La lettre juridique n°135 du 23 septembre 2004 : Fiscalité des entreprises

[Focus] La dissolution par confusion de patrimoines (TUP) à la lumière des dernières règles fiscales et comptables

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[Focus] La dissolution par confusion de patrimoines (TUP) à la lumière des dernières règles fiscales et comptables. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/15306298-focus-la-dissolution-par-confusion-de-patrimoines-tup-a-la-lumiere-des-dernieres-regles-fiscales-et-
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par S. M.

le 07 Octobre 2010


La dissolution sans liquidation, appelée aussi communément la dissolution par confusion de patrimoines (TUP) est régie par l'article 1844-5 du Code civil (N° Lexbase : L2025ABM). Cet article prévoit que si une société dont toutes les parts sont réunies en une seule main est dissoute, la dissolution entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Ce n'est qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2002, que le régime de faveur des fusions a pu être appliqué à cette opération. Par ailleurs, un avis du Conseil national de la comptabilité (le CNC), du 25 mars 2004, a apporté de nouvelles précisions sur le traitement comptable de ces transmissions (CNC, avis n° 2004-01 du 25 mars 2004).

1. Une lente accession au régime de faveur des fusions

Par une instruction fiscale en date du 11 août 1993 (BOI n° 4 I-1-93 N° Lexbase : X0827AAU), l'administration avait estimé que la dissolution par confusion de patrimoines n'était pas éligible au régime de faveur des fusions, puisqu'elle n'en avait pas le caractère juridique. Cette position paraissait, toutefois, contraire à la directive européenne du 23 juillet 1990 (directive (CE) 90/434 N° Lexbase : L7670AUM) qui qualifie de fusion "toute opération de transfert universel du patrimoine d'une société à la société détenant la totalité de son capital, par suite d'une dissolution sans liquidation", incluant dans sa définition les dissolutions-confusions. Aussi, certaines sociétés ont eu recours à une fusion simplifiée, beaucoup plus formelle et coûteuse, afin de bénéficier du régime de faveur.

Depuis, la loi de finances pour 2002 (loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001, art. 85 N° Lexbase : L1042AWI) a introduit un nouveau régime de fusion codifié à l'article 210-0 A du CGI qui, d'une part, donne une définition fiscale de la fusion très fortement inspirée de celle de la directive communautaire et, d'autre part, permet de faire bénéficier à la dissolution par confusion de patrimoine (qui n'avait ni les caractéristiques économiques de fusions, ni la qualification juridique au sens du droit des sociétés) du régime de faveur des fusions.

  • La nouvelle définition des fusions pour l'application du régime de faveur

L'article 210-0A, I, du CGI définit désormais les fusions comme les opérations par lesquelles :

- une ou plusieurs sociétés absorbées transmettent, par suite et au moment de leur dissolution sans liquidation, l'ensemble de leur patrimoine à une autre société préexistante absorbante, moyennant l'attribution à leurs associés de titres de la société absorbante et, éventuellement, d'une soulte ne dépassant pas 10 % de la valeur nominale de ces titres ;

- deux ou plusieurs sociétés absorbées transmettent, par suite et au moment de leur dissolution sans liquidation, l'ensemble de leur patrimoine à une société absorbante qu'elles constituent, moyennant l'attribution à leurs associés de titres de la société absorbante et, éventuellement, d'une soulte ne dépassant pas 10 % de la valeur nominale de ces titres.

L'inscription dans le Code général des impôts de cette définition, qui repose sur la nature économique des opérations, est désormais source de sécurité juridique. En effet, il n'existait auparavant aucune définition législative des fusions, des scissions et des apports partiels d'actifs, sauf en matière de droits d'enregistrement.

Par ailleurs, cette définition a pour effet de rendre éligibles au régime de faveur des opérations qui présentent les caractéristiques économiques de fusions, mais qui n'en ont pas la qualification juridique et, notamment, les opérations de dissolution-confusion.

  • Le régime de faveur des fusions

Le régime spécial des fusions est réservé aux opérations auxquelles participent exclusivement des personnes morales ou organismes passibles de l'impôt sur les sociétés, quelle que soit par ailleurs leur forme juridique.

Les conséquences de l'application du régime de faveur pour la société absorbée sont, principalement, les suivantes :

- les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif (actif immobilisé et actif circulant) apportés du fait d'une fusion ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés ;

- l'impôt sur les sociétés n'est applicable aux provisions figurant au bilan de la société absorbée que si elles deviennent sans objet ;

- la société absorbée fait l'objet d'une imposition immédiate à raison des résultats - y compris les plus-values - réalisés au cours de la période d'imposition close par la fusion, augmentés, le cas échéant des provisions devenues sans objet ;

- la société absorbée fait l'objet d'une imposition immédiate à raison des résultats - y compris les plus-values - réalisés au cours de la période d'imposition close par la fusion, augmentés, le cas échéant des provisions devenues sans objet.

2. Conséquence de l'application du régime de faveur à la dissolution par confusion de patrimoines

L'administration a eu l'occasion de commenter l'application du régime de faveur aux dissolutions par confusion de patrimoine par une instruction du 7 juillet 2003 (BOI n° 4 I-1-03 N° Lexbase : X5337ABB).

Il en ressort que, dorénavant, il est possible d'intégrer les actifs et les passifs d'une filiale avec les mêmes effets qu'une fusion, mais selon une procédure plus simple et plus rapide. En effet, la dissolution sans liquidation ne requiert qu'une déclaration de la société mère. Autrement dit, la transmission universelle de patrimoine entraîne ni l'intervention d'un commissaire aux apports chargé d'évaluer le patrimoine transmis, ni la rédaction d'un traité de fusion et encore moins la tenue d'une assemblée générale de l'absorbante. Cette simplification n'est donc pas négligeable.

Pourtant, la TUP n'est pas dépourvue de tout inconvénient. En matière de droits d'enregistrements, la dissolution par confusion de patrimoines peut entraîner un coût fiscal important, dans la mesure où la transmission de l'actif immobilier exigera la taxe de publicité foncière de 0,60 % de la valeur vénale de l'immeuble au lieu d'un droit fixe dans le cas d'une fusion simplifiée .

Quant à la théorie de la mutation conditionnelle, celle-ci s'applique, lorsque certains actifs ont été antérieurement apportés à la société faisant l'objet de la dissolution par confusion par une autre personne morale non soumise à l'impôt sur les sociétés. Cette opération peut générer le paiement du droit de 4,80 %.

Enfin, en ce qui concerne le régime de TVA, l'administration n'a pas encore indiqué sa position.

Demeurent le problème de la valeur des actifs et passifs, ainsi que celui de la rétroactivité. En effet, avant l'avis du Conseil national de la comptabilité en date du 25 mars 2004 (avis n° 2004-01 relatif au traitement comptable, dans les comptes individuels, des fusions et opérations assimilés), la doctrine comptable s'opposait, du fait de l'absence de traité et de commissaire aux apports, à ce que les actifs soient revalorisés. L'opération devait donc se faire à la valeur nette comptable, alors que l'administration avait accepté qu'il soit conféré un effet rétroactif à la dissolution par confusion de patrimoines. Mais, l'avis ici rapporté prodigue de nouvelles règles comptables. D'une part, les actifs et passifs de l'entreprise dissoute sont toujours transmis à la valeur comptable. D'autre part, la rétroactivité des opérations de dissolution par confusion de patrimoine n'étant pas prévue par le Code civil, le CNC confirme qu'il n'apparaît pas possible de donner un effet rétroactif aux TUP sur le plan comptable.

Enfin, les écritures comptables seront reprises chez l'absorbante à l'issue du délai d'opposition des créanciers. Autrement dit, la date d'effet comptable ne correspond pas à la date de la décision de la fusion mais plutôt à l'issue du délai d'opposition des créanciers.

Ainsi la TUP a véritablement été assimilée à une opération de fusion bénéficiant du régime de faveur prévu à l'article 210 A du CGI . Mais, pour ce concerne les règles comptables y afférentes, il faudra attendre un arrêté ministériel, afin que ces dernières soient pleinement applicables.


Lire également :

Nouvelles règles comptables relatives aux fusions et opérations assimilées, Lexbase Hebdo n° 122 du 26 mai 2004 - édition fiscale (N° Lexbase : N1728ABM) ;
Les transmissions universelles de patrimoine : éligibilité au régime fiscal de faveur, Lexbase Hebdo n° 107 du 11 février 2004 - édition fiscale (N° Lexbase : N0497ABZ) ;
Régime fiscal de faveur des fusions : les conséquences de la nouvelle définition des fusions, Lexbase Hebdo n° 45 du 30 octobre 2002 - édition fiscale (N° Lexbase : N4504AA3) ;
- Loi de finances pour 2002 : l'aménagement des régimes de restructurations d'entreprises, Lexbase Hebdo n° 10 du 13 février 2002 - édition fiscale (N° Lexbase : N1946AAC) ;
- Fusion, apports partiels d'actifs, TUP... Ce que les nouvelles règles comptables devraient changer, BCF Entreprises, 4/04, éditions Francis Lefebvre, p. 1 à 5 ;
- La dissolution par confusion de patrimoines : une nouvelle étape, Sybille Plantin, JCP n° 11-14 mars 2002, p. 456 à p. 457 ;
- La dissolution par confusion de patrimoine : une alternative économique à la fusion, Gilles Semadeni et Yves Larue, Entreprise et expertise n° 769 du 26 janvier 2004.


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