Réf. : BOI-IS-RICI-10-20-20 (N° Lexbase : X8313ALH)
Lecture: 7 min
N0395BWK
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Jules Bellaiche, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale
le 10 Décembre 2015
Aux termes de l'article 220 sexies du CGI et de l'article 220 F du CGI (N° Lexbase : L0108IK9), les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés sont susceptibles de bénéficier d'un crédit d'impôt imputable sur l'impôt sur les sociétés et restituable pour la partie excédentaire dans la mesure où elles répondent aux conditions exigées pour le bénéfice de ce crédit d'impôt cinéma.
Le crédit d'impôt cinéma est réservé aux entreprises de production ayant la qualité d'entreprises de production déléguée. Conformément à l'article D. 331-1 du Code du cinéma et de l'image animée (N° Lexbase : L7619I3L), a la qualité d'entreprise de production déléguée l'entreprise qui, dans le cadre d'une coproduction, prend l'initiative et la responsabilité financière, technique et artistique de la réalisation de l'oeuvre cinématographique et en garantit la bonne fin. Pour une même oeuvre, cette qualité ne peut être reconnue qu'à deux entreprises au plus à la condition qu'elles agissent conjointement. Cette qualité peut également être reconnue à l'entreprise de production qui, en dehors d'une coproduction, prend seule l'initiative et la responsabilité financière, technique et artistique de la réalisation de l'oeuvre cinématographique et en garantit la bonne fin. Ces entreprises doivent être soumises à l'IS et respecter la législation sociale.
Seules les oeuvres cinématographiques de longue durée agréées par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), sous réserve du respect de certaines conditions (Code du cinéma et de l'image animée, art. D. 210-1 N° Lexbase : L7411I3U), bénéficient du crédit d'impôt au titre des dépenses de production cinématographique. Les films concernés sont les oeuvres cinématographiques de fiction, documentaires et d'animation.
Ainsi, les dépenses de production uniquement engagées pour la réalisation et la production d'oeuvres cinématographiques de longue durée ouvrent droit au crédit d'impôt.
Ces dépenses doivent, par ailleurs, correspondre à des opérations effectuées en France.
Une distinction est opérée selon que les dépenses sont engagées pour la réalisation d'oeuvres cinématographiques de fiction ou documentaires ou d'oeuvres cinématographiques d'animation.
Certains types d'oeuvres sont exclus du bénéfice du dispositif du crédit d'impôt cinéma. Le 2 du II de l'article 220 sexies du CGI prévoit que n'ouvrent pas droit au crédit d'impôt cinéma :
- les oeuvres à caractère pornographique ou d'incitation à la violence ;
- les oeuvres cinématographiques utilisables à des fins de publicité ;
- les programmes d'information, les débats d'actualité et les émissions sportives, de variété ou de jeux ;
- tout document ou programme audiovisuel ne comportant qu'accessoirement des éléments de création originale.
II - Les modalités de calcul et le plafonnement du crédit d'impôt cinéma
En principe, conformément au III de l'article 220 sexies du CGI, le crédit d'impôt est égal à 20 % du montant total des dépenses éligibles de production cinématographique exposées au cours de l'exercice au titre duquel le crédit d'impôt est calculé.
Toutefois, comme le confirme la fiche BoFip du 2 décembre 2015, lorsque le montant du budget de production est strictement inférieur à 4 millions d'euros, le crédit d'impôt est égal à 30 % du montant total des dépenses exposées au cours de l'exercice au titre duquel le crédit d'impôt est calculé.
Le respect de cette condition de budget est apprécié au moment de la demande d'agrément provisoire et lors de l'obtention de l'agrément définitif auprès du CNC. Le bénéfice du taux majoré de 30 % peut dès lors être remis en cause et l'entreprise se verrait alors être imposée au taux de droit commun de 20 % et devoir rembourser la différence. A contrario, le crédit d'impôt peut faire l'objet d'une régularisation au bénéfice de l'entreprise de production si le budget n'a, au final, pas dépassé les 4 millions d'euros.
Le taux de 30 %, instauré par l'article 38 de la loi n° 2013-1279, de finances rectificative pour 2013, s'applique, comme il a été dit ci-dessus, aux crédits d'impôt calculés au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2014 (entrée en vigueur par le décret n° 2015-307 du 17 mars 2015 N° Lexbase : L1710I8T, publié le 19 mars 2015 au Journal officiel).
Ainsi, prenons l'exemple d'une entreprise de production déléguée dont l'exercice comptable coïncide avec l'année civile. Elle a déposé une demande d'agrément provisoire en septembre 2012 pour une oeuvre dont la réalisation s'est écoulée entre novembre 2012 et septembre 2014. Par hypothèse, les dépenses liées à cette oeuvre sont engagées sur la même période. Au moment de la demande d'agrément définitif, le coût définitif de l'oeuvre s'élève à 3,7 millions d'euros. Les dépenses éligibles liées à cette oeuvre donneront, par conséquent, lieu à l'application du taux de :
- 20 % pour celles engagées au titre des exercices clos en 2012 et en 2013 ;
- 30 % pour celles engagées au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2014.
Le VI de l'article 220 sexies du CGI fixe le plafond du crédit d'impôt applicable aux oeuvres cinématographiques dans la limite de 4 millions d'euros par oeuvre, quel que soit le genre de l'oeuvre cinématographique concernée.
Ce plafond de 4 millions d'euros s'applique aux dépenses effectuées au titre des exercices clos à compter du 12 décembre 2013 (décret n° 2013-1139 du 9 décembre 2013 N° Lexbase : L6253IYA, publié au Journal officiel le 11 décembre 2013).
En pratique, une entreprise de production déléguée réalise une oeuvre cinématographique de fiction dont l'exercice coïncide avec l'année civile. Cette oeuvre obtient l'agrément provisoire le 25 mars 2010 et les prises de vues débutent le 28 mars de cette même année. Le visa d'exploitation est accordé le 25 septembre 2011 et l'agrément définitif est délivré le 15 octobre 2011.
L'entreprise calcule un crédit d'impôt de 1 440 000 euros au titre de l'exercice 2010 et de 1 920 000 euros au titre de l'exercice 2011, soit un total de 3 360 000 euros. Ce total ne dépasse pas le nouveau plafond de 4 millions d'euros applicable au crédit d'impôt cinéma. L'entreprise en question pourra donc utiliser en totalité son crédit d'impôt cinéma. Le crédit d'impôt est plafonné pour chaque oeuvre cinématographique et non par entreprise de production cinématographique. Le plafond s'applique pour une même oeuvre cinématographique en additionnant, le cas échéant, les crédits d'impôt dont l'oeuvre aura bénéficié au cours de plusieurs exercices successifs.
Autre exemple, si une oeuvre de fiction obtient l'agrément provisoire du CNC au 1er janvier 2009. L'oeuvre obtient son visa d'exploitation le 5 mai 2011 et son agrément définitif le 7 décembre de cette même année.
Pour cette oeuvre, l'entreprise de production bénéficie d'un crédit d'impôt :
- d'un montant de 2 400 000 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2010 ;
- d'un montant de 1 200 000 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011 ;
- d'un montant de 880 000 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012.
Elle pourra imputer le crédit d'impôt dont elle bénéficie au titre de 2010, soit 2 400 000 euros, sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de cet exercice, et le cas échéant obtenir le remboursement de l'excédent de crédit d'impôt non imputable.
De même, elle pourra imputer le crédit calculé au titre de l'exercice clos en 2011 soit 1 200 000 euros, sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de ce même exercice, et le cas échéant obtenir le remboursement de l'excédent de crédit d'impôt non imputable.
Cependant, en application du plafonnement du crédit d'impôt à 4 000 000 euros, elle ne pourra utiliser le crédit d'impôt calculé au titre de l'exercice 2012 qu'à hauteur de 400 000 euros, le solde, soit 480 000 euros, étant définitivement perdu.
Dans le cas d'une coproduction, pour apprécier quelle part de ce plafond revient à chaque entreprise de production déléguée, il est fait application d'un prorata calculé en multipliant le montant du plafond par le pourcentage de dépenses éligibles engagées par chaque entreprise.
Par exemple, s'agissant d'une oeuvre documentaire qui obtient l'agrément provisoire du CNC le 5 février 2010. L'oeuvre obtient son visa d'exploitation le 18 avril 2011 et son agrément définitif le 28 mai 2011.
L'oeuvre est coproduite par l'entreprise de production déléguée A, qui engage 25 % des dépenses éligibles au crédit d'impôt cinéma et par l'entreprise de production déléguée B qui engage 75 % des dépenses éligibles.
Pour l'exercice clos le 31 décembre 2010, le montant total de crédit d'impôt cinéma dont bénéficie l'oeuvre est de 3 200 000 euros.
Ainsi, l'entreprise A bénéficie d'un crédit d'impôt cinéma d'un montant de 3 200 000 x 25 % = 800 000 euros. Elle pourra imputer ce crédit d'impôt sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de cet exercice, et le cas échéant obtenir le remboursement de l'excédent de crédit non imputable ;
L'entreprise B bénéficiera d'un crédit d'impôt cinéma d'un montant de : 3 200 000 x 75 % = 2 400 000 euros. Elle pourra imputer ce crédit d'impôt sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de cet exercice, et le cas échéant obtenir le remboursement de l'excédent de crédit d'impôt non imputable.
Pour l'exercice clos le 31 décembre 2011, le montant total de crédit impôt cinéma dont bénéficiera l'oeuvre au titre de cet exercice est de 2 400 000 euros.
Cependant, en application du plafonnement du crédit d'impôt à 4 millions d'euros pour les oeuvres cinématographiques documentaires, seuls 800 000 euros (4 000 000 - 3 200 000 du crédit d'impôt déjà utilisé au titre de 2010) de crédit d'impôt pourront être utilisés au titre de cet exercice (le surplus, soit 2 400 000 - 800 000 = 1 600 000 euros, étant perdu). Ce crédit d'impôt sera réparti entre les deux entreprises de production déléguée agissant dans le cadre de la coproduction comme suit :
- l'entreprise A bénéficiera d'un crédit d'impôt d'un montant de 800 000 x 25 % = 200 000 euros. Elle pourra imputer ce crédit d'impôt sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de cet exercice, et le cas échéant obtenir le remboursement de l'excédent de crédit d'impôt non imputable ;
- l'entreprise B bénéficiera d'un crédit d'impôt d'un montant de 800 000 x 75 % = 600 000 euros. Elle pourra imputer ce crédit d'impôt sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de cet exercice, et le cas échéant obtenir le remboursement de l'excédent de crédit d'impôt non imputable.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:450395