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N5323AIY
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Haute Alsace
le 07 Octobre 2010
1.1. Droits aux allocations servies par le régime d'assurance chômage
Le régime d'assurance chômage (convention 1er janv. 2004, régl. art. 12 N° Lexbase : L1601DPY ; C. trav., art. R. 351-1 N° Lexbase : L0253ADQ) a modifié en profondeur la durée de versement des allocations. Les durées d'indemnisation sont déterminées en fonction des périodes d'affiliation et de l'âge du salarié privé d'emploi à la date de la fin du contrat de travail (terme du préavis) retenue pour l'ouverture des droits.
Les durées d'indemnisations sont de :
- 213 jours lorsque le salarié privé d'emploi remplit la condition d'affiliation de 182 jours d'affiliation ou 910 heures de travail ;
-700 jours lorsque le salarié privé d'emploi remplit la condition d'affiliation de 426 jours d'affiliation ou 2 123 heures de travail ;
- 1 095 jours pour le salarié privé d'emploi âgé de 50 ans et plus lorsqu'il remplit la condition d'affiliation de 821 jours d'affiliation ou 4 095 heures de travail ;
- 1 277 jours pour le salarié privé d'emploi âgé de 57 ans et plus, lorsqu'il remplit la condition d'affiliation de 821 jours d'affiliation ou 4 095 heures de travail et justifie de 100 trimestres validés par l'assurance vieillesse.
Le pouvoir réglementaire a introduit une nouvelle règle, réduisant le droit des allocataires aux allocations chômage. En application de l'article R. 351-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0253ADQ), complété par un dernier alinéa introduit par le décret n° 2005-587 du 27 mai 2005 (N° Lexbase : L7716G8B), les durées de versement des allocations de chômage sont diminuées de la durée de la convention de reclassement personnalisé dont l'intéressé a bénéficié à la fin du même contrat de travail (en application de l'article L. 321-4-2 du Code du travail N° Lexbase : L8927G7R).
La raison de cette nouvelle disposition trouve son origine dans la volonté des partenaires sociaux de lier les allocations servies par le régime d'assurance chômage, à l'allocation spécifique de reclassement, servie au titre de la convention de reclassement personnalisé. Cette indexation de la seconde sur la première a été décidée par les partenaires sociaux, dans la Convention relative à la convention de reclassement personnalisé du 27 avril 2005. En effet, les textes conventionnels (art. 11 de la convention du 27 avril 2005) posent le principe que l'allocation spécifique de reclassement est versée pour une durée maximum de huit mois de date à date à compter de la prise d'effet de la convention de reclassement personnalisé. La durée de versement de l'allocation spécifique de reclassement ne peut en aucun cas excéder celle à laquelle ils auraient pu prétendre au titre de l'allocation d'aide au retour à l'emploi.
1.2. Sanctions pour non présentation par l'employeur d'une convention de reclassement personnalisé
Une contribution spéciale était due au régime par l'employeur qui procédait au licenciement pour motif économique d'un salarié, sans lui proposer le bénéfice d'un Pare anticipé en application des dispositions de l'article L. 321-4-2 du Code du travail (N° Lexbase : L8927G7R). Elle était calculée en fonction du salaire journalier moyen (visé à l'article 22 § 4 du Règlement) ayant servi au calcul des allocations du salarié concerné. Elle correspondait à 30 fois le salaire journalier de référence servant au calcul des allocations (Règl. annexé, Conv. 1er janv. 2004, art. 67 N° Lexbase : L1601DPY).
Les partenaires sociaux ont pris acte de la "novation" du Pare anticipé, en convention de reclassement personnalisé, appelant un nouveau régime juridique de ce dispositif, notamment, au regard des sanctions encourues par l'employeur défaillant.
C'est pourquoi les partenaires sociaux ont modifié la convention d'assurance chômage du 1er janvier 2004, par un avenant n° 5, ainsi que le règlement d'assurance chômage, annexé à la convention d'assurance chômage du 1er janvier 2004, par un avenant n° 4. Ces deux textes ont été rendus obligatoires par la procédure de l'agrément ministériel (arrêté du 24 mai 2005 N° Lexbase : L7949G8W). Une contribution égale à deux mois de salaire brut moyen des douze derniers mois travaillés est due au régime d'assurance chômage par l'employeur qui procède au licenciement pour motif économique d'un salarié sans lui proposer le bénéfice d'une convention de reclassement personnalisé, en application de l'article L. 321-4-2 du Code du travail (N° Lexbase : L8927G7R).
Il faut relever que le montant de la sanction a doublé, passant de 1 mois de salaire, au titre du Pare anticipé, à 2 mois de salaire, au titre de la convention de reclassement personnalisé.
Les partenaires sociaux ont, par un accord signé le 18 février 2004, fixé le régime juridique du financement par l'assurance chômage de points de retraite complémentaire. Puisque le sort des adhérents aux conventions de reclassement personnalisé suit, de près, celui des allocataires du régime d'assurance chômage, il était donc cohérent que le financement par l'assurance chômage de points de retraite complémentaire bénéficie également aux adhérents d'une convention de reclassement personnalisé.
C'est pourquoi les partenaires sociaux ont conclu un avenant n° 1 à l'accord signé le 18 février 2004, fixant le régime juridique du financement par l'assurance chômage de points de retraite complémentaire, agréé par le ministre du Travail et de l'Emploi par arrêté du 24 mai 2005.
Les bénéficiaires des allocations visées par la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé (N° Lexbase : L4927G8Y) acquièrent des points de retraite complémentaire dans les conditions précisées par l'article 2 de l'accord du 18 février 2004, fixant le régime juridique du financement par l'assurance chômage de points de retraite complémentaire. L'assurance chômage contribue au financement des points de retraite en versant comme suit :
- pour le régime Agirc : les cotisations obligatoires prévues par l'article 6 § 2 de la Convention collective nationale du 14 mars 1947 (N° Lexbase : L1737AI8) et assorties du pourcentage d'appel applicable aux cotisations versées à l'Agirc, assises sur 60 % de la tranche B du salaire journalier de référence retenu pour le calcul des allocations de chômage ; une partie du prélèvement du précompte supporté par les allocataires du régime d'assurance chômage et par les adhérents à une convention de reclassement personnalisé ; une participation sur 20 ans au titre du financement des points de retraite pour les périodes de chômage antérieures au 1er janvier 1996.
- pour le régime Arrco : les cotisations prévues par l'article 13 de l'Accord du 8 décembre 1961 (N° Lexbase : L1403AIS) et assorties du pourcentage d'appel applicable à l'ensemble des cotisations versées à l'Arrco, assises sur 60 % du salaire journalier de référence retenu pour le calcul des allocations de chômage, ce salaire étant limité au plafond de la Sécurité sociale pour les ressortissants de l'Agirc, ou limité à trois plafonds de la Sécurité sociale pour les personnes ne relevant pas de l'Agirc ; une partie du prélèvement du précompte supporté par les allocataires du régime d'assurance chômage et par les adhérents à une convention de reclassement personnalisé, en fonction d'un salaire limité au plafond de la Sécurité sociale pour les ressortissants de l'Agirc, ou limité à trois plafonds de la Sécurité sociale pour les personnes ne relevant pas de l'Agirc.
- pour les autres régimes de retraite complémentaire, en application d'une convention, sur la base des taux d'appels prévus par ces régimes, assis sur 60 % du salaire journalier de référence retenu pour le calcul des allocations de chômage et dans la limite : du taux obligatoire de cotisation fixé par l'accord du 8 décembre 1961 relatif à l'Arrco (N° Lexbase : L1403AIS) sur la fraction de la rémunération inférieure ou égale au plafond de la sécurité sociale ; et du taux obligatoire de cotisation fixé par la Convention collective nationale du 14 mars 1947 relative à l'Agirc (N° Lexbase : L1737AI8) pour la fraction de la rémunération comprise entre le plafond de la Sécurité sociale et quatre fois ce plafond.
2. Portée des arrêtés d'agrément
La loi de cohésion sociale (N° Lexbase : L6384G49) a renvoyé aux partenaires sociaux le soin de fixer le régime juridique des conventions de reclassement personnalisé, et au pouvoir réglementaire, le soin d'agréer ces textes conventionnels, en application du droit commun de l'agrément des conventions d'assurance chômage.
Les textes conventionnels relatifs à la convention de reclassement personnalisé ne visent pas le régime d'assurance chômage, mais sont rendus obligatoires par application du régime juridique de l'agrément ministériel des conventions d'assurance chômage.
2.1. Nécessité d'un agrément par le ministre de l'Emploi
Les accords conclus entre employeurs et travailleurs à l'effet de servir des allocations aux travailleurs sans emploi peuvent être rendus obligatoires en vertu de la procédure d'agrément (C. trav., art. L. 352-1 N° Lexbase : L6273ACC). Il en va donc de même pour les accords portant sur la convention de reclassement personnalisé.
Cet agrément sera d'autant plus nécessaire que l'accord serait minoritaire. Il a pour effet de rendre obligatoires les dispositions de l'accord pour tous les employeurs et travailleurs compris dans le champ d'application professionnel et territorial dudit accord (C. trav., art. L. 352-1 N° Lexbase : L6273ACC et L. 352-2 N° Lexbase : L6274ACD).
2.2. Modalités de l'agrément
L'agrément est accordé après avis du comité supérieur de l'emploi, pour la durée de la validité de l'accord (C. trav., art. L. 352-2). Les conditions de publicité prévues aux articles L. 133-13 (N° Lexbase : L5707ACD) et L. 133-14 (N° Lexbase : L5708ACE) du Code du travail s'appliquent.
La procédure d'agrément met en scène plusieurs intervenants : le ministre lui-même (auteur de l'acte d'agrément) ; les syndicats (qui ont conclu la convention d'assurance chômage, objet de l'agrément), des organisations et personnes intéressées (qui font connaître leurs observations : C. trav., art. L. 133-14 et R. 133-1 N° Lexbase : L9081ACC) et, enfin, le comité supérieur de l'emploi (qui donne son avis sur l'agrément).
La procédure est assez complexe. Le comité supérieur de l'emploi donne son avis, pris en compte par le ministre de l'Emploi, avant la délivrance de l'agrément (C. trav., art. L. 352-2 N° Lexbase : L6274ACD), ainsi que dans l'hypothèse d'une convention non majoritaire (C. trav., art. L. 352-2-1 N° Lexbase : L6275ACE). Un avis est publié au Journal officiel, portant sur le projet d'agrément, invitant les organisations et personnes intéressées à faire connaître leurs observations (C. trav., art. L. 133-14), qui disposent alors d'un délai de 15 jours (C. trav., art. R. 133-1 N° Lexbase : L9081ACC).
La question a donné lieu à des développements contentieux, s'agissant de l'agrément de convention d'assurance chômage. Les solutions sont donc transposables à la procédure d'agrément des textes conventionnels relatifs à la convention de reclassement personnalisé.
Dans un premier temps, le Conseil d'Etat a considéré que les textes législatifs et réglementaires n'ont ni pour objet, ni pour effet d'exiger que la réunion du Conseil supérieur de l'emploi doive avoir lieu après expiration d'un délai de 15 jours suivant la publication de l'avis publié au Journal officiel (CE 1° et 2° s-s, 29 mars 2000, n° 207444, Association des Officiers dans les carrières civiles et autres N° Lexbase : A9503AG3, RD sanit. soc. 2000, p. 854, obs. CW ; D. 2001, somm. p. 736, obs. C. Guénin ; Dr. soc. 2000, p. 927, obs. P. Fombeur).
Un tel dispositif reviendrait, en effet, à établir une sorte de hiérarchie et une procédure s'imposant au ministre du Travail et de l'Emploi, qui n'ont pas de traduction législative : solliciter les organisations et personnes intéressées afin qu'elles fassent connaître leurs observations (C. trav., art. L. 133-14 N° Lexbase : L5708ACE) ; puis, dans un délai de 15 jours (C. trav., art. R. 133-1 N° Lexbase : L9081ACC), recueillir l'avis du Comité supérieur de l'emploi. Le Conseil d'Etat a rappelé opportunément, dans cet arrêt rendu le 29 mars 2000, qu'un tel dispositif n'est pas expressément prévu par les textes et n'emporte donc aucune conséquence juridique sur la validité de l'agrément lui-même, ou sur la validité de l'avis émis par le Conseil supérieur de l'emploi.
Puis, le Conseil d'Etat s'est prononcé une seconde fois sur la légalité d'un arrêté d'agrément, dont la légalité peut alors être mise en cause, à défaut de respect des règles de consultation du conseil supérieur de l'emploi par le ministre (CE 1° s-s, 11 mai 2004, n° 255886, Association AC ! et autres N° Lexbase : A1829DCQ, TPS 2004, comm. 236, note Prétot ; X. Prétot, Le contentieux de l'assurance chômage entre le juge civil et le juge administratif - Erreur de calcul ou erreur de droit ?, Dr. soc. 2004, p. 766).
Le juge administratif a rappelé que, dans l'hypothèse où une convention collective nationale d'assurance chômage n'est pas signée par la totalité des syndicats d'employeurs et de travailleurs, le ministre de l'Emploi ne peut procéder à son agrément que si le comité supérieur de l'emploi a émis un avis favorable motivé et que, en cas d'opposition écrite et motivée de deux syndicats d'employeurs ou de deux syndicats de travailleurs qui y sont représentés, il ne peut y procéder qu'au vu d'une nouvelle consultation du comité, sur la base d'un rapport qui précise la portée des dispositions en cause ainsi que les conséquences de l'agrément. Aussi, selon le Conseil d'Etat, la consultation du comité supérieur de l'emploi revêt le caractère d'une formalité substantielle.
S'agissant de la convention d'assurance chômage, son agrément par arrêté du ministre chargé du Travail est conditionné à ce que la convention ne comporte aucune stipulation incompatible avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, en particulier avec celles relatives au contrôle de l'emploi, à la compensation des offres et des demandes d'emploi, au contrôle des travailleurs privés d'emploi et à l'organisation du placement de l'orientation ou du reclassement des travailleurs sans emploi.
L'agrément peut être retiré par le ministre chargé du Travail si les dispositions de l'accord ou ses conditions d'application cessent d'être en conformité avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur (C. trav., art. L. 352-2 N° Lexbase : L6274ACD). Il ne s'agit donc que d'un simple rappel du principe de la hiérarchie des normes : la convention collective nationale d'assurance chômage est conditionnée, dans sa validité, au respect des dispositifs législatifs et réglementaires.
Ces recommandations du législateur, destinées au pouvoir réglementaire, exerçant son pouvoir d'agréer une convention d'assurance chômage, n'intéressent que de loin l'agrément des textes conventionnels relatifs à la convention de reclassement personnalisé.
Le Conseil d'Etat en déduit que la légalité d'un arrêté ministériel portant agrément est nécessairement subordonnée à la validité des stipulations de l'accord en cause (CE Contentieux, 18 mai 1998, n° 187836, Union nationale de coordination des associations militaires et autres N° Lexbase : A7752ASW, RD sanit. et soc. 1999, p. 225, obs. CW ; D. 1999, somm. p. 30, obs. A. Bouilloux et p. 282, obs. D. Morel, X. Prétot, De la complexité des règles de compétence en droit du travail. À propos du contentieux de la convention d'assurance chômage).
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