Le Quotidien du 19 février 2024 : Actualité judiciaire

[A la une] Affaire Bygmalion : Nicolas Sarkozy condamné à six mois de prison ferme en appel

Lecture: 5 min

N8465BZK

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[A la une] Affaire Bygmalion : Nicolas Sarkozy condamné à six mois de prison ferme en appel. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/104927440-a-la-une-affaire-bygmalion-nicolas-sarkozy-condamne-a-six-mois-de-prison-ferme-en-appel
Copier

par Vincent Vantighem

le 16 Février 2024

Il y a un peu plus d’une décennie, les plus mauvaises augures imaginaient un avenir judiciaire sombre pour Nicolas Sarkozy quand les premières poursuites le concernant sont apparues. Difficile aujourd’hui de leur donner tort… Et chaque jour qui passe amène chacun à s’interroger sur l’hypothèse d’un ancien président de la République considéré par l’administration pénitentiaire comme un détenu écroué, sous bracelet électronique ou pire encore… La cour d’appel de Paris a donné un peu plus de corps à cette hypothèse, mercredi 14 février, en rendant sa décision dans l’affaire du dépassement de ses comptes de la campagne présidentielle de 2012 – dite « affaire Bygmalion » – et en le condamnant à un an de prison dont six mois ferme.

Quelques heures après avoir participé à l’hommage rendu à Robert Badinter place Vendôme, Nicolas Sarkozy n’a passé que très peu de temps dans la salle d’audience, sur l’île de la Cité, pour écouter la décision, avant de sortir en trombe, la mine renfrognée, sans adresser un mot à qui que ce soit. C’est toujours l’histoire du verre à moitié plein ou à moitié vide. Côté pile : la peine prononcée en appel est plus faible que celle prononcée en première instance (un an de prison ferme soit le maximum de la peine encourue). Mais côté face, elle est plus forte que celle requise lors du procès qui s’est tenu fin-novembre, début-décembre, devant la cour d’appel (un an de prison avec sursis). En décryptant rapidement les motivations, la présidente a précisé que la cour avait validé, en fait, la sanction requise en première instance tout en demandant que celle-ci soit aménagée sous la forme d’un placement sous surveillance électronique à domicile. En clair, l’ancien chef de l’État n’ira pas en prison mais il pourrait être forcé par un juge d’application des peines à porter un bracelet électronique et à rester chez lui la majeure partie de la journée si la décision devenait définitive. Une infamie pour lui.

« Deux poids, deux mesures » à côté de François Bayrou

Mais nous n’en sommes pas encore là. Car la cour d’appel n’a pas prononcé l’exécution provisoire de la sanction et, surtout, l’ex-chef de l’État a immédiatement formé un pourvoi en cassation contre cette décision. Moyen de gagner, grosso modo, encore un an avant que les ennuis ne se concrétisent. À en croire son avocat, il n’y pense pas pour le moment. En dépit d’une condamnation confirmée en appel, il escompte toujours faire valoir son innocence. « L’arrêt de la cour d’appel est hautement contestable », a ainsi réagi Vincent Desry, qui s’est occupé de lui dans cette affaire, et qui voit dans la relaxe dont a bénéficié François Bayrou dans l’affaire des assistants des eurodéputés du MoDem un « deux poids, deux mesures » difficilement acceptable. « Nicolas Sarkozy, qui reste totalement combatif, est pleinement innocent des faits qui lui sont reprochés. Il n’avait nullement connaissance de cette fraude. Le débat juridique se poursuivra devant la Cour de cassation », a encore avancé son avocat.

S’il y a bien un point sur lequel il n’a pas tort et que la cour d’appel lui reconnaît, c’est que Nicolas Sarkozy n’avait « nullement connaissance de la fraude ». Ou tout au moins que rien ne permet de le prouver. Mais dans cette affaire de double facturation qui a permis au président candidat à sa propre succession d’exploser le plafond des dépenses autorisé par la loi en 2012, difficile de dire qu’il n’en a pas « bénéficié » pour reprendre les termes de l’ordonnance de renvoi des juges d’instruction.

Pour rappel, en 2012, plusieurs cadres de l’UMP et les dirigeants de la société Bygmalion avaient mis sur pieds une escroquerie permettant de sortir plusieurs meetings du compte officiel de la campagne de Nicolas Sarkozy. Avec, finalement, un écart de plus de 20 millions d’euros sur les autres candidats. Encore une fois, rien ne permet de dire que Nicolas Sarkozy avait organisé ce système ou même en avait été ne serait-ce qu’informé. Mais il en a évidemment bénéficié en tant que candidat. Dans la mesure où son compte de campagne porte sa signature, difficile pour la justice de ne pas lui en faire grief et de ne pas le condamner pour « financement illégal de campagne ». Car, pour la justice, la magouille Bygmalion n’est plus à démontrer. En affichant dans la salle d’audience les fameuses fausses factures jour après jour, la cour d’appel a, comme l’avait fait avant elle le tribunal judiciaire, démontré l’existence de cette fraude ; c’est ainsi qu’elle a également lourdement condamné tous les protagonistes de ce dossier.

La menace du procès du financement libyen

Évidemment aujourd’hui, leur sort importe peu. Même Jérôme Lavrilleux, le plus illustre des co-prévenus, ne vaut pas tripette dans l’opinion publique à côté de Nicolas Sarkozy qui se bat désormais pour ne pas être le premier président de la Cinquième République à être condamné à une peine de prison ferme.

Mais nous le disions plus haut : plus le temps passe et plus l’espoir s’amenuise pour lui. Déjà condamné en première instance et en appel dans l’affaire dite « affaire des écoutes » de Paul Bismuth (trois ans de prison dont un an ferme), le voilà désormais soumis au même sort dans l’affaire Bygmalion. Pour chaque dossier, il a saisi la plus haute juridiction, comme un ultime espoir. Mais il sait bien qu’il ne lui reste plus beaucoup de cartouches avant d’être frappé, définitivement, pas une décision de justice. Il doit se rappeler cet adage fleuri de son prédécesseur Jacques Chirac : « les emmerdes, ça vole en escadrille ! » Car Nicolas Sarkozy sait que le plus gros dossier qui l’attend sera celui du financement libyen de sa campagne de 2007 pour lequel il est quadruplement mis en examen et pour lequel il sera jugé, pendant quatre mois, début 2025. L’audience de fixation qui organisera ce procès doit se tenir le 7 mars prochain. Le début de la suite des ennuis pour lui.

newsid:488465

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.