La lettre juridique n°135 du 23 septembre 2004 : Sociétés

[Textes] La société européenne "à la française" : la société anonyme fermée

Réf. : Proposition de loi portant statut d'une société anonyme fermée

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par Aurélie Ecuyer, SGR - Droit des sociétés

le 07 Octobre 2010

Le principe de la societas europae n'est pas nouveau, néanmoins il aura fallu attendre trente ans après la première proposition pour que le règlement relatif au statut de la société européenne (règlement n° 2157/2001 du Conseil du 8 octobre 2001 N° Lexbase : L1040AWG) et la directive complétant le statut de la société européenne pour ce qui concerne l'implication des travailleurs (directive 2001/86/CE du Conseil du 8 octobre 2001 N° Lexbase : L5882A4M) soient adoptés. Ce règlement entre en vigueur le 8 octobre prochain, sans que les modifications nécessaires dans l'ordre interne français aient été effectuées. A cette fin, les sénateurs Jean-Guy Branger et Jean-Jacques Hyest viennent de présenter une nouvelle proposition de loi portant statut d'une société anonyme fermée, complétant celle qu'ils avaient déposée en janvier relative à la transposition de la directive concernant l'implication des travailleurs (une première proposition de loi relative à la société européenne avait déjà été présentée par le sénateur Philippe Marini en octobre 2003, sur ce texte lire N° Lexbase : N9045AAA). Toutefois, une autre proposition pourrait être élaborée par la Chancellerie afin de fédérer l'ensemble des projets en cours. Nous reviendrons sur l'importance et l'intérêt de l'adoption rapide en droit français d'une législation adaptée et sur la présentation de la proposition de loi portant statut d'une société anonyme fermée.
  • L'importance d'une modification rapide du droit interne

La société européenne (SE) va permettre aux sociétés ayant une activité communautaire de se réorganiser et d'éviter les contraintes juridiques et pratiques des différentes législations des Etats membres. Le règlement a prévu quatre modes de constitution de la SE : fusionner les sociétés, former une société holding ou une filiale commune, et transformer une société anonyme de droit national.

L'entrée en vigueur, le 8 octobre 2004, du règlement relatif au statut de la société européenne souligne l'urgence pour le législateur français d'adopter les modifications nécessaires. En effet, la société européenne ainsi créée est régie à la fois par le droit communautaire (le règlement n° 2157/2001) et par les dispositions nationales du lieu du siège de la société. En premier lieu, toutes les règles relatives à la constitution, au fonctionnement, aux comptes annuels et à la dissolution et liquidation de la société dépendent du règlement ; en second lieu, pour les domaines non traités par le droit communautaire, le règlement effectue un renvoi, le cas échéant, au droit interne.

Pour les sociétés européennes souhaitant s'immatriculer en France, l'article 9 du règlement précise que le droit des sociétés anonymes est applicable. C'est pourquoi, il est nécessaire d'apporter certaines modifications au droit des sociétés anonymes, afin qu'il puisse s'articuler avec le règlement (article 3 § 2) et qu'il réponde "aux exigences de compétitivité normative".

Ainsi, les Etats qui adapteront le plus rapidement leur législation nationale, et qui opteront pour des dispositions "intéressantes" pour les sociétés, seront les plus concurrentiels. Le législateur français doit se mettre rapidement à l'oeuvre, afin que la France puisse se positionner au niveau européen, et "attirer" les nouvelles SE.

  • Présentation de la proposition de loi portant statut d'une société anonyme fermée

Le but de la présente proposition de loi est de coordonner le droit français au droit communautaire afin de le rendre plus attractif et compétitif par rapport aux autres Etats membres, notamment ceux qui ont déjà procédé aux modifications nécessaires.

Aux termes de cette proposition de loi, un statut particulier de société anonyme serait créé : la société anonyme fermée (SA fermée). Ce statut serait réservé aux sociétés ne faisant pas appel publiquement à l'épargne et concernerait "les opérateurs privés souhaitant mieux contrôler la gestion" du capital de la société. Ainsi, une section 10 intitulée "Des sociétés anonymes fermées" serait instituée au sein du chapitre V du titre II du livre II du Code de commerce.

Afin de répondre aux exigences posées par l'article 3 § 2 du règlement qui stipule que "les dispositions de l'Etat membre du siège statutaire de la SE filiale exigeant qu'une société anonyme ait plus d'un actionnaire ne sont pas d'application pour la SE filiale", la société anonyme fermée pourrait être unipersonnelle (C. com., art . L. 225-272).

Parallèlement, l'article L. 432-4 du Code du travail (N° Lexbase : L6408ACC) relatif à l'information du comité d'entreprise, devrait être modifié, afin que les salariés des sociétés anonymes fermées à actionnaire unique en bénéficient.

En outre, l'accès au statut de SA fermée serait facilité. Les sociétés anonymes ne faisant pas publiquement appel à l'épargne pourraient opter pour ce statut, en effectuant une simple modification statutaire (C. com., art. L. 225-271). Cet accès le serait également pour les sociétés par actions simplifiées, qui pourraient plus aisément se transformer en SA fermées en raison de leur régime spécifique, et par la même accéder à la société européenne.

Toutefois, l'article L. 225-275 préciserait que "les dispositions relatives aux modalités de publicité concernant la transformation des sociétés par actions simplifiées en sociétés anonymes fermées ou les modalités de prise de décision en vue de l'option des sociétés anonymes pour les sociétés anonymes seront déterminées par décret".

Par ailleurs, plusieurs dispositions ont été présentées afin d'obtenir une SA fermée avec un fonctionnement plus souple, dans un souci de "compétitivité normative".

L'article L. 225-273 du Code de commerce laisserait une option pour la direction de la SA fermée, une structure moniste, un conseil d'administration et un président, ou une structure dualiste composée d'un conseil de surveillance et d'un directoire.

L'alinéa 2 de l'article L. 225-273 du Code de commerce soumettrait la direction et l'administration de la société par principe aux règles applicables aux sociétés anonymes tout en introduisant plus de liberté contractuelle.

Ainsi, la direction et l'administration de la SA fermée serait assujettie, notamment, aux règles applicables aux rémunérations des dirigeants, aux pouvoirs des organes de direction, aux cautions, avals et garanties, aux assemblées générales extraordinaires et aux conventions réglementées.

Néanmoins, l'article L. 225-38 relatif aux conventions réglementées (N° Lexbase : L5909AIP) serait complété par un alinéa concernant l'hypothèse d'un actionnaire unique, précisant que la convention conclue entre celui-ci et la société, serait simplement mentionnée au registre des décisions de l'actionnaire unique. D'une façon plus générale, on pourrait s'interroger sur l'ensemble des décisions prises par cette société par un actionnaire unique, notamment, les décisions relatives aux opérations sur le capital. Ne pourrait-on pas proposer des procédures plus simplifiées que celles qui existent dans les sociétés anonymes à l'heure actuelle ?

Parmi les dispositions qui ne seraient pas applicables à la direction et à l'administration de la SA fermée, on peut citer : le mode de nomination (C. com., art. L. 225-18 N° Lexbase : L5889AIX, L. 225-24 N° Lexbase : L5895AI8, L. 225-78 N° Lexbase : L5949AI8) et de révocation (C. com., art. L. 225-55 N° Lexbase : L5926AIC) des dirigeants, la composition (C. com., art. L. 225-69 N° Lexbase : L5940AIT, L. 225-58 N° Lexbase : L5929AIG, L. 225-17 N° Lexbase : L5888AIW) et les règles de majorité et de quorum des organes de direction et d'administration (C. com., art. L. 225-36-1 N° Lexbase : L2208ATX et L. 225-37 N° Lexbase : L5908AIN).

Toutefois, l'alinéa 5 de l'article L. 225-37, relatif à l'obligation de confidentialité des personnes assistant à une réunion du conseil d'administration, resterait applicable.

Par ailleurs, une plus grande liberté statutaire serait laissée s'agissant des formes et délais de convocation des assemblées générales.

Enfin, les règles relatives aux limitations du cumul des mandats sociaux (C. com., art. L. 225-21 N° Lexbase : L5892AI3, L. 225-67 N° Lexbase : L5938AIR et L. 225-77 N° Lexbase : L5938AIR) seraient écartées.

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