La lettre juridique n°285 du 13 décembre 2007 : Internet - Bulletin d'actualités n° 10

[Panorama] Bulletin d'actualités Clifford Chance - Département Communication Média & Technologies - Novembre 2007

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[Panorama] Bulletin d'actualités Clifford Chance - Département Communication Média & Technologies - Novembre 2007. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3209575-panoramabulletindactualitesbcliffordchancebdepartementcommunicationmediaamptechnologiesn
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le 07 Octobre 2010

Tous les mois, Marc d'Haultfoeuille, avocat associé chez Clifford Chance, vous propose de retrouver l'actualité juridique en matière de Communication Média & Technologies. Seront abordés, ce mois ci, l'exclusion du champ d'application de l'article L. 131-5 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3388ADT) de l'utilisation à des fins publicitaires d'oeuvres musicales faisant l'objet d'un contrat de cession du droit d'exploitation ; la reproduction, sans autorisation, d'une oeuvre protégée sur la page de couverture d'un magazine d'information, dépassant le cadre du droit à l'information et constituant un acte de contrefaçon ; l'interconnexion des fichiers nationaux d'informations financières concernant les sociétés cotées en bourse par la mise en place d'un réseau électronique ; les modalités du droit de réponse en ligne ; et, enfin, la condamnation d'un hébergeur à la suite de la violation du droit moral des auteurs d'une oeuvre en raison des conditions de visualisation qu'il offre.

I - Droits d'auteurs

  • Par un arrêt du 14 juin 2007, la première chambre civile de la Cour de cassation refuse d'appliquer l'article L. 131-5 du Code de la propriété intellectuelle à une oeuvre musicale exploitée dans un cadre publicitaire au motif qu'une telle exploitation n'engendre aucun "produit" : Cass. civ. 1, 14 juin 2007, n° 06-15.863, M. Philippe Mallier, F-P+B (N° Lexbase : A7966DWX)

Faits :

Le 28 mai 1996, la société Bouygues Télécom a passé commande auprès de Messieurs X et Y d'une oeuvre musicale originale, moyennant le paiement d'une somme fixe au titre de la création et de la réalisation de l'oeuvre et d'une somme forfaitaire versée par année d'exploitation. Par actes du 18 mars et du 8 avril 2002, Messieurs X et Y ont assigné la société Bouygues Télécom afin d'obtenir une révision de ce forfait annuel, sollicitant une augmentation du montant forfaitaire de 50 000 francs (environ 7 622 euros) à 900 000 euros par année d'exploitation avec une augmentation de 10 % par année d'exploitation supplémentaire.

La cour d'appel de Versailles les a déboutés de leur action en révision par un arrêt du 8 décembre 2005. Selon la cour, la rémunération forfaitaire de la cession des droits sur l'oeuvre musicale à la société Bouygues Télécom ne pouvait être révisée au motif "qu'étant publicitaire, elle ne rapportait aucun produit".

Messieurs X et Y se sont alors pourvus en cassation au motif que l'oeuvre musicale pouvait engendrer des profits indirects car elle participait à la popularité de la société Bouygues Télécom auprès du public et au succès de l'opération publicitaire. A ce titre, ils soutenaient que la situation entrait alors dans le champ d'application de l'article L. 131-5 du Code de propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3388ADT), qui prévoit une révision des conditions de prix d'un contrat de cession d'exploitation d'une oeuvre en cas de préjudice de plus des 7/12èmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l'oeuvre.

Décision :

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par Messieurs X et Y.

Elle relève, dans un premier temps, que l'oeuvre musicale n'est utilisée que de façon accessoire par la société Bouygues Télécom en tant qu'identifiant sonore pour son réseau de téléphonie mobile.

Dans un second temps, elle approuve le raisonnement de la cour d'appel selon lequel une telle utilisation de l'oeuvre musicale "n'engendrait aucun produit au profit de la société" Bouygues Télécom et, par conséquent, "le forfait en contrepartie duquel l'oeuvre avait été cédée n'était pas soumis à révision à défaut de remplir les conditions requises par l'article L. 131-5" du Code de la propriété intellectuelle.

Commentaire :

Cette décision tend à exclure du champ d'application de l'article L. 131-5 du Code de la propriété intellectuelle l'utilisation à des fins publicitaires d'oeuvres musicales faisant l'objet d'un contrat de cession du droit d'exploitation.

L'article L. 135-1 dispose, en effet, que "en cas de cession du droit d'exploitation, lorsque l'auteur aura subi un préjudice de plus de sept douzièmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l'oeuvre, il pourra provoquer la révision des conditions de prix du contrat".

Cette demande de révision suppose que plusieurs conditions soient réunies.

Tout d'abord, l'oeuvre doit avoir été cédée moyennant une rémunération forfaitaire, ce qui était le cas en l'espèce.

En outre, il faut une lésion ou une prévision insuffisante des produits de l'oeuvre.

Or, en l'espèce, la cour d'appel et la Cour de cassation ont considéré que l'exploitation de l'oeuvre musicale dans un cadre publicitaire ne générait aucun produit puisqu'elle n'était utilisée que de façon accessoire en tant qu'identifiant sonore. Ainsi, l'argumentation de Messieurs X et Y tendant à démontrer que l'exploitation de l'oeuvre musicale engendrait un produit indirect n'a pas été retenue.

Par conséquent, le régime de la révision du prix pour prévision insuffisante exige comme condition sine qua non que le produit de l'oeuvre puisse être quantifié, ce qui semble impossible pour la Cour de cassation et la cour d'appel lorsque l'oeuvre est exploitée de manière accessoire dans une publicité.

Cependant, dans un arrêt du 9 juin 1986, la cour d'appel de Versailles avait jugé que l'action en rescision pour lésion visée à l'article 37 de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 (devenu, C. prop. Intell., art. L. 131-5) n'était pas exclue dans le domaine publicitaire et "qu'il importait de rechercher, par référence aux usages professionnels et en fonction des modalités d'exploitation de l'oeuvre que l'auteur avait autorisées, si un préjudice de plus des 7/12èmes avait été subi".

  • Dans un arrêt en date du 2 octobre 2007, la Cour de cassation a considéré que la reproduction, sans autorisation, d'une oeuvre protégée sur la page de couverture d'un magazine d'information dépasse le cadre du droit à l'information et constitue un acte de contrefaçon : Cass. civ. 1, 2 octobre 2007, n° 05-14.928, Société Hachette Filipacchi associés (HFA), FS-D (N° Lexbase : A6509DYQ)

Faits :

Le magazine d'information mensuel "Onze Mondial" a illustré la page de couverture du numéro de juillet 1998 avec un photomontage reproduisant le trophée de la Coupe du monde de football, entouré de footballeurs célèbres qui avaient les yeux levés vers ce trophée. Le trophée de la Coupe du monde de football étant une oeuvre artistique dont les droits ont été cédés à la Fédération Internationale de Football Association (la "FIFA"), celle-ci a assigné la société Hachette Filipacchi Associés (la "société HFA") en réparation du préjudice subi au motif que cette reproduction non autorisée constituait un acte de contrefaçon.

La cour d'appel de Paris a considéré, dans un arrêt du 9 mars 2005, que la reproduction du trophée au sein du photomontage était illicite et constituait dès lors un acte de contrefaçon (CA Paris, 4ème ch., sect. A, 9 mars 2005, n° 03/21924 N° Lexbase : A4003DHQ).

La société HFA s'est, ainsi, pourvue en cassation, invoquant le fait que la reproduction photographique du trophée était inséparable de l'information du public sur le déroulement de cet événement d'importance majeure. La société HFA cherchait à démontrer qu'en refusant de considérer que la reproduction du trophée était justifiée par le droit à l'information du public, la cour d'appel avait violé l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L4743AQQ) et l'article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3360ADS).

Décision :

La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la société HFA en énonçant, tout d'abord, que "le droit à l'information du public consacré par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales trouve ses limites dans le respect des autres droits identiquement protégés ; qu'il en est ainsi des droits de propriété intellectuelle".

Selon la Cour de cassation, le magazine "Onze Mondial", dans lequel figure la reproduction du trophée de la Coupe du monde n'est pas un document d'information puisqu'il est intégré dans un photomontage et qu'il excède la simple relation de l'événement d'actualité concerné. Ainsi, conclut la Cour, "cette reproduction relève de l'exploitation de l'oeuvre laquelle n'ayant pas été autorisée constitue un acte de contrefaçon".

Par conséquent, la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la société HFA et confirme l'arrêt de la cour d'appel de Paris.

Commentaire :

Par cet arrêt, les juges ont, à nouveau, délimité l'étendue du droit à l'information, consacré par l'article 10 de la CESDH.

La Cour rappelle que le droit à l'information du public consacré à l'article 10 précité trouve ses limites dans les droits de propriété intellectuelle. Cette interprétation est conforme à l'article qui pose le principe du droit à la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées (alinéa 1) sous réserve, notamment, de "la protection de la réputation ou des droits d'autrui" (alinéa 2).

En l'espèce, la Cour de cassation a considéré que la reproduction du trophée de la Coupe du monde dans un photomontage n'avait pas pour but de relater l'événement d'actualité, mais d'illustrer, de façon symbolique, les aspirations des participants à l'événement au sein d'un article qui le présente.

Par conséquent, la Cour de cassation a fait une application stricte de la notion d'actualité pour décider que la société HFA avait commis un acte de contrefaçon en reproduisant une oeuvre protégée sans autorisation de la FIFA, titulaire des droits d'auteur.

La Cour de cassation avait déjà adopté la même position sur la notion d'actualité dans un arrêt du 5 juillet 2005 relatif au dopage dans le milieu cycliste (Cass. civ. 1, 5 juillet 2005, n° 03-13.913, FS-P+B N° Lexbase : A8821DIK).

II - Informatique

  • Dans une Recommandation du 11 octobre 2007 n° 2007/657/CE, la Commission encourage les Etats membres à interconnecter les fichiers nationaux d'informations financières concernant les sociétés cotées en bourse par la mise en place d'un réseau électronique

Contenu :

La Recommandation n° 2007/657/CE de la Commission européenne a pour objet d'encourager les Etats membres à veiller à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour interconnecter efficacement les mécanismes nationaux de stockage des informations réglementées relatives aux acteurs des marchés financiers. Elle vient compléter le système prévu par la Directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2004, sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé (N° Lexbase : L5206GUD).

La Commission propose les mesures suivantes pour garantir à ce service une qualité et une accessibilité optimale :

- Conclusion d'un accord de gestion : les Etats membres devraient mandater une autorité compétente pour préparer un accord relatif à la gestion du réseau électronique communautaire, cet accord devant nécessairement traiter plusieurs points précisés par la Recommandation (création d'une plate-forme réseau, conditions de participation au réseau, organe chargé de la gestion quotidienne du réseau, conditions de financement du réseau, etc.).

-Tarification : les mécanismes de stockage devraient être libres de définir leurs propres tarifications. Toutefois, la Commission distingue l'accès aux informations financières publiées conformément à des obligations légales, qui devrait être gratuit pendant une durée limitée, et l'accès aux services à valeur ajoutée dont la tarification devrait être librement déterminée par les mécanismes de stockage.

- Normes de qualité minimales : la Recommandation précise les normes minimales que les mécanismes de stockage intervenant dans le réseau électronique devront respecter afin d'assurer un fonctionnement harmonisé. En outre, des mécanismes de sécurité devront être mis en oeuvre par les mécanismes de stockage afin de garantir la sécurité des communications (les moyens de communication devant cependant rester aisément accessibles, communément utilisés et largement disponibles à bas prix), l'intégrité des informations réglementées stockées, la validation des informations (garantir leur conformité aux normes et aux formats en vigueur), la fiabilité de l'accès aux services, ainsi que les éventuelles dérogations applicables aux dépôts d'informations non-conformes et la bonne tenue du système de sauvegarde.

- Certitude quant à la source de l'information : les mécanismes de stockage devraient, par ailleurs, disposer de systèmes sûrs permettant de contrôler la fiabilité de la source des informations (directement de l'entité à laquelle incombe l'obligation de dépôt ou d'une personne habilitée à remplir cette obligation pour le compte de celle-ci), d'accuser électroniquement réception des documents et de comporter une fonction de "non répudiation". A cet égard, les systèmes de stockage devraient, également, mettre en place des dispositifs de sécurité permettant d'attester de la validité de l'expéditeur (signature numérique, code d'accès ou toute autre mesure de sécurité).

- Fiabilité d'accès pour les utilisateurs finals : les mécanismes de stockage devraient être en mesure de garantir l'absence de risque de corruption ou de modification des données stockées et être en mesure d'en identifier toute altération ou modification. Ils devraient pouvoir enregistrer automatiquement les dépôts ainsi que leur date et horaire, tout en permettant d'utiliser des technologies de traitement automatique de bout en bout (en imposant pour cela des formats et des modèles de dépôt prédéfinis).

Les mécanismes devraient disposer de toutes les versions linguistiques disponibles des informations ayant fait l'objet du dépôt. Les fonctionnalités de recherche mises en place devraient être disponibles dans la langue officielle de l'Etat membre ainsi que dans une autre langue communément utilisée dans l'univers de la finance internationale.

Une assistance de service à disposition des utilisateurs devrait également être mise en place (le degré d'assistance restant à définir au niveau national).

Les informations doivent être conservées dans un format permettant aux utilisateurs de les visualiser, les télécharger ou les imprimer en totalité.

Commentaire :

Les recommandations de la Commission n'ont pas de force obligatoire. Elles expriment l'opinion de la Commission européenne et incitent les Etats membres à adopter un comportement déterminé. En l'espèce, cette Recommandation vient compléter la Directive 2004/109/CE (transposée par la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005, pour la confiance et la modernisation de l'économie N° Lexbase : L5001HGC) qui imposait de laisser à la disposition des participants au marché financier les informations financières réglementaires dans des fichiers centraux désignés par les Etats membres, par la mise en place d'un réseau électronique interconnectant les fichiers nationaux d'informations financières concernant les sociétés cotées en bourse. Le but de ces mesures est de faciliter l'accès des investisseurs aux données historiques sur les performances des entreprises et leur position financière.

Ce n'est donc pas un système de stockage au niveau communautaire qui est souhaité, mais un réseau électronique reliant les différents systèmes de stockage des Etats membres. Le but de ce procédé est de promouvoir l'intégration des marchés de capitaux européens, en facilitant l'accès du public aux informations à publier en vertu des Directives 2003/6/CE (N° Lexbase : L8022BBQ transposée par les lois n° 2005-811 du 20 juillet 2005, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des marchés financiers N° Lexbase : L5010HGN et n° 2003-710 du 1er août 2003, d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine N° Lexbase : L3558BLD) et 2003/71/CE (N° Lexbase : L4456DMY transposée par la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005).

Le Comité européen des régulateurs de marchés de valeurs mobilières ("CERVM") se voit, également, attribuer un rôle majeur puisqu'il est chargé de gérer, avec les autorités instituées par les Etats membres, la mise en place de l'accord précisant les conditions clés pour la création, le fonctionnement et le financement du réseau électronique. Ce comité sera, également, chargé de désigner un organe en charge de la gestion quotidienne du réseau.

La volonté de la Commission européenne est de garantir un accès simple, peu onéreux et sécurisé aux informations sur l'ensemble du territoire communautaire tout en s'assurant que ces informations sont fiables, en raison, notamment, de leur sensibilité et des enjeux financiers qu'elles impliquent. Bien que cette Recommandation n'ait aucune valeur obligatoire pour les Etats membres, le respect de celle-ci apparaît nécessaire pour harmoniser les systèmes de stockage des informations relatives aux sociétés cotées au niveau communautaire.

III - Internet

  • Le décret n° 2007-1527 du 24 octobre 2007, pris en application de la loi n° 2004-575 sur la confiance dans l'économie numérique en date du 21 juin 2004, précise les modalités d'exercice du droit de réponse en ligne (N° Lexbase : L7717HYH)

Contenu :

Le décret n° 2007-1527 du 24 octobre 2007 précise les modalités d'exercice du droit de réponse applicable aux services de communication au public en ligne lorsque le service n'offre aucun moyen à un utilisateur d'émettre des observations sur un message écrit, audio ou graphique le mettant en cause, mentionnée au IV de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 (loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique [LXB= L2600DZC]).

La demande d'exercice du droit de réponse est adressée au directeur de la publication. Si celui-ci n'est pas connu, elle est envoyée à l'hébergeur qui doit la lui transmettre dans un délai de vingt-quatre heures sous peine d'amende. Le moyen utilisé pour l'envoi doit permettre de garantir l'identité du demandeur et la réception de la demande. En effet, dans un délai de trois jours suivant la réception de la demande, le destinataire doit indiquer au demandeur la suite qu'il entend donner à sa demande ou les mesures mises en oeuvre à cet effet.

En outre, la demande doit indiquer les références du message, ses conditions d'accès et, s'il est connu, le nom de son auteur. Elle doit préciser si le message est constitué de textes, de sons ou d'images et mentionner les passages sur lesquels portent les commentaires qu'il suscite. Elle doit comporter, enfin, les commentaires du demandeur sur le message ou, à défaut, les éléments du message dont il demande la vérification ou la suppression.

Par ailleurs, la réponse au message prend toujours la forme d'un texte même si le message dont elle fait l'objet est constitué de sons ou d'images. Sa longueur ne peut dépasser celle du message ou, si ce dernier n'est pas composé de caractères alphanumériques, celle de sa description sous forme d'un texte. En tout état de cause, la taille de la réponse ne peut excéder 200 lignes.

Cette réponse est, ensuite, publiée par le directeur de la publication sous la forme d'un droit de réponse dans la publication litigieuse. Elle doit être mise à disposition du public aussi longtemps que le message l'a été, étant précisé que cette durée ne peut être inférieure à un jour.

Enfin, elle est insérée à la suite du message. A titre d'alternative, il est possible d'insérer un lien hypertexte dans le message renvoyant vers la réponse. Si le message dont elle fait l'objet apparaît dans un courrier électronique non-quotidien, elle doit être publiée dans l'envoi qui suit la réception de la demande. Lorsque le message n'est plus mis à la disposition du public, la réponse doit comporter sa référence, sa date et sa durée de mise à disposition.

Commentaire :

Ce décret contient essentiellement des éléments procéduraux. Il concerne les éditeurs de sites internet qui n'offrent pas aux utilisateurs de moyens de réagir directement à un message ainsi qu'aux hébergeurs de pages personnelles. Par conséquent, les éditeurs de blogs ou d'articles qui proposent aux internautes d'insérer directement leurs commentaires sous le message appelant une réaction de leur part ne sont a priori pas concernés par cette nouvelle procédure.

Par ailleurs, le décret met en place un système de vérification de l'identité du demandeur. Le but est d'éviter qu'une personne n'usurpe l'identité d'une autre à des fins déloyales. C'est pourquoi la demande d'exercice du droit de réponse doit être envoyée par courrier recommandé avec avis de réception ou par tout moyen garantissant l'identité du demandeur, tel qu'un courriel signé numériquement.

Lorsque la demande émane d'une personne morale, la jurisprudence constante considère que seuls les dirigeants ou leurs délégués sont autorisés à l'émettre. A ce titre, ils doivent justifier de leur pouvoir. La Cour de cassation a ainsi considéré, dans un arrêt du 9 mai 1990 (Cass. crim., 9 mai 1990, n° 88-83414, Bodin Pierre et autres, publié N° Lexbase : A7727CGB, Bull. crim. n° 178), qu'un avocat chargé d'exercer le droit de réponse d'une personne morale devait accompagner sa demande d'un mandat lui conférant expressément ce pouvoir. Le dirigeant, quant à lui, peut justifier de son pouvoir par la production des statuts de la société ou de tout document lui permettant de justifier de son pouvoir.

Selon l'article 6 du décret, si le directeur de la publication est inconnu, comme souvent en matière de pages personnelles, l'hébergeur est tenu de lui adresser la demande dans un délai de trois jours. S'il ne se conforme pas à ce délai, il est passible d'une amende de 750 euros, s'il est une personne physique, et de 3 750 euros, s'il est une personne morale. Enfin, le directeur de la publication est tenu d'insérer les réponses dans un délai de trois jours suivant leur réception. S'il ne s'y conforme pas, il est passible d'une amende pouvant atteindre 3 750 euros. Cette dernière peine ne s'applique qu'aux personnes physiques.

  • Par un jugement en date du 19 octobre 2007, le tribunal de grande instance de Paris a condamné Google en sa qualité d'hébergeur du site Google Video du fait de ne pas avoir mis en oeuvre les moyens nécessaires pour éviter la remise en ligne d'un documentaire protégé par le droit d'auteur : TGI Paris, 19 octobre 2007, n° RG 06/11874, SARL Zadig Productions c/ Société Google INC (N° Lexbase : A5562DZZ)

Faits :

Jean-Robert V. et Mathieu V. sont les auteurs du film documentaire Tranquility bay, produit par la société Zadig Productions. Après une première diffusion au festival international de programmes audiovisuels de Biarritz, la version finale du film destinée à une exploitation internationale a été diffusée en France par une chaîne de télévision française le 11 mai 2006.

Le 12 avril 2006, le producteur avait été averti du fait que le documentaire était disponible sur le site Google Video exploité par la société Google Inc. sans son autorisation. Après mise en demeure adressée à Google, le film a été remis en ligne par différents internautes et à plusieurs reprises. Ces nouvelles diffusions ont fait l'objet d'une nouvelle dénonciation par le producteur auprès de Google qui a systématiquement supprimé les contenus litigieux.

Néanmoins, le producteur reprochait à Google de ne pas avoir mis en oeuvre les moyens nécessaires pour empêcher que le documentaire soit à nouveau diffusé sur le site internet de Google Video.

Jean-Robert V. et Matthieu V., en tant qu'auteurs, considéraient, par ailleurs, que la diffusion en streaming du documentaire avait porté atteinte à leur droit moral et ont demandé le paiement de dommages et intérêts aux motifs que :

- la qualité de visualisation était médiocre au moyen d'une fenêtre de visualisation de taille réduite et la durée initiale de l'oeuvre avait été réduite de manière significative, passant de 80 à 53 minutes (atteinte à l'intégrité de l'oeuvre) ;
- le nom des co-auteurs n'était pas mentionné (atteinte au droit de paternité des auteurs sur l'oeuvre) ;
- la mise en ligne de la version finale sur Google video avait eu lieu avant sa diffusion par la chaîne de télévision française (atteinte au droit de divulgation de l'oeuvre).

La société Google Inc., appuyée par l'AFA, soutenait qu'elle ne faisait qu'exercer une activité d'hébergement, les sons et images présentés sur son site étant fournis par les utilisateurs et considérait, en tant qu'hébergeur, avoir agi rapidement pour bloquer l'accès au documentaire après avoir été informé de chaque nouvelle mise en ligne.

Décision :

Par ce jugement, le tribunal de grande instance de Paris n'a pas retenu la qualité d'éditeur et a considéré que Google avait la qualité d'hébergeur.

En effet, selon le tribunal, "le fait pour la société défenderesse d'offrir aux utilisateurs de son service Google Video une architecture et les moyens techniques permettant une classification des contenus, au demeurant nécessaire à leur accessibilité par le public, ne permet pas de la qualifier d'éditeur de contenu dès lors qu'il est constant que lesdits contenus sont fournis par les utilisateurs eux-mêmes, situation qui distingue fondamentalement le prestataire technique de l'éditeur, lequel, par essence même, est personnellement à l'origine de la diffusion et engage à ce titre sa responsabilité".

Le tribunal a rejeté la responsabilité de Google pour la première mise en ligne du documentaire dans la mesure où Google avait rempli ses obligations d'hébergeur en retirant promptement le film contrefaisant. Néanmoins, le tribunal a retenu la responsabilité de Google pour les mises en ligne ultérieures du film contrefaisant car "informé du caractère illicite du contenu en cause par la première notification, il lui appartenait de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires en vue d'éviter une nouvelle diffusion". Google aurait dû développer des solutions techniques "afin de prévenir et à tout le moins de limiter l'atteinte aux droits des tiers".

En outre, le tribunal a condamné Google en violation du droit moral des auteurs du film. De fait, il relève que les noms des auteurs n'étaient pas mentionnés et que la qualité de visualisation de la vidéo était très mauvaise, ce qui constituait une atteinte au droit à la paternité et à l'intégrité de l'oeuvre. En revanche, le tribunal a rejeté l'argumentation relative au droit de divulgation, l'oeuvre ayant été présentée au public à Biarritz avant sa mise en ligne.

En conséquence, le tribunal a condamné Google au paiement de la somme de 25 000 euros au producteur en réparation de l'atteinte portée aux droits patrimoniaux et de 5 000 euros à chacun des coauteurs en réparation de la violation de leurs droits moraux.

Commentaire :

Sur la qualité d'hébergeur

Par cette décision, le tribunal de grande instance de Paris a confirmé la jurisprudence "Dailymotion" rendue par le même tribunal le 13 juillet 2007 (TGI Paris, 13 juillet 2007, n° RG 07/05198, Monsieur Christian Carion c/ SA Dailymotion N° Lexbase : A5139DXM et lire, Bulletin d'actualités Clifford Chance - Département Communication Média & Technologies - Juillet 2007, Lexbase Hebdo n° 272 du 13 septembre 2007 - édition privée générale N° Lexbase : N2734BCA). Il a considéré que Google, en tant qu'hébergeur des contenus illicites, n'était pas tenu à une obligation générale de surveillance des contenus. Il est à noter que la décision "Dailymotion" avait été rendue par les mêmes juges.

Le tribunal a retenu la qualité d'hébergeur de Google dans la mesure où, selon les juges, les contenus sont fournis non pas par Google mais par les utilisateurs de Google Video eux-mêmes et a rappelé qu'un éditeur de contenu est celui qui est personnellement à l'origine de la diffusion des contenus.

Sur les obligations de l'hébergeur

Le tribunal a retenu la responsabilité de Google dans la mesure où, selon les juges, il lui appartenait de "mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires en vue d'éviter une nouvelle diffusion" et ce dès la première notification.

Il résulte de la jurisprudence du tribunal de grande instance de Paris que les hébergeurs de sites, ayant des activités similaires à celles de la société Dailymotion ou de Google, devraient prendre des mesures techniques destinées à bloquer l'accès et/ou à retirer les contenus illicites d'un site internet dès la première mise en demeure de le faire.

Par cette décision, le tribunal de grande instance de Paris confirme sa jurisprudence.

Enfin, pour la première fois, un hébergeur est condamné à la suite de la violation du droit moral des auteurs d'une oeuvre en raison des conditions de visualisation de l'oeuvre qu'il offre, ces conditions entraînant une violation des droits de paternité et d'intégrité de l'oeuvre.

Marc d'Haultfoeuille
Avocat associé
Département Communication Média & Technologies
Cabinet Clifford Chance

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