l'efficacité du DIF a vivement été critiquée par la Cour des comptes, dans son dernier rapport, pour Gérard Lenoir, le dispositif, combiné, ou non, à d'autres systèmes, constitue un moyen efficace, susceptible de s'articuler avec des périodes de chômage partiel. Le DIF peut, également s'avérer très efficient comme "éclaireur" dans les trajectoires professionnelles des salariés les plus en difficultés. Dans la mesure où la formation professionnelle permet d'accompagner les salariés, elle doit être mise à profit pour amortir la crise. Ainsi, la stratégie doit rester offensive : alors que le contexte voudrait que les entreprises restreignent leurs investissements formation, pour l'AGEFOS PME, il faut, au contraire, utiliser le temps disponible pour former et investir dans les compétences des salariés. La formation doit rester un investissement et non représenter une dépense. Et si la solution peut paraître étonnante, Joël Ruiz, directeur général d'AGEFOS PME, rappelle que l'on est dans un paradoxe, le chômage augmente, mais les entreprises ont du mal à trouver des compétences. C'est pourquoi il faut accompagner les entreprises sur les compétences stratégiques. Pour cela, plusieurs dispositifs existent. Tout d'abord, le contrat de transition professionnelle (CTP).
Destiné à se substituer à l'actuelle convention de reclassement personnalisé (CRP), le contrat de transition professionnelle est un dispositif expérimental de reclassement testé d'avril 2006 à novembre 2008 sur des bassins d'emploi non couverts par la convention de reclassement personnalisé. Il concerne tous les salariés licenciés pour motif économique d'entreprises de moins de 1 000 salariés ou ceux issus d'entreprises en liquidation ou redressement judiciaire et permet aux bénéficiaires de disposer d'une allocation équivalente à 80 % de leur salaire et d'un accompagnement pendant 12 mois par des parcours de formation adaptés. Le CTP offre la possibilité aux bénéficiaires d'associer, selon les besoins, période formation et période de travail en entreprise. Le CTP ayant été jugé plus efficace que la CRP, la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008, de finances pour 2009 (N° Lexbase : L3783IC4), a prolongé l'expérience d'un an. Le CTP va donc continuer temporairement à s'appliquer aux procédures de licenciement économique engagées par les entreprises jusqu'au 30 novembre 2009. Par ailleurs, cette loi a également décidé d'étendre le CTP à 18 nouveaux bassins d'emploi, caractérisés par une situation économique très défavorable à l'emploi, déterminés par décret. Rappelons, également, que les employeurs ne proposant pas au salarié de conclure un contrat de transition professionnel doivent s'acquitter d'une contribution.
Le second dispositif permettant d'accompagner les entreprises sur les compétences stratégiques est celui de la préparation opérationnelle à l'emploi (POE), mise en place par l'ANI du 7 janvier. L'objectif est, ici, d'utiliser les dispositifs existants. Rappelons simplement que ce nouveau dispositif est dans l'attente de la publication d'un décret d'application.
Selon les termes de l'ANI, le dispositif de la POE peut être mis en oeuvre de façon individuelle ou collective.
Un demandeur d'emploi susceptible d'occuper un emploi correspondant à une offre identifiée, déposée à Pôle emploi par une entreprise, bénéficie sans préjudice de l'offre de service mise en oeuvre par Pôle emploi, d'une action de formation ne pouvant excéder 400 heures en vue d'acquérir le socle de compétences professionnelles nécessaires pour occuper le poste proposé. Sa durée sera définie en fonction du diagnostic établi conjointement avec le demandeur d'emploi, lequel est présélectionné par Pôle emploi, volontaire et choisi par le futur employeur en fonction du profil de l'offre qu'il aura déposé.
L'entreprise, avec l'aide de Pôle emploi et l'OPCA dont il relève, définit les compétences que le demandeur d'emploi doit acquérir au cours de l'action de formation pour occuper l'emploi proposé.Cette action est prise en charge par Pôle emploi et, partiellement, par l'OPCA concerné au titre de la professionnalisation ou, plus largement, des fonds mutualisés. Le bénéficiaire a, pendant l'action de formation, le statut de stagiaire de la formation professionnelle.
A l'issue de la formation, l'employeur conclut un contrat de travail (contrat à durée indéterminée, contrat de professionnalisation à durée indéterminée, contrat d'une durée déterminée d'au moins 12 mois) avec le demandeur d'emploi concerné ayant atteint, grâce à l'action de formation, le niveau requis pour occuper l'emploi proposé.
En cas de non conclusion d'un contrat de travail, des modalités d'accompagnement renforcées, fixées dans la convention, seront mises en oeuvre avec Pôle emploi pour réorienter le bénéficiaire.
Rappelons, pour conclure, que, à la suite du Sommet social du 18 février 2009, le chef de l'Etat, annonçait, en matière de formation, la création d'un fonds d'investissement social, afin de coordonner les efforts en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle, en consolidant différentes sources de financement de l'Etat et des partenaires sociaux.
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