La lettre juridique n°962 du 26 octobre 2023 : Procédure

[Focus] L’unité de la notion de qualité en droit processuel privé

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par Théo Scherer, Maître de conférences à l'université de Caen Normandie, Institut caennais de recherche juridique (ICReJ)

le 25 Octobre 2023

Mots-clés : droit processuel • procédure pénale • procédure civile • recevabilité • action • qualité à agir

La qualité est une des conditions de recevabilité de l’action en justice. En principe, elle découle de l’intérêt à agir, sauf dans les cas pour lesquelles la loi réserve l’action à certaines catégories de personnes. La notion de qualité a fait l’objet de nombreuses études en droit judiciaire privé. Ce n’est pas le cas en procédure pénale, sauf lorsqu’il est question de la recevabilité des requêtes en nullité d’un acte d’enquête ou d’instruction. Cette différence de traitement pourrait laisser penser que la notion n’est pas la même dans les deux matières. Cependant, il s’agit bien de la même exigence de qualité, et le fait qu’elle soit étudiée sous des angles différents n’est que le fruit de spécificités propres à chacune des procédures.


 

Les principes directeurs du procès tendent à rendre la procédure équitable, et ils se renforcent mutuellement à cette fin. Pourtant, certains d’entre eux ont des effets antagonistes. Ainsi, à moyens constants, on ne peut pas augmenter la célérité de la justice sans abréger les échanges contradictoires ou diminuer le nombre de saisines. Chaque année, plus d’un million d’affaires civiles sont soumises à l’appréciation des magistrats des tribunaux judiciaires. Les stocks ne cessent de s’alourdir en juridictions, ce qui entraîne un « sentiment de submersion et d’impuissance » [1]. Cette difficulté ne se réduit pas seulement à la question du budget de la justice. En effet, l’augmentation du nombre d’introduction d’instance n’est pas en soi un indicateur de justice saine. En revanche, il est le marqueur d’une judiciarisation de la société, qui découle de la défaillance des autres mécanismes de régulation sociale et d’une crise de confiance dans les institutions [2]. En outre, les raisons d’agir en justice des individus ne correspondent pas toujours à la volonté d’être restaurés dans leurs droits. Une demande peut être motivée par la quérulence de son auteur. Elle peut aussi être destinée à intimider un journaliste ou un chercheur importun. Par conséquent, le droit d’accès à un tribunal, garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme [3], ne saurait être absolu. Cependant, les limites de ce droit ne doivent pas être arbitraires, elles doivent résulter de règles qui s’appliquent à tous. L’action en justice est donc soumise à des conditions de recevabilité [4], et notamment à celle de la qualité à agir.

  1. La qualité est une condition de recevabilité que l’on rencontre en procédure civile comme en procédure pénale. Il s’agit d’une notion bien balisée en droit judiciaire privé. Elle est un objet d’étude traité par tous les manuels et dans d’autres ouvrages [5]. On ne peut pas en dire autant en matière pénale. Le terme « qualité » apparaît de manière désordonnée dans le Code de procédure pénale. Il est utilisé pour désigner le pouvoir juridictionnel du tribunal correctionnel [6], le pouvoir du procureur de réaliser certains actes d’investigation [7], ainsi que l’autorisation de la loi faite à tout citoyen d’appréhender l’auteur d’une infraction flagrante [8]. La jurisprudence participe parfois à la confusion, en mobilisant la notion de qualité pour traiter une question de pouvoir de représentation [9]. Cette différence de traitement montre que la notion n’a pas la même importance dans les deux matières. Elle est aussi de nature à faire douter de l’unité de la notion de qualité entre les deux procédures.
  2. En raison de ce doute, il est pertinent de s’en tenir à une méthode comparatiste. À cet égard, le droit processuel apporte un éclairage utile sur les notions juridiques. Bien sûr, chaque procédure a ses spécificités, et il ne faut pas réaliser de comparaison hâtive. Mais, contrairement aux apparences, la procédure pénale et la procédure civile ne sont pas si éloignées l’une de l’autre : elles partagent des notions et des mécanismes communs [10]. L’action fait partie de ces notions communes [11]. Si elle donne l’impression d’être différente d’une procédure à l’autre, c’est parce que les spécialistes des deux matières l’étudient sous des angles différents, propres à répondre aux problématiques qui les concernent. En établissant l’unité de la notion de qualité à agir en droit processuel, la recherche sur le sujet pourrait s’enrichir de données plus variées, issues des deux procédures. En première analyse, la dissemblance majeure est que la question de la qualité à agir en tant que condition de recevabilité de l’action semble l’apanage du droit judiciaire privé (I.), alors que la qualité à agir en tant que condition de recevabilité des exceptions de nullité donne l’impression d’une question propre à la procédure pénale (II.). Cependant, il peut être établi que cette distinction ne résulte pas d’une différence de contenu de la notion de qualité entre les deux procédures, mais tient en réalité aux spécificités que connaissent ces matières.

I. L’appropriation de la question de la qualité à agir par le droit judiciaire privé

  1. Les définitions et les réflexions portant sur la qualité à agir ont essentiellement été proposées par des spécialistes de procédure civile, généralement dans le cadre d’une étude sur l’action en justice (A.). Pour autant, la qualité est aussi une condition de l’action en matière pénale. Mais en raison des spécificités de la procédure répressive, elle n’entraîne qu’occasionnellement des difficultés (B.) et livre donc peu de matière à commentaire.

A. Une condition de l’action en justice

  1. La notion d’action fait l’objet d’une controverse doctrinale : elle peut être perçue comme le droit substantiel mis en mouvement [12], comme l’expression d’un droit d’agir en justice [13], comme un lien entre au moins deux personnes ayant pour objet une situation de fait dont l’une a un intérêt légitime à demander la modification [14] ou comme une manière commode de désigner les conditions de recevabilité des demandes et des défenses [15]. Dès lors, plusieurs définitions de la qualité coexistent : pour les uns, il s’agit d’un titre attaché au droit d’agir en justice pour certaines actions [16], pour d’autres, elle résulte de « l’aptitude du demandeur à être titulaire du droit substantiel litigieux » [17]. Quelle que soit la conception retenue, tous les auteurs s’accordent à dire que celui qui agit en justice doit avoir intérêt et qualité dans les cas que la loi détermine. C’est ce qui ressort des articles 31 N° Lexbase : L1169H43 et 122 N° Lexbase : L1414H47 du Code de procédure civile. Après avoir admis que la qualité est une condition de recevabilité de l’action, il faut distinguer deux cas de figure. Le premier se rencontre lorsque l’existence d’un intérêt légitime, né et actuel suffit pour que la demande soit recevable. On dit alors que la qualité découle de l’intérêt, ou que la qualité est absorbée par la notion d’intérêt [18]. Si tel est le cas, alors l’action est dite « banale ». En revanche, si l’action est réservée à certaines personnes parmi celles qui y ont intérêt, alors l’action est dite « attitrée ».

  2. Les actions attitrées sont la manifestation d’une restriction de l’action, empêchant certaines personnes d’agir, alors même qu’elles pourraient y trouver un intérêt. Une de leurs finalités est de prévenir l’immixtion de tiers dans des affaires desquelles il convient de les écarter. Ainsi, on retrouve beaucoup d’actions attitrées en matière familiale. L’exemple du divorce est particulièrement parlant : cette action est réservée aux époux. L’action en recherche de paternité [19] et de maternité [20] est réservée à l’enfant, l’action en nullité du mariage pour vice de consentement est attitrée aux époux [21] et au ministère public [22]. Ces quelques illustrations ne doivent pas donner l’impression que les actions attitrées sont uniquement présentes lorsqu’il est question de droits extrapatrimoniaux. En matière contractuelle, le principe est que seuls les cocontractants ont qualité à agir pour demander l’exécution ou l’anéantissement de la convention. De manière plus générale, on remarque que la qualité à agir s’apprécie au regard de la possibilité objective que le demandeur soit titulaire du droit qu’il invoque [23].
  3. Certains effets particuliers sont parfois attachés à la qualité. Il existe des dispositions spéciales qui conditionnent l’action à la seule démonstration de la qualité à agir [24]. Ainsi, la nullité d’un mariage pour bigamie peut être invoquée par toute personne y ayant intérêt [25]. Pour l’époux au préjudice duquel a été contracté un second mariage, son action n’est pas subordonnée à la démonstration d’un intérêt à agir [26]. Cette condition ne s’imposera à lui que s’il perd cette qualité d’époux [27]. La qualité permet ici de présumer l’intérêt. Il y a un autre domaine dans lequel les notions de qualité et d’intérêt sont particulièrement déformées. Il s’agit des actions en défense des intérêts d’autrui. En principe, elles ne devraient pas être admises, car le requérant invoque une règle dont il n’est pas destinataire, au bénéfice d’un intérêt qui ne lui est pas personnel. Néanmoins, pour certaines de ces actions, le législateur et la jurisprudence ont attribué à des individus et des groupements une qualité artificielle [28], leur permettant d’agir au nom de l’intérêt d’autrui. Tel est le cas de l’action des associations en défense d’un intérêt collectif. Elle existe dans une moindre mesure en procédure pénale, dans le cadre de régimes d’habilitation prévus aux articles 2-1 et suivants du code. Cette action ne doit pas être confondue avec la défense de l’intérêt général, qui relève du ministère public.
  4. Le ministère public connaît deux modalités de participation à la procédure en droit judiciaire privé : en tant que partie principale ou en tant que partie jointe. Seule la première est pertinente pour une comparaison avec la procédure pénale. Il est généralement affirmé que la loi donne qualité au procureur de la République pour intervenir dans un certain nombre d’affaires [29], que sa qualité à agir est liée à ses prérogatives fonctionnelles [30]. Pour certaines matières, des dispositions prévoient expressément qu’il peut agir : contestation de nationalité [31], demande d’ouverture d’une mesure de protection [32] ou d’une procédure de redressement judiciaire [33]. Le procureur a aussi qualité pour intervenir dans toute affaire, à condition qu’il agisse pour défendre l’ordre public à l’occasion des faits qui portent atteinte à celui-ci [34]. Dans ce cas, sa qualité ne suffit pas, il doit démontrer un intérêt particulier, tendant à la protection de l’intérêt général. La particularité des conditions de recevabilité de l’intervention du ministère public est encore plus remarquable en matière pénale.

B. Une difficulté occasionnelle en matière pénale

  1. Si la question de la qualité à agir est peu étudiée en procédure pénale, c’est sans doute en raison du rôle prépondérant du procureur de la République. Le procureur a toujours qualité à mettre en mouvement et exercer l’action publique, sans qu’il n’ait à justifier d’un intérêt particulier [35]. Dans certains cas, son action est susceptible d’être irrecevable [36], mais ce n’est jamais en raison d’un défaut de qualité. Toutefois, cette affirmation ne vaut que pour l’action publique stricto sensu. Pour l’action fiscale, le procureur n’a qualité à la mettre en mouvement qu’accessoirement à l’action publique contre un délit ou une contravention douanière de cinquième classe [37].

  2. En laissant de côté le ministère public, on pourrait se demander s’il en est de même pour l’action civile. Il est parfois écrit que l’action civile est une action attitrée, réservée à ceux qui, selon l’article 2 du Code de procédure pénale, « ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ». Ce texte implique que la victime qui souhaite se constituer partie civile allègue avoir subi un préjudice découlant d’une infraction. Ce faisant, elle met en avant un trouble dont elle souffre et que le jugement sollicité pourrait faire cesser. Dès lors, cette condition semble davantage relever de l’intérêt à agir [38]. On pourrait objecter que dans certains cas, des personnes ont vu leur constitution de partie civile déclarée irrecevable, alors même qu’elles pouvaient justifier d’un intérêt. C’est notamment le cas lorsqu’il y a une adéquation imparfaite entre l’infraction et le préjudice allégué. Pour l’illustrer, on peut prendre l’exemple d’une société qui s’est constituée partie civile dans les poursuites exercées contre un conducteur pour blessures involontaires aggravées [39]. Dans cette affaire, la société était la propriétaire du véhicule qui a été détruit dans l’accident. La Cour de cassation a retenu que la société n’était pas une victime directe de l’infraction, et était donc irrecevable à se constituer partie civile. Toutefois, le caractère direct ou non du préjudice est à rattacher à l’intérêt, qui doit lui-même être direct [40]. À ce titre, la chambre criminelle a parfois utilisé la formule : « un intérêt direct et personnel peut seul servir de base à l’action civile devant les juridictions répressives » [41]. Il n’est donc pas question de défaut de qualité dans ce cas.
  3. En revanche, il est vrai que la Cour de cassation s’est parfois servie de l’exigence d’un préjudice direct pour ériger des actions civiles attitrées. Tel est le cas lorsqu’elle affirme que seules certaines catégories de personnes peuvent subir un préjudice direct découlant d’une infraction donnée. La chambre criminelle a notamment retenu « que le délit d’abus des biens ou du crédit d’une société ne cause de préjudice direct qu’à la société elle-même et à ses actionnaires ; que les créanciers de la société ne peuvent souffrir que d’un préjudice qui, à le supposer établi, serait indirect et dont la réparation, dès lors, ne pourrait être demandée qu’aux juridictions civiles » [42]. De même, elle estime que l’infraction de tromperie ne peut causer de préjudice direct qu’aux consommateurs [43]. La présomption d’absence d’intérêt direct qu’elle édicte à l’égard de ceux qui n’appartiennent pas à la catégorie qu’elle a désigné produit les mêmes effets qu’une action attitrée. Un autre exemple peut être pris de la qualification prétorienne d’infraction d’intérêt général. La chambre criminelle retient que ces infractions n’ont « en vue que les intérêts de l’ordre public » [44]. Or, seul le ministère public a qualité à défendre ces intérêts, ce qui empêche toute constitution de partie civile.
  4. Depuis plusieurs dizaines d’années, la tendance est d’ouvrir l’action civile devant le juge répressif à un plus grand nombre de personnes. La théorie des infractions d’intérêt général est en déclin [45] et l’action civile des victimes par ricochet est plus largement admise [46]. En outre, le législateur permet de plus en plus aux tiers subrogés dans les droits de la victime d’intervenir dans le procès pénal [47]. Par conséquent, le nombre de décisions déclarant une constitution de partie civile irrecevable devrait avoir tendance à décroître.
  5. Ce n’est donc pas tant en matière d’action publique ou d’action civile que se rencontrent les difficultés relatives à la qualité à agir, mais plutôt en matière de recours. En effet, l’exercice des voies de recours est soumis lui aussi à des conditions de recevabilité, et la majorité des recours sont d’ailleurs des voies attitrées, réservées aux seules parties [48]. Pour certains recours ouverts dès la phase préparatoire au procès pénal, on retrouve d’autres conditions de qualité. C’est le cas pour l’appel ouvert contre la décision du juge des libertés et de la détention ordonnant de procéder à une saisie spéciale [49]. Selon les textes du Code de procédure pénale, seuls le propriétaire et les tiers ayant des droits sur le bien saisi peuvent former le recours. L’appel d’un suspect ou un mis en examen qui n’aurait pas l’une de ces deux qualités est donc irrecevable [50]. Toutefois, la Cour de cassation fait preuve de souplesse, en admettant qu’une personne sans droit sur le bien appartenant à une personne morale, mais qui en a tout de même la libre disposition, puisse interjeter appel de la décision ordonnant la saisie [51]. Pour retenir cette solution, la chambre criminelle se fonde sur l’intérêt protégé, comme elle a l’occasion de le retenir en matière d’exceptions de nullité. 

II. La prédominance de la qualité du défendeur en procédure pénale

  1. Depuis quelques années, la question de la qualité à agir a gagné de l’importance en matière pénale, principalement dans le cadre du contentieux de l’annulation des actes d’enquête ou d’instruction (A.). Bien que discrète, la question de l’exigence de qualité à se défendre existe aussi en procédure civile (B.).

A. La recevabilité d’une demande d’annulation d’un acte d’enquête ou d’instruction

  1. Deux arrêts du 7 septembre 2021 [52] ont mis la notion de qualité à agir sur le devant de la scène en procédure pénale. Bien qu’il ne s’agisse pas des premières décisions formulant l’exigence de qualité à demander l’annulation d’un acte d’enquête ou d’instruction, ces arrêts marquent un tournant [53]. Depuis longtemps, la jurisprudence retenait qu’un tiers à un acte d’instruction ne pouvait pas exciper de sa nullité, sans toutefois faire référence à la qualité à agir [54]. L’expression apparaît timidement dans quelques arrêts [55]. Elle n’est véritablement érigée en condition de recevabilité des requêtes en nullité que dans les arrêts de 2021. Dotée d’une motivation enrichie, ces décisions ne définissent pas la qualité à agir, mais donnent une méthode d’appréciation : le juge doit rechercher si « la formalité substantielle ou prescrite à peine de nullité, dont la méconnaissance est alléguée, a pour objet de préserver un droit ou un intérêt qui lui [le requérant] est propre ». Mutadis mutandis, cela revient à se demander si la partie qui invoque l’irrégularité de l’acte d’enquête ou d’instruction était bien la personne protégée par la disposition méconnue, c’est-à-dire le destinataire de la règle de droit en cause. La notion de qualité mobilisée par la chambre criminelle est donc similaire à celle qui prévaut en droit judiciaire privé.

  2. La jurisprudence est déjà suffisamment riche en ce domaine pour que différentes catégories se dessinent. Dans un premier temps, on peut dire que l’exception de nullité est une action attitrée, car elle est réservée aux parties. Il s’agit a priori d’une évidence, puisque c’est le cas de toutes les défenses. Le terme partie est ici compris dans un sens large, incluant le témoin assisté [56] et le ministère public [57]. La précision est importante, car le mot « partie » désigne seulement le mis en examen et la partie civile dans le livre Ier du Code de procédure pénale [58]. Cet aspect n’est pas dépourvu d’enjeu, car il arrive que des tiers à la procédure revendiquent le droit de demander l’annulation d’un acte d’enquête ou d’instruction. Tel est le cas du journaliste qui souhaite voir des procès-verbaux de surveillance annulés pour violation du secret des sources. S’il n’est pas partie à la procédure, sa requête en annulation est irrecevable. Cette solution reste conforme au droit à un recours juridictionnel effectif pour le Conseil constitutionnel [59].
  3. La nécessaire qualité de partie mise à part, l’exception de nullité d’un acte d’enquête ou d’instruction peut être une défense banale ou attitrée. Les exemples d’actions attitrées ne manquent pas. En principe, l’irrégularité d’une perquisition ne peut être invoquée que par la partie titulaire d’un droit sur le local dans lequel la perquisition a été effectuée [60]. En matière d’accès aux données de connexion, seules les parties qui prétendent être titulaires ou utilisatrices de l’une des lignes identifiées ou qui établissent qu’il aurait été porté atteinte à leur vie privée ont qualité à invoquer l’irrégularité des investigations litigieuses [61]. De même, seule une personne photographiée à l’occasion de surveillances a qualité pour en contester la régularité [62].
  4. Il est important de noter que l’emploi d’un stratagème déloyal fait tomber l’exigence de qualité ; avant les arrêts de 2021, la Cour de cassation avait déjà admis qu’un tiers à un interrogatoire se prévale de la méconnaissance d’un droit appartenant en propre à une autre personne dès lors que c’est le caractère déloyal de l’acte qui est invoqué [63]. Elle a récemment confirmé cette solution dans un arrêt du 25 octobre 2022 : « une personne mise en examen est recevable, sans que puisse lui être opposé un défaut de qualité pris de l’absence d’un droit ou d’un intérêt qui lui est propre, à présenter un moyen de nullité dès lors qu’elle invoque le recours, par l’autorité publique, à un procédé déloyal » [64].
  5. Pour ce qui est des actions banales, différents arrêts permettent de tracer leur périmètre. La Cour de cassation a notamment estimé que la violation d’une « formalité substantielle dont l’objet est de garantir le caractère contradictoire du déroulement des opérations de perquisition ainsi que la présence effective sur les lieux des objets découverts et saisis » pouvait être invoquée par toute partie y ayant un intérêt [65]. Cette particularité découle de l’arrêt Bykov c. Russie, dans lequel la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé que tout accusé doit se voir offrir la possibilité de remettre en question l’authenticité des éléments de preuve [66]. Par conséquent, on peut raisonnablement imaginer que la violation d’autres formalités, destinées à garantir l’authenticité des éléments de preuve, puisse être invoquée par toutes parties sans qu’elles aient à justifier d’une qualité particulière, comme l’absence de témoins au cours d’une pesée contradictoire [67] ou le défaut d’enregistrement de l’interrogatoire d’un suspect en matière criminelle [68]. Le contrôle de la finalité des formalités encadrant la réalisation d’un acte d’enquête est opéré par la Cour de cassation. En effet, dans des arrêts récents [69], des parties avaient estimé que l’absence d’autorisation judiciaire d’une géolocalisation était de nature à affecter l’authenticité du moyen de preuve obtenu de cette manière, ce qui devait donc ouvrir l’exception de nullité à toutes les parties y trouvant un intérêt. Mais pour la Cour de cassation, cette autorisation avait pour finalité de préserver le droit au respect de la vie privée des personnes, et par conséquent, seules les personnes justifiant de droit sur les véhicules géolocalisés ou arguant d’une violation de l'intimité de la vie privée avaient qualité à agir.
  6. Enfin, doit être signalé le cas des nullités d’ordre public, qui ne sont pas soumises à une condition d’intérêt et de qualité. Cette catégorie regroupe notamment la méconnaissance de dispositions relatives à la compétence des juridictions [70] ou aux modalités d’intervention d’un expert [71].

B. La discrète exigence de qualité à soulever une exception de nullité en procédure civile

  1. En droit judiciaire privé, il est aussi admis que le défendeur doit répondre à une condition de qualité [72]. Cette exigence découle notamment de l’article 32 du Code de procédure civile, qui dispose que les prétentions émises contre une personne dépourvue du droit d’agir sont irrecevables. Pour la doctrine, il faut que le défendeur ait le droit de discuter le bien-fondé de la prétention émise par le demandeur [73]. La qualité à défendre résulte bien souvent de l’intérêt à se défendre, qui relève quant à lui de l’évidence [74]. Mais la loi détermine parfois qui peut être défendeur [75], et la jurisprudence a déjà déclaré irrecevables des actions intentées contre la mauvaise personne [76]. Néanmoins, dans ce cas de figure, la qualité n’est pas une condition de recevabilité de la défense, mais de l’action : la fin de non-recevoir sanctionne ici une erreur du demandeur [77]. Cette hypothèse ne correspond donc pas à celle qui vient d’être présentée en matière pénale.

  2. En effet, ce qui est recherché, c’est la qualité en tant que condition de recevabilité des défenses, parfois désignée sous le nom de « qualité active du défendeur » [78]. Cette idée a été discutée en doctrine. Si l’exigence d’intérêt semble parfois avoir été retenue, en revanche, il y a un consensus pour rejeter l’exigence de qualité pour présenter les défenses [79]. Cependant, les termes de ce débat ne correspondent qu’imparfaitement à la question de la recevabilité des exceptions de nullité, puisque les auteurs raisonnent essentiellement avec le cas des défenses au fond. Pour effectuer la comparaison avec la procédure pénale et les arrêts du 7 septembre 2021, il est nécessaire de se cantonner à la recevabilité des exceptions de nullités d’actes de procédure.
  3. Sur ce point, la jurisprudence est rare, mais pas inexistante. Un arrêt a été rendu sur cette question au début du XIXe siècle [80]. Il était question d’héritiers régulièrement cités qui avaient soulevé la nullité de la citation d’autres parties. La Cour royale de Nîmes avait fait droit à l’exception, mais son arrêt a été cassé par la Cour de cassation. Pour celle-ci, les litisconsorts ne pouvaient pas « se plaindre d’une irrégularité qui ne les concernait pas et qui n’avait pas été relevée par les seules parties intéressées ». Des commentateurs en ont déduit que « le droit d’exciper des nullités de procédure n’appartient qu’aux personnes vis-à-vis desquelles ces nullités ont été commises » [81]. À lui seul, cet arrêt n’est pas pleinement satisfaisant : il ne fait pas référence à la notion de qualité, il est trop ancien et surtout, le fait que les parties n’ont pas comparu en 1re instance et qu’elles ont soulevé la nullité de la citation pour la première fois en appel brouille sa portée.
  4. Plus récemment, des arrêts se sont prononcés sur cette question en matière d’irrégularité de fond. La Cour de cassation a notamment affirmé que « l’acte délivré au nom d’une personne décédée est entaché d’une irrégularité de fond pouvant être soulevée par tout intéressé » [82] et que « le défaut de pouvoir d’une personne, figurant au procès comme représentant d’une personne morale, constitue une irrégularité de fond qui peut être invoquée par tout défendeur à l’action » [83]. Il faudrait donc voir dans ces exceptions de nullité des défenses banales [84]. Toutefois, d’autres arrêts, relatifs à l’action de collectivités territoriales, ont réservé le droit d’invoquer l’irrégularité d’un acte à certaines personnes. Ainsi, seule une commune est recevable à invoquer le défaut d’autorisation de son maire à interjeter appel en son nom [85] et que « l’exception tirée du défaut d’autorisation d’agir en justice au nom du département donnée par le conseil général à son président existe seulement dans l’intérêt de la collectivité territoriale et que, dès lors, la partie adverse n’est pas autorisée à s’en prévaloir » [86]. On peut donner un autre exemple tiré de l’action d’un syndic de copropriété. Traditionnellement, la jurisprudence estimait que toute partie y ayant intérêt pouvait soulever le défaut d’autorisation du syndic d’agir en justice [87]. Mais en 2019, le législateur a réservé cette exception de nullité aux seuls copropriétaires [88]. Il est donc permis de penser que le domaine des exceptions attitrées de nullité tirée d’une irrégularité de fond continue de s’étendre [89].
  5. Pour ce qui est des vices de forme, il faut s’intéresser à un arrêt du 1er septembre 2016 [90]. Dans cette affaire, la deuxième chambre civile a retenu que « seul le destinataire d’un acte est recevable à se prévaloir de la nullité de cet acte en raison d’une irrégularité de forme l’affectant ». Bien que le terme n’apparaît pas expressément, il est bien question de qualité dans cet arrêt [91]. On pourrait s’étonner d’une action attitrée, réservée au seul « destinataire de l’acte» affecté d’un vice de forme. Néanmoins, la qualité visée découle de l’irrégularité en cause : en l’espèce, il était question de l’annulation de la notification d’une surenchère. S’il était question d’une irrégularité commise dans le cadre d’une mesure d’instruction, la qualité de destinataire de l’acte serait inopérante. Les résultats d’une mesure d’instruction affectée d’un vice sont susceptibles de porter atteinte aux intérêts du demandeur et à ceux du défendeur. Par exemple, le défaut d’accomplissement personnel de sa mission par l’expert peut valablement être invoqué par la partie qui a saisi le juge pour voir ordonner la mesure d’instruction [92] ou par son adversaire [93]. Dès lors, faire de l’exception de nullité d’une mesure d’instruction une défense attitrée semble trop restrictif ; en ce domaine, le seul contrôle de l’intérêt à demander l’annulation semble pertinent. En réalité, tout dépend de l’irrégularité en cause et de l’intérêt protégé [94]. Si l’on retient cette conception, on retrouve donc une condition de recevabilité de l’exception de nullité analogue à celle qui prévaut en matière pénale.
  6. De manière plus générale, au terme de la comparaison, on constate l’unité de la notion de qualité en droit processuel privé. Le fait qu’elle soit mobilisée dans des cadres différents résulte seulement des particularités de chacun des contentieux. Le rôle prépondérant du procureur de la République dans la mise en mouvement de l’action publique atténue l’importance de la qualité en tant que condition de recevabilité de l’action. En revanche, la multiplicité des actes d’enquête et d’instruction attentatoires aux droits fondamentaux exacerbe les enjeux tenant à la recevabilité des exceptions de nullité. Les différences de contentieux conduisent la jurisprudence et la doctrine à traiter cette question sous des angles différents, mais il n’en reste pas moins que la notion de qualité est caractérisée par son unicité en droit processuel privé. Ce lien invite à transposer des solutions prétoriennes d’une branche du droit à l’autre et ouvre des perspectives de recherche intéressantes. Il clarifie la notion, et ce faisant, participe à l’effectivité du droit d’accès à un tribunal.
 

[1] Rapport du comité des États généraux de la justice, avril 2022, p. 18.

[2] M. Castillo, La judiciarisation, une solution et un problème, Inflexions 2018, n° 2, p. 167.

[3] CEDH, Req. 4451/70, 21 février 1975, Golder c/ Royaume-Uni N° Lexbase : A1951D7E.

[4] Pour la CEDH, le fait qu’une action du requérant soit jugée irrecevable pour défaut d’intérêt légitime n’équivaut pas à un refus d’accès à un tribunal : CEDH, Req. 11761/85, 28 juin 1990, Obermeier c/ Autriche, § 68 N° Lexbase : A6327AWA.

[5] V. aussi R. Gassin, La qualité pour agir en justice, 1955, thèse de doctorat, université d’Aix-en-Provence.

[6] C. proc. pén., art. 385 N° Lexbase : L3791AZG : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction ».

[7] C. proc. pén., art. 701, al. 2 N° Lexbase : L7706I7K  : « Toutefois, le procureur de la République a qualité pour accomplir ou faire accomplir les actes nécessités par l’urgence ».

[8]  C. proc. pén., art. 73 N° Lexbase : L3153I38 : « Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur […] ».

[9] Cass. crim., 3 janvier 2006, n° 04-85.991, FS-P+F N° Lexbase : A4151DMP.

[10] E. Vergès, Procès civil, procès pénal : différents et pourtant si semblables, D. 2007, p. 1441.

[11] V. en ce sens E. Vergès, La notion d’action, in S. Amrani-Mekki (dir.), Procédure civile et procédure pénale : unité ou diversité ?, 2014, Bruylant, p. 89.

[12] C. Demolombe, Cours de Code Napoléon, t. 9, 4e éd.,1870, Durand et Hachette, n° 338.

[13] H. Motulsky, Le droit subjectif et l’action en justice, in Études et notes de procédure civile, 2010, Dalloz, reproduction de l’édition de 1973, p. 85 et s.

[14] G. Wiederkehr, La notion d’action, in S. Amrani-Mekki (dir.), Procédure civile et procédure pénale : unité ou diversité ?, 2014, Bruylant, p. 79.

[15] J. Héron, T. Le Bars, K. Salhi, Droit judiciaire privé, 7e éd., 2019, LGDJ, n° 48 et s.

[16] « Qualité », in Cornu G. (dir.), Vocabulaire juridique, 14e éd., 2022, PUF.

[17] G. Bolard, Qualité ou intérêt pour agir ?, in Mélanges en l’honneur de Serge Guinchard. Justices et droit du procès : du légalisme procédural à l’humanisme processuel, 2010, Dalloz, p. 597.

[18] S. Guinchard, F. Ferrand, C. Chainais, L. Mayer, Procédure civile, 36e éd., 2022, Dalloz, n° 193. 

[19] C. civ., art. 327 N° Lexbase : L8829G9U.

[20] C. civ., art. 325 N° Lexbase : L5825ICQ.

[21] Si le consentement d’un seul des époux a été vicié, l’autre n’a pas qualité à demander l’annulation du mariage.

[22] C. civ., art. 180 N° Lexbase : L1359HI8.

[23] V. aussi C. Giverdon, La qualité, condition de recevabilité de l’action en justice, D. 1952, 1, chron. XIX : « Dans un procès ayant pour objet l’atteinte à un droit subjectif, a seul qualité pour agir celui qui se prétend titulaire de ce droit ».

[24] En ce sens, et pour d’autres exemples, v. G. Cornu et J. Foyer, Procédure civile, 3e éd., 1996, PUF, n° 77.

[26] C. civ., art. 188 N° Lexbase : L1948ABR.

[27] Cass. civ. 1ère, 31 janvier 1990, n° 88-16.497 N° Lexbase : A3849AHZ : JCP G 1990, IV, 121.

[28] J. Héron, T. Le Bars, K. Salhi, op. cit., n° 83.

[29] V. G. Cornu et J. Foyer, op. cit., n° 88.

[30] V. R. Gassin, op. cit., n° 178 et s.

[31] C. civ., art. 29-3 N° Lexbase : L2701ABN.

[32] C. civ., art. 430 N° Lexbase : L8412HWH.

[33] C. com., art. L. 631-8 N° Lexbase : L7315IZX.

[34] C. proc. civ., art. 423 N° Lexbase : L6524H7R.

[35] En ce sens, v. E. Vergès, La notion d’action, préc., p. 99. V. aussi L. Cadiet et E. Jeuland, Droit judiciaire privé, 11e éd., 2020, LexisNexis, n° 353.

[36] V. par ex. C. pén., art. 226-6 N° Lexbase : L4980LAP (exigence d’une plainte préalable de la victime pour les atteintes à la vie privée) ou LPF, art. L. 228 N° Lexbase : L6506LUI (verrou de Bercy).

[37] Cass. crim., 20 février 1997, n° 95-84.764 N° Lexbase : A0925ACA.

[38] En ce sens, v. E. Jeuland, Droit processuel général, 4e éd., 2018, n° 314 ; J. Leroy, Procédure pénale, 6e éd., 2019, n° 420.

[39] Cass. crim., 18 octobre 1995, n° 94-83.119 N° Lexbase : A8851ABG.

[40] V. G. Cornu et J. Foyer, op. cit., n° 78.

[41] Cass. crim., 16 novembre 1956 : Gaz. Pal. 1957. 1. 163.

[42] Cass. crim.,9 novembre 1992, n° 92-81.432 N° Lexbase : A0804ABE : B. Bouloc, note, Rev. Sociétés, 1993, p. 433 ; Bull. Joly Sociétés 1993, p. 317.

[43] Cass. crim., 22 novembre 2016, n° 15-86.766, F-P+B N° Lexbase : A3542SLR : J.-H. Robert, note, Dr. pén. 2017, comm. 46.

[44] Cass. crim., 2 mars 1961.

[45] Par ex. les infractions aux dispositions du Code de l’urbanisme ne sont plus considérées comme des infractions d’intérêt général : Cass. crim.,17 janvier 1984, n° 81-92.858 N° Lexbase : A7967AAC. Il en va de même pour la non-dénonciation de crime : Cass. crim.,17 novembre 1993, n° 93-80.466 N° Lexbase : A9221CHY : G. Levasseur, obs., RSC 1994, p. 333.

[46] La Chambre criminelle refusait l’action de la victime par ricochet si la victime directe n’était pas décédée. Elle a renoncé à cette jurisprudence au cours des années 1980 : Cass. crim.,9 février 1985, n° 85-91.653.

[47] Par ex. les assureurs (C. proc. pén., art. 388-1 N° Lexbase : L7518LP7), les tiers payeurs (CSS, art. L. 376-1 N° Lexbase : L8870LHY et L. 455-2 N° Lexbase : L6965IG3), les fonds de garantie (C. proc. pén., art. 706-11 N° Lexbase : L7661LPG et C. assur., art. L. 421-5 N° Lexbase : L2504DKX)…

[48] V. G. Cornu et J. Foyer, op. cit., n° 78.

[49] V. par ex. C. proc. pén., art. 706-148, al. 2 N° Lexbase : L5021K8H (saisie de patrimoine), 706-150, al. 2 N° Lexbase : L7454LPR (saisie immobilière) et 706-153, al. 2 N° Lexbase : L7453LPQ (saisie de biens incorporels).

[50] Cass. crim.,15 mars 2017, n° 16-80.801, FS-P+B N° Lexbase : A2640UCR.

[51] Cass. crim.,9 juin 2022, n° 21-86.360, FS-B N° Lexbase : A793474M : J. Buisson, note, Procédures 2022, comm. 230 ; M. Hy, Recevabilité de l’appel d’une ordonnance de saisie par la personne à l’encontre de laquelle la demande d’entraide aux fins de saisie a été réalisée, Lexbase Pénal, juillet 2022 N° Lexbase : N2203BZM.

[52] Cass. crim.,7 septembre 2021, no 20-87.191, FS-B N° Lexbase : A458743B et 21-80.642, FS-B N° Lexbase : A459043E : A.-S. Chavent-Leclère, note, Procédures 2021, comm. 299 ; P.-J. Delage, note, RSC 2022, p. 9 ; V. Georget, obs., Dr. pén. 2022, chron. 1  ; J. Leroy, chron., JCP G 2021, doctr. 1039 ; H. Matsopoulou, note, JCP G 2021, 1161.

[53] Pour une approche plus complète de cette évolution, v. J. Buisson, La requête en annulation : le droit à un recours effectif quelque peu malmené ?, Procédures 2022, ét. 12 ; E. Rubi-Cavagna, Nullités des actes de l’enquête et de l’instruction – Le principe du contradictoire rebat les règles, RSC 2022, p. 439. V. aussi J.-B. Perrier, Le contentieux des nullités en procédure pénale : aspects théoriques, Lexbase Pénal 24 mai 2018 N° Lexbase : N3939BX8.

[54] Ce constat pouvait déjà être fait dès le début des années 2000. V. P. Bonfils, Essai sur la nature juridique d’une institution, 2000, PUAM, n° 75 et s.

[55] V. par ex. Cass. crim., 11 février 2014, n° 13-86.878, F-P+B+I N° Lexbase : A3775MEK : « dès lors que ce dernier était sans qualité pour se prévaloir de la méconnaissance de formalités substantielles à l’occasion de l’audition libre d’une autre personne » ; Cass. crim.,30 janv. 2019, n° 17-86.618 : « la méconnaissance d’une formalité substantielle de la rétention douanière […] que des tiers n’ont pas qualité à invoquer ».

[56] C. proc. pén., art. 170 N° Lexbase : L0918DYN. Cette précision ne vaut que pour la requête présentée au cours de l’instruction, car par hypothèse, un témoin assisté ne peut pas être renvoyé devant une juridiction de jugement.

[57] Même article.

[58] Cass. crim., 21 juin 2005, n° 05-81.491, F-P+F+I N° Lexbase : A8678DIA : J. Buisson, obs., Procédures 2005, comm. 238.

[59] Cons. const., décision n° 2022-1021 QPC, 28 octobre 2022 N° Lexbase : A21288RA : A Léon, Secret des sources et absence de capacité d’action en annulation des journalistes tiers à une procédure : pas d’inconstitutionnalité, Lexbase Pénal, novembre 2022 N° Lexbase : N3144BZH.

[60] Cass. crim., 6 février 2018, n° 17-84.380, FS-P+B N° Lexbase : A6728XC8.

[61] Cass. crim.,12 juillet 2012, n° 21-83.710, F-D N° Lexbase : A01847GW.

[62] Cass. crim., 28 mars 2023, n° 22-83.874, F-B N° Lexbase : A14119LT.

[63] Cass. crim., 15 décembre 2015, n° 15-82.013, FS-P+B N° Lexbase : A8544NZH : H. Matsopoulou, note, JCP G 2016, 335.

[64] Cass. crim., 25 octobre 2022, n° 21-85.763, F-D N° Lexbase : A03327TH : A.-S. Chavent-Leclère, comm., Procédures 2022.

[65] Cass. crim., 7 septembre 2021, n° 21-80.642, FS-B N° Lexbase : A459043E : A.-S. Chavent-Leclère, obs., Procédures 2021, comm. 299 ; H. Matsoupoulou, obs., JCP G 2021, 1161.

[66] CEDH, 10 mars 2009, Req. 4378/02, Bykov c/ Russie, § 90 N° Lexbase : A4528EMN.

[67] C. proc. pén., art. 706-30-1 N° Lexbase : L7675IPX.

[68] C. proc. pén., art. 64-1 N° Lexbase : L8170ISE.

[69] Cass. crim., 5 septembre 2023, n° 22-87.391, F-D N° Lexbase : A01331GZ et n° 23-80.134, F-D N° Lexbase : A01481GL.

[70] Cass. crim.,5 mars 1986, n° 86-91.071 N° Lexbase : A3647AAC.

[71] Cass. crim.,10 mai 2016, n° 16-80.312, F-D N° Lexbase : A0874RP3.

[72] Sur cette question, v. Y.-M. Serinet, La qualité du défendeur, RTD Civ. 2003, p. 203.

[73] V. G. Cornu et J. Foyer, op. cit., 3e éd., 1996, PUF, n° 79.

[74] V. J. Héron, T. Le Bars, K. Salhi, op. cit., 7e éd., 2019, LGDJ, n° 133.

[75] Par exemple, l’action en divorce ne peut être dirigée que contre l’autre époux.

[76] V. par ex. Cass. civ. 1ère, 5 décembre 1995, n° 92-18.292 N° Lexbase : A7228ABC.

[77] V. H. Solus et R. Perrot, Droit judiciaire privé, t. 1, 1961, n° 305. V. aussi J. Héron, T. Le Bars, K. Salhi, op. cit., n° 133.

[78] Y.-M. Serinet, La qualité du défendeur, RTD Civ. 2003, p. 203.

[79] Ibid.

[80] Ch. civ. 23 décembre 1828 : S. 1928, 30. 1. 205.

[81] Laisney et R. Rousseau, Dictionnaire théorique et pratique de procédure civile, commerciale, criminelle et administrative, t. IV, 2e éd., Arthur Rousseau, 1886, p. 316.

[82] Cass. civ. 3e, 19 mars 1997, n° 95-16.826 N° Lexbase : A8133AHP : Loyers et copr. 1997, comm. 287.

[83] Cass. civ. 1ere, 19 janvier 1999, n° 96-13.509 N° Lexbase : A7896CWD.

[84] Cette position semblait relativement admise à la fin du XXe siècle. Un auteur relevait que, si « la nullité pour vice de fond peut être invoquée par les deux parties, la nullité pour vice de forme ne peut l'être que par la personne protégée par la règle ». V. J.-P. Brouillaud, Les nullités de procédure : des procédures pénales et civiles comparées, D. 1996, p. 98 et s.

[85] Cass. civ. 2e, 26 juin 2008, n° 07-14.996, F-D N° Lexbase : A3682D9A.

[86] Cass. civ. 2e, 16 mai 2013, n° 12-20.317, F-P+B N° Lexbase : A5202KDZ : Y.-M. Serinet, obs., JCP G 2013, 1225, n° 4 ; R. Perrot, obs., Procédures 2013, n° 209 ; Vinckel, note, Rev. huissiers 2013, 169.

[87] Ass. plén., 15 mai 1992, n° 89-18.021 N° Lexbase : A4642ABK : P. Capoulade et C. Giverdon, note, JCP G 1992, II, 21940.

[88] Décret n° 67-223, du 17 mars 1967, art. 55 al. 2 N° Lexbase : L8032BB4 dans sa rédaction issue du décret n° 2019-966, du 18 septembre 2019.

[89] En faveur de cette solution, v. C. Atias, La raison d’être des autorisations d’agir en justice au nom d’une personne morale, D. 2011, p. 701.

[90] Cass. civ. 2e, 1er septembre 2016, n° 15-14.596, FS-P+B [LX=A9391RYH].

[91] En ce sens, v. C. Bléry, De la qualité pour invoquer une nullité de forme…, Gaz. Pal., 29 novembre 2016, p. 69.

[92] V. par ex. Cass. civ. 3e, 26 novembre 2008, n° 07-20.071, FS-P+B N° Lexbase : A4637EBD : JCP G, 2009, IV, 1007.

[93] V. par ex. Cass. civ. 2e, 8 septembre 2022, n° 21-12.030, F-B N° Lexbase : A24618HM : S. Amrani Mekki, obs. Procédures 2022, n° 241, obs.. Dans cet arrêt, le rapport de l’expert n’a pas été annulé en raison de l’absence de grief subi par l’adversaire de la partie qui a demandé la mesure d’instruction. 

[94] Dès lors, certaines irrégularités, même en matière d’expertise, ne pourraient être invoquées que par un défendeur ayant la qualité adéquate. Tel semble être le cas d’une représentation irrégulière lors d’une mesure d’expertise (Cass. civ. 2e, 10 juin 1966).

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