Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 25 mars 2021, n° 430593, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A45214ME)
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N6967BYP
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par Marie-Claire Sgarra
Le 06 Avril 2021
► Le Conseil d’État est revenu dans un arrêt du 25 mars 2021 sur le recours au supérieur hiérarchique dans le cadre d’un contrôle fiscal et sur le respect de cette garantie qui dépend du moment de la demande.
Les faits :
⇒ une société, qui a pour objet le développement, l'édition et la distribution de logiciels, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notifié des rappels de TVA correspondant à la remise en cause de la taxe déduite au titre d'achats de licences logicielles qu'elle a regardés comme relevant d'opérations fictives,
⇒ le tribunal administratif a déchargé la société de la majoration pour manquement délibéré à laquelle elle a été assujettie à la suite de ce contrôle et rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe,
⇒ la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son appel contre ce jugement puis remis à sa charge la majoration pour manquement délibéré (CAA Marseille, 2 avril 2019, n° 16MA03916 N° Lexbase : A7505Y9T).
Principes.
✔ Avant l'engagement d'une vérification, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration (LPF, art. L. 10 N° Lexbase : L3156KWS).
✔ Le paragraphe 6 du chapitre Ier de la charte remise au contribuable prévoit qu’en cas de difficultés, le contribuable peut s’adresser à l'inspecteur divisionnaire ou principal et ensuite à l'interlocuteur départemental ou régional et les contacter pendant la vérification.
✔ Le paragraphe 4 du chapitre III de la charte indique que si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal. Si après ces contacts, des divergences importantes subsistent, il est possible de faire appel à l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur.
Solution du Conseil d’État.
👉 La possibilité pour un contribuable de s'adresser, dans les conditions édictées par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, au supérieur hiérarchique du vérificateur puis à l'interlocuteur départemental ou régional constitue une garantie substantielle ouverte à l'intéressé à deux moments distincts de la procédure d'imposition, en premier lieu, au cours de la vérification et avant l'envoi de la proposition de rectification, pour ce qui a trait aux difficultés affectant le déroulement des opérations de contrôle, et, en second lieu, après la réponse faite par l'administration fiscale aux observations du contribuable sur cette proposition, pour ce qui a trait au bien-fondé des rectifications envisagées.
👉 L'administration n'est pas tenue de donner suite à la demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, présentée au cours d'une vérification de comptabilité, qui ne fait état d'aucune difficulté affectant le déroulement des opérations de contrôle, susceptible de la rattacher à l'exercice de la garantie prévue au chapitre Ier de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.
📌 Sur la participation de l'interlocuteur départemental à la Commission départementale : le Conseil d’État a jugé que le fait que l'interlocuteur départemental ait participé à la séance de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, au cours de laquelle celle-ci s'est prononcée sur les redressements en litige, n'est pas un événement de nature à priver l'utilité du débat ultérieur entre ce fonctionnaire et le contribuable (CE 9° et 10° ssr., 5 mai 2010, n° 308430, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1123EXU). Cet arrêt faisait suite à un autre par le Conseil d'État par lequel il a été jugé que la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur sur les points sur lesquels persiste un désaccord est sans incidence sur la circonstance que le supérieur hiérarchique ait participé à une séance de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires relative au même litige, que celle-ci ait été ou non compétente (CE 3° et 8° ssr., 30 mars 2007, n° 271787, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8121DUC). |
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Réf. : Décret n° 2021-315, du 25 mars 2021, modifiant le décret n° 2020-987, du 6 août 2020, relatif à l'octroi par les comptables de la Direction générale des Finances publiques de plans de règlement aux redevables professionnels confrontés à la crise économique engendrée par l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L8099L3D)
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N6956BYB
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par Marie-Claire Sgarra
Le 31 Mars 2021
► Le décret n° 2021-315, du 25 mars 2021, publié au Journal officiel du 26 mars 2021, modifie des dispositions réglementaires relatives à l'octroi de plans de règlement par les comptables de la Direction générale des Finances publiques aux redevables confrontés à la crise économique engendrée par l'épidémie de covid-19.
🔎 Pour rappel, en raison de l'impact de l’épidémie de coronavirus sur l’activité économique, la DGFiP a mis en place un dispositif permettant aux entreprises de solliciter un plan de règlement spécifique pour le paiement de leurs impôts. Ce plan de règlement prévu par le décret n° 2020-987 du 6 août 2020 (N° Lexbase : L8099L3D), vise à soutenir les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME) particulièrement touchées par les conséquences économiques de la crise du coronavirus. |
📌 Que prévoyait ce plan de règlement ?
Le plan s’adresse aux commerçants, artisans, professions libérales et autres agents économiques, quel que soit leur statut (société, entrepreneur individuel, association, etc.) et leur régime fiscal et social (y compris micro-entrepreneurs) ayant débuté leur activité au plus tard le 31 décembre 2019.
Sont éligibles les entreprises qui :
Peuvent faire l’objet de ce plan de règlement, les impôts directs et indirects recouvrés par la Direction générale des finances publiques, sauf ceux résultant d’une procédure de contrôle, dont la date d’échéance de paiement est intervenue entre le 1er mars 2020 et le 31 mai 2020, ou aurait dû intervenir pendant cette période avant décision de report au titre de la crise sanitaire.
Ce plan est d’une durée maximale de 36 mois.
📌 Que prévoit le nouveau texte ?
Le décret a pour objet de modifier les modalités d'octroi de plan de règlement.
Voici les modifications apparentes :
I. - Les redevables personnes physiques et personnes morales exerçant une activité économique au sens du dernier alinéa de l'article 256 A du Code général des impôts (N° Lexbase : L3557IAY), ci-après désignées par le mot « entreprises », bénéficient, sur leur demande, de plans de règlement pour leurs impôts, recouvrés par les comptables de la direction générale des finances publiques, dont la date d'échéance de paiement est intervenue entre le 1er mars 2021 et le 31 décembre 2020.
La demande doit être formulée auprès du comptable public compétent au plus tard le 30 juin 2021.
II. - La première échéance du plan de règlement prévu au I est fixée au plus tôt le 1er septembre 2020 pour les plans de règlement conclus avant cette date (ces dispositions sont abrogées).
III. - La durée des plans de règlement prévus au I est fixée par arrêté du ministre chargé du Budget, sans pouvoir excéder trente-six mois.
IV. - L'octroi du plan de règlement est subordonné aux conditions cumulatives suivantes :
1° L'entreprise emploie moins de 250 salariés et a réalisé, au titre du dernier exercice clos, un chiffre d'affaires hors taxes n'excédant pas 50 millions d'euros ou un total de bilan n'excédant pas 43 millions d'euros ;
2° L'entreprise n'est pas membre d'un groupe au sens des articles 223 A (N° Lexbase : L1889KG3) et 1586 quater (N° Lexbase : L4420LCP) du Code général des impôts sauf si le groupe remplit les conditions prévues au 1° du IV du présent article ;
3° L'entreprise a débuté son activité au plus tard le 31 décembre 2019 ;
4° Les impositions objet du plan de règlement ne peuvent résulter d'une procédure de rectification ou d'imposition d'office ;
5° L'entreprise est à jour de ses obligations fiscales déclaratives à la date de sa demande ;
6° L'entreprise constitue auprès du comptable public des garanties propres à assurer le recouvrement des créances du Trésor à hauteur des droits dus si la durée du plan de règlement octroyé est supérieure à douze mois (vingt-quatre mois) ;
7° L'entreprise atteste avoir sollicité pour le paiement des dettes dues à ses créanciers privés et dont la date d'échéance de paiement est intervenue entre le 1er mars et le 31 décembre 2020 un étalement de paiement ou des facilités de financement supplémentaires, à l'exclusion des prêts garantis par l'État en application de l'article 6 de la loi du 23 mars 2020 susvisée.
Sont insérées ces nouvelles dispositions : 8° L'entreprise est redevable, au jour de la demande de plan de règlement visé au I, d'impôts recouvrés par les comptables de la direction générale des finances publiques, dont la date d'échéance de paiement est intervenue, ou aurait dû intervenir avant décision de report au titre de la crise sanitaire entre le 1er mars et le 31 décembre 2020. Ces impositions ne peuvent résulter d'une procédure de rectification ou d'imposition d'office.
IV bis. - Les garanties constituées au titre d'un précédent plan de règlement sont maintenues, en cas d'octroi d'un plan de règlement visé au I portant en tout ou partie sur les mêmes dettes, à hauteur de leur montant restant dû au jour de cet octroi.
V. - En cas de dépréciation ou d'insuffisance des garanties du 6° du IV, le comptable public compétent peut, à tout moment, demander un complément de garanties.
VI. - Le plan de règlement est dénoncé à défaut :
1° Le cas échéant, de constitution du complément de garanties ;
2° Ou de respect par l'entreprise des échéances du plan de règlement ;
3° Ou de respect par l'entreprise de ses obligations fiscales courantes ;
4° Ou d'avoir sollicité l'étalement prévu au 7° du IV.
⏲ Les dispositions du décret entreront en vigueur le 1er avril 2021.
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Réf. : Règlement (UE) n° 2021/444, du Parlement européen et du Conseil, 11 mars 2021, établissant le programme « Douane » aux fins de la coopération dans le domaine des douanes et abrogeant le Règlement (UE) n° 1294/2013 (N° Lexbase : L5679L3Q)
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N7049BYQ
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par Marie-Claire Sgarra
Le 31 Mars 2021
► Le Règlement (UE) n° 2021/444, établissant le programme « Douane » aux fins de la coopération dans le domaine des douanes, pour la période 2021/2027, a été publié au Journal officiel de l’Union européenne le 15 mars 2021.
🔎 Le programme « Douane » a pour objectif de soutenir le fonctionnement et la modernisation de l'Union douanière afin de renforcer le marché intérieur grâce à une coopération entre les pays participants, leurs autorités douanières et leurs fonctionnaires.
Pour rappel, poursuivant des objectifs de simplification, la Commission européenne avait initialement proposé un programme unique Fiscus pour succéder aux programmes Douane 2013 et Fiscalis 2013. Mais les États membres se sont prononcés à l'unanimité en faveur d'une scission du programme unique.
📌 Les objectifs du programme. Le programme a pour objectif général de soutenir l’union douanière et les autorités douanières, coopérant et agissant de concert, en vue de protéger les intérêts financiers et économiques de l’Union et de ses États membres, de garantir la sécurité et la sûreté au sein de l’Union et de protéger l’Union du commerce déloyal et illégal tout en facilitant les activités économiques légitimes.
Plus spécifiquement, le programme a pour objectifs de soutenir :
📌 Le budget. L’enveloppe financière pour l’exécution du programme, pour la période 2021–2027, est établie à 950 000 000 euros en prix courants.
Le texte est applicable à partir du 1er janvier 2021.
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Réf. : Décret n° 2021-328, du 26 mars 2021, modifiant le décret n° 2007-1664, du 26 novembre 2007, relatif à la direction générale des douanes et droits indirects (N° Lexbase : L8393L3A)
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N6968BYQ
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par Marie-Claire Sgarra
Le 29 Mars 2021
► La Direction générale des Douanes et Droits indirects (DGDDI) est chargée d'élaborer les statistiques publiques dans le domaine du commerce extérieur. Pour se conformer à l'avis de portée générale que l'Autorité de la statistique publique a émis le 17 décembre 2019 sur la statistique publique dans les décrets d'organisation des administrations centrales, le décret n° 2021-328, du 26 mars 2021, publié au Journal officiel du 28 mars 2021, intègre les exigences d'indépendance professionnelle qui s'imposent à tout service statistique ministériel (SSM) et affirme, dans ce cadre, le rôle de coordination de l'Institut national de la statistique et des études économiques de même que le rôle du SSM rattaché à la DGDDI par rapport à la statistique européenne.
Dorénavant, la DGDDI est chargée de développer, de produire et de diffuser les statistiques publiques dans le domaine du commerce extérieur dans le respect de l'indépendance professionnelle de son service statistique, en liaison avec l'Institut national de la statistique et des études économiques, responsable de la coordination statistique. Son service statistique constitue l'autorité nationale pour la production des statistiques européennes dans ce domaine.
Le texte est entré en vigueur le 28 mars 2021.
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N7062BY9
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par Guillaume Massé, Avocat à la Cour et Estelle Biemmi, Juriste, D'Alverny Avocats
Le 01 Avril 2021
Mots-clés : loi de finances pour 2021 • entreprises • créances de carry-back • procédure de conciliation
En réponse à la crise sanitaire, la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 (loi n° 2020-935, du 30 juillet 2020, de finances rectificative pour 2020 N° Lexbase : N4307BY8) et la loi de finances pour 2021 du 29 décembre 2020 (loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 N° Lexbase : L3002LZ9) sont venues remettre au gout du jour la possibilité du remboursement anticipé des créances de carry-back. Ces mesures ont été récemment commentées au BOFiP du 24 février 2021 (BOI-IS-DEF-20 N° Lexbase : X8716ALE).
Si la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 a prévu de manière exceptionnelle l’extension de ce dispositif à toutes les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés pour l’exercice clos au 31 décembre 2020, la loi de finances pour 2021 est venue étendre, de manière perpétuelle, la possibilité de remboursement des créances de carry back aux entreprises faisant l’objet d’une procédure de conciliation. En effet, cette possibilité n’était jusqu’à présent ouverte que pour les entreprises faisant l’objet d’une procédure de sauvegarde, d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire.
Pour rappel, le mécanisme de carry-back permet d’imputer le déficit fiscal constaté au titre d’un exercice sur le résultat bénéficiaire de l’exercice précédent dans la limite d’un million d’euros (CGI, art. 220 quinquies N° Lexbase : L9172LNZ). L’imputation du déficit fait naître une créance sur le Trésor qui correspond à l’excédent d’impôt sur les sociétés antérieurement versé (cette créance n’est pas imposable).
En principe, la créance issue du report en arrière pourra être utilisée pour le paiement de l’impôt sur les sociétés durant les cinq années suivant la clôture de l’exercice durant lequel le report en arrière a été exercé. Si elle n’est pas utilisée durant ces cinq années, la créance sera automatiquement remboursée. Si l’administration ne s’acquitte pas spontanément de cette obligation, l’entreprise doit présenter une demande de remboursement dans le délai de prescription quadriennale (suivant l’expiration de la cinquième année).
Par exception, il a été prévu dès 2011 que les entreprises faisant l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire peuvent demander le remboursement anticipé de leurs créances (CGI, art. 220 quinquies, I, al. 5). Cette possibilité était donc déjà ouverte uniquement pour les entreprises en difficultés.
Quelles nouveautés ?
Dans le contexte de la crise sanitaire, le Gouvernement a mis en place, dans la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020, article 5, un dispositif temporaire permettant de demander le remboursement anticipé des créances de carry-back (constatées au plus tard lors de la clôture de l’exercice au 31 décembre 2020) pour l’ensemble des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés.
Sont donc visés par cette faculté de remboursement anticipé, le stock de créances de report en arrière des déficits, résultant d’une option déjà exercée à la clôture des exercices 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019, ainsi que les créances qui sont constatées en 2020. Les entreprises en conciliation pouvaient donc déjà, sur ce fondement, demander le remboursement anticipé de leurs créances de carry-back.
La loi de finances pour 2021 vient étendre ce dispositif, de manière pérenne, aux entreprises faisant l’objet d’une procédure de conciliation (CGI, art. 220 quinquies, I, al. 5 modifié). À compter du 1er janvier 2021, celles-ci pourront donc désormais aussi solliciter le remboursement de la créance non utilisée à compter de la date de l’ouverture de la procédure de conciliation.
Quelles entreprises concernées ?
L’article 220 quinquies du CGI vise les personnes morales et collectivités passibles de plein droit ou sur option de l’impôt sur les sociétés. Alors même que depuis une loi de 2011 [1]toutes les entreprises répondant à ces critères peuvent bénéficier de la procédure de carry-back, seules certaines peuvent demander le remboursement anticipé. En effet cette possibilité n’était jusqu’alors ouverte qu’aux entreprises faisant l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.
La loi de finances pour 2021 étend cette possibilité aux entreprises faisant l’objet de la procédure de conciliation prévue par l’article L. 611-4 (N° Lexbase : L8840INQ) et suivants du Code de commerce. Il s’agit des entreprises non-agricoles qui éprouvent une difficulté juridique, économique, avérée ou prévisible, et qui ne se trouvent pas en cessation des paiements depuis plus de 45 jours [2].
Pour quelles créances ?
Le remboursement anticipé pourra concerner les créances non-utilisées à compter de la date de la décision d’ouverture de la procédure de conciliation, mais également pour les créances nées pendant la période couverte par la procédure.
La doctrine administrative l’avait déjà précisé concernant le remboursement anticipé des créances nées pendant la période de couverture par les procédures de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires.
Il est admis que les créances de carry-back existantes, et encore non utilisées par les entreprises au 1er janvier 2021 pourront faire l’objet de la demande de remboursement anticipé [3].
Le remboursement sera effectué après déduction d’un intérêt appliqué à la créance au taux d’intérêt légal applicable le mois suivant la demande de l’entreprise.
En cas d’intégration fiscale, la société tête du groupe qui fait l’objet d’une procédure de conciliation peut demander, en application de la présente mesure, le remboursement anticipé :
Les créances de report en arrière des déficits subis par une société membre avant son entrée dans le groupe et qui n'ont pas été cédées à la société mère peuvent, quant à elles, être remboursées de manière anticipée à cette société membre si cette dernière fait l'objet d'une procédure de conciliation.
Le saviez-vous ?
L’administration est venue préciser que les entreprises agricoles qui font l’objet d’une procédure de règlement amiable (telle que prévu par les articles L. 351-1 N° Lexbase : L3911AEL et suivants du Code rural et de la pêche maritime) pourront également demander le remboursement anticipé de leurs créances de report en arrière des déficits. La demande de remboursement immédiat pourra intervenir à compter de la date à laquelle le président du tribunal judiciaire nomme un conciliateur conformément à l’article L. 351-4 du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L2737LBY).
D’autre part, pour les entreprises dont l’exercice n’est pas celui de l’année civile, il sera possible de demander le remboursement anticipé, jusqu’au 19 mai 2021, pour les créances issues du déficit de leur exercice clos en 2020 sur le fondement de la mesure exceptionnelle mis en place par la loi de finances du 30 juillet 2020 [4].
Quelles modalités ?
La demande de remboursement anticipé devra être réalisée via l’imprimé n° 2573-SD Cerfa n° 12486 disponible sur le site de l’administration impôts.gouv.fr, accompagné d’une copie de la décision d’ouverture de la procédure de conciliation ou du jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement, ou de liquidation judiciaire [5]. Il devra également être joint à la demande l’imprimé n° 2039-SD Cerfa n°14471 relatif à l’état de suivi de la créance résultant du report en arrière des déficits du millésime de l’année où la créance a été constatée (CGI, art. 46 quater-0 W, II, annexe III N° Lexbase : L8531HLK).
À retenir
Cette mesure permet aux entreprises soumises au régime de l’impôt sur les sociétés, faisant face à des difficultés économiques donnant lieu à l’ouverture d’une procédure de conciliation, d’augmenter leur trésorerie en sollicitant le remboursement anticipé de leur créance de carry-back auprès de l’administration.
Il s’agit toutefois d’une option laissée à l’entreprise qui constitue une décision de gestion qui lui est opposable [6].
Pour aller plus loin
Il ne s’agit pas de la seule mesure mis en place par la loi de finances pour 2021 pour aider les entreprises en procédure de conciliation. La loi, afin d'encourager les abandons de créance au profit des entreprises en conciliation, a également complété l'article 39, 1-8° du CGI (N° Lexbase : L7516LWB), pour permettre la déduction, sans condition, des abandons de créance à caractère commercial consentis en application d'un accord constaté ou homologué dans les conditions prévues à l'article L. 611-8 du Code de commerce (N° Lexbase : L7272IZD). La déduction d'un abandon de créance à caractère commercial consenti par une entreprise créancière de l'entreprise en conciliation n'est donc pas subordonnée à la condition que l'entreprise créancière ait agi dans son propre intérêt. Des créanciers minoritaires pourront ainsi déduire la perte résultant de l'abandon de créance décidé par la majorité des créanciers.
[1] Loi n° 2011-1117, 19 septembre 2011, de finances rectificative pour 2011, art 2 (N° Lexbase : L1269IRG).
[2] BOI-IS-DEF-20-20 n° 80 (N° Lexbase : X4772ALC).
[3] BOI-IS-DEF-20-20 (mise à jour du 24 février 2021), § 140.
[4] BOI-IS-DEF-20 n° 1.
[5] BOI-IS-DEF-20-20, mise à jour du 24 février 2021, § 220.
[6] BOI-IS-DEF-20-10 n° 250 (N° Lexbase : X9104ALR).
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Réf. : CA Rennes, 23 mars 2021, n° 19/07631 (N° Lexbase : A10644MD)
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N6995BYQ
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par Marie-Claire Sgarra
Le 31 Mars 2021
► La perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée et ne peut être équivalente à 100 % du préjudice allégué.
Les faits :
⇒ les époux X, tous deux agriculteurs, étaient propriétaires de parcelles de terres, provenant d’une donation, avant de faire l’objet d’un apport en communauté par acte notarié,
⇒ les époux X ont été approchés par une société, intéressée par ces terrains constructibles,
⇒ ils ont consulté leur notaire à propos de la fiscalité applicable à la vente et ont signé une promesse de vente ; quelques jours plus tard, ils ont été informés par leur comptable que l’opération était soumise à un impôt sur la plus-value professionnelle à long terme et aux prélèvements sociaux, car les biens vendus étaient inscrits au bilan de leur exploitation agricole,
⇒ le notaire a reconnu qu’à l’occasion des différents entretiens ayant précédé la promesse de vente, il n’avait pas vérifié si les terres vendues étaient ou non inscrites à l’actif du bilan de leur exploitation ; il a régularisé une déclaration de sinistre auprès de son assureur, dans laquelle il a admis être parti du principe que les biens vendus étaient détenus dans le patrimoine personnel des vendeurs depuis plus de trente ans et donc non soumis à l’impôt sur les plus-values en cas de vente,
⇒ les époux X estiment que le faute du notaire est en relation directe avec cette plus-value,
⇒ le TGI de Quimper a retenu la faute du notaire.
📌 Sur le devoir d’information et de conseil du notaire.
✔ Le notaire habituel des époux X, était tenu d’un devoir de conseil et d’information à leur égard, s’agissant des conséquences fiscales de la vente de leurs parcelles à la SNC LIDL. Le notaire doit s’informer auprès des parties pour remplir son devoir de conseil et d’information.
✔ En l’espèce le notaire ne s’est pas suffisamment renseigné sur le statut des terrains vendus, en partant du postulat que ceux-ci relevaient du patrimoine personnel de ses clients. Cette absence d’investigation approfondie l’a conduit à délivrer aux époux X une information erronée sur l’incidence fiscale de l’opération envisagée.
La faute professionnelle du notaire est donc établie.
📌 Sur le montant du préjudice.
✔ Les époux X revendiquent un préjudice consommé égal au montant de l’imposition qu’ils ont acquittée et contestent la perte de chance retenue par le tribunal, en affirmant qu’il est certain que mieux informés, ils auraient renoncé à la vente de leurs parcelles.
👉 Le préjudice induit par la faute du notaire dans son obligation de conseil et d'information ne peut s'analyser que comme une perte de chance de ne pas avoir pu renoncer à la vente.
👉 Il ne saurait être égal au montant de l'imposition acquittée compte tenu de l’aléa qui s'attache nécessairement à la volonté des parties.
👉 Il convient donc de déterminer avec quelle probabilité, les époux, même mieux informés, auraient poursuivi la vente de leurs terrains aux mêmes conditions.
La cour d’appel confirme le jugement du tribunal de grande instance de Quimper, mais réévalue la somme due au titre des dommages et intérêts, la cour estimant que le préjudice résultant de cette perte de chance ne saurait excéder 45 000 euros et non 100 000 comme l’avait jugé le TGI.
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N6964BYL
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par Virginie Pradel, Fiscaliste
Le 01 Avril 2021
Mots-clés : donations • successions • transmission de patrimoine • abattements
Se dirige-t-on vers un allègement de la (très lourde!) fiscalité des donations en France ? Ce sujet est, comme on le sait, hautement inflammable. D’aucuns considèrent en effet que l’allégement de celle-ci représenterait un nouveau cadeau aux « riches » [1] après ceux de la suppression de l’ISF et de l’instauration de la flat tax de 30 % sur les revenus du patrimoine. Force est toutefois de constater qu’un tel allégement serait nécessaire pour permettre une meilleure circulation du patrimoine entre les différentes générations et in fine une économie plus dynamique.
La France a fait le choix de sensiblement renforcer la fiscalité applicable aux donations depuis plusieurs années.
En 2013, le taux d’imposition marginal applicable en ligne directe a été augmenté de 40 % à 45 %.
En 2021, le montant de l’abattement applicable en ligne directe aux enfants a été réduit de plus d’un tiers, passant de 159 325 euros à 100 000 euros.
Du reste, les conditions pour bénéficier dudit abattement ont été sensiblement renforcées dans la mesure où le délai de « rapport fiscal », à savoir le délai applicable pour qu’un donataire puisse bénéficier de l’abattement après en avoir bénéficié au titre d’une donation antérieure a été plus que doublé : fixé initialement à 6 ans, il a été porté à 15 ans en 2012.
Enfin, le barème d’imposition a été gelé depuis 2012. Ce dernier était auparavant indexé sur l’inflation, comme le barème de l’impôt sur le revenu.
Contrairement à la France, un certain nombre de pays font le choix de ne pas taxer les donations [2]. Parmi ces derniers figurent la Suède, l’Autriche, l’Estonie, la Lituanie, Malte, le Liechtenstein, la Roumanie, le Royaume-Uni [3], la Norvède, l’Argentine [4], l’Australie, la Chine, Hong Kong, le Cambodge, le Congo, l’Égypte, Gibraltar, l’Indonésie, Israël, la Jordanie, le Kazakhstan, Madagascar, la Malaisie, la Mauritanie, l’île Maurice, la Mongolie, la Nouvelle-Zélande, le Nigéria, Oman, le Pakistan, le Panama, le Paraguay, le Quatar, le Rwanda, la Russie, Sainte-Lucie, l’Arabie Saoudite, Singapour, le Sri Lanka, la Tanzanie, l’Ouganda, le Turkménistan, les Émirats arabes unis, l’Uuguay, le Zimbabwe.
La fiscalité applicable aux donations en France
En ligne directe, les donations sont actuellement taxées selon un barème progressif allant de 5 % à 45 % [5]. Un abattement de 100 000 euros [6] peut s’appliquer par parent et par enfant. Les donations faites aux petits-enfants et arrière-petits-enfants sont taxées également selon le même barème progressif. Des abattements de 31 865 euros [7] et de 5 310 euros [8] peuvent respectivement s’appliquer à ces derniers.
Les donations entre époux sont taxées selon un barème progressif allant de 5 % à 45 % [9]. Un abattement de 80 724 euros [10] peut s’appliquer.
Les donations entre frères et sœurs sont taxées aux taux de 35 % et 45 %. Un abattement de 15 932 euros peut s’appliquer. Les donations au neveu et nièces sont taxées au taux de 55 %, avec un abattement possible de 7 967 euros, tandis que les autres donations jusqu’au 4ème degré inclus sont taxées au taux de 55 %, sans abattement. Les donations entre parents au-delà du 4ème degré ou entre personnes non parentes sont taxées au taux de 60 %, sans abattement.
Une personne handicapée a droit à un abattement spécifique de 159 325 euros qui se cumule avec les autres.
Les abattements s’appliquent aux donations consenties par un même donateur à un même donataire sur une période de 15 ans. Il n’est donc possible de bénéficier de l’abattement qu’une fois tous les 15 ans. À titre d’exemple, un parent effectuant un don de 100 000 euros à son enfant le 12 avril 2021 pourra de nouveau lui donner cette somme en exonération de droits à partir du 12 avril 2036.
S’ajoutent à ces abattements, les dons de sommes d’argent qui ne sont pas soumis au paiement de droits de donation, sous certaines conditions :
Le bénéficiaire peut recevoir jusqu’à 31 865 euros [11] sans avoir à payer de droits. Ce plafond d’exonération s’applique aux donations effectuées d’un même donateur à un même bénéficiaire. L’exonération est renouvelable tous les 15 ans. À titre d’exemple, un parent effectuant un don à son enfant de 31 865 euros le 5 mai 2020 pourra de nouveau lui donner cette somme d’argent sans droits à payer à partir du 5 mai 2035.
Par ailleurs, la troisième loi de finances rectificative pour 2020 [12] a instauré, à titre temporaire, un nouvel abattement de 100 000 euros jusqu’au 30 juin 2021 au profit des enfants, petits-enfants ou arrière-petits-enfants. Un même bénéficiaire peut recevoir plusieurs dons de 100 000 euros, par exemple, un don de ses parents et un autre de ses grands-parents. Pour bénéficier de l’exonération, le don doit financer :
La somme reçue par le donataire doit être utilisée dans les 3 mois après son versement.
Ce don d’argent est cumulable avec les autres abattements en vigueur précités. En l’état actuel, un parent peut donc, sous certaines conditions, donner jusqu’à 231 865 euros sans droits à payer une fois tous les 15 ans.
Vers un allégement des droits de donation ?
Une quarantaine de députés les Républicains ont récemment déposé une proposition de loi [13] visant à alléger la fiscalité applicable aux donations, [14] mais aussi aux successions.
Pour ces derniers, « Face à la situation difficile que vivent nombre de nos concitoyens depuis le début de la crise sanitaire du Covid-19, il est urgent de relancer la consommation. Pour cela, il faut permettre le déblocage de l’épargne des Français ». Les députés rappellent que l’« On hérite de plus en plus tard en France. En 1980, l’âge moyen des héritiers s’établissait à 42 ans ; il est de 50 ans aujourd’hui et il sera, si aucune évolution législative et réglementaire n’intervient d’ici là, de 58 ans, en 2050. Le poids des droits de mutation à titre gratuit appliqué à la succession s’avère vite très lourd pour les héritiers, car, au-delà d’un abattement consenti en fonction du lien de parenté et qui culmine à 100 000 euros pour les héritiers en ligne directe, les taux s’envolent rapidement pour atteindre un maximum de 45 % en ligne directe et de 60 % pour les héritiers dépourvus d’un lien de parenté. Par conséquent, en 2016, le montant des droits de succession perçus par l’État a atteint 10,8 milliards d’euros et les droits de donation 1,8 milliard d’euros, ce qui, en cumulé, représente 1,2 % du PIB et place la France au deuxième rang des pays de l’OCDE ».
S’agissant du volet « donation », les députés proposent tout d’abord de
Les députés proposent ensuite l’exonération totale des donations entre époux. Le conjoint survivant est actuellement exonéré de droits de succession alors que les donations entre époux restent curieusement soumises aux droits de donation (abattement de 80 724 euros puis barème quasi identique à celui en ligne directe).
Les députés proposent également de porter le plafond de dons d’argent à 100 000 euros tous les cinq ans. Chaque enfant pourrait ainsi recevoir, en exonération de droits, jusqu’à 100 000 euros de chacun de ses parents, grands-parents et arrière-grands-parents. Du reste, toute donation intervenant moins de quinze ans avant le décès du donateur est actuellement à réintégrer fiscalement dans la succession de ce dernier. Ce délai est trop long et interdit aux familles toute stratégie de transmission du patrimoine sur le long terme. Les députés proposent donc de ramener ce délai à deux ans pour accélérer encore les transmissions.
On attend impatiemment les propositions du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance. Ce dernier devrait faire des propositions en ce sens dans les prochaines semaines. Selon les dernières informations, le ministre souhaiterait privilégier les petites donations de l’ordre de 10 000 euros, afin de ne pas heurter l’aile gauche de la majorité.
[1] Catégorie fiscale non clairement identifiée.
[2] PWC, Worldwide Tax Summaries, Inheritance and gift tax, 2021.
[3] Sauf si le donateur décède dans un délai de 7 ans.
[4] Les donations ne sont pas taxées au niveau fédéral. La région de Buenos Aires taxe toutefois les donations de certains actifs.
[5] CGI, art. 777 (N° Lexbase : L4680I7H).
[6] CGI, art 779 (N° Lexbase : L6869IZG).
[7] CGI, art 790 B (N° Lexbase : L9408ITM).
[8] CGI, art 790 D (N° Lexbase : L9407ITL).
[9] Au-delà de 1 805 677 euros.
[10] CGI, art 779.
[11] À compter du 1er janvier 2012.
[12] Loi n° 2020-935, du 30 juillet 2020, de finances rectificative pour 2020, art. 19 (N° Lexbase : L7971LXI).
[13] Assemblée nationale, proposition de loi visant à alléger la fiscalité applicable aux successions et aux donations afin de faciliter la transmission de patrimoine aux jeunes générations, n° 3962.
[14] Et également aux successions.
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Réf. : Trib. UE, 15 juillet 2020, aff. T-778/16, Irlande/Commission et T-892/16, Apple Sales International et Apple Operations Europe/Commission (N° Lexbase : A18323RB)
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par Ivan Aubert, Master 2 fiscalité appliquée, Paris XII Secrétaire général du Cercle Droit & Liberté sous la Direction scientifique de Fabrice Pezet, Maître de conférences en droit public à l'Université Paris-Est Créteil (UPEC)
Le 31 Mars 2021
Mots-clés : affaire Apple • rulings • aides d'État • concurrence
En juillet dernier, le Tribunal de l’Union européenne [1], juridiction de première instance de la CJUE, se prononçait sur la compatibilité au droit communautaire du traitement fiscal de la marque à la pomme par l’Irlande.
Cette dernière avait octroyé un « ruling » validant pour l’avenir une méthode de détermination de la base imposable des entités irlandaises du groupe Apple, sur proposition de ce dernier. Les succursales domiciliées en Irlande tiraient notamment leur chiffre d’affaires de l’exploitation d’actifs incorporels qui ne leur appartenaient pas. Lesdites licences étaient détenues par les filiales domiciliées hors d’Irlande Apple Sales International (ASI) et Apple Operations Europe (AOE), auxquelles Apple Inc., société américaine et propriétaire, en avait concédé la jouissance. Afin de déterminer le résultat imposable par l’Irlande réalisé par les succursales, les filiales avaient obtenu des rulings en 1991 et 2007.
La Commission attaquait ces deux mesures suivant trois raisonnements :
Le tribunal, validant certaines parties de ce raisonnement, a cependant considéré que la preuve d’une aide, qui doit se caractériser pour l’entreprise par une charge fiscale effective moins importante, n’était pas rapportée.
Il ne s’agit pas d’une énième affaire européenne visant à combattre une concurrence fiscale déloyale entre États membres, mais bien d’une décision qui, si elle devait être confirmée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), marquerait un tournant en matière de preuve et préserverait certains contribuables de redressements à huit chiffres. Bien que la décision du 17 juillet 2020 ne remette pas en question le droit des aides d’État (I), elle apporte des éclaircissements sur l’exigence probatoire en ce domaine (II). Dans l’attente de la position de la CJUE, le doute planera encore.
I - Le droit européen des aides d’État : un serpent de mer dans les eaux des prix de transfert
L’étendue de l’interdiction
Comme il est d’usage entre entités liées, les opérations facturées entre elles doivent l’être au prix de marché, c’est-à-dire sans distordre la concurrence. Le respect de ce principe de pleine concurrence est sanctionné par le droit primaire de l’UE (TFUE, arts. 101 et s. N° Lexbase : L2398IPI). Les aides d’État créant, ou susceptibles de créer, des entraves à la concurrence, et uniquement celles-ci, sont pour cette raison interdites par l’article 107 TFUE (N° Lexbase : L2404IPQ). Or, à une interprétation littérale de l’article 107 TFUE qui proscrit certaines aides d’État, la Cour de justice de l’Union européenne a depuis 1974 [2] cédé à la volonté de la Commission, jamais dissimulée [3], d’y préférer une interprétation téléologique. « Coup d’État communautaire » [4] ou non, le droit des aides d’État s’étend désormais aussi aux aides « négatives » : toute mesure est visée, qu’il s’agisse d’une dépense budgétaire ou fiscale, qu’importe sa ratio legis. Seul l’effet de la mesure constaté sur la concurrence, effet réel ou potentiel, examiné de plus a posteriori, suffit à transformer une mesure légale en aide d’État contraire au droit de l’Union. Dès lors, les problématiques de sécurité juridique deviennent inhérentes à ce domaine, et dressent États et contribuables face à face : les premiers ne peuvent garantir la conformité au droit de l’Union de leurs rulings, les seconds, qui cherchent précisément à se prémunir de tout risque de redressement, doivent seuls les supporter. Comme confirmé à de nombreuses reprises [5], les principes de confiance légitime [6] et de sécurité juridique ont été chassés du jardin des aides d’État, et ont rarement la chance d’y retourner [7].
Le droit primaire n’interdit qu’une sorte de mesure au titre de l’article 107 TFUE : celle qu’entreprend l’État, sélective, susceptible d’impacter la concurrence au sein du marché commun, constitutive, enfin, dans ses effets d’un avantage, c’est-à-dire d’une diminution de la charge d’impôts normalement due [8]. En juillet dernier, la Commission tentait de prouver la sélectivité, et oubliait de relever l’existence d’une diminution effective de la charge d’impôt.
La méthode d’examen du caractère sélectif de la mesure
Pour déterminer le caractère sélectif d’une mesure, il faut d’abord déterminer le « cadre de référence », c’est à dire, ici, le droit commun applicable et ses principes directeurs. Apple considérait que la disposition de droit interne dont il était question (article 25 du Taxes Consolidation Act, 1997), qui visait effectivement les seules sociétés non-résidentes, traduisait l’existence d’un cadre spécial, réservé à ces dernières qui aurait dû servir de cadre de référence dans l’affaire en litige. Retenir cet argument eût conduit le Tribunal à reconnaître que le droit interne ne traitait pas de la même façon résidents et non-résidents. L’issue de la décision aurait alors pu être tout autre. Et ce, comme il a pu être relevé, car la formation de jugement « déduit d’une analyse du système irlandais que le principe de pleine concurrence s’y applique, sans aller jusqu’à prétendre que tous les systèmes fiscaux européens doivent, en matière de prix de transfert, appliquer ce principe. Ainsi, le droit européen des aides d’État [ne saurait] les contraindre à mettre en œuvre des règles qui ne sont pas les leurs » [9]. En revanche, tout système juridique qui connait ce principe, doit l’appliquer en son sein de façon égale et « horizontale » à tous les sujets de droit. Cette précision était bienvenue car le moyen soulevé par l’Irlande, ASI et AOE n’était autre qu’une « violation des principes constitutionnels fondamentaux de l’ordre juridique de l’Union qui régissent la répartition des compétences entre l’Union et les États membres » (§ 103).
Les trois raisonnements de la commission concluent au caractère sélectif des rulings (§ 118). Or une mesure sélective peut ne pas octroyer d’avantage. L’Irlande reprochait donc à l’exécutif européen de ne pas examiner séparément le critère de l’avantage et celui, tout aussi nécessaire, de la sélectivité. La présente décision rappelle donc de façon opportune qu’ils « constituent deux critères distincts » (§ 134), mais qu’« il ne saurait être exclu que ces critères puissent être examinés conjointement » (§ 135).
À titre principal, la Commission n’hésitait pas à raisonner par exclusion dans son appréhension des faits. En effet, de la simple constatation, non contestée, qu’ASI et AOE n’avaient en dehors de leurs succursales irlandaises ni les moyens humains et ni les moyens matériels nécessaires à la gestion effective des licences, elle concluait que seules ces succursales irlandaises auraient pu les exploiter (§ 39). « Selon la Commission, cet avantage présentait un caractère sélectif, puisqu’il entraînait une réduction de la charge de l’impôt d’ASI et d’AOE en Irlande par rapport aux sociétés non intégrées dont le bénéfice imposable reflétait les prix négociés sur le marché dans des conditions de pleine concurrence » (§ 40). Le Tribunal rejette ce syllogisme au nom d’une mauvaise interprétation du droit et de la jurisprudence des tribunaux nationaux [10]: « la question pertinente aux fins de la détermination des bénéfices de la succursale est de savoir si la succursale irlandaise contrôle ledit actif » (§ 182), pas si la filiale ne le contrôle pas. C’est fort heureux : quid des situations complexes ? La preuve se serait retrouvée à la charge du contribuable, pressé de prouver à la Commission arrivant les mains vides, en dévoilant la complexité de ses structures opérationnelles, qui effectivement exploitent les licences détenues par la tête de groupe. Surtout, et c’est primordial, il s’agit pour le Tribunal de contrôler la réinterprétation des droits internes effectuée par la Commission, certes inhérente à l’application de l’article 107 TFUE au domaine fiscal, mais en soi attentatoire à la souveraineté des États membres en matière de fiscalité directe.
II - Les aides d’État soumises à la rigoureuse question de la preuve
À titre principal, la Commission cherchait à démontrer le caractère sélectif des mesures en arguant d’une mauvaise interprétation du droit interne par les autorités fiscales irlandaises. Au titre du raisonnement subsidiaire, elle avançait que l’avantage sélectif ressortait d’une erreur de méthode de calcul, et au titre de son raisonnement alternatif qu’il découlait de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire.
Cependant, dans aucun de ces trois raisonnements la Commission n’apporte la preuve d’une diminution effective de la charge de l’impôt, c’est-à-dire d’un avantage. Or si le caractère sélectif et l’existence d’un avantage peuvent être étudiés côte-à-côte, l’un n'entraîne pas nécessairement l’autre (§ 493) [11]. Dans son raisonnement alternatif, elle ne parvient pas non plus à véritablement convaincre du caractère sélectif, alors qu’elle désirait créer une « présomption de sélectivité » en cas d’absence de « critères objectifs liés au système fiscal » justifiant la mesure (§ 491). En effet, le Tribunal rappelle la jurisprudence de la CJUE [12] selon laquelle l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire n’est constitutif d’une mesure sélective que s’il permet de « déterminer les bénéficiaires et les conditions de la mesure accordée sur le fondement de critères étrangers au système fiscal ».
Pire encore, l’absence de critères objectifs présents dans le système fiscal irlandais est déduit de l’examen de onze rulings dans lesquels la Commission « a constaté un certain nombre d’incohérences, sur le fondement desquelles elle a considéré que la pratique des autorités fiscales irlandaises en matière de rulings fiscaux était discrétionnaire » (§ 491). Cet argument, qui n’a pas convaincu, rappelle un précédent : la récente affaire « McDonald’s ». La Commission avait dû abandonner les poursuites faute de preuve, et avait accepté de reconnaître au terme de l’examen de vingt-cinq rulings que le fait de donner le même traitement à tout contribuable qui le demandait suffisait à écarter le caractère sélectif. À défaut de pouvoir démontrer la présence d’un avantage au sens du droit interne, elle avait simplement renoncé à dénoncer l’avantage [13]. Si l’activité d’Apple était reconnue comme étant aussi spécifique que celle de McDonalds, toute comparaison avec un concurrent non comparable perdrait son sens. MacBooks et Big Macs profiteront-ils du même micmac ?
L’étude de comparabilité effectuée pour appuyer le raisonnement subsidiaire est d’ailleurs rejetée. Le tribunal affirme que l’avantage que constituerait l’érosion de la base taxable n’est pas avéré et que malgré la possible « erreur méthodologique » quant à l’attribution du résultat des entités, il se situe « dans la partie inférieure d’un intervalle de pleine concurrence » (§ 477).
Il s’agit là du point sans doute le plus problématique de la décision du tribunal : le rejet brutal des moyens de la Commission soulignant, de manière documentée, la complaisance de l’Irlande vis-à-vis d’Apple dans l’octroi de ses faveurs. Certes, une décision contraire eût fait reposer la véritable charge de la preuve sur le contribuable, alors qu’il supportait déjà le poids de l’insécurité juridique et du redressement final. Quant aux États, il se serait agi ni plus ni moins de leur imposer une nouvelle obligation positive, sans fondement conventionnel, de documenter plus assidûment leur procédure d’octroi de ruling. Cependant, alors même que le Tribunal relève que l’Irlande n’a pas procédé à un examen suffisamment attentif de la validité de la demande d’Apple au regard du droit interne, et retient que de multiples considération extra-économiques, dont celles de l’emploi, ont été évoquées, il refuse pourtant d’y voir la preuve d’une mesure sélective. Il conclut simplement à « une défaillance méthodologique regrettable [14] » qui, « à elle seule, ne saurait démontrer […] l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire étendu par les autorités fiscales irlandaises » (§ 500), et semble ainsi exiger au mieux un « standard de preuve élevé » [15], au pire une véritable probatio diabolica.
De longs mois s’écouleront avant que la CJUE, devant laquelle les parties se sont portées [16], ne rende sa décision. Il n’est pas impossible d’envisager la confirmation de la décision du Tribunal, malgré les enjeux politiques colossaux que soulève ce contentieux. Bien que la preuve semblerait alors difficilement constituable à l’avenir, ce serait l’occasion de sanctionner les facilités de raisonnement de la Commission, si dommageables à l’attractivité des États et à la situation des contribuables.
[1]« le Tribunal » ci-après.
[2] CJCE, 2 juillet 1974, aff. C-173/73, Italie/Commission (N° Lexbase : A6890AUQ), Rec. 1974, p. 709.
[3] JOCE, n° 125 du 17 août 1963, p. 2235.
[4] T. Lübbig, L’application de l’article 87 du Traité de Rome aux aides fiscales : un coup d’État communautaire ? ; RMCUE, 2003, n° 465.
[5] CJUE, 23 janvier 2019, aff. C-387/17, Fallimento Traghetti del Mediterraneo SpA (N° Lexbase : A8616YTB).
[6] Principe communautaire censé préserver tout opérateur avisé et raisonnable d’un changement juridique trop brusque.
[7] CJCE, 22 juin 2006, aff. C-182-03 et C-217/03, Royaume de Belgique c/ Commission des Communautés européennes (N° Lexbase : A9603DPD).
[8] CJCE, 24 juillet 2003, aff. C-280/00, Altmark Trans GmbH, c/ Nahverkehrsgesellschaft Altmark GmbH (N° Lexbase : A2343C9N).
[9] Les enjeux de l’affaire Apple après l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 juillet 2020, Alexandre Maitrot de la Motte, Droit fiscal n° 30-35, 23 juillet 2020, 320.
[10] High Court (Haute Cour, Irlande), S. Murphy (Inspector of Taxes) v Dataproducts (Dub.) Ltd., 1988.
[11] CJUE, 4 juin 2015, aff. C-15/14 P, Commission européenne c/ MOL Magyar Olaj- és Gázipari Nyrt. (N° Lexbase : A2341NKW) : il revient à la Commission d’établir que les deux critères sont remplis.
[12] CJUE, 25 juillet 2018, aff. C-128/16 P, Commission européenne c/ Royaume d'Espagne, point 55 (N° Lexbase : A2957XY8).
[13] Commission européenne, communiqué de presse, 19 septembre 2018, n° IP/5831.
[14] Souligné par l’auteur.
[15] Michel Debroux, LEDICO sept. 2020, n° 113f2, p. 6
[16] JOUE, 1er février 2021, 2021/C 35/33.
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 25 mars 2021, n° 431603, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A45224MG)
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par Marie-Claire Sgarra
Le 29 Mars 2021
► Doit être regardée comme une reconstruction, une opération comportant la construction de nouveaux bâtiments à la suite de la démolition totale des bâtiments existants ;
Dans ce cas, la taxe d'aménagement est assise sur la totalité de la surface de la construction nouvelle, sans qu'il y ait lieu d'en déduire la surface supprimée.
Les faits :
⇒ des sociétés ont été assujetties à des cotisations de taxe d'aménagement à raison de permis de démolition et de construction d'ensembles immobiliers à Pau, Bayonne et Anglet.
⇒ chaque société a sollicité la réduction de son imposition à hauteur d'une somme correspondant à la surface des bâtiments démolis,
⇒ le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes.
Principes.
✔ Les communes ou établissements publics de coopération intercommunale perçoivent une taxe d'aménagement (C. urb., art. L. 331-1 N° Lexbase : L3058LBU).
✔ Les opérations d'aménagement et les opérations de construction, de reconstruction et d'agrandissement des bâtiments, installations ou aménagements de toute nature, soumises à un régime d'autorisation en vertu du présent code donnent lieu au paiement d'une taxe d'aménagement (C. urb., art. L. 331-6 N° Lexbase : L7411LZI).
✔ L'assiette de la taxe d'aménagement est constituée par la valeur, déterminée forfaitairement par mètre carré, de la surface de la construction (C. urb., art. L. 331-10 N° Lexbase : L1452IPH).
👉 La taxe d'aménagement est assise sur la surface de la construction créée à l'occasion de toute opération de construction, de reconstruction ou d'agrandissement de bâtiments.
Solution du Conseil d’État.
👉 Les travaux de construction réalisés par chaque société requérante avaient été précédés de la démolition totale des bâtiments existants.
👉 L'opération réalisée doit être regardée comme une reconstruction, de sorte que l'assiette de la taxe d'aménagement devait être calculée sur la base de la surface totale des constructions nouvellement créées.
📌 Sur la notion d'agrandissement pour l'application de la taxe locale d'équipement : le Conseil d’État a jugé dans un arrêt du 10 mai 2017 que la taxe locale d'équipement est assise sur la surface hors œuvre nette (SHON) créée à l'occasion de toute opération de construction, de reconstruction ou d'agrandissement de bâtiments. Doit être regardée comme un agrandissement une opération ayant pour conséquence, déduction faite, le cas échéant, de la SHON supprimée, l'augmentation nette de la SHON d'un bâtiment préexistant (CE 9° et 10° ch.-r., 10 mai 2017, n° 393485, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1100WCQ). Par cette décision, le Conseil d’État avait opéré un revirement de sa jurisprudence. Pour rappel, jusqu’ici, en cas de travaux affectant un immeuble existant, il n’était pas possible de compenser les surfaces créées et les surfaces supprimées. Toute création de surface était par principe assujettie à la taxe locale d’équipement (CE 3° et 8° ssr., 10 février 2006, n° 277754, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8347DM4). |
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 25 mars 2021, n° 438050, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A45254MK)
Lecture: 4 min
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par Marie-Claire Sgarra
Le 28 Mars 2021
► Le droit de se prévaloir du principe de confiance légitime suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, aient été fournies au contribuable par une autorité compétente ;
► Pour la TVA, cette autorité est l'autorité compétente en matière d'assiette ou une personne disposant d'une délégation régulière de signature l'habilitant à agir au nom de cette autorité.
Les faits :
⇒ la société irlandaise Rugby World Cup (RWC) Limited, société commerciale liée à la fédération internationale de rugby, laquelle détient les droits afférents à la coupe du monde de rugby, a confié à la fédération française de rugby (FFR) l’organisation de la coupe du monde de 2007,
⇒ le contrat conclu dans ce cadre prévoyait notamment le versement d’une redevance de tournoi et d’une prime de participation à la société RWC, par la FFR, à laquelle a succédé le groupement d’intérêt public Coupe du monde du rugby 2007,
⇒ à l'issue d'une vérification de la comptabilité du GIP, l'administration fiscale a estimé que ces deux sommes auraient dû être assujetties à la TVA en France,
⇒ le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de la Fédération française de rugby tendant à la décharge des suppléments d'impôt litigieux,
⇒ la cour administrative d'appel de Versailles a prononcé la décharge du rappel de TVA correspondant à la prime de participation (CAA Versailles, 28 novembre 2019, n° 17VE02120 N° Lexbase : A6462Z44).
Principes.
✔ Ne peut être regardée comme une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal une prise de position qui n'émane pas de l'autorité compétente en matière d'assiette ou d'une personne disposant d'une délégation régulière de signature l'habilitant à agir au nom de cette autorité (LPF, art. L. 80 A N° Lexbase : L6958LLB).
✔ Le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit de l'Union européenne, trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique interne dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif est régie par le droit de l'Union, ce qui est le cas des litiges en matière de taxe sur la valeur ajoutée.
✔ Le droit de se prévaloir de ce principe suppose toutefois que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, aient été fournies au contribuable par une autorité compétente.
Solution du Conseil d’État :
👉 La fédération ne peut, à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance du principe de confiance légitime, se prévaloir d'assurances qui auraient été fournies par une autorité compétente.
Pour l’opposabilité d’une interprétation administrative sur le fondement de l’article 1649 quinquies E du CGI, devenu l’article L. 80 A du LPF : le Conseil d’État a jugé dans un arrêt du 28 octobre 1983 qu’une lettre du directeur du bureau national du cognac, établissement public placé sous la tutelle du ministre de l'agriculture, faisant état d'assurances qui auraient été reçues de l'administration fiscale et selon lesquelles les personnes effectuant une seule opération par année sur les récépissés-warrants, émis en contrepartie de dépôt d'eaux-de-vie dans le magasin général de la société à laquelle cette lettre a été adressée, ne seraient pas recherchées en paiement de l'impôt sur le revenu, ne constitue pas une interprétation du texte fiscal par l'administration, au sens de l'article 1649 quinquies E du CGI. |
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Réf. : CAA Lyon, 18 mars 2021, n° 19LY00501 (N° Lexbase : A01154M9)
Lecture: 4 min
N6977BY3
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par Marie-Claire Sgarra
Le 02 Avril 2021
► Après le Conseil d’État, c’est au tour de la cour administrative d’appel de Lyon de saisir le juge communautaire d’une question préjudicielle relative au régime de taxation sur la marge à des opérations de livraisons de terrains à bâtir.
Les faits :
⇒ deux SARL et une SAS, qui exercent une activité de marchand de biens, ont acquis une parcelle bâtie,
⇒ après avoir procédé à une division parcellaire, les sociétés ont cédé des terrains à bâtir en assujettissant chacune de ces opérations à la TVA selon le régime de la marge,
⇒ à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a remis en cause l'application de ce régime,
⇒ dans les trois affaires, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge totale des rappels de TVA ainsi que des intérêts de retard correspondants.
Solution de la cour administrative d’appel.
📌 La cour administrative d’appel rappelle que le Conseil d’État a déjà eu l’occasion de préciser que les dispositions de l’article 268 du Code général des impôts (N° Lexbase : L4910IQW) ont été interprétées en ce sens que les règles de calcul dérogatoires de la TVA qu'elles prévoient s'appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s'appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d'un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l'objet d'une démolition de la part de l'acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l'objet d'une division parcellaire en vue d'en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d'assiette du bâtiment.
Consulter en ce sens : CE 8° et 3° ch.-r., 27 mars 2020, n° 428234, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A42573KU) ; D. Falco, TVA sur la marge en matière immobilière : la condition d’identité validée par le Conseil d’État, Lexbase Fiscal, mai 2020, n° 824 (N° Lexbase : N3279BY4) |
📌 La Cour de justice a cependant été saisie par une décision du Conseil d'État du 25 juin 2020, dans l'hypothèse d'un lotisseur ayant fait l'acquisition d'un terrain non bâti revendu en qualité de terrain à bâtir, après avoir effectué des travaux de viabilisation et division en lots, d'une question préjudicielle, portant notamment sur le point de savoir si l'article 392 de la Directive du 28 novembre 2006, d'application stricte en tant que dérogation, doit être interprété comme excluant l'application du régime de taxation sur la marge à des opérations de livraisons de terrains à bâtir dans les deux hypothèses suivantes : soit lorsque ces terrains, acquis non bâtis, sont devenus, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l'assujetti, des terrains à bâtir ; soit lorsqu'ils ont fait l'objet, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l'assujetti, de modifications de leurs caractéristiques telles que leur division en lots ou la réalisation de travaux permettant leur desserte par divers réseaux.
Consulter en ce sens : CE 3° et 8° ch.-r., 25 juin 2020, n° 416727, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A34753PE) ; M.-G. Merloz, TVA sur marge : saisine de la CJUE – Conclusions du Rapporteur public, Lexbase Fiscal, juillet 2020, n° 833 (N° Lexbase : N4177BYD). |
Le marchand de biens comme le lotisseur, agissant en qualité d'acheteurs-revendeurs, réalisent une opération de livraison d'un terrain à bâtir effectuée après avoir opéré certaines transformations d'un terrain acquis alors qu'il n'avait pas la qualification de terrain à bâtir. Les deux types d'opérations diffèrent en revanche en ce que, dans un cas, le terrain a initialement été acquis bâti alors que, dans l'autre cas, il a été acquis non bâti.
👉 La réponse aux moyens présentés dans le présent litige, pose des questions complémentaires à celles posées à la Cour par le Conseil d’État le 25 juin 2020.
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