Réf. : Cass. civ. 3, 7 décembre 2023, n° 22-20.093, F.D N° Lexbase : A126918I
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 12 Janvier 2024
► La validité de la clause d’exclusion de garantie dépend de la qualité de l’acheteur ; s’il est professionnel, il est irréfragablement réputé avoir connaissance du vice.
La clause de non-garantie des vices cachés ne peut être invoquée par l’acheteur professionnel, réputé avoir connaissance du vice qui affecte la chose vendue. Ce principe, quoique très sévère, est régulièrement rappelé par la jurisprudence comme en atteste l’arrêt rapporté.
En l’espèce, des vendeurs particuliers vendent une ferme à des acquéreurs, également particuliers. Les acquéreurs, invoquant l’existence de vices cachés, obtiennent la désignation d’un expert judiciaire puis assignent au fond après le dépôt du rapport sur le fondement de la garantie des vices cachés et, subsidiairement, de l’obligation de délivrance conforme.
La cour d’appel de Nancy, dans un arrêt rendu le 23 mai 2022 (CA Nancy, 23 mai 2022, n° 21/01187 N° Lexbase : A16528GB), rejette leur demande portant sur la toiture, au motif que le vice avait été couvert par la clause d’exclusion. Pour eux, les vendeurs devaient être considérés de bonne foi et ignoraient l’existence du vice.
La Haute juridiction censure. Le particulier qui se comporte comme un professionnel de la construction sans en avoir les compétences professionnelles doit être regardé comme connaissant les vices de la chose au sens de l’article 1645 du Code civil N° Lexbase : L1748ABD.
Cet arrêt vient confirmer la sévérité de la jurisprudence à l’égard de l’acheteur, même pas vraiment professionnel. L’acheteur professionnel ou profane ne sont, en effet, pas soumis au même régime. Lorsque l’acheteur est un profane, c’est-à-dire qu’il n’a pas de compétences techniques particulières au regard du produit qu’il utilise, la jurisprudence admet, dans son ensemble, assez facilement que le vice présente un caractère caché. En revanche, la condition de l’acheteur professionnel est plus sévère puisqu’il est censé connaître les vices de la chose qu’il achète.
Il résulte de l’article 1645 du Code civil une présomption de connaissance par le vendeur professionnel du vice de la chose vendue qui l’oblige à réparer l’intégralité de tous les dommages qui en sont la conséquence (Cass. com., 5 juillet 2023, n° 22-11.621, FS-B N° Lexbase : A330198R). Le caractère irréfragable de cette présomption a pour objet de le contraindre à procéder à une vérification méticuleuse de la chose avant la vente.
Compréhensible à l’égard du vendeur (la solution est constante depuis longtemps, pour exemple : Cass. civ. 1, 21 novembre 1972, n° 70-13.898, publié au bulletin N° Lexbase : A4661CIH), la transposition envers l’acheteur n’est pas évidente.
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