Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 181 (N° Lexbase : L3002LZ9)
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N6229BYD
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par Marie-Claire Sgarra
Le 27 Janvier 2021
► L’article 181 de la loi de finances pour 2021 supprime l’obligation pour les entreprises d’envoyer systématiquement à l’administration le document récapitulant les positions symétriques.
🔎 Aux termes de l’article 38-6-3° du Code général des impôts (N° Lexbase : L6167LUX), une position s'entend de la détention, directe ou indirecte, de contrats à terme d'instruments financiers, de valeurs mobilières, de devises, de titres de créances négociables, de prêts ou d'emprunts, ou d'un engagement portant sur ces éléments.
👉 Des positions sont qualifiées de symétriques si leurs valeurs ou leurs rendements subissent des variations corrélées telles que le risque de variation de valeur ou de rendement de l'une d'elles est compensé par une autre position, sans qu'il soit nécessaire que les positions concernées soient de même nature, prises sur la même place, ou qu'elles aient la même durée.
👉 Il faut que les variations de valeurs ou de rendement de chaque position soient corrélées et de sens inverse.
📌 Actuellement, les entreprises sont tenues de déclarer, dans un document annexé à leurs déclarations de résultat de l’exercice, les positions symétriques prises au cours de l’exercice et celles qui sont en cours à la clôture de celui-ci.
À défaut, la perte sur une position n’est pas déductible du résultat imposable .
📌 L’obligation d’envoi systématique à la déclaration à l’administration est supprimée.
En pratique : l'entreprise continuera à mentionner ces positions sur un document spécifique, remis à l’administration sur demande |
La suppression de cette obligation s’applique aux exercices clos à compter du 31 décembre 2020.
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Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 144 (N° Lexbase : L3002LZ9)
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N6192BYY
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par Marie-Claire Sgarra
Le 27 Janvier 2021
► L’article 144 de la loi de finances pour 2021 proroge d’un an le dispositif d’exonération d’impôt sur les sociétés des reprises d’entreprises en difficulté.
🔎 Rappel : aux termes de l’article 44 septies du Code général des impôts (N° Lexbase : L4650I7D), les sociétés créées jusqu’au 31 décembre 2020, pour la reprise d’entreprises ou d’établissements industriels en difficulté peuvent bénéficier d’une exonération d’impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés au cours des 24 derniers mois d’activités.
À ce titre l’administration fiscale a apporté plusieurs précisions (BOI-IS-GEO-20-10-10 N° Lexbase : X7410ALZ) :
👉 L’état de difficulté est apprécié par l’analyse de la situation de l’entreprise reprise ou, le cas échéant, du ou des établissements repris. Cet état de difficulté résulte notamment de l’engagement d’une procédure de redressement judiciaire. Dans ce cas, la reprise est effectuée par voie de rachat de l’entreprise ou du ou des établissements cédés en application de l’article L. 631-22 du Code de commerce (N° Lexbase : L3101I4M).
👉 L’ensemble des actifs repris doit être affecté à l’activité industrielle de l’entreprise reprise. Par conséquent, lorsque l’entreprise ou l’établissement repris, selon le cas, exerce simultanément une activité industrielle et une ou plusieurs autres activités ne présentant pas ce caractère, les dispositions de l’article 44 septies du CGI ne sont pas applicables à l’entreprise nouvelle, sauf si les activités non industrielles constituent le complément indissociable d’une activité industrielle exercée à titre principal.
À noter : le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 1er juillet 2021, un rapport évaluant le coût du dispositif prévu à l'article 44 septies du code général des impôts pour l'État, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés ainsi que son efficacité au regard des objectifs qui lui sont fixés. Ce rapport identifiera également les pistes d'évolution envisageables.
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 31 décembre 2020, n° 430230, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A35094BL)
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N6201BYC
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par Marie-Claire Sgarra
Le 27 Janvier 2021
► L'exonération d'impôt sur le revenu prévue par l’article 81 du Code général des impôts (N° Lexbase : L7510LXG) est réservée aux rémunérations perçues pendant la période des études secondaires ou supérieures à raison d'un emploi salarié.
Les faits. À l'issue d'un contrôle sur pièces de leurs déclarations de revenus au titre des années 2011 à 2013, les requérants ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'IR à raison des rémunérations perçues par leurs trois enfants, rattachés à leur foyer fiscal, dans le cadre de stages.
Procédure. Le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande de réduction de ces impositions supplémentaires (TA Caen, 17 mai 2017, n° 1501907 N° Lexbase : A7612ZK7). La cour administrative d'appel de Nantes, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des sommes dégrevées par l'administration fiscale en cours d'instance, a rejeté le surplus de leurs conclusions dirigées contre le jugement du tribunal (CAA Nantes, 28 février 2019, n° 17NT02119 N° Lexbase : A3609ZGR).
Principes :
Solution du Conseil d’État. Les enfants ont perçu des gratifications à raison de stages effectués dans le cadre de leurs études supérieures ;
⇒ Ces sommes ne revêtent pas la nature d’un salaire ⇒ elles ne bénéficient pas d’une exonération d’IR.
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Réf. : Décret n° 2020-58 (N° Lexbase : L9055LZE) et décret n° 2021-58 (N° Lexbase : L9056LZG), du 25 janvier 2021 ; arrêté du 25 janvier 2021, n° NOR : LOGL2100768A (N° Lexbase : L9082LZE) ; arrêté du 25 janvier 2021, n° NOR : LOGL2100768A (N° Lexbase : L9082LZE)
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N6205BYH
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par Marie-Claire Sgarra
Le 28 Janvier 2021
► Plusieurs textes, relatifs à la prime de transition énergétique, ont été publiés au Journal officiel du 26 janvier 2021.
🔎 À compter du 1er janvier 2020, le CITE (crédit d'impôt pour la transition énergétique) a été transformé en prime pour les ménages modestes, fusionnée avec l'aide Anah Agilité et versée dès l'envoi des factures des travaux. Cette prime unique est baptisée « MaPrimeRénov ». Le CITE a toutefois été maintenu pour les ménages non éligibles à cette prime jusqu'au 31 décembre 2020.
La nouvelle loi de finances pour 2021 (loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 N° Lexbase : L3002LZ9) a étendu le bénéfice de la prime à tous les ménages, y compris les propriétaires bailleurs, ainsi qu'aux copropriétés. Par ailleurs, le CITE disparait définitivement.
📌 Le décret n° 2020-59, du 25 janvier 2021 (N° Lexbase : L9055LZE), modifie le décret n° 2020-26, du 14 janvier 2020 (N° Lexbase : Z002919P) pris en application de l'article 15 de la loi n° 2019-1479, du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 (N° Lexbase : L5870LUX), qui prévoit la création d'une prime de transition énergétique, baptisée MaPrimeRénov', à destination des ménages sous plafonds de ressources et distribuée par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH).
👉 Ainsi, dans le cadre de la clôture du CITE et du plan de relance, les caractéristiques et conditions d'octroi de la prime évoluent. Ces évolutions sont prévues dans le présent décret :
Le texte est entré en vigueur le 27 janvier 2021. Il s'applique aux demandes de prime déposées à compter du 1er janvier 2021.
📌 Le décret n° 2021-58, du 25 janvier 2021 (N° Lexbase : L9056LZG) fixe la composition et prévoit les cas et les modalités de saisine de la commission des sanctions, instituée par l'article 8, du décret n° 2020-26, du 14 janvier 2020, relatif à la prime de rénovation énergétique.
👉 Cette commission composée de 5 membres est chargée de rendre un avis préalablement aux décisions de sanction prises par le directeur général de l'Agence nationale de l'habitat. La commission doit obligatoirement être saisie des projets de sanction visant des mandataires, en cas de manquements et irrégularités graves, répétées ou présentant un caractère nouveau, en cas de manœuvre frauduleuse ainsi que lorsque la personne concernée a demandé à être entendue par la commission. Le directeur général de l'agence nationale de l'habitat peut également lui soumettre tout dossier qui lui parait utile.
Le texte est entré en vigueur le 27 janvier 2021.
📌 L’arrêté du 25 janvier 2021, n° NOR : LOGL2100768A (N° Lexbase : L9082LZE), précise les modalités des évolutions de la prime de transition énergétique.
👉 Ainsi,
Le décret du 14 janvier 2020 modifié prévoit également plusieurs dispositions améliorant la gestion de la prime. Le présent arrêté prévoit les modalités de ces évolutions et précise :
📌 Enfin, l’arrêté du 25 janvier 2021, n° NOR : LOGL2100769A (N° Lexbase : L9100LZ3), définit les caractéristiques techniques et des modalités de réalisation des travaux de « rénovation globale », de la prestation d'assistance à maîtrise d'ouvrage, et des chantiers éligibles aux bonifications mentionnées au septième alinéa du I de l'article 3 du décret n° 2020-26 du 14 janvier 2020, relatif à la prime de transition énergétique.
👉 Deux nouvelles dépenses sont rendues éligibles à la prime de transition énergétique : les travaux de rénovation énergétique visant à améliorer la performance globale (dit « rénovations globales ») et la prestation d'assistance à maîtrise d'ouvrage. De plus, deux bonifications sont créées pour des chantiers permettant de passer d'une étiquette du diagnostic de performance énergétique F ou G à une étiquette A, B, C, D ou E, et pour des chantiers permettant de passer d'une étiquette C ou moins à une étiquette A ou B.
Le présent arrêté précise les caractéristiques techniques et modalités de réalisation de ces travaux et prestation.
Les deux arrêtés sont entrés en vigueur le 27 janvier 2021 et s'applique aux demandes de primes déposées auprès de l'Agence national de l'habitat à compter du 1er janvier 2021.
En pratique :
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Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 30 novembre 2020, n° 438496, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A295538X)
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N6240BYR
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par Arnaud Le Gall, Maître de conférences en droit public à l’Université de Caen-Normandie, Centre Maurice Hauriou (Université Paris V- Descartes), directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de l'urbanisme", avocat au barreau de Paris.
Le 27 Janvier 2021
Mots-clés : proposition de rectification • changement de domicile • représentant fiscal
Par un arrêt du 30 novembre 2020, le Conseil d’État précise sa jurisprudence relative à la désignation d’un représentant fiscal et à ses conséquences sur la notification des actes de la procédure d’imposition.
Malgré les restrictions de mobilité dues à la crise sanitaire actuelle, restrictions qu’on espère provisoires, l’apport de cette décision est important, notamment pour les personnes expatriées qui voient ainsi clarifiées les conditions et les conséquences de la désignation d’un représentant fiscal auprès de l’administration.
Dans cette affaire, un couple de contribuables avait été assujetti à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre de l’année 2011. Ces impositions supplémentaires résultaient de l’expiration du sursis d’imposition dont ils bénéficiaient à raison d’une plus-value d’apport de titres réalisée en 2010, la dissolution de la société bénéficiaire de l’apport ayant entraîné l’annulation des titres reçus en échange. Après avoir résidé en France jusqu’en 2011, les contribuables avaient transféré leur résidence à Londres, ce dont l’administration avait été informée par un courrier de l’avocat qu’ils avaient désigné comme leur représentant fiscal en France. L’administration n’avait toutefois pas tenu compte de ce courrier et avait notifié la proposition de rectification à leur adresse londonienne. Le tribunal administratif de Montreuil avait annulé la procédure d’imposition au motif que le mandat qui avait été donné à l’avocat emportait élection de domicile au cabinet de ce dernier et que l’administration était tenue de lui notifier les actes de la procédure d’imposition. Aux termes d’un arrêt plus motivé que le jugement, la cour administrative d’appel de Versailles avait confirmé cette solution au visa des articles L. 57 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L0638IH4) et 164 D du Code général des impôts (N° Lexbase : L4684I7M). Saisi par le ministre de l’Action et des Comptes publics, le Conseil d’Etat confirme cette solution, estimant que la cour n’a pas dénaturé le courrier emportant désignation du représentant fiscal des contribuables et qu’elle n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que ces derniers avaient pu désigner spontanément ce représentant. Deux éléments méritent de retenir l’attention : la désignation du mandataire fiscal (I) et le droit pour le contribuable de le désigner de manière spontanée (II).
I – La désignation du mandataire fiscal
La désignation d’un mandataire par le contribuable renvoie à la question de la personne à laquelle les actes de la procédure d’imposition doivent être notifiés. L’article L. 57 du Livre des procédures fiscales se limite à exiger que la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable soient motivées. Il ne précise pas les modalités de signification de la proposition de redressement. Logiquement, la proposition de rectification est donc signifiée à son destinataire. Qu’en est-il, en revanche, lorsque celui-ci se prévaut de la désignation d’un mandataire ?
La jurisprudence a posé plusieurs jalons permettant de déterminer les conditions d’une notification régulière de la proposition de rectification. Commençons par l’avocat dont la situation a été éclaircie par un arrêt du 24 février 2017 qui précise « que, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires excluant l’application d’un tel principe dans les cas particuliers qu’elles déterminent, les avocats ont qualité pour représenter leurs clients devant les administrations publiques sans avoir à justifier du mandat qu’ils sont réputés avoir reçu de ces derniers, dès lors qu’ils déclarent agir pour leur compte. Aucune disposition législative ou réglementaire applicable au déroulement de la procédure d’imposition ne subordonne la possibilité pour un avocat de représenter un contribuable à la justification du mandat qu’il a reçu » (CE 3° et 8° ch.-r., 24 février 2017, n° 391014, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2361TP7). En statuant ainsi, le Conseil réaffirme l’importance du principe selon lequel « L’avocat est cru sur sa robe ».
On notera que cette décision étend la solution qu’elle énonce à l’ensemble des autres mandataires potentiels. L’arrêt précise, au visa de l’article L. 57 du Livre des procédures fiscales, que sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l’ensemble des actes de la procédure d’imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire. Par conséquent, lorsque le mandat a été porté à la connaissance de l’administration fiscale, celle-ci est en principe tenue d’adresser au mandataire l’ensemble des actes de la procédure d’imposition. Pour les avocats, le mandat peut prendre la forme d’une élection de domicile au cabinet : dans cette hypothèse, « l’administration fiscale est tenue de lui adresser les actes de la procédure d’imposition sans qu’il soit besoin d’exiger la production d’un mandat exprès ».
L’avocat n’a donc pas à justifier de l’existence, de la validité et du contenu de son mandat à l’égard des administrations publiques. En outre, le mandat donné par le contribuable à son avocat de recevoir l’ensemble des actes de la procédure d’imposition emporte élection de domicile.
L’arrêt du 24 février 2017 confirme ainsi l’avis « Riccobono » du 23 mai 2003, selon lequel le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire (CE Contentieux, 23 mai 2003, n° 253223, publié au recueil Lebon, « SA Imprimerie Riccobono » N° Lexbase : A9488C7K). L’administration fiscale, lorsqu'elle a été informée de l’existence d’un tel mandat, est donc tenue d'adresser à ce mandataire l'ensemble des actes de cette procédure et, en particulier, la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable.
Le mandat donné à un représentant fiscal emporte donc nécessairement élection de domicile, sauf mention contraire, pour les actes relatifs à son imposition et cette élection de domicile impose à l’administration fiscale de notifier la notification de redressement prévue par l’article L. 57 du Livre des procédures fiscales (CE 3° et 8° ssr., 13 mars 2016, n° 376141, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2181Q8B). Cette solution avait été rendue au visa de l’article 223 quinquies A du code général des impôts mais dès lors que celui-ci prévoit des dispositions, relatives aux personnes morales, parfaitement identiques à celle de l’article 164 D, on ne pouvait qu’en conclure qu’il s’applique à ce dernier. Dans ses conclusions sur l’arrêt du 16 mars 2016, M. Bonhert précisait explicitement que la désignation d’un représentant fiscal présente un caractère général et prévaut sur les distinctions opérées par la jurisprudence au sujet des mandats. Rappelant les décisions du 27 octobre 2010 et du 12 avril 2013, il estimait en effet que la distinction opérée par ces décisions n’avait pas lieu de s’appliquer à la désignation d’un représentant, opérée en vertu de l'article 223 quinquies A du CGI (N° Lexbase : L4682I7K) (Concl. B Bonhert sur CE 3° et 8° ssr., 16 mars 2016, n° 376141, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2181Q8B, Droit fiscal n° 22, 2 Juin 2016, comm. 357).
Les juges du fond ont également considéré que la désignation d’un représentant fiscal emporte élection de domicile. La cour administrative d’appel de Paris a considéré que la circonstance que le contribuable avait désigné, sur un formulaire de déclaration de revenus, son avocat comme étant son représentant fiscal en France, emportait élection de domicile chez ce dernier et obligeait en le service, même s'il estimait que la conservation d'un domicile en France par le contribuable ne rendait pas obligatoire cette désignation, à adresser au représentant l'ensemble des actes de procédure concernant l'examen contradictoire de la situation fiscale du contribuable (CAA Paris, 29 décembre 2006, n° 04PA03289).
Pour compléter ce tableau, il faut évoquer les limites relatives à la désignation d’un mandataire. C’est ainsi que le mandat n'emporte élection de domicile que s'il est donné pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure et y répondre. Faute d’habiliter expressément le mandataire à recevoir l'ensemble des actes de la procédure, il n'emporte pas élection de domicile (CE 3° et 8° ssr., 27 octobre 2010, n° 327163, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1098GDZ ; CE 3° et 8° ssr., 25 mars 2013, n° 351822 mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3254KB7 ; CE 3° et 8° ssr., 12 avril 2013, n° 354551, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0992KCQ). En outre, le mandat n’est pas toujours opposable à l’administration fiscale : en l’absence d’une mention habilitant expressément le mandataire à recevoir l’ensemble des actes de la procédure d’imposition, l’administration n’entache pas la procédure d’imposition d’irrégularité en notifiant l’ensemble des actes de la procédure au contribuable, alors même que le mandat confierait au mandataire le soin de répondre à toute notification de redressements, d’accepter ou de refuser tout redressement (CE 3° et 8° ssr., 27 octobre 2010, n° 327163, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1098GDZ). Un courrier adressé à l’administration par un avocat ne peut être regardé comme l'informant de l'existence d'un mandat emportant élection de domicile, dès lors qu'il se borne à indiquer à l'administration que les contribuables ont désigné un mandataire chargé de suivre leur dossier et de les représenter, cette désignation visant, de surcroît un examen de leur situation fiscale personnelle portant les années 2001 à 2003, alors que les redressements en litige faisant l'objet de la proposition de rectification procédaient d'un contrôle sur pièces relatif à l'année 2000 (CE, 12 avr. 2013, n° 354551 précité).
L’arrêt du 30 novembre 2020 opère une synthèse de la jurisprudence antérieure avec l’hypothèse de la désignation d’un représentant fiscal, prévue par l’article 164 D du Code général des impôts qui disposait, dans sa rédaction applicable à l’affaire : « Les personnes physiques exerçant des activités en France ou y possédant des biens, sans y avoir leur domicile fiscal, ainsi que les personnes mentionnées au 2 de l'article 4 B, peuvent être invitées, par le service des impôts, à désigner dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la réception de cette demande, un représentant en France autorisé à recevoir les communications relatives à l'assiette, au recouvrement et au contentieux de l'impôt ». Notons au passage que la rédaction actuelle, issue de l’article 62 de la loi de finances rectificative pour 2014 (loi n° 2014-1655, du 29 décembre 2014, de finances rectificative pour 2014 N° Lexbase : L2844I7H), supprime cette obligation, notamment pour les contribuables résidant dans un autre pays de l’union européenne, à la suite d’une décision de la cour de justice qui voyait là une atteinte à la libre circulation des capitaux (CJUE, 5 mai 2011, aff. C-267/09 Commission c/ Portugal N° Lexbase : A7687HPE).
La décision du 30 novembre 2020 pose donc les conséquences de la désignation d’un mandataire fiscal dans les termes suivants : « un contribuable imposable à l’impôt sur le revenu en France sans y avoir son domicile fiscal désigne une personne établie ou domiciliée en France pour la représenter auprès de cette administration, cette désignation emporte élection de domicile auprès de ce représentant pour l’ensemble des procédures d’établissement et de recouvrement de l’impôt sur le revenu. Par suite, lorsque l’administration fiscale, dûment informée de cette désignation, conduit à l’égard de ce contribuable une procédure de rectification, elle doit, en principe, adresser à ce représentant la proposition de rectification prévue à l’article L. 57 du Livre des procédures fiscales. La notification de la proposition de rectification au domicile du contribuable est toutefois réputée régulière s’il est établi que le pli de notification a été effectivement retiré par le contribuable ou par l’un de ses préposés ».
Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette décision.
Tout d’abord, on notera que, dans le cadre de l’application de l’article 164 D du Code général des impôts, elle dépasse la distinction entre les avocats et les autres mandataires. En effet, la seule condition posée à la désignation du représentant tient à sa domiciliation ou au fait qu’il est établi en France. Le contribuable est donc libre de désigner toute personne de confiance pour le représenter auprès de l’administration fiscale. Ce choix n’impose pas moins un certaine prudence, au regard des conséquences qu’il peut emporter.
Ensuite, le champ d’application de cette désignation est étendu puisqu’elle vaut, toujours dans le cadre de l’article 164 D, pour l’ensemble des procédures d’établissement et de recouvrement de l’impôt sur le revenu. Le mandat recouvre tant les actes relatifs à une imposition primitive que ceux relatifs à un rehaussement d’imposition. L’arrêt précise explicitement ce point puisqu’il mentionne explicitement le cas de la proposition de rectification qui doit être adressée au représentant.
Enfin, l’arrêt maintient l’exception évoquée dans l’avis précité « Riccobono » : la notification d’une proposition de rectification directement au contribuable qui a désigné un représentant demeure régulière si le contribuable, ou l’un de ses préposés, retire effectivement le courrier. La portée pratique de cette exception n’est pas négligeable. Au-delà de la volonté de piéger le contribuable en lui adressant sciemment une proposition de rectification alors qu’il a pourtant explicitement désigné un représentant fiscal, deux motifs peuvent expliquer une telle démarche de la part de l’administration. D’une part, et très classiquement, l’incompétence de l’agent peut le conduire à oublier de prendre en compte cet élément du dossier du contribuable.
D’autre part, le caractère parfois ambiguë de la désignation du mandataire peut pousser le fonctionnaire à considérer qu’il doit notifier la proposition de rectification directement au contribuable. A cet égard, le Conseil d’État, dans l’arrêt commenté, confirme la lecture que la cour avait fait du courrier du 18 juillet 2011 de l’avocat des contribuables, adressé à l’administration fiscale et intitulé « Transfert de leur résidence principale au Royaume-Uni » dans lequel ledit avocat avait informé le service des impôts du transfert par les contribuables de leur domicile à Londres et indiqué être leur « représentant fiscal ». Le rejet du grief de dénaturation soulevé par le ministre à l’encontre de l’arrêt, ainsi que le rappel des faits par l’arrêt d’appel, montrent que ce courrier était manifestement trop sommaire et trop mal rédigé pour pouvoir être considéré comme valant élection de domicile au cabinet de l’avocat. Toutefois, ainsi que la cour l’a explicitement relevé, la qualité de non-résident des contribuables permettait d’y voir un cas d’application de l’article 164 D du Code général des impôts. On peut raisonnablement penser que cette circonstance a été déterminante pour le Conseil d’État.
En tout état de cause, et quelle que soit la raison qui peut conduire l’administration à passer outre la désignation d’un représentant fiscal, le contribuable expatrié doit faire preuve de la plus grande prudence et informer chacune des personnes de son entourage qui pourrait être susceptible de recevoir un pli de l’administration fiscale. Sous peine de révoquer de facto la désignation du représentant fiscal, aucun pli ne doit être accepté. On peut même suggérer au contribuable, pour éviter toute difficulté, de ne pas communiquer son adresse à l’administration fiscale, dès lors que la désignation du représentant l’en dispense.
II – La désignation volontaire du représentant fiscal
Le second aspect important de l’arrêt tient à la question de la désignation volontaire d’un représentant fiscal. Il résulte des termes de l’article 164 D du Code général des impôts précités que la désignation d’un représentant est faite sur demande de l’administration : « Les personnes physiques exerçant des activités en France ou y possédant des biens, sans y avoir leur domicile fiscal, […] peuvent être invitées, par le service des impôts, à désigner […] un représentant ». Attention à l’euphémisme car la sanction de cette « invitation » est brutale : l’article L. 72 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L3934ALB) prévoit l’application de la taxation d’office à l’égard du contribuable qui n’a pas déféré à la demande de désignation d’un représentant fiscal.
On sait à quel point il est illusoire de fonder une argumentation devant le juge administratif en général, et le Conseil d’État en particulier, sur la seule approche littérale d’un texte. Toutefois, en l’occurrence, si le texte semble réserver à l’administration, laquelle n’y est pas obligée (CE 9° et 10° ssr., 30 mars 2005, n° 230053, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A4313DH9), le droit de provoquer la désignation d’un représentant, force est de constater qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’interdit explicitement au contribuable qui n’est pas domicilié en France de procéder d’initiative à cette désignation.
En outre la jurisprudence antérieure à l’arrêt commenté s’orientait nettement dans le sens d’une possibilité, pour le contribuable de désigner spontanément un représentant fiscal.
Au sujet d’un contribuable qui avait transféré sa résidence fiscale à l’étranger, M. Martin précisait expressément, dans ses conclusions sur un arrêt du 13 mai 1992, que la désignation d’un représentant fiscal peut intervenir de manière spontanée et sans qu’on puisse lui opposer la lettre de l’article 164 D du Code général des impôts. Evoquant le cas de double résidence ou de résidences multiples, il considérait que le contribuable est en droit de suggérer à l'administration fiscale une organisation des envois postaux qui soit la plus conforme aux nécessités pratiques. Il en déduisait que, dans ces hypothèses, l'administration ne peut ignorer l'adresse indiquée par le contribuable pour les actes constituant des garanties légales. Cette solution s’imposait d’autant plus que la question de l’adresse utilisée pour correspondre avec le contribuable, ne préjuge pas du pays dans lequel il est effectivement imposable. Au sujet de la lettre de l’article 164 D, M. Martin relevait « [...] ce texte ne prévoit qu'une simple faculté pour l'Administration, et il n'interdit pas la solution que nous proposons » (Ph. Martin, concl. sur CE 13 mai 1992, Droit fiscal n° 23, 8 juin 1994, 1127).
Statuant dans le cadre de l’article 223 quinquies A du Code général des impôts qui prévoit une disposition exactement similaire pour les sociétés redevables de l’impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée, le Conseil d’État, dans l’arrêt précité du 16 mars 2016, a explicitement confirmé l’analyse de la cour administrative d’appel qui avait reconnu la validité de la désignation d’un représentant fiscal en l’absence de toute sollicitation de l’administration fiscale : « 3. Considérant que, dans l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Marseille a relevé que Me A...avait souscrit, les 20 juin 2003 et 10 mai 2004, pour le compte de la société Autophon Funk AG, des déclarations au titre de la taxe sur la valeur vénale des immeubles détenus par des entités juridiques, relatives aux immeubles qu'elle détenait en France en se présentant comme le représentant fiscal de cette société » (CE 3° et 8° ssr., 16 mars 2016, n° 376141, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2181Q8B). Dans cette affaire, il ne faisait aucun doute, au vu de la rédaction des arrêts d’appel et de cassation, que la désignation du représentant avait été faite spontanément par le contribuable et non sur demande de l’administration fiscale.
L’arrêt du 20 novembre 2020 confirme la possibilité pour le contribuable de désigner spontanément un représentant fiscal. L’arrêt précise en effet que la solution qu’il énonce s’applique dans le cadre de l’article 164 D, que la désignation par le contribuable intervienne « de sa propre initiative ou à la suite d’une demande que lui adresse l’administration fiscale en application de ces dispositions ». Le Conseil en conclut qu’ « En en déduisant que, bien que cette désignation ne soit pas intervenue à la suite d’une demande de l’administration en application des dispositions de l’article 164 D du Code général des impôts, il appartenait à l’administration d’adresser la proposition de rectification à ce représentant, la cour administrative d’appel de Versailles n’a pas commis d’erreur de droit ».
Cette solution ne semble pas limitée à l’article 164 D et rien ne s’oppose à ce qu’elle s’applique aux autres cas dans lesquels le code général des impôts prévoit la désignation d’un représentant fiscal. On pense à l’article 983 qui, pour l’impôt sur la fortune immobilière, renvoie à l’article 164 D. Il en va de même pour l’article 223 quinquies A précédemment évoqué, applicable qui exercent des activités en France ou y possèdent des biens sans y avoir leur siège social et qui prévoit une disposition similaire à l’article 164 D au sujet de l’impôt sur les sociétés. On peut également citer l’article 244 bis A, relatif au prélèvement sur les plus-values immobilières des non-résidents, qui prévoit qu’il est acquitté sous la responsabilité d’un représentant fiscal lorsque, notamment, le cédant n’est pas établi dans un Etat membre de l’Union européenne. Selon les cas, le représentant fiscal fait office de simple courroie de transmission postale ou peut être légalement tenu comme redevable de l’impôt.
La possibilité de désigner spontanément un représentant fiscal s’adapte aux contraintes des expatriés. Les communications électroniques permettent ainsi au contribuable de prendre connaissance presqu’instantanément du contenu des correspondances de l’administration ce qui facilite le respect des délais ouverts au contribuable, qu’il s’agisse de répondre aux propositions de rectification ou aux demandes d’éclaircissement ou de justification. Du point de vue de l’administration, cette solution facilite également les modalités de communication avec le contribuable puisque le représentant, quand bien même il n’est pas avocat, constitue un point d’entrée unique. Sa présence évite toute recherche d’adresses à l’étranger et garantit la distribution des correspondances. Une fois n’est pas coutume en matière fiscale, tout le monde y gagne, sauf, dans l’espèce commentée, le Trésor public, puisque le rejet du pourvoi du ministre confirme l’annulation de la procédure d’imposition.
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Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 3 (N° Lexbase : L3002LZ9)
Lecture: 1 min
N6182BYM
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par Marie-Claire Sgarra
Le 27 Janvier 2021
► L’article 3 de la loi de finances pour 2021 étend le champ d’application de la réduction d’impôt pour versement d’une prestation compensatoire en capital aux prestations compensatoires mixtes.
🔎 Les prestations compensatoires sont versées pour partie sous forme de capital en numéraire libéré dans les douze mois du jugement de divorce (ou la date à laquelle la convention de divorce par consentement mutuel a acquis force exécutoire) et pour partie sous forme de rente. En cas de versement d'une prestation compensatoire mixte, à liquider pour partie en capital et pour partie en rente, la partie en capital n'ouvrait pas droit à la réduction d'impôt, même si elle devait être versée dans les douze mois suivant le divorce.
Par une décision du 31 janvier 2020, le Conseil constitutionnel a déclaré que le régime fiscal de la prestation compensatoire mixte (CGI, art. 199 octodecies N° Lexbase : L2587LBG) était inconstitutionnel en raison de la violation du principe d’égalité devant les charges publiques (Cons. const., décision n° 2019-824 QPC, du 31 janvier 2020 N° Lexbase : A85133CB).
👉 Lire en ce sens, F. Laffaille, Fiscalité des prestations compensatoires mixtes, Lexbase Fiscal, mars 2020, n° 815 (N° Lexbase : N2402BYM). |
📌 Nouveau régime instauré par la loi de finances :
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Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 (N° Lexbase : L3002LZ9), art. 3
Lecture: 2 min
N6181BYL
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par Marie-Claire Sgarra
Le 26 Janvier 2021
► L’article 3 de la loi de finances pour 2021 tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel en date du 28 mai 2020 et aménage ainsi le régime de déductibilité de la contribution aux charges du mariage (Cons. const., décision n° 2020-842 QPC, du 28 mai 2020 N° Lexbase : A22913MS).
🔎 Rappel :
Le Conseil d’État avait transmis au Conseil constitutionnel une QPC portant sur les dispositions précitées de l’article 156 du Code général des impôts qui réservaient la déduction des contributions aux charges du mariage aux versements qui résultent d’une décision de justice (CE 9° et 10° ch.-r., 28 février 2020, n° 436454, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A93013GL). Le Conseil constitutionnel avait jugé ces dispositions non conformes à la Constitution.
👉 Lire en ce sens, L. Dominici, La fin d’une égalité inconstitutionnelle, Lexbase Fiscal, juillet 2020, n° 831 (N° Lexbase : N3981BY4). |
📌 Nouveau régime instauré par la loi de finances : la déductibilité de la contribution aux charges du mariage du revenu imposable de l’époux qui la verse n’est plus subordonnée à la condition que son versement résulte d’une décision de justice.
📌 En pratique :
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Réf. : Résolution du Parlement européen du 21 janvier 2021 sur la réforme de la liste des paradis fiscaux de l’Union européenne
Lecture: 1 min
N6206BYI
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par Marie-Claire Sgarra
Le 27 Janvier 2021
► Les députés européens ont adopté une résolution proposant des modifications au système établissant la liste noire européenne des paradis fiscaux.
Pour rappel, les États membres ont convenu de la toute première liste noire, au niveau de l’Union européenne en 2017. Cette liste s’inscrit dans le cadre des travaux de l’Union européenne pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.
Cette liste a été établie à l’aune de trois critères :
Cette liste, régulièrement actualisée, est amené à évoluer.
Les députés ont proposé des modifications qui rendraient la procédure d’inscription ou de retrait d’un pays de la liste plus transparente.
Les modifications apportées seraient les suivantes :
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Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 11 décembre 2020, n° 440307, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A654939G)
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N6199BYA
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par Karin Ciavaldini, Rapporteure publique au Conseil d’État
Le 05 Février 2021
Mots-clés : convention fiscale • imposition • plus-value immobilière
L’article 13 de la convention fiscale franco-brésilienne, en prévoyant que certains gains sont imposables dans l’État où ces biens sont situés, n’a ni pour objet, ni pour effet d’exclure toute possibilité pour l’État dont le contribuable est résident, d’imposer également ces gains.
👉L’État de la source (le Brésil) ne dispose pas d’un droit exclusif d’imposition.
Telle est la solution retenue par le Conseil d’État dans un arrêt en date du 11 décembre 2020. Lexbase Hebdo Édition Fiscale vous propose les conclusions de la Rapporteure publique, Karin Ciavaldini.
Mme Guilhem de P. a cédé en 2008 des actions d’une société de droit brésilien dont l’actif était principalement composé de biens immobiliers. Elle a estimé que la plus-value réalisée n’était imposable qu’au Brésil. Dans le cadre d’un contrôle sur pièces, l’administration fiscale a au contraire estimé que cette plus-value était imposable en France, tout en acceptant l’imputation sur l’impôt français de l’impôt acquitté au Brésil. Mme Guilhem de P. a contesté sans succès les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge devant le tribunal administratif de Lyon, mais elle a obtenu gain de cause devant la cour administrative d’appel de Lyon, par un arrêt du 12 mars 2020 contre lequel le ministre se pourvoit en cassation.
La plus-value en litige était imposable en France en vertu de la loi fiscale française mais les juges du fond se sont divisés sur le point de savoir si la convention fiscale du 10 septembre 1971 entre la France et le Brésil (N° Lexbase : E0486EUK) faisait obstacle à cette imposition. L’article 13 de cette convention stipule, en son paragraphe 1, que : « Les gains provenant de l’aliénation de biens immobiliers … ou de l’aliénation de parts ou de droits analogues dans une société dont l’actif est composé principalement de biens immobiliers sont imposables dans l’État contractant où ces biens immobiliers sont situés ». Le dossier pose l’unique question de savoir comment interpréter les clauses des conventions fiscales ainsi rédigées : en énonçant que des revenus « sont imposables » dans l’un des Etats contractants, ces clauses retirent-elles ou non à l’autre État le droit d’imposer également ?
Dans son ouvrage Les impôts dans les affaires internationales, Bruno Gouthière estime que la jurisprudence sur ce point est un peu hésitante [1]. Elle est, en outre, très peu fournie.
Certaines formulations des conventions fiscales sont dépourvues d’ambiguïté : tel est le cas de celles qui indiquent que certains revenus « ne sont imposables que » dans un Etat (cf. le paragraphe 2 de l’article 13 de la convention franco-brésilienne) ou que certains revenus « sont imposables dans les deux Etats contractants » (cf. le paragraphe 3 de l’article 13 de la convention franco-brésilienne). Comme le rappelle aussi Bruno Gouthière, les formules utilisées par les conventions fiscales ne sont pas neutres. Nous en tirons comme première conclusion que la formule « sont imposables … » ne doit pas être lue comme ayant exactement la même portée que la formule « ne sont imposables que … ». La motivation de l’arrêt de la Cour de cassation du 24 mars 1992, n° 572 P, « Le Marois d’Andlau » [2] nous paraît donc contestable, en ce qu’elle énonce que la stipulation : « la fortune constituée par des biens immobiliers … est imposable dans l’État contractant où les biens sont situés », dénuée d’équivoque, réserve à l’État où les immeubles sont situés le droit de les imposer. Nous contestons à la fois l’appréciation portée par la Cour de cassation sur la clarté d’une telle stipulation, prise à elle seule, et l’interprétation que l’arrêt donne de celle-ci.
À la différence des deux autres que nous avons précédemment citées, la formule ici en cause ne nous paraît donner, en elle-même, aucune indication sur le droit ou non d’imposer pour l’autre État contractant. C’est la position de Bruno Gouthière, qui indique dans son ouvrage précité : « cette expression ne dit rien de ce qui peut se passer dans l’autre Etat, et certainement pas que ces revenus n’y sont pas imposables » [3].
Il nous semble qu’en présence de cette formule, c’est dans d’autres stipulations de la convention, en l’occurrence celles tendant à l’élimination de la double imposition, qu’il faut chercher la réponse à la question de savoir si l’autre État peut, lui aussi, imposer les mêmes revenus. C’est d’ailleurs le sens de votre décision du 26 février 1992, « Malet » [4] (CE 7° et 8° ssr., 26 février 1992, n° 83461 N° Lexbase : A0976AIY). Etaient en cause des revenus relevant de la clause balai de l’article 22-1-a de la convention franco-américaine du 28 juillet 1967 [5], qui prévoyait que de tels revenus provenant d’un État contractant étaient imposables dans cet Etat contractant. Les revenus en litige provenaient des États-Unis et, pour juger qu’ils n’étaient pas imposables en France, vous vous êtes référés à l’article 23 de la convention, relatif à l’élimination de la double imposition, qui prévoyait que de tels revenus étaient, en France, exonérés d’impôt sur le revenu. Dans les conclusions sur cette décision, le Président Fouquet indiquait : « si, a priori, le caractère ʺimposableʺ dans un État n’exclut pas l’imposition dans l’autre État, c’est sous réserve des stipulations de la clause d’élimination de la double imposition ». Bruno Gouthière ne nous paraît d’ailleurs pas en désaccord avec cette approche puisqu’il justifie la solution retenue par la Cour de cassation dans l’arrêt « Le Marois d’Andlau » par l’absence de clause d’élimination de doubles impositions et par le fait qu’aucune stipulation de la convention fiscale franco-suisse ne donnait à la France le droit d’imposer, ce qui équivaut à une interdiction.
Il est vrai qu’une autre de vos décisions semble aller pleinement dans le sens de l’arrêt de la Cour de cassation (CE 8° et 9° ssr., 9 février 2000, n° 178389, publié au recueil Lebon Société suisse Hubertus AG N° Lexbase : A9245AGI) [6]. Mais le motif en cause fait seulement l’objet d’une incidente, la portée de la décision étant de juger que l’article correspondant de la convention fiscale n’était pas applicable au litige. Cette décision ne nous paraît donc pas trancher réellement la question.
Enfin, le ministre invoque les commentaires du modèle de convention de l’OCDE de 1963, antérieurs à la convention fiscale franco-brésilienne. Ces commentaires explicitent, de manière générale, les formulations précitées en les mettant en relation avec l’objet même des conventions, qui est l’élimination des doubles impositions. Le Brésil n’étant pas membre de l’OCDE, il est délicat de s’appuyer pleinement sur ces commentaires pour éclairer la portée des formulations retenues par la convention franco-brésilienne, en l’absence de certitude que les parties contractantes ont entendu s’y référer. Cependant, on peut constater qu’ils confortent l’approche que nous avons proposée plus haut. Ils indiquent que, lorsque l’État de la source abandonne son droit d’imposition, l’article correspondant déclare que le revenu et la fortune en question « ne sont imposables que » dans l’autre État. En revanche, lorsque l’État de la source ne renonce pas à l’impôt – dans ce cas, l’article correspondant stipule que les revenus ou la fortune « sont imposables » dans l’État de la source –, l’État de la résidence doit accorder une déduction de façon à éviter la double imposition. Toujours selon les commentaires, la formule « sont imposables » dans l’État de la source a pour effet d’accorder une priorité d’imposition à cet État, ce qui a pour conséquence que c’est à l’État de la résidence qu’incombe le soin d’éviter la double imposition.
Il est temps de revenir à l’arrêt attaqué, pour constater que la cour semble bien avoir estimé devoir combiner la stipulation de l’article 13, paragraphe 1, de la convention franco-brésilienne avec celles de l’article 22, relatif à l’élimination des doubles impositions, qu’elle a également citées. Mais le motif déterminant de la solution retenue par la cour reste, néanmoins, nous semble-t-il, la seule comparaison entre la formule du paragraphe 1 de l’article 13 : « sont imposables dans l’État contractant où les biens immobiliers sont situés » et celle du paragraphe 3 du même article : « sont imposables dans les deux États contractants ». Sur le fondement de cette différence de rédaction, elle semble avoir estimé que le paragraphe 1 de l’article 13 devait être lu comme réservant l’imposition à l’État contractant où les biens immobiliers sont situés.
Or, il nous semble que les stipulations de l’article 22 de la convention devaient, en l’espèce, conduire à une autre conclusion. Dans le cas de la France, elles prévoient d’abord, dans un a), que les revenus autres que ceux visés aux b et c sont exonérés des impôts français mentionnés au paragraphe 1 de l’article 2, lorsque ces revenus sont imposables au Brésil en vertu de la convention. Si les revenus en litige entraient dans les prévisions de ces stipulations, la solution de la cour serait justifiée (on serait dans la configuration de votre décision Malet précitée). Mais les revenus visés à l’article 13 relèvent du c), qui prévoit qu’« En ce qui concerne les revenus visés aux articles 10, 11, 12, 13, 14, 16 et 17 qui ont supporté l’impôt brésilien conformément aux dispositions desdits articles, la France accorde aux résidents de France percevant de tels revenus de source brésilienne un crédit d’impôt correspondant à l’impôt perçu au Brésil et dans la limite de l’impôt français afférent à ces mêmes revenus ».
Mme Guilhem de P. conteste toutefois que ces stipulations du c) confèrent à la France le pouvoir d’imposer les revenus en cause. Il est vrai que certaines conventions fiscales sont rédigées de manière extrêmement claire sur ce point. Pour prendre un exemple, parmi d’autres, la convention entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966 (N° Lexbase : E1728EUK), dans sa version actuellement en vigueur, prévoit, au paragraphe 2 de l’article 25 : « Un résident de France qui possède de la fortune imposable en Suisse conformément aux dispositions des paragraphes 1, 2, 4 ou 5 de l’article 24 est également imposable en France à raison de cette fortune [7]. L’impôt français est calculé sous déduction d’un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt payé en Suisse sur cette fortune … » [8]. Mais les stipulations de l’article 22, paragraphe 2, c) de la convention franco-brésilienne, qui font référence à « l’impôt français afférent » aux revenus en cause, nous paraissent suffisantes pour traduire l’intention des parties de permettre à la France d’imposer.
Par ailleurs, une telle stipulation d’élimination de la double imposition n’aurait pas de sens si la stipulation relative aux revenus qu’elle vise avait pour effet d’empêcher l’imposition par l’État de la résidence. On pourrait certes encore objecter que, l’article 13 comportant plusieurs paragraphes formulés de manière différente, la mention de l’article 13 dans l’énumération de l’article 22, paragraphe 2, c) ne pourrait viser que les revenus pour lesquels l’article 13 accorde expressément le droit d’imposer aux deux États (autrement dit, ceux visés au paragraphe 3). Mais figurent également dans l’énumération du c du paragraphe 2 de l’article 22 les articles 16 et 17 de la convention, qui sont rédigés strictement de la même manière que le paragraphe 1 de l’article 13 (i.e. avec la formule : « sont imposables »). Nous en concluons que les stipulations de l’article 22, paragraphe 2, c) autorisent la France à imposer les revenus visés au paragraphe 1 de l’article 13 et prévoient les modalités d’élimination de la double imposition.
Nous vous proposons donc de juger que la cour a commis une erreur de droit en jugeant qu’il ne résultait pas des stipulations des articles 13 et 22 paragraphe 2 de la convention franco-brésilienne que la plus-value en litige pouvait faire l’objet, non seulement d’une imposition au Brésil, mais aussi d’une imposition en France. Vous annulerez les articles 2 à 4 de l’arrêt attaqué et renverrez, dans cette mesure, l’affaire à la cour administrative d’appel de Lyon. L’État n’étant pas la partie perdante, vous rejetterez les conclusions présentées par Mme Guilhem de P. au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Tel est le sens de nos conclusions.
[1] Sur cette question, voir, dans la 13e édition de l’ouvrage, les paragraphes 9560 et 10445 à 10470.
[2] RJF, 6/92 n° 909, Étude de Stéphane Salou et Philippe Juilhard p. 477.
[3] Les impôts dans les affaires internationales, § 10445.
[4] Aux T. et à la RJF, 4/92, n° 534.
[5] Dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige – 1979 à 1981 –, antérieure à l’avenant du 17 janvier 1984.
[6] Au recueil p. 43 et à la RJF, 3/00, n° 342, cl. J. Arrighi de Casanova au BDCF, 3/00, n° 31.
[7] C’est nous qui soulignons.
[8] Voir aussi, notamment, l’article 20-2-c de la convention fiscale du 21 juillet 1959 entre la France et l’Allemagne (N° Lexbase : E0444EUY), l’article 24-1 de la convention fiscale entre la France et l’Argentine du 4 avril 1979 (N° Lexbase : E4262EX7), l’article 23 de la convention fiscale entre la France et la Corée du 19 juin 1979 (N° Lexbase : E5001EXI).
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Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 4 (N° Lexbase : L3002LZ9)
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N6216BYU
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par Marie-Claire Sgarra
Le 01 Février 2021
La fiscalité des non-résidents a fait l’objet d’une réforme votée dans le cadre de loi de finances pour 2019 (loi n° 2018-1317, du 28 décembre 2018, de finances pour 2019 N° Lexbase : L6297LNK).
🔎 Pour rappel, la loi prévoyait :
👉 Lire en ce sens, C. Koubar, Les modifications apportées par la loi de finances au régime d’imposition à l’impôt sur le revenu des revenus de source française de personnes domiciliées à l’étranger, Lexbase Fiscal, n° 775 (N° Lexbase : N7975BXN). |
📌 La loi de finances pour 2020 avait repoussé l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions (loi n° 2019-1479, du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 N° Lexbase : L5870LUX).
📌 La nouvelle loi de finances pour 2021 abandonne la réforme du régime d’imposition prévue par les deux derniers budgets et maintient le dispositif de retenue à la source spécifique, partiellement libératoire sur les salaires et revenus assimilés de source française.
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