Par jugement rendu le 20 août 2015, le TGI de Tours a estimé qu'il y avait lieu de faire droit à la demande de substitution, dans l'acte de naissance du demandeur, de la mention "sexe : neutre" à celle de "sexe masculin", (TGI Tours, 2ème ch., 20 août 2015, n° 15/00000
N° Lexbase : A2714NTP). En l'espèce, le demandeur se présentait comme une personne intersexuée, c'est-à-dire "
dont les organes génitaux ne correspondent pas à la norme habituelle de l'anatomie masculine ou féminine". Il expliquait être né et avoir grandi avec une ambiguïté sexuelle de telle sorte qu'il considérait la mention "masculin" figurant sur son état civil comme erronée, et demandait à la voir substituer par la mention "neutre" et subsidiairement par la mention "intersexe". Dans leur décision, les juges relèvent que la mise en oeuvre, par les officiers d'état civil, de l'article 57 du Code civil (
N° Lexbase : L8839G9A) suppose nécessairement que le sexe de l'enfant puisse être déterminé, ce qui n'est pas toujours le cas comme le reconnaît expressément l'article 55 de la circulaire du 28 octobre 2011, relative aux règles particulières à divers actes de l'état civil (
N° Lexbase : L1448KML), puisque ce texte autorise que ne soit indiqué dans l'acte de naissance aucune mention sur le sexe de l'enfant "
si dans certains exceptionnels, le médecin estime ne pouvoir immédiatement donner aucune indication sur le sexe probable d'un nouveau-né". La circulaire subordonne également cette dérogation à l'hypothèse où "
le sexe peut être déterminé définitivement dans le délai d'un ou deux ans, à la suite de traitements appropriés" sans évoquer la possibilité où le sexe de l'intéressé ne pourrait jamais être déterminé, ce qui était précisément le cas où se plaçait le demandeur. Selon le jugement, on peut donc parler à cet égard de vide juridique, et rien ne s'oppose en droit interne à ce que la demande de ce dernier soit accueillie favorablement. Le jugement relève, par ailleurs, que la demande ne se heurte à aucun obstacle juridique afférent à l'ordre public, dans la mesure où la rareté avérée de la situation dans laquelle il se trouve ne remet pas en cause la notion ancestrale de binarité des sexes, ne s'agissant aucunement dans l'esprit du juge de voir reconnaître l'existence d'un quelconque "troisième sexe", ce qui dépasserait sa compétence, mais de prendre simplement acte de l'impossibilité de rattacher l'intéressé à tel ou tel sexe et de constater que la mention qui figure sur son acte de naissance est simplement erronée. C'est ainsi que le tribunal a estimé qu'il y avait lieu d'ordonner que soit substituée, dans l'acte de naissance du demandeur, à la mention "de sexe masculin", la mention "sexe : neutre", qui peut se définir comme n'appartenant à aucun des genres masculin ou féminin, préférable à "intersexe" qui conduit à une catégorisation qu'il convient d'éviter (ne s'agissant pas de reconnaître un nouveau genre) et qui apparaît plus stigmatisante.
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