Réf. : TA Rennes, 11 avril 2013, n° 1203243 (N° Lexbase : A9709KEC)
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Le 06 Juin 2013
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par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition publique
Le 06 Juin 2013
Roxane Jurion : Les conventions d'occupation domaniale sont des contrats publics par lesquels l'autorité gestionnaire d'une dépendance du domaine public autorise un opérateur privé à y exercer une activité économique en contrepartie d'une redevance. Contrairement à d'autres conventions parfois assez proches, comme en témoignent les abondantes requalifications juridictionnelles, elles ne sont soumises à aucun formalisme. Leur passation, fortement empreinte du régime de la domanialité publique, est caractérisée par la liberté de gestion du maître du domaine. Les autorités compétentes disposent ainsi d'un pouvoir discrétionnaire quant au choix de l'occupant ; l'attribution du titre s'effectue de gré à gré.
Le Code général de la propriété des personnes publiques n'a pas remis en cause ce principe. En l'état actuel du droit, il n'existe donc aucune obligation de publicité et de mise en concurrence préalables à la passation de ces contrats, dès lors qu'ils ont pour unique objet l'occupation du domaine. Les concessions de plage, les autorisations d'exploitation de fréquences radioélectriques sur le domaine public hertzien et les conventions domaniales intégrées à un montage contractuel (concession d'outillage, de travaux, marché public ou délégation de service public) sont soumises à un encadrement procédural. Mais s'agissant des conventions domaniales "pures", le Conseil d'Etat rappelle régulièrement qu'aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe n'imposent un tel formalisme, même lorsque l'occupant de la dépendance est un opérateur sur un marché concurrentiel.
Dans le silence des textes, la personne publique peut toutefois volontairement mettre en oeuvre une procédure de publicité et de mise en concurrence. Elle est alors tenue de respecter les règles qu'elle a elle-même fixées et de motiver suffisamment les décisions de refus à l'encontre des candidats évincés. Si elle est confrontée à un doute sur la nature juridique de la convention, l'administration doit mettre en oeuvre la procédure la plus contraignante (1). Hormis ces hypothèses, sa liberté contractuelle demeure entière.
Lexbase : Quelle est l'évolution jurisprudentielle en la matière ?
Roxane Jurion : A l'origine, les contraintes pesant sur la personne publique lorsqu'elle attribue un titre domanial étaient limitées. Le juge administratif se bornait à vérifier que l'activité exercée par l'occupant était compatible avec l'affectation et la destination normale de la dépendance. Il admettait qu'un motif d'intérêt général (préservation de l'ordre public ou de l'environnement, conservation du domaine, droit d'accès des riverains...) puisse justifier un refus d'occupation.
L'objectif de valorisation du domaine public et la dimension économique qui en résulte ont toutefois conduit le juge à renforcer ses exigences. L'évolution a été amorcée avec la décision "Million et Marais" à propos des actes de dévolution du service public (2) : le contrôle de légalité s'effectue désormais à l'aune des règles de concurrence résultant de l'ordonnance du 1er décembre 1986, relative à la liberté des prix et de la concurrence (N° Lexbase : L8307AGR). Ces règles, actuellement codifiées sous les articles L. 420-1 (N° Lexbase : L6583AIN) et suivants du Code de commerce, prohibent les abus de position dominante de la part des opérateurs économiques. Le juge a ensuite étendu cette exigence à l'octroi des titres domaniaux dans l'arrêt "Société EDA" (3). Ainsi, la personne publique ne peut légalement délivrer l'autorisation lorsque sa décision aurait pour effet de méconnaître le droit de la concurrence, notamment en plaçant automatiquement l'occupant en situation d'abuser d'une position dominante (4). Mais le Conseil d'Etat applique cette jurisprudence de façon restrictive : il considère que l'attribution du titre à un opérateur exclusif n'entraîne pas automatiquement une méconnaissance des règles de concurrence.
Les juridictions du fond paraissent pourtant sensibles à cette éventualité. Plusieurs décisions (5) témoignent de la volonté de mieux encadrer la passation des conventions domaniales. Le juge de l'Union européenne n'est pas étranger à cette tendance : la jurisprudence "Telaustria" (6) tend à étendre à l'ensemble des contrats publics les principes de transparence et de non-discrimination qui imposent un minimum de formalisme. Mais le Conseil d'Etat semble réticent à entériner ce mouvement. Il a récemment rappelé sa position dans un arrêt "Ville de Paris" (7).
Lexbase : Une réforme des règles s'impose-t-elle pour conjuguer domanialité publique et droit de la concurrence ?
Roxane Jurion : L'idée d'une réforme a été soulevée par la doctrine et de nombreux articles sur la question ont paru ces dernières années. Il est clair que l'état actuel du droit ne permet pas de garantir pleinement la transparence de l'action administrative et l'égalité de traitement des candidats à l'occupation. Le caractère intuitu personae de la passation des conventions est, en effet, propice aux pratiques occultes et aux malversations. Le domaine public, siège potentiel d'activités commerciales, est devenu un objet de convoitise pour les entreprises privées. Certaines dépendances, telles que les couloirs du métro, les gares ou les aéroports, peuvent constituer une ressource rare pour les opérateurs. Les occupants privatifs du domaine bénéficient ainsi d'un avantage non négligeable sur leurs concurrents. L'analyse de la jurisprudence indique que le Conseil d'Etat ne prend pas suffisamment en compte l'impact des décisions de l'administration sur le marché concurrentiel lorsqu'il examine la légalité de l'octroi des titres. En outre, le juge semble réticent à faire jouer la théorie des infrastructures essentielles. Une obligation de publicité et de mise en concurrence préalables à la passation des conventions permettrait donc de mieux concilier les exigences d'une concurrence libre et égale avec les principes de la domanialité publique.
L'argument principal en faveur d'une telle réforme est la visibilité de l'activité administrative. L'impératif de transparence, qui imprègne aujourd'hui l'action publique dans son ensemble, ne devrait pas s'arrêter au seuil du domaine public. C'était d'ailleurs la position affichée par le Conseil d'Etat lui-même dans son rapport public 2002, "Collectivités publiques et concurrence". Elle est également soutenue par l'Autorité de la concurrence à propos de la distribution des quotidiens gratuits et des concessions commerciales sur le domaine aéroportuaire. Une telle obligation procédurale serait, en outre, avantageuse pour la personne publique puisqu'elle susciterait la concurrence entre les candidats à l'occupation et des offres plus intéressantes -ce qui, en cette période de raréfaction des deniers publics, n'est pas négligeable-. Mais c'est aussi du point de vue de l'égalité entre les opérateurs économiques que la réforme apparaît nécessaire.
En ce sens, une publicité préalable garantirait l'égalité d'accès à l'occupation du domaine dans la mesure où tous les opérateurs potentiellement intéressés seraient informés de l'offre publique. Une mise en concurrence fondée sur des critères objectifs déterminés par l'autorité gestionnaire du domaine assurerait ensuite l'égalité de traitement entre les candidats. L'importance économique colossale que revêtent certaines conventions nécessite de préserver les impératifs d'une saine concurrence sans pour autant dénaturer le régime de la domanialité publique. Si une réforme voit le jour, elle devra nécessairement allier pragmatisme et subtilité : il n'est pas question d'étendre l'encadrement procédural à toutes les autorisations domaniales. Seules les conventions ayant un impact sensible sur la concurrence devraient être concernées. Même si cette perspective est délicate, il semble techniquement possible d'instaurer des critères afin de circonscrire le champ de l'obligation.
Lexbase : Quels seraient les risques d'une telle réforme ?
Roxane Jurion : Elle ne serait pas exempte de tout inconvénient. En effet, une mise en concurrence préalable à la passation des conventions ouvrirait de nouvelles voies contentieuses aux candidats à l'occupation. Ceux-ci ont déjà la faculté d'attaquer l'acte détachable ayant permis la conclusion du contrat. Si la passation a été précédée d'une procédure volontaire de publicité et de mise en concurrence, le juge admet la recevabilité du recours "Tropic Travaux" (8). Mais la réforme permettrait aussi aux concurrents évincés d'exercer un référé précontractuel ou un référé contractuel, puisque la nouvelle rédaction du Code de justice administrative issue de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique (N° Lexbase : L1548IE3), a élargi l'objet de ces référés à tous les contrats dont la passation est soumise à un formalisme en amont.
Ces nouvelles possibilités de recours offertes aux tiers augmenteraient la précarité de l'occupation domaniale, déjà fragile par essence, en portant atteinte à la stabilité des relations contractuelles. L'action de l'administration serait ralentie alors que la gestion domaniale suppose une certaine flexibilité. Un gonflement du contentieux n'est pas à exclure au regard de la propension des tiers intéressés à saisir systématiquement le juge des référés, et la subjectivisation du recours opérée par la jurisprudence "Smirgeomes" (9) ne semble pas avoir terni son succès. Les impératifs liés à la sécurité juridique et à la valorisation du domaine public ne doivent donc pas être occultés. C'est pourquoi il importe de ne pas systématiser à outrance l'encadrement procédural et de concilier habilement les différents principes.
(1) CE 2° et 7° s-s-r., 10 juin 2009, n° 317671, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A0570EIX).
(2) CE Sect., 3 novembre 1997, n° 169907, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A5178ASL).
(3) CE Sect., 26 mars 1999, n° 202260, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A3525AXT).
(4) CE 2° et 7° s-s-r., 23 mai 2012, n° 348909, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0935IML).
(5) Voir, par exemple, TA Nîmes, 24 janvier 2008, n° 0620809.
(6) CJCE, 7 décembre 2000, aff. C-324/98 (N° Lexbase : A1916AWU).
(7) CE 2° et 7° s-s-r., 15 mai 2013, n° 364593, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A3193KDM).
(8) CE Ass., 16 juillet 2007, n° 291545, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4715DXW) ; pour une acceptation par le juge de la recevabilité du recours "Tropic", voir TA Rouen, 6 octobre 2011, n° 0803061.
(9) CE, S., 3 octobre 2008, n° 305420, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A5971EAE).
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Réf. : CEDH, 30 mai 2013, Req. 25393/10 (N° Lexbase : A9708KEB)
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Le 13 Juin 2013
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Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 29 mai 2013, n° 365666, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A3748KEK)
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Le 11 Juin 2013
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Réf. : CJUE, 4 juin 2013, aff. C-300/11 (N° Lexbase : A0399KGU)
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Le 07 Juin 2013
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Réf. : CJUE, 30 mai 2013, aff. C-534/11 (N° Lexbase : A0405KG4)
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Le 08 Juin 2013
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Réf. : Décret n° 2013-441 du 28 mai 2013 (N° Lexbase : L9125IWU)
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Le 13 Juin 2013
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Réf. : TA Pau, 16 mai 2013, n° 1101224 (N° Lexbase : A0006KGC)
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Le 13 Juin 2013
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par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition publique
Le 06 Juin 2013
Par ailleurs, l'agent non titulaire doit être en fonction au 13 mars 2012 ou bénéficier de l'un des congés du décret n° 88-145 du 15 février 1988, relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale (N° Lexbase : L1035G8T), et justifier d'une durée de service au moins égale à six années dans la même collectivité au cours des huit années qui précédent le 13 mars 2012 (pour les agents d'au moins 55 ans au 13 mars 2012, la durée de service requise est ramenée à trois ans au cours des quatre années précédant le 13 mars 2012). Enfin, le contrat sur lequel est recruté l'agent doit être légal. S'il a été déféré au contrôle de légalité, il ne pourra faire l'objet d'une transformation en CDI qu'après que la décision juridictionnelle soit devenue définitive et ait consacré la régularité du contrat. La Haute juridiction administrative a récemment indiqué que, si le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci, il ne peut pas prétendre à la mise en oeuvre des stipulations illégales de ce contrat (CE 3° et 8° s-s-r., 30 mai 2012, n° 343039, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A5437IMC, CE 4° et 5° s-s-r., 15 juin 2012, n° 335398, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8627INT, CE 2° et 7° s-s-r., 10 février 2010, n° 314145, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7559ERE). En outre, un agent non titulaire de la fonction publique territoriale, engagé pour une durée indéterminée, ne peut faire l'objet d'un licenciement sans que soit respecté un préavis d'une durée minimale variable selon son ancienneté dans le service, il est loisible aux parties de prévoir dans le contrat une durée de préavis plus favorable à l'agent en considération de son ancienneté et de la nature de ses fonctions. Toutefois, le préavis ainsi fixé par les stipulations du contrat ne saurait, du fait d'une durée excessive, avoir pour effet d'entraver la possibilité, pour l'autorité administrative, de mettre un terme au contrat dans l'intérêt du service et de procéder au licenciement de l'agent (CE 2° et 7° s-s-r., 6 février 2013, n° 347622, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4643I74).
Pour bénéficier du renouvellement du CDD par la conclusion d'un CDI, l'agent non titulaire doit, lorsque le fondement du contrat n'a jamais changé, avoir été recruté sur l'un des fondements de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984, ce qui inclut les agents recrutés en l'absence de cadre d'emploi, ou pour la nature des fonctions ou les besoins du service pour les agents de catégorie A, les secrétaires de mairie de communes de moins de 1 000 habitants. Lorsque le fondement du contrat a connu des évolutions, le contrat sera un CDI si l'agent peut justifier, auprès de la même collectivité, d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins, sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique (A, B, C). Sont comptabilisés dans les six années les contrats passés pour un accroissement temporaire d'activité (besoin occasionnel ou saisonnier ou, dans la nouvelle rédaction, l'accroissement temporaire ou saisonnier d'activité), les contrats passés du fait de l'indisponibilité du titulaire de l'emploi, ainsi que de la vacance de l'emploi. Sont également comptabilisés, les services accomplis lors la mise à disposition par le centre interdépartemental de gestion auprès d'une collectivité qui a ensuite recruté l'agent.
Une interruption de contrat, si elle n'excède pas quatre mois, permet de comptabiliser les deux contrats qui se sont succédés. Précisons que le Conseil d'Etat a récemment dit pour droit que le fait que le non-renouvellement du contrat d'un agent employé depuis six ans sous contrat à durée déterminée par une collectivité territoriale n'ait pas été précédé d'un entretien n'est pas de nature, par lui-même, à entraîner l'annulation de la décision de non-renouvellement (CE 3° et 8° s-s-r., 26 avril 2013, n° 355509, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8784KCC), faisant application de sa jurisprudence "Danthony" sur les vices de procédure affectant une décision administrative (CE, S., 23 décembre 2011, n° 335033, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9048H8M). Le centre de gestion devient compétent pour assurer la publication des postes vacants sur information de l'autorité territoriale, à l'exception des emplois susceptibles d'être pourvus exclusivement par voie d'avancement de grade. La vacance d'emploi doit préciser le motif et comporter une description du poste à pourvoir. Ainsi, l'exigence de motivation et de justification des postes à pourvoir est renforcée afin d'embaucher des agents pour des postes précis, dans un contexte économique de la collectivité bien précis. A ce titre, le tribunal administratif de Lyon a récemment jugé que la transmission de la déclaration de vacance d'un emploi au centre de gestion est une garantie de l'égal accès aux emplois publics et est susceptible d'exercer une influence sur le choix de la collectivité (TA Lyon, 12 octobre 2012, n° 12001797).
II - Les articles 14 et 15 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 posent les conditions à respecter par chaque agent pour qu'il soit éligible au dispositif de titularisation. Au 31 mars 2011, l'agent contractuel doit avoir une quotité de temps de travail au moins égale à 50 % et avoir été recruté sur un emploi permanent et sur l'un des fondements de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 (ce qui inclut les agents recrutés temporairement sur des emplois permanents pour l'absence momentanée du titulaire ou la vacance de l'emploi, les agents recrutés en l'absence de cadre d'emploi, ou pour la nature des fonctions ou les besoins du service pour les agents de catégorie A) ou bénéficier d'un CDI pour les agents de catégorie C concourant à l'entretien et au gardiennage de services administratifs, ainsi qu'au fonctionnement du service administratif de restauration. Il n'existe pas de condition d'ancienneté pour les agents déjà en CDI au 31 mars 2011, ni pour ceux qui sont éligibles à la transformation automatique de leur CDD en CDI au 13 mars 2012, même s'ils doivent malgré tout occuper un emploi avec une quotité de temps de travail au moins égal à 50 %, alors que cette condition n'est pas exigée pour le dispositif de transformation obligatoire du CDD en CDI.
L'on peut, toutefois, s'interroger sur la dérogation qu'induit l'accès au CDI au principe selon lequel un emploi permanent est occupé par un fonctionnaire (loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires N° Lexbase : L6938AG3, art. 3). A ce titre, le juge administratif a récemment rappelé qu'un agent recruté sur un emploi permanent pouvant légalement être confié à un agent contractuel, dont le contrat a été transformé en contrat à durée indéterminée, ne peut faire l'objet d'un licenciement que dans l'hypothèse où, à la suite d'une décision formelle ou d'une réorganisation du service ayant le même effet, son poste est supprimé, et où son reclassement est impossible, ou pour des motifs liés à sa manière de servir ou à son aptitude à exercer ses fonctions (CAA Marseille, 2ème ch., 19 mars 2010, n° 08MA04753, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A8953EWI). Les agents en CDD, pour être éligibles au dispositif de titularisation, doivent justifier d'une durée de service public effectif d'au moins quatre années en équivalent temps plein au cours des six années précédant le 31 mars 2011. Pour le calcul de l'ancienneté de quatre ans, aucun changement d'employeur n'est admis : les quatre années de service sont effectuées auprès du même employeur (celui qui emploie l'agent au 31 mars 2011 ou entre le 1er janvier et le 31 mars 2011), sauf lorsque le contrat de l'agent a été transféré à la suite d'un transfert de compétence relative à un service public administratif (SPA). Dans ce cas, les services accomplis dans le cadre du SPA d'origine sont assimilés à des services accomplis au sein de la personne publique d'accueil. Sont également comptabilisés les services effectués après avoir été mis à disposition par le centre interdépartemental de gestion auprès d'une collectivité dès lors que l'agent a ensuite été recruté par cette collectivité.
Les services effectués en qualité de collaborateur de cabinet ou de groupes d'élus, ainsi que les services effectués sur le fondement de l'article 47 de la loi (emploi fonctionnel de direction) ne sont pas comptabilisés. Les quotités de travail supérieures ou égales à 50 % d'un temps complet sont assimilées à des services à temps complet. Si cette quotité est inférieure à 50 % ils sont alors comptabilisés pour les trois quarts d'un temps complet. Toutefois, les agents qui ont quitté leur emploi entre le 1er janvier 2011 et le 31 mars 2011 pour insuffisance professionnelle ou faute disciplinaire ne sont pas éligibles au dispositif. La cour administrative d'appel de Nancy a jugé qu'en application du principe de parité, la rémunération d'un agent contractuel ne peut être disproportionnée par rapport à celle d'un agent de l'Etat de qualification équivalente et exerçant des fonctions analogues (CAA Nancy, 4ème ch., 22 octobre 2012, n° 12NC00150, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0639IXX).
Si on ne peut que saluer une loi apportant des réponses à la précarité des contractuels, l'on peut s'interroger sur le fait qu'en renforçant la place du CDI, lequel permet de recruter des contractuels sur des emplois permanents sans limitation de durée, la loi du 12 mars 2012 pourrait constituer une première étape vers la remise en cause du statut des fonctionnaires.
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Réf. : Proposition de loi constitutionnelle tendant à réformer le Conseil constitutionnel
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Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 29 mai 2013, n° 366456, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A9700KEY)
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Le 06 Juin 2013
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N7331BTP
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par Christophe De Bernardinis, Maître de conférences à l'Université de Lorraine
Le 06 Juin 2013
Plus qu'un principe directeur, le principe du contradictoire est le principe matriciel de toute procédure. Le Conseil d'Etat impose le principe du contradictoire absolument à toutes les juridictions administratives sans exception, que les textes le prévoient ou non. Mais la valeur du principe a longtemps été incertaine et l'exigence du respect de ce principe peut être un exercice difficile pour le juge. Le Conseil d'Etat, en ce sens, est amené, à intervalles réguliers et tout en rappelant que cette préoccupation doit être au coeur d'une procédure équitable, à recadrer le principe ou plus prosaïquement à redéfinir ces contours.
On retrouve, en l'espèce et à l'origine du litige, une concession d'outillage public entre une chambre de commerce et d'industrie (CCI) et l'Etat pour la gestion d'un aérodrome. Sur le fond, la CCI demande le remboursement à l'Etat d'une somme de six millions d'euros au titre des avances qu'elle estimait avoir consenti à l'Etat dans l'accomplissement de cette gestion. Le tribunal administratif de Poitiers, puis la cour administrative d'appel de Bordeaux, ont rejeté la demande de la CCI tendant à l'annulation du refus implicite opposé par le ministre de l'Equipement.
C'est le préfet de Charente qui avait confié la gestion de l'aérodrome à la CCI sur le fondement de différents arrêtés. Or, s'agissant d'une concession d'outillage, le préfet était incompétent et la concession aurait dû résulter d'un arrêté pris par les ministres chargés de l'Economie et de l'Aviation civile. La cour administrative d'appel a, cependant, estimé que le vice tenant à l'incompétence du préfet pour accorder une telle concession n'était pas d'une gravité telle que le juge aurait dû écarter le contrat. Devant les juges du fond, les parties avaient exclusivement débattu, compte tenu des règles alors applicables, sur le terrain de la responsabilité quasi-contractuelle et sur le terrain de la responsabilité quasi-délictuelle. En d'autres termes, pendant l'instruction, elles avaient admis la nullité du contrat et débattaient sur le terrain de l'enrichissement sans cause, en prenant en compte l'état de la jurisprudence antérieur au 28 décembre 2009, date de l'arrêt "Commune de Béziers I" (1). La cour administrative d'appel a, elle, réglé l'affaire sur le terrain contractuel en faisant application d'une nouvelle règle applicable aux litiges contractuels apparue postérieurement à l'audience.
Cette nouvelle règle découle de la jurisprudence "Commune de Béziers I" précitée, intervenue donc postérieurement à la clôture de l'instruction. Elle fait prévaloir l'exigence de loyauté des relations contractuelles sur l'annulation du contrat et applique donc le principe du maintien du contrat, sauf vice d'une particulière gravité ou contenu illicite. L'arrêt énonce une règle désormais bien connue, selon laquelle "il incombe en principe au juge, saisi d'in litige relatif à l'exécution d'un contrat, de faire application du contrat" (2). Et "c'est seulement dans le cas où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, qu'il ne peut régler le litige sur le terrain contractuel" (3). En cas de litige résultant de l'exécution du contrat, les parties ne peuvent donc le remettre en cause que de façon très limitée et leur différend doit être résolu par priorité sur la base du contrat.
Comme dit précédemment et faisant application de cette jurisprudence, la cour juge que l'incompétence du préfet pour signer la concession n'était pas d'une gravité telle qu'elle devait écarter le contrat dès lors qu'il résultait, notamment, du dossier soumis au juge du fond que les ministres concernés avaient approuvé l'opération. Le litige devant prioritairement être réglé au regard du droit de la responsabilité contractuelle, la nouvelle règle conduisait à juger que le contrat, que les parties s'étaient accordées à considérer illégal, ne pouvait plus être écarté et devait donc être maintenu pour trancher le litige.
Sur le fond, le juge d'appel n'a pas été contredit par le Conseil d'Etat, celui-ci ayant exercé son office sur le terrain juridiquement approprié. Par contre, sur la forme, il aurait dû, l'instruction étant close à la date de la décision "Commune de Béziers I", rouvrir l'instruction et inviter les parties à s'exprimer sur les conséquences de la nouvelle jurisprudence. La Haute juridiction a donc estimé que la cour bordelaise avait "méconnu le caractère contradictoire de la procédure" en n'invitant pas les parties à présenter leurs observations. En agissant de la sorte, le juge se rattache simplement aux exigences du contradictoire sans soulever d'office un moyen à soumettre à la contradiction. L'obligation d'informer préalablement les parties ne relevant pas de la procédure particulière prévue pour les moyens d'ordre public (CJA, art. R. 611-7 N° Lexbase : L3102ALH).
Le Conseil d'Etat propose deux solutions pour permettre aux parties d'exprimer leur point de vue. La solution la plus naturelle consiste à rouvrir l'instruction après la radiation du rôle si le revirement intervient très peu de temps avant l'audience. La seconde solution consiste à ce que la juridiction rende une décision avant-dire droit en indiquant la solution qu'elle entend donner au litige et en invitant les parties à formuler leurs observations.
En agissant de la sorte, le juge suprême complète sa jurisprudence relative à l'effet des revirements de jurisprudence. La solution est évidement à mettre en avant à travers l'application du principe du contradictoire mais elle témoigne des implications nouvelles de la consécration du principe de sécurité juridique. Ce principe conduit les magistrats à renforcer les garanties au profit des justiciables tout en accroissant conjointement leurs pouvoirs. En l'espèce, le Conseil d'Etat prolonge le courant jurisprudentiel par lequel il cherche à modérer les atteintes que peuvent porter ses revirements de jurisprudence au principe de sécurité juridique. Il reconnaît ainsi le droit des justiciables de ne pas voir leur situation légalement acquise brutalement bouleversée par un revirement de jurisprudence sans pouvoir en débattre. Si la modification apportée à l'interprétation traditionnelle d'une règle de droit demeure en principe rétroactive, ce principe n'est désormais plus absolu. La jurisprudence d'espèce s'ajoute ainsi à celle qui avait permis la modulation des effets des annulations contentieuses (4) ou celle qui avait permis au juge de moduler dans le temps les effets de ses décisions au cas où une décision de rejet mettant fin à la suspension d'un acte administratif est prononcée (5) voire, enfin, celle qui avait donné la possibilité au juge administratif de n'appliquer que pour le futur ses revirements, notamment en matière contractuelle (6).
Si auparavant la sécurité juridique était nécessairement sacrifiée face au progrès du droit, fusse-t-il jurisprudentiel, ledit progrès passe désormais par une meilleure prise en compte des aspirations des justiciables à un plus grand respect de ce principe. La prudence est toutefois de mise s'agissant d'un principe délicat à manipuler car il peut amener à précariser davantage la situation des administrés au lieu de la sécuriser.
Vertu inhérente à la fonction du juge, l'impartialité est aujourd'hui un concept des plus délicats à saisir dans la mesure où, devenu un droit fondamental et substantiel auquel toute personne est en droit de prétendre, il est naturellement, par suite, appelé à être garanti par tous les pouvoirs publics constitutionnels, administratifs et juridictionnels. C'est la récusation qui est, chronologiquement, le premier moyen offert au requérant pour infléchir le cours d'une procédure dans l'hypothèse où il estimerait que le principe d'impartialité, dans son versant subjectif, s'oppose à ce que tel membre de la juridiction prenne part au débat. Ouverte même sans texte, la voie de la récusation est expressément prévue, s'agissant de la juridiction administrative, par les dispositions du Code de justice administrative.
L'article L. 721-1 de ce code (N° Lexbase : L3180ALD) dispose, à cette fin et au niveau législatif, que "la récusation d'un membre de la juridiction est prononcée, à la demande d'une partie, s'il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité". L'article R. 621-6 (N° Lexbase : L5881IGW) étend le champ d'application de cet article aux experts et sapiteurs et les articles R. 621-6-1 (N° Lexbase : L5945IGB) à R. 621-6-4 fixent la procédure à suivre. Cette procédure s'organise de la façon suivante : une demande écrite doit être établie par la partie récusante, une réponse de la personne dont la récusation est demandée doit être transmise et, enfin, uniquement dans le cas où cette dernière n'acquiesce pas à la demande, la juridiction, par une décision non motivée, se prononce sur la demande, après audience publique dont l'expert et les parties sont avertis.
Les procédures de récusation des experts ou des sapiteurs sont rares et la jurisprudence qui les concerne quasiment inexistante, d'où l'intérêt de la présente espèce. Il ressort des faits que, lors d'un litige entre un centre hospitalier et les constructeurs du nouvel hôpital de la ville, un expert a été nommé par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif, à la demande des deux sociétés, avec pour mission, notamment, de déterminer les causes du retard du chantier de construction. Le centre hospitalier demande alors la récusation de cet expert en raison d'une possible partialité. Cette personne avait, neuf ans avant sa nomination en tant qu'expert par le juge, occupé les fonctions de directeur d'une société ayant participé à un groupement d'entreprises avec une société partie au litige, en vue de l'attribution d'un marché. Le tribunal administratif de Nîmes et la cour administrative d'appel de Marseille ont respectivement rejeté la demande du centre hospitalier tendant à la récusation de l'expert.
C'est d'abord la question de la motivation de la décision juridictionnelle prononcée par les juges du fond qui a, dans un premier temps, été posée au Conseil d'Etat. Pour y répondre, le juge se réfère, dans un premier temps, à son avis contentieux du 23 mars 2012 (7) dans lequel il lève une interrogation importante qui portait sur la nature de la "décision" rendue par la juridiction, saisie d'une demande de récusation d'un expert. L'avis précise qu'en dépit du terme "décision" utilisée sans autre précision par l'article R. 621-6-4 (N° Lexbase : L5971IGA), il s'agit bien d'une décision de nature juridictionnelle. Le souci est que le même article précise que la décision est "non motivée". Or, la motivation des décisions juridictionnelles constitue un principe fondamental de la procédure administrative contentieuse (8). C'est une garantie fondamentale du justiciable contre les risques liés à la partialité et à l'arbitraire. Le jugement, mieux compris, est censé être mieux accepté par les justiciables et la motivation permet, de même, un contrôle des juridictions supérieures sans lequel ce double degré de juridiction ne fonctionnerait pas. Ce principe fondamental semblerait, a priori, avoir vocation à s'appliquer à une décision de refus de révocation d'un expert dans la mesure où elle entre dans la catégorie des jugements.
Pour autant, le Conseil d'Etat fait une lecture "utile" de l'expression, précisant que l'article en question n'a pas entendu écarter la règle générale de motivation des décisions juridictionnelles. En agissant de la sorte, il tend simplement à prendre en compte les exigences d'une bonne administration de la justice, ainsi que les particularités de chaque affaire qui peut aborder la vie privée, la probité ou la réputation professionnelle de l'expert. Aussi, pour ne pas ignorer ces considérations, le juge peut se limiter à énoncer "qu'il y a lieu" ou "qu'il n'y a pas lieu" de récuser l'expert. L'article R. 621-6-4 n'écarte pas l'application générale du principe de motivation mais l'adapte, en fait, à des circonstances de fait. C'est une sorte de souplesse donnée au juge sans vouloir porter atteinte à un principe fondamental du droit. La décision est "non motivée", mais pas dans des conditions susceptibles de porter atteinte à des droits protégés. Dans la décision d'espèce, le Conseil d'Etat rappelle cette jurisprudence et le fait que ces dispositions n'imposent pas au juge d'expliciter dans sa décision les raisons pour lesquelles il estime devoir user de cette faculté de limiter ainsi la motivation de sa décision.
Ensuite, dans un second temps, le Conseil d'Etat vient préciser ce que doit être précisément l'office du juge en pareilles circonstances. Il est alors tenu de rechercher si, eu égard à leur nature, à leur intensité, à leur date et à leur durée, les relations directes ou indirectes entre cet expert et l'une ou plusieurs des parties au litige sont de nature à susciter un doute sur son impartialité. En particulier, doivent, en principe, être regardées comme suscitant un tel doute les relations professionnelles s'étant nouées ou poursuivies durant la période de l'expertise. En l'espèce, eu égard à l'ancienneté des faits en cause à la date de la désignation de l'expert, à la nature et à l'intensité des relations avec la société partie au litige, cette personne n'étant plus dirigeant de la société lors de la période d'exécution du marché relatif à la construction de l'hôpital, il n'existait aucun obstacle à ce qu'elle accomplisse sa mission d'expert confiée par le juge. C'est donc à bon droit que la cour a estimé que l'expert désigné pouvait accomplir sa mission, celle-ci n'ayant pas "inexactement qualifié les éléments soumis à son examen en estimant, par une décision suffisamment motivée", et que le parcours professionnel de l'expert dans le secteur du bâtiment et des travaux publics "ne révélait aucun élément actuel qui ferait obstacle à ce qu'il accomplisse la mission confiée par le juge des référés".
Cette précision de l'office du juge par le Conseil d'Etat est plus que la bienvenue dans la mesure où l'avis sur la motivation de la décision de récusation était si nuancé qu'il en devenait difficilement compréhensible. Le juge peut motiver puisqu'il est soumis à cette exigence mais il peut régulièrement ne pas le faire. Pour autant, préciser l'office du juge sans amener à établir l'exigence de motivation peut continuer à apparaître comme une démarche à contre-courant dans un contexte social semblant marqué par une montée des exigences de transparence dont la motivation des décisions de justice constitue un aspect important. Ce n'est pas la première fois que le Conseil d'Etat est conduit à concilier l'exigence de motivation des décisions juridictionnelles avec le respect d'un secret protégé, mais la motivation des décisions est en quelque sorte sacrifiée au profit d'une bonne administration de la justice ; or, il semble quand même que les deux mesures sont là pour permettre de lutter contre l'arbitraire.
La garantie du rejugement en droit et en fait qu'offre le double degré de juridiction suppose qu'un certain nombre de conditions soient remplies, afin que la juridiction d'appel statue avec la même plénitude et la même impartialité que les premiers juges. Toutefois, cette garantie rencontre des limites qui tiennent aux pouvoirs du juge d'appel qui ne favorisent pas toujours le double degré de juridiction. C'est dans l'effet dévolutif de l'appel que réside la garantie d'un rejugement impartial de l'affaire, celui-ci signifie que l'ensemble du litige en droit et en fait est soumis au juge d'appel dans les limites des conclusions présentées en appel. L'effet dévolutif correspond à l'office normal du juge d'appel qui procède à un rejugement de l'affaire après un premier examen par la juridiction de première instance. Cet office comporte, néanmoins, deux limites, le cadre du procès tel qu'il avait été fixé en première instance et la volonté des parties, exprimées par le double adage : il n'est dévolu qu'autant qu'il a été jugé et qu'autant qu'il a été appelé.
Il en va différemment de l'évocation. Lorsque les premiers juges ne se sont pas prononcés de manière régulière sur le bien-fondé de la demande qui leur était soumise, notamment en ce qui concerne l'appréciation de leur compétence, le juge d'appel peut choisir entre deux issues : constater cette irrégularité et renvoyer l'affaire aux premiers juges, ou évoquer l'affaire. Dans ce dernier cas, le juge d'appel statue lui-même sur le fond après avoir annulé le jugement de première instance, par exception à la règle du double degré de juridiction. L'erreur des premiers juges est alors telle que le juge d'appel annule le premier jugement. Le litige est considéré comme n'ayant jamais été jugé.
L'effet dévolutif de l'appel et l'évocation sont souvent confondus. Or, la dévolution et l'évocation répondent à des régimes très différents dont la méconnaissance conduit à des cassations sachant, notamment, que la dévolution a, pour la cour administrative d'appel, un caractère impératif, alors que l'évocation, qui se traduit, dans un souci de célérité, par une amputation du double degré de juridiction, revêt pour elle un caractère facultatif relevant de la seule appréciation du juge. L'arrêt d'espèce est une parfaite illustration de cette possible confusion entre effet dévolutif et évocation.
A l'origine du litige, une commune avait conclu une délégation de service public avec une société générale de restauration pour assurer le service de restauration scolaire pendant une durée de cinq ans. Ce contrat a été prolongé par un avenant portant la durée de la convention à quinze ans. Celui-ci a été pris deux semaines avant la promulgation de la loi "Sapin" (loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques N° Lexbase : L8653AGL), sans procédure de publicité ni mise en concurrence. Quelques années plus tard, la commune a résilié unilatéralement le contrat pour motif d'intérêt général. Le cocontractant a, alors, saisi le juge pour qu'il constate l'existence de factures impayées tout en demandant l'annulation de la mesure de résiliation. La commune a, pour sa part, présenté des conclusions indemnitaires reconventionnelles.
Par jugement avant-dire droit, le tribunal administratif de Versailles a relevé la nullité du contrat et a statué sur le terrain des responsabilités quasi-contractuelle et quasi-délictuelle avant de constater, par jugement classique et de manière plus solennelle, la nullité du contrat conclu entre les parties, rejetant la demande d'annulation de la décision de résiliation prise par la commune, les demandes de paiement et les demandes indemnitaires formulées sur un fondement contractuel. La cour administrative d'appel de Versailles a confirmé la nullité du contrat et rejeté les conclusions de la société de restauration contestant la part de responsabilité laissée à sa charge. Le Conseil d'Etat s'est ensuite prononcé sur la résiliation en requalifiant la délégation en contrat de marché public, et en confirmant l'annulation mais il annule, néanmoins, l'arrêt en tant seulement que le juge d'appel avait rejeté les conclusions de la société de restauration contestant le partage de responsabilité. Le Conseil d'État a, en conséquence, renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Versailles qui a donc statué une seconde fois sur la même affaire dans la limite du renvoi après cassation (9), en bénéficiant, cette fois, de l'analyse du Conseil d'Etat (10).
Le juge d'appel de renvoi s'est prononcé à nouveau sur le jugement qui avait fixé les parts respectives de responsabilité mais il s'est également prononcé sur l'appel dirigé contre le jugement statuant sur les conclusions indemnitaires des parties rendu trois ans après le premier jugement. Il annule le premier jugement et, par voie de conséquence, le second jugement. Statuant, ensuite, par la voie de l'évocation sur les demandes, le juge d'appel condamne, d'une part, la société de restauration à verser à la commune une somme avec intérêts légaux au titre des dépenses utiles sur le fondement de l'enrichissement sans cause et, condamne, d'autre part, la commune à verser à la société de restauration une somme avec intérêts légaux et capitalisation au titre du bénéficie manqué sur le fondement quasi-délictuel.
Pour le Conseil d'Etat, à nouveau saisi, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit en ne s'estimant pas tenue par l'effet dévolutif de l'appel et en décidant de statuer par la voie de l'évocation. Seul un fondement sur l'irrégularité des jugements soumis aurait pu justifier l'évocation. Elle ne pouvait donc statuer que par l'effet dévolutif et, dans ce, cas la décision est irrégulière et doit donc normalement être annulée (11). Le Conseil d'Etat tempère, néanmoins, cette jurisprudence en l'espèce en montrant que, si la cour a agi par évocation, cette erreur n'a pu avoir aucune incidence sur le jugement du litige qui se présentait de manière identique selon que la cour statue dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel ou, comme elle l'a fait, qu'elle se prononce par la voie de l'évocation. Par suite, et dans les circonstances particulières de l'espèce, les moyens tirés de l'erreur de droit relatif à l'évocation sont inopérants.
La tendance jurisprudentielle actuelle voit dans l'effet dévolutif l'office normal du juge d'appel. A priori, l'arrêt d'espèce ne s'inscrit pas dans cette logique puisque l'évocation du juge n'est pas remise en question par le Conseil d'Etat. On peut citer à tire d'exemple de cette tendance, l'arrêt "Mlle Maltseva" (12) où, revenant sur une jurisprudence bien établie (13), la section du contentieux déplace le curseur qui s'était établi entre effet dévolutif de l'appel et évocation à la lumière de nouvelles considérations de politique jurisprudentielle. Le juge affirme, notamment, que "le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen comme irrecevable, ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel [...]". Cette solution rétablit nettement la distinction entre effet dévolutif et évocation, selon lequel l'évocation joue lorsque le premier juge n'a pas régulièrement statué tandis que l'effet dévolutif de l'appel joue dans le cas inverse et qu'il n'y a pas obligation de commencer par annuler la décision du juge du fond. En effet, on ne peut assimiler l'omission de répondre à un moyen qui peut être considéré comme un manquement sérieux à l'office du juge et qui est une cause d'évocation au fait de déclarer un moyen irrecevable. Dans ce dernier cas, le juge s'est trompé dans la réponse en droit à donner au moyen soulevé, mais il ne l'a aucunement ignoré. Une telle irrégularité ne mérite pas d'encourir la sanction de l'annulation. Le juge d'appel ne peut alors, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, que relever cette erreur et se prononcer sur le bien-fondé du moyen écarté à tort comme irrecevable.
Mais si l'évocation n'est pas remise en cause par le juge, l'arrêt confirme, par contre, la tendance actuelle emprunte de réalisme affichée par le Conseil d'Etat encourageant les magistrats à renforcer les garanties offertes aux justiciables contre l'instabilité juridique ou l'instabilité du droit. Que le juge d'appel procède lui-même au règlement complet du litige ou bien qu'il admette la présentation de demandes ou moyens nouveaux, le recours en appel est utilisé comme une voie d'achèvement du procès. A partir du moment où l'office du juge n'est pas affecté par une irrégularité de procédure, le moyen devient inopérant, l'erreur de droit n'existe pas même si la procédure est irrégulière. Par la sorte, le juge ne se contente plus de trancher le litige, il apaise le conflit en fixant lui-même l'importance de la règle jurisprudentielle et en évaluant son implication réelle. C'est là encore un témoignage supplémentaire du développement de l'office du juge administratif qui se reconnaît une pleine liberté d'interprétation dans son rôle de garant de la stabilité de la norme juridique mais c'est, là aussi, encore un moyen qui doit, au final, amener à sécuriser la situation des administrés au lieu de la précariser et non le contraire. Le "juge interprète" ne doit pas au final se transformer en "administrateur juge".
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Réf. : Arrêté du 27 mai 2013 (N° Lexbase : L9166IWE)
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Le 12 Juin 2013
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Le 21 Juin 2013
- CE 4° et 5° s-s-r., 31 mai 2013, n° 356900 (N° Lexbase : A9696KET) : les dispositions de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 (N° Lexbase : L8240AGB), ne font pas obstacle à ce que le CSA, dans l'exercice du pouvoir de régulation que lui a reconnu la loi, puisse décider légalement de ne pas délivrer des autorisations d'émettre au profit des candidats sélectionnés sur la base d'un appel à candidatures et d'interrompre la procédure, eu égard, d'une part, à de nouvelles circonstances de fait nouvelles et, d'autre part, au caractère provisoire de cette interruption de la procédure d'attribution des fréquences.
- CE 4° et 5° s-s-r., 31 mai 2013, n° 350887 (N° Lexbase : A9693KEQ) : ce n'est pas au maire de la commune, mais à l'exploitant du domaine skiable, dont, en vertu de l'article L. 342-13 du Code du tourisme (N° Lexbase : L0179HGQ), la responsabilité ne peut être recherchée que devant le juge judiciaire dès lors qu'il gère un service public industriel et commercial, qu'il incombe de signaler sur le terrain les limites de ce domaine.
- CE 4° et 5° s-s-r., 31 mai 2013, n° 346876 (N° Lexbase : A9689KEL) : en confiant à l'Office national des forêts (ONF) la mission d'assurer l'affichage de ses arrêtés temporaires d'interdiction de circuler et la mission de contrôler l'état des chemins, le représentant de l'Etat dans le département ne lui confie pas de prérogatives de puissance publique. L'ONF n'exerce pas davantage de telles prérogatives en pourvoyant à la signalisation de sentiers de randonnée. Dès lors, le juge judiciaire est compétent pour connaître des litiges nés de ces activités.
- CE 2° et 7° s-s-r., 29 mai 2013, n° 364827 (N° Lexbase : A3746KEH) : en soutenant que la communication d'informations relatives aux caractéristiques et avantages relatifs de l'offre retenue à un candidat évincé, exigée par l'article 255 du Code des marchés publics (N° Lexbase : L1173IRU), risquerait de donner à ce dernier un avantage compétitif de nature à nuire à la loyauté de la concurrence, dans l'hypothèse où la procédure litigieuse serait annulée par le Conseil d'Etat ou serait déclarée sans suite pour motif d'intérêt général et où une nouvelle procédure de passation du marché serait engagée, le pouvoir adjudicateur n'apporte aucun élément de nature à établir que la communication des informations demandées porterait, en l'espèce, une atteinte au secret des affaires ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre les opérateurs économiques et à faire ainsi obstacle à ce qu'il y soit procédé (cf. l’Ouvrage "Marchés publics" N° Lexbase : E7481ETA).
- CE 2° et 7° s-s-r., 29 mai 2013, n° 365954 (N° Lexbase : A3385KGH) : l'absence de publication de l'avis d'attribution du marché ne peut être utilement invoquée pour obtenir du juge du référé contractuel l'annulation de ce marché (cf. l’Ouvrage "Marchés publics" N° Lexbase : E6587EQZ).
- CE 2° et 7° s-s-r., 29 mai 2013, n° 366606 (N° Lexbase : A3749KEL) : pour contrôler le caractère anormalement bas ou non d'une offre, le juge du référé contractuel ne peut se borner à relever un écart de prix important entre cette offre et d'autres offres que les explications fournies par le candidat ne sont pas de nature à justifier, sans rechercher si le prix en cause est en lui-même manifestement sous-évalué et, ainsi, susceptible de compromettre la bonne exécution du marché (cf. l’Ouvrage "Marchés publics" N° Lexbase : E2081EQ7).
- CE 4° et 5° s-s-r., 31 mai 2013, n° 366865 (N° Lexbase : A9701KEZ) : s'il appartient à l'administration de respecter la règle prévue à l'article R. 223-4 du Code de la route (N° Lexbase : L2062IBY), la circonstance qu'elle n'est pas en mesure d'établir qu'un retrait de trois points ou plus consécutif à une infraction commise pendant la période probatoire a été notifié à l'intéressé par LRAR est sans incidence sur la légalité de ce retrait. Une telle circonstance n'est pas davantage de nature à entacher d'illégalité la décision par laquelle le ministre de l'Intérieur constate que le permis a perdu sa validité en raison de ce retrait combiné avec des retraits consécutifs à d'autres infractions. A supposer que l'intéressé n'ait pas reçu auparavant notification de certains des retraits de points, le ministre les lui rend opposables en les mentionnant dans la récapitulation des retraits qu'il fait figurer dans sa décision. Il peut, dès lors, en tenir compte légalement pour constater que le solde des points est nul.
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Réf. : Décret n° 2013-451, 31 mai 2013, modifiant le décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique, NOR : RDFF1303484D, VERSION JO (N° Lexbase : L9443IWN)
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Le 22 Septembre 2013
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