Réf. : Cass. civ. 1, 15 mai 2024, n° 23-12.432, F-D N° Lexbase : A17715CL
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par Hélène Nasom-Tissandier, Maître de conférences HDR, Université Paris Dauphine-PSL, CR2D
le 04 Juin 2024
► La recevabilité de l'action en responsabilité et indemnisation formée par un donataire contre le notaire qui a instrumenté la donation-partage n'est pas subordonnée à la mise en cause des autres donataires.
Faits et procédure. Par acte reçu le 20 décembre 2000 par un notaire, des époux ont consenti une donation-partage à leurs trois enfants. Un donataire a assigné le notaire en responsabilité et indemnisation pour manquement à son devoir de conseil. L’assureur du notaire est intervenu volontairement à l’instance. Par arrêt infirmatif du 29 novembre 2022, la cour d'appel de Grenoble a, notamment, déclaré les demandes irrecevables car les demandes excédaient le débat sur la seule responsabilité du notaire et qu'il appartenait à la demanderesse de mettre en cause les autres parties signataires de l'acte de donation-partage, l'accueil éventuel de ses prétentions relatives à l'évaluation de l'actif partageable induisant une éventuelle remise en cause des attributions en valeur des lots entre les donataires (CA Grenoble, 22 novembre 2022, n° 20/03463 N° Lexbase : A58488XU). Un pourvoi est formé au motif « que la recevabilité de l'action en responsabilité dirigée contre un notaire pour manquement à son devoir de conseil n'est pas subordonnée à la mise en cause de l'ensemble des parties à l'acte concerné ».
Solution. La Cour de cassation devait apprécier si la recevabilité de l'action en responsabilité et indemnisation formée par un donataire contre le notaire qui a organisé la donation-partage, est subordonnée à la mise en cause des autres donataires. Elle rend un arrêt de cassation aux visas des articles 31 N° Lexbase : L1169H43 et 122 N° Lexbase : L1414H47 du Code de procédure civile. Elle rappelle d’abord que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. Elle énonce ensuite que constitue une fin de non-recevoir, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Elle en déduit que la recevabilité de l'action en responsabilité et indemnisation formée par un donataire contre le notaire qui a instrumenté la donation-partage n'est pas subordonnée à la mise en cause des autres donataires.
La Cour de cassation s’est déjà prononcée dans des affaires similaires. Dans un arrêt rendu le 15 juin 2017, la première chambre civile a énoncé que « l'annulation du testament, du codicille et des modifications des clauses désignant les bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie n'était pas un préalable nécessaire à la recevabilité de l'action en responsabilité dirigée contre M. Z, tuteur et notaire en charge de la succession » (Cass. civ. 1, 15 juin 2017, n° 16-20.446, F-D N° Lexbase : A2177WIH). Dans un arrêt rendu le 20 décembre 2018, la troisième chambre civile a retenu que « la recevabilité de l'action en responsabilité délictuelle formée par le propriétaire d'un logement contre un occupant auquel il n'est pas contractuellement lié n'est pas subordonnée à la mise en cause du locataire » (Cass. civ. 3, 20 décembre 2018, n° 17-31.461 N° Lexbase : A6566YRM). En l’espèce, est déclinée la même logique pour la mise en cause de la responsabilité du notaire pour manquement à son devoir de conseil.
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