Réf. : Cass. civ. 2, 19 juin 2008, n° 07-16.135, Société Omnium de gestion et de financement (OGF), FS-P+B (N° Lexbase : A2263D9P)
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen
le 07 Octobre 2010
Résumé
Il résulte de l'article L. 242 1, alinéa 1er, du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L0113HGB), dans sa rédaction en vigueur avant la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, de financement de la Sécurité sociale pour 2006, que sont soumises à cotisations toutes les sommes versées aux salariés en contrepartie ou à l'occasion du travail, y compris les sommes compensant les pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail. Peu importe le caractère prioritaire, ou non, de l'objectif d'éviter des licenciements, le recours à une hausse du taux horaire ou à des versements à plus longue échéance de la compensation des pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail ou, enfin, la présence ou l'absence de mention expresse du caractère indemnitaire des sommes litigieuses. |
Commentaire
I - Nature de l'indemnité compensatrice RTT avant la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, de financement de la Sécurité sociale pour 2006 (art. 14, 1° du II)
A - Avant la jurisprudence "Société Durand c/ Urssaf de Mayenne" (2)
Une importante décision rendue par la Cour de cassation en 1994 (3) retient la nature non de salaire, mais de dommages et intérêts à une indemnité compensant le préjudice subi par le salarié lorsque son emploi à temps plein est transformé en emploi à temps partiel. Selon la Cour de cassation, les indemnités versées aux salariés ayant accepté la transformation de leur emploi à temps plein en emploi à temps partiel, dans le cadre d'un plan social, ont le caractère de dommages-intérêts compensant le préjudice né pour les intéressés de la réduction de leur temps de travail. En conséquence, elles ne doivent pas être incluses dans l'assiette des cotisations. Cette jurisprudence revêt, pourtant, une dimension et une portée limitées, parce que la nature juridique de l'indemnité versée aux salarié doit son caractère de dommages et intérêts (et non de salaire) plus au fait qu'elle est versée dans le cadre d'un plan social, qu'en raison de son mécanisme (indemnité compensant le passage d'un temps plein à un temps partiel).
La jurisprudence "Beghin-say c/ Urssaf Lille" (supra) a déclenché une réaction du ministère de la Santé et des Affaires sociales (lettre ministérielle du 17 mars 1997), ainsi que de l'Acoss (lettre circulaire n° 97-051 du 2 juillet 1997). L'Acoss décidait que l'indemnité compensatrice versée par l'employeur à l'occasion d'une mesure de réduction du temps de travail ne peut revêtir le caractère de dommages et intérêts (et non, de salaire) qu'à la double condition que le préjudice soit avéré et qu'elle soit mise en place dans le cadre d'un plan social.
En revanche, le ministère de la Santé et des Affaires sociales prenait une position bien plus favorable aux Urssaf, puisque l'administration décidait que l'exonération de cotisations s'applique, dès lors que le préjudice est avéré et que la réduction du temps de travail intervient afin d'éviter des licenciements pour motif économique (lettre ministérielle du 17 mars 1997, diffusée par lettre circulaire Acoss n° 97-051 du 2 juillet 1997).
L'exonération ne trouve pas à s'appliquer dans le cadre de dispositifs de réduction du temps de travail mis en place en vue de créer des emplois (volet offensif). Toute somme versée au salarié compensant cette réduction est pleinement assujettie aux cotisations sociales, compte tenu de l'aide apportée par l'Etat. Cette décision d'assujettir ces sommes à cotisations est motivée, selon l'administration du travail, par le fait que l'employeur a bénéficié, par ailleurs, d'une aide de l'Etat prenant la forme d'un allègement dégressif de cotisations patronales de sécurité sociale applicable pendant une durée maximale de 7 ans. De même, les sommes versées dans le cadre des dispositifs de réduction du temps de travail destinés à éviter des licenciements (volet défensif), pour lesquels l'employeur bénéficie d'une aide de l'Etat prenant la forme d'un allègement dégressif de cotisations patronales de sécurité sociale, ne doivent pas être exclues de l'assiette des cotisations (lettre circulaire Acoss n° 2006-063, 21 avril 2006 N° Lexbase : L5850HII, infra, n° 24).
La loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, relative à la réduction négociée du temps de travail ("Aubry II") (N° Lexbase : L0988AH3), comporte des précisions spécifiques à la question de l'indemnité compensatrice éventuellement versée aux salariés en cas de réduction du salaire. La compensation salariale de la réduction du temps de travail peut être assurée par un complément différentiel de salaire ou par une hausse du taux horaire. La loi a défini la garantie applicable aux salariés payés au SMIC sur la base de la compensation par complément différentiel. Cependant, ce choix n'interdit pas aux entreprises de retenir, y compris pour leurs salariés payés au SMIC, la modalité de la hausse du taux horaire, dès lors qu'elles respectent les montants de la garantie applicable aux salariés payés au SMIC et les revalorisations qui s'appliqueront à cette garantie.
Le complément différentiel a la même nature que la partie de salaire versée sur la base de la durée du travail après réduction. Il n'a pas un caractère indemnitaire. Il est soumis à cotisations sociales et doit être mentionné, sur le bulletin de paye dans les éléments de salaire soumis à ces cotisations. Sa mise en place ne modifie donc pas les droits à prestations sociales des salariés. La Cour de cassation s'est prononcée sur la nature des indemnités compensatrices à la RTT en affirmant que la compensation pour réduction d'horaire a la nature de majoration de salaire à intégrer au salaire de base à comparer au minimum garanti, que celui-ci soit légal ou conventionnel (Cass. soc., 19 mars 1985, supra). Si, dans un arrêt du 7 avril 1994 ("Béghin Say", supra), la Cour de cassation a estimé que les indemnités compensatrices, allouées dans le cadre d'un plan social aux salariés à temps complet qui acceptent de travailler à mi-temps, ont la nature de dommages-intérêts compensant le préjudice né de la réduction de leur temps de travail et ne doivent donc pas être soumises à cotisations, cette position ne peut être appliquée, selon la circulaire du ministère de l'Emploi du 3 mars 2000 (préc.) s'agissant de la réduction du temps de travail effectuée dans le cadre de la loi du 13 juin 1998 ("Aubry I") ou de la loi n° 98-461 du 19 janvier 2000, d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail ("Aubry II") (N° Lexbase : L7982AIH). La jurisprudence récente confirme que très rares peuvent être les circonstances dans lesquelles les sommes destinées à maintenir un salaire peuvent être exclues de l'assiette des cotisations sociales (Cass. soc., 25 novembre 1999, n° 97-13.063, Urssaf de la Somme c/ Association Le Temps du Jazz N° Lexbase : A3261AAZ et circulaire du 3 mars 2000, préc.).
B - Depuis la jurisprudence "Société Durand c/ Urssaf de Mayenne"
En 2004, la Cour de Cassation a considéré que les sommes versées aux salariés en compensation de la perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail présentent le caractère de dommages et intérêts. A ce titre, elles doivent être exclues de l'assiette des cotisations et contributions de Sécurité sociale (5). Destinées à compenser les pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail, les sommes versées aux salariés en application de l'accord d'entreprise défensif (prévu par l'article 39-1, alinéa 2, de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle N° Lexbase : L7486AI4) ont le caractère de dommages-intérêts. La cour d'appel a exactement décidé que les indemnités litigieuses n'entraient pas dans les prévisions de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité sociale et qu'elles devaient être exclues de l'assiette des cotisations sociales.
La lettre circulaire n° 2004-175 du 28 décembre 2004 a précisé la portée de la jurisprudence de la Cour de cassation relative à la nature juridique de dommages et intérêts d'une indemnité compensatrice RTT (Cass. civ. 2, 20 janvier 2004, n° 02-30.950, préc.). Selon la lettre circulaire Acoss n° 2004-175 du 28 décembre 2004, l'exclusion des sommes versées aux salariés en compensation de la perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail de l'assiette des cotisations et contributions de Sécurité sociale s'applique aux seuls accords défensifs de Robien, à l'exclusion des accords conclus en application de l'article 3 V de la loi "Aubry I". "En raison de la motivation très générale de cet arrêt [Cass. civ. 2, 20 janvier 2004, n° 02-30.950, préc.] et des termes clairs du dispositif de la décision, cette jurisprudence doit être appliquée aux accords de Robien défensifs au titre des indemnités destinées à compenser les pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail allouées aux salariés pour lesquels le préjudice est avéré".
L'Acoss en tire la conclusion que ces indemnités de compensation RTT sont exonérées de cotisations sociales pendant toute la durée d'application de l'accord de Robien défensif et tant que dure le préjudice subi par le salarié en raison de la baisse de sa rémunération. En revanche, selon l'Acoss, ne peuvent prétendre à une exonération de charges sociales, en application de cette jurisprudence, les salariés qui perçoivent une compensation RTT, mais qui appartiennent à l'une des deux catégories suivantes : salariés qui étaient à temps partiel lors de la conclusion de l'accord de Robien et dont la durée de travail reste inchangée ; salariés embauchés ultérieurement à la conclusion de l'accord de Robien, qu'ils soient à temps partiel ou pour une durée de travail, au moins, égale à la nouvelle durée du travail réduite.
L'Acoss décide que seule la compensation de la perte de rémunération se traduisant par le versement d'une indemnité préjudicielle présente le caractère de dommages et intérêts à l'exclusion d'un maintien du niveau de rémunération par l'augmentation du taux horaire.
II - Nature de l'indemnité compensatrice RTT depuis la loi de financement de la Sécurité sociale du 19 décembre 2005
A - Nature juridique de salaire, en application de la loi
Le législateur a précisé la nature des sommes ainsi versées aux salariés. Selon le premier alinéa de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité sociale, la compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est considérée comme une rémunération et non des dommages et intérêts, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire. Cette règle est applicable aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier 2006 dans le cadre d'accords collectifs réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er octobre 1996. Cette date d'entrée en vigueur s'entend sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, qui produisent leurs effets jusqu'à la date d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives ; et des instances en cours au 20 décembre 2005, date de publication de la loi de financement pour 2006.
Il résulte de la législation nouvelle que les sommes versées aux salariés en compensation de la perte de rémunération induite par une réduction du temps de travail ont la même nature que les autres éléments de rémunération : dès lors, elles sont assujetties à cotisations et contributions de sécurité sociale dans les conditions de droit commun. La législation nouvelle est applicable aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier 2006 dans le cadre d'accords collectifs réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er octobre 1996. Cette date d'entrée en vigueur s'entend sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, qui produisent leurs effets jusqu'à la date d'entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives ; et des instances en cours au 20 décembre 2005, date de publication de la loi de financement pour 2006.
La lettre circulaire ACOSS apporte d'importantes précisions sur le régime juridique des indemnités compensatrices RTT versées par l'employeur au titre de la loi de Robien n° 96-502 du 11 juin 1996.
- Type d'accords visés
La nouvelle disposition s'applique aux sommes versées à compter du 1er janvier 2006 en application d'accords collectifs réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er octobre 1996. Compte tenu de la formulation large retenue par la loi, celle-ci vise, outre les sommes versées dans le cadre des dispositifs légaux, tous les accords collectifs réduisant la durée du travail et prévoyant une compensation salariale, quel que soit le niveau auquel ils ont été conclus. Sont, ainsi, visés : le dispositif de Robien (loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, modifiée par la loi n° 96-502 du 11 juin 1996, tendant à favoriser l'emploi par l'aménagement et la réduction conventionnels du temps de travail N° Lexbase : L7981AIG) ; les accords de réduction du temps de travail conclus dans le cadre des lois n° 98-461 du 13 juin 1998 ("Aubry I") (conclues pour une durée de cinq ans, ces conventions peuvent produire leurs effets jusqu'au 31 décembre 2006 en ce qui concerne l'allègement) et n° 2000-37 du 19 janvier 2000 ("Aubry II") ; d'une manière générale tout accord collectif réduisant la durée du travail et prévoyant une compensation salariale.
- Modalités de compensation
La règle d'inclusion dans l'assiette des cotisations et contributions sociales s'applique quelle que soit la modalité retenue pour la compensation : le maintien de la rémunération ou une indemnité différentielle.
B - Nature juridique de salaire, selon la jurisprudence
- En l'espèce, selon l'employeur, une mesure de réduction du temps de travail entraîne nécessairement, à défaut de compensation, une diminution de salaire. Devraient avoir le caractère de dommages-intérêts les sommes destinées à compenser la perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail décidée afin d'éviter des licenciements. Elles devraient être exclues de l'assiette des cotisations sociales, dès lors qu'elles ont été versées avant le 1er janvier 2006, la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 ayant prévu leur assujettissement à compter de cette date seulement.
Or, en l'espèce, l'accord du 15 juin 1999, conclu dans le cadre d'un plan social afin d'éviter des licenciements, prévoyait que la réduction du temps de travail de 39 heures à 35 heures n'entraînerait pas de réduction corrélative du salaire et qu'il en résulterait une augmentation du taux horaire de 11,43 %. Cette augmentation du taux horaire était destinée à compenser la baisse du salaire de base qui, à défaut, aurait résulté, pour les salariés, de la réduction de leur temps de travail : les sommes versées par ce biais aux salariés avaient le caractère de dommages-intérêts et, ayant été versées avant le 1er janvier 2006, devaient être exclues de l'assiette des cotisations.
La cour d'appel avait décidé, au contraire, que les sommes versées aux salariés n'étaient pas destinées à compenser un préjudice induit par la réduction du temps de travail. De plus, ces sommes avaient été versées par le biais d'une hausse du taux horaire et non par la formule de "l'allocation d'une prime indemnitaire" ou "de maintien du salaire à caractère résorbable". Enfin, pour considérer que les sommes versées aux salariés ne pouvaient avoir un caractère indemnitaire, les juges du fond ont relevé que, dans l'arrêt du 20 janvier 2004 (Cass. civ. 2, 20 janvier 2004, n° 02-30.950, préc.), le litige portait sur des sommes versées aux salariés en application d'un accord d'entreprise conclu au titre du volet défensif de la loi "Robien", tandis que l'accord du 15 juin 1999, ayant décidé la réduction du temps de travail au sein de la société, était un accord sui generis échappant à toute disposition législative ou réglementaire.
L'analyse de la cour d'appel est confirmée par la Cour de cassation par l'arrêt rapporté : il résulte de l'article L. 242-1, alinéa 1er, du Code de la Sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur avant la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, que sont soumises à cotisations toutes les sommes versées aux salariés en contrepartie ou à l'occasion du travail, y compris les sommes compensant les pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail. Peu importe le caractère prioritaire, ou non, de l'objectif d'éviter des licenciements, le recours à une hausse du taux horaire ou à des versements à plus longue échéance de la compensation des pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail ou enfin, la présence ou l'absence de mention expresse du caractère indemnitaire des sommes litigieuses.
- Date d'effet de la nature de salaire des indemnités compensatrices RTT par application de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005
La nouvelle nature juridique des indemnités compensatrices RTT est applicable aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier 2006 dans le cadre d'accords collectifs réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er octobre 1996. Selon les dispositions réglementaires prises en application de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2006 (7), la nouvelle disposition s'applique aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier 2006 -dans le cadre d'accords collectifs réduisant la durée du travail conclus à compter du 1er octobre 1996- sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des instances en cours à la date de la publication de la loi.
Lorsqu'un accord de réduction du temps de travail a été conclu antérieurement au 1er janvier 2006 (et à compter du 1er octobre 1996), les sommes versées postérieurement au 1er janvier 2006 doivent être soumises aux cotisations et contributions sociales quelle qu'ait pu être la pratique retenue antérieurement par l'employeur y compris dans l'hypothèse où une décision de justice est venue entériner cette pratique.
Les deux réserves, qui tendaient à limiter la portée rétroactive du texte (sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des instances en cours à la date de la publication de la loi.), retenue dans la première version du projet de loi, ont été maintenues dans la rédaction du texte. Elles n'apportent, toutefois, aucune restriction à la portée de la nouvelle disposition qui reconnaît la nature de salaire aux compensations salariales versées à compter du 1er janvier 2006. Les décisions de justice définitives, rendues ou à venir dans le cadre d'instances en cours au 20 décembre 2005, ne peuvent concerner par hypothèse que des périodes antérieures à l'application du nouveau texte. Or, une décision de justice n'est applicable qu'aux seuls éléments -période et sommes- objets du litige, soumis à l'appréciation de la juridiction. Par conséquent, la nouvelle loi s'applique aux compensations salariales versées postérieurement au 1er janvier 2006, y compris lorsque le cotisant bénéficie, au titre d'une période antérieure, d'une décision favorable devenue définitive.
Or, la Cour de cassation paraît donner une interprétation contra legem à la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, puisqu'elle décide, par l'arrêt rapporté, qu'il résulte de l'article L. 242-1, alinéa 1er, du Code de la Sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur avant la loi n° 2005 1579 du 19 décembre 2005, que sont soumises à cotisations toutes les sommes versées aux salariés en contrepartie ou à l'occasion du travail, y compris les sommes compensant les pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail. La lecture de l'article L. 242-1, alinéa 1er, du Code de la Sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur avant la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, est personnelle à la Cour de cassation, car cet article ne mentionne, à aucun moment, l'indemnité compensatrice RTT (qui aurait donc vocation à être assujetti aux cotisations de Sécurité sociale). Par l'arrêt rapporté, la Cour de cassation donnerait, ainsi, une portée rétroactive à la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, laquelle avait, pourtant, expressément défini son champ d'application dans le temps et écarté, précisément, une telle rétroactivité.
Mais, l'interprétation par la Cour de cassation de la loi n° 2005-1579 peut-être envisagée sous un autre angle et l'on peut avancer qu'elle n'est pas, à proprement parler, contra legem, en ce sens que le législateur a défini le champ d'application de la loi n° 2005-1579 (la qualification de salaire aux indemnités compensatrices RTT s'applique à compter du 1er janvier 2006), mais le législateur n'exclut pas, expressis verbis, qu'une autre qualification soit retenue pour les indemnités compensatrices RTT versées antérieurement au 1er janvier 2006 : en d'autres termes, le juge étant seul compétent pour donner une qualification juridique à une indemnité, il lui appartient, souverainement, de décider si une indemnité compensatrice RTT revêt, dans l'espèce qui lui est soumis, la nature juridique de salaire ou de dommages et intérêts.
L'arrêt rapporté statue dans le même sens qu'un arrêt rendu en 2007 par la Cour de cassation, visant une indemnité compensatrice versée, cette fois, non pas en application de la loi "Aubry I", mais de la loi "Aubry II".
Décision
Cass. civ. 2, 19 juin 2008, n° 07-16.135, Société Omnium de gestion et de financement (OGF), FS-P+B (N° Lexbase : A2263D9P) Cassation CA Versailles, 5ème ch., sect. A, 3 avril 2007 Textes visés : loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005, de financement de la Sécurité sociale pour 2006 (N° Lexbase : L9963HDD) et CSS, art. L. 242-1 (N° Lexbase : L7529HBH) Mots-clefs : sommes destinées à compenser la perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail décidée afin d'éviter des licenciements ; nature juridique ; dommages et intérêts (non) ; salaire (oui) ; assujettissement aux cotisations sociales (oui). Lien base : (N° Lexbase : E3636AU9) |
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