La lettre juridique n°215 du 18 mai 2006 : Urbanisme

[Textes] L'application de la nouvelle procédure d'évaluation environnementale aux SCOT et aux PLU

Réf. : Circulaire UHC/PA2 n° 2006-16 du 6 mars 2006, relative à l'évaluation des incidences de certains documents d'urbanisme sur l'environnement (N° Lexbase : L5648HIZ)

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le 23 Octobre 2014

Initialement oublié des champs de réflexion du développement économique des territoires, l'environnement a, ensuite, longtemps été perçu uniquement comme une contrainte pour l'aménagement. Cette perception est encore, pour beaucoup, bien réelle. Pourtant, la prise en compte des préoccupations d'environnement par le droit français de l'urbanisme est relativement ancienne. Le texte fondateur est la loi du 10 juillet 1976, relative à la protection de la nature (1) dont l'article 2 dispose que "les travaux et projets d'aménagements qui sont entrepris par une collectivité publique ou qui nécessitent une autorisation ou une décision d'approbation ainsi que les documents d'urbanisme doivent respecter les préoccupations d'environnement". Afin de mettre concrètement en oeuvre l'obligation de respect de l'environnement, le législateur, s'inspirant de la législation américaine, a entendu soumettre un certain nombre d'aménagements, d'ouvrages et de travaux à une évaluation préalable de leurs effets sur l'environnement par le biais d'une procédure nouvelle : l'étude d'impact. C'était le temps où le droit français était assez innovant, avant que les instances communautaires ne se saisissent de la question de l'évaluation environnementale. Le 21 juillet 2001, le Journal officiel des Communautés européennes (JOCE) publiait le texte de la Directive 2001/42 (2) attendue depuis plusieurs années. Cette Directive impose aux pays membres de légiférer pour que, avant leur adoption, certains plans et programmes susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, soient soumis à une évaluation environnementale. Cette évaluation étant justement élaborée selon le principe de l'étude d'impact. La Directive devient ainsi un outil de simplification et de rationalisation des décisions en rendant homogène l'évaluation des incidences environnementales des plans et programmes, à un stade où des inflexions sont encore possibles, c'est-à-dire dès la planification. C'est en respectant ces objectifs que la France a transposé la Directive par l'ordonnance n° 2004-489 du 3 juin 2004 (3) et défini les conditions et la procédure de l'évaluation environnementale pour les documents d'urbanisme. Le décret d'application n° 2005-608 du 27 mai 2005 (4) est venu modifier, en ce sens, le Code de l'urbanisme, la circulaire n° 2006-16 du 6 mars 2006 (5) venant préciser les conséquences de la soumission des PLU (plans locaux d'urbanisme) et SCOT (schémas de cohérence territoriale) à la nouvelle procédure d'évaluation départementale. Si la procédure d'évaluation départementale est un moyen d'enrichir et d'améliorer les projets constitutifs des SCOT et des PLU, de nouvelles obligations s'imposent aux collectivités territoriales.

Si la loi SRU du 13 décembre 2000 (6) a renforcé le poids des contraintes environnementales et étendu les obligations de consultation du public en ce qui concerne les principaux documents de planification urbaine, l'ampleur des changements à venir dans les pratiques des collectivités publiques et des aménageurs est considérable car le champ d'application de la procédure apparaît comme particulièrement large (I). De même, la procédure modifie profondément le contenu du rapport de présentation des documents concernés (II).

I. La largesse du champ d'application de la nouvelle procédure d'évaluation environnementale

Le champ d'application de la procédure d'évaluation se matérialise, avant tout, à travers les documents d'urbanisme devant faire l'objet de l'évaluation (A) ; certains se trouvent, cependant, dispensés de cette obligation (B).

A. Les documents devant faire l'objet d'une évaluation départementale

La nouvelle procédure d'évaluation environnementale issue de la Directive n'a pas nécessairement d'incidence sur les études environnementales déjà exigées par la loi SRU et n'entraîne donc pas, systématiquement, la réalisation d'études complémentaires pour l'établissement des documents d'urbanisme concernés.

Le degré d'analyse est fonction de la complexité et de la sensibilité environnementale du territoire concerné et de l'importance des projets que le document permet. Cette analyse peut reprendre les études environnementales déjà réalisées à l'occasion de l'établissement d'autres documents (7), comme celles réalisées à l'occasion de projets plus ponctuels (8).

La procédure d'évaluation environnementale s'applique, en premier lieu, aux SCOT dont l'échelle territoriale est la plus adaptée pour analyser les choix et les orientations d'aménagement au regard des exigences environnementales. Il permet de mutualiser les études et de prendre en compte des phénomènes et des thèmes (tels que les milieux naturels, l'eau, les risques naturels ou technologiques, le traitement des déchets...), qui dépassent souvent le territoire communal.

Elle s'applique, en second lieu, à certains PLU susceptibles d'avoir une incidence notable sur l'environnement (9). Il s'agit, d'abord, des PLU qui permettent la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements qui doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences sur un site Natura 2000 (10). Sont concernés les projets situés soit à l'intérieur du site, soit à l'extérieur du site, mais susceptibles d'avoir des incidences sur celui-ci. Ensuite, sont concernés les PLU de territoires non couverts par un SCOT ayant fait l'objet d'une évaluation environnementale. Doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale, les PLU dans les cas d'une commune d'une superficie supérieure ou égale à 5 000 hectares et comprenant une population supérieure ou égale à 10 000 habitants ; de la création, dans des secteurs agricoles ou naturels, de zones U ou AU d'une superficie totale supérieure à 200 hectares ou à 50 hectares pour les communes littorales.

B. Les procédures dispensées de l'évaluation départementale

L'obligation de réaliser une évaluation environnementale dans les conditions prévues par le décret ne s'impose pas aux documents d'urbanisme dont l'élaboration ou la révision a été prescrite avant le 21 juillet 2004, à condition que l'enquête publique ait été ouverte avant le 1er février 2006 ou que leur approbation soit intervenue avant le 21 juillet 2006.

S'agissant des PLU, la date à prendre en compte est celle de la délibération qui prescrit l'élaboration ou la révision du plan (11). En ce qui concerne l'élaboration des SCOT, la date à prendre en compte est celle de la délibération qui précise les modalités de la concertation (12) dans la mesure où il n'existe pas de délibération prescrivant l'élaboration du SCOT.

Certaines procédures sont dispensées de l'évaluation environnementale en vertu de l'article R. 121-16 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L9609G8E) à condition qu'elles n'aient pas pour objet d'autoriser la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements dont la réalisation est de nature à affecter de façon notable un site Natura 2000 (13).

Concernant les SCOT, ce sont les procédures de modification (C. urb., art. L. 122-13, al. 2 N° Lexbase : L7600DKP), les mises en compatibilité résultant de déclaration d'utilité publique ou de déclarations de projet (C. urb., art. L. 122-15 N° Lexbase : L2411ATH).

Concernant les PLU, ce sont aussi les modifications (sauf celles des PLU des communes situées en zone de montagne qui prévoient la réalisation d'unités touristiques nouvelles soumises à l'autorisation du préfet coordonnateur de massif) et les révisions simplifiées prévues à l'article L. 123-13, alinéa 8, du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L1945DKA) (sauf celles des PLU des communes situées en zone de montagne qui prévoient la réalisation d'unités touristiques nouvelles soumises à l'autorisation du préfet coordonnateur de massif et sauf celles qui créent, dans des secteurs agricoles ou naturels, des zones U ou AU d'une superficie supérieure à 200 hectares et, pour les communes littorales, d'une superficie supérieure à 50 hectares).

II. Le déroulement de la procédure d'évaluation environnementale

La procédure d'évaluation amène d'abord à modifier profondément le contenu des rapports de présentation des documents d'urbanisme concernés par cette procédure (A), l'Etat veillant à transmettre aux collectivités territoriales les nouvelles obligations qui s'imposent à elles (B).

A. La modification profonde du contenu des rapports de présentation des documents d'urbanisme

L'évaluation environnementale figure dans le rapport de présentation du document d'urbanisme. L'article R. 122-2 pour les SCOT (N° Lexbase : L9611G8H) et l'article R. 123-2-1 (N° Lexbase : L9586G8K) pour les PLU, soumis à la procédure d'évaluation environnementale, énumèrent les rubriques que doivent comporter les rapports de présentation de ces documents. Ils devront, en particulier, comporter les éléments suivants : une analyse de l'état initial de l'environnement et des perspectives de son évolution examinant, notamment, les perspectives d'évolution des zones susceptibles d'être touchées de manière notable par la mise en oeuvre du SCOT ou du PLU ; une analyse des incidences notables et prévisibles de la mise en oeuvre du SCOT ou du PLU sur l'environnement et leurs conséquences sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement sont à traiter de façon très attentive ; ou encore, une description de l'articulation du document (SCOT ou PLU) avec les autres documents d'urbanisme et les plans ou programmes soumis à évaluation environnementale en application du code de l'environnement, avec lesquels il doit être compatible ou qu'il doit prendre en considération.

Dans l'hypothèse où plusieurs variantes ont été envisagées pour établir le projet d'aménagement et de développement durable, les documents devront comporter une explication et une justification des choix retenus et des raisons pour lesquelles des projets alternatifs ont été écartés (14). Le rapport doit expliquer en quoi les choix retenus prennent en compte les objectifs de protection de l'environnement établis au niveau international, communautaire ou national.

De même et encore, les documents comporteront aussi une présentation des mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en oeuvre du document d'urbanisme sur l'environnement et le rappel que ce document fera l'objet d'une analyse des résultats de son application, notamment, en ce qui concerne l'environnement, au plus tard à l'expiration d'un délai de dix ans à compter de son approbation. Il convient d'abord de prévoir les mesures permettant d'éviter ou de réduire les conséquences dommageables sur l'environnement de la mise en oeuvre du document, le recours aux mesures compensatoires ne devant être que supplétif et non systématique. Les mesures compensatoires éventuelles peuvent résulter du projet lui-même. Elles ne peuvent être envisagées que dans les domaines que réglemente le document d'urbanisme, et non dans d'autres domaines, tels que la production agricole ou forestière.

Enfin, il faudra aussi un résumé non technique des éléments de l'évaluation environnementale et une description de la manière dont cette évaluation a été effectuée. Lors de l'enquête publique, le public pourra ainsi appréhender plus aisément la démarche d'évaluation environnementale.

B. L'intervention de l'Etat dans la procédure d'évaluation

L'Etat intervient d'abord au titre du porter à connaissance (PAC). Le préfet fournit obligatoirement aux communes ou à leurs groupements compétents les informations nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme, et notamment les études techniques dont dispose l'Etat en matière de prévention des risques et de protection de l'environnement (15). Il importe particulièrement que ce PAC soit complet et alimenté en continu. Concernant les PLU, le PAC devra lister clairement les cas qui relèvent de la procédure d'évaluation environnementale et préciser quelles conséquences concrètes en résultent pour les collectivités.

Au cours de l'élaboration du projet, la collectivité territoriale compétente pour élaborer le SCOT ou le PLU peut consulter le préfet sur le degré de précision des informations que doit contenir l'étude environnementale du rapport de présentation (16). Cette possibilité est offerte aux collectivités compétentes afin de les aider dans la réalisation de l'évaluation environnementale et d'améliorer le contenu de celle-ci. Elle est facultative.

De manière obligatoire, avant l'enquête publique sur le projet de SCOT ou de PLU, le préfet est saisi pour avis sur la qualité de l'évaluation environnementale contenue dans le rapport de présentation et sur la prise en compte de l'environnement par le projet de document d'urbanisme (17). Il s'agit d'un avis simple. Il est formulé de manière séparée de l'avis de l'Etat prévu aux articles L. 122-8 (N° Lexbase : L9621G8T) et L. 123-9 (N° Lexbase : L2921DZ9), qui n'est pas limité aux seules préoccupations d'environnement.

La consultation obligatoire du préfet est effectuée trois mois au plus tard avant l'ouverture de l'enquête publique. Dans la pratique, lors de l'élaboration ou de la révision d'un SCOT ou d'un PLU soumis à cette procédure, le préfet sera saisi sur le document arrêté. Dans les cas particuliers où cette procédure est exigée à l'occasion d'une modification, d'une mise en compatibilité ou d'une révision simplifiée où ne se rencontre pas la phase d'arrêt du projet, l'avis de l'autorité environnementale requis à ce titre fera l'objet d'une demande d'avis particulière.

L'avis est réputé favorable dans un délai de trois mois. Il est joint au dossier d'enquête publique. Il est préparé, sous l'autorité du préfet, par la direction régionale de l'environnement, en liaison avec les autres services de l'Etat compétents.

Christophe De Bernardinis
Maître de conférences à l'Université de Metz


(1) Loi n° 76-629 du 10 juillet 1976, relative à la protection de la nature (N° Lexbase : L4214HKB).
(2) Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001, relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement (N° Lexbase : L7717AUD).
(3) L'ordonnance n° 2004-489 du 3 juin 2004, portant transposition de la Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement (N° Lexbase : L2412DYY).
(4) Décret d'application n° 2005-608 du 27 mai 2005, relatif à l'évaluation des incidences des documents d'urbanisme sur l'environnement et modifiant le Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L7661G8A).
(5) Circulaire UHC/PA2 n° 2006-16 du 6 mars 2006 relative à l'évaluation des incidences de certains documents d'urbanisme sur l'environnement (N° Lexbase : L5648HIZ).
(6) Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbains (N° Lexbase : L9087ARY).
(7) Par exemple, un projet de PLU peut s'appuyer sur les études et les travaux réalisés à l'occasion d'un SCOT, d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, etc.
(8) Etude d'incidences sur un site Natura 2000 ou étude d'impact.
(9) L'article R. 121-14 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L9607G8C) précise quels sont les PLU concernés.
(10) C. env., art. L. 414-4 (N° Lexbase : L4329HBX).
(11) C. urb., art. L. 123-6 (N° Lexbase : L1948DKD) ou L. 123-13 (N° Lexbase : L1945DKA).
(12) C. urb., art. L. 122-4 (N° Lexbase : L7599DKN).
(13) C. env., art. L. 414-4 précité.
(14) Il n'est cependant pas nécessaire de développer tous les partis d'aménagement différents. Seuls les projets effectivement envisagés doivent être expliqués.
(15) C. urb., art. L. 121-2 (N° Lexbase : L8128GT9).
(16) C. urb., art. L. 121-12, alinéa 2 (N° Lexbase : L2937DZS).
(17) C. urb., art. L. 121-12 précité, alinéa 1er, et art. R. 121-15 (N° Lexbase : L9608G8D).

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