Le Quotidien du 7 février 2023 : Actualité judiciaire

[A la une] Soupçons d’emplois fictifs : la menace d’un nouveau procès pour détournement de fonds publics plane sur François Fillon

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par Vincent Vantighem

le 07 Février 2023

La saison un mettait en scène le personnage de Penelope. Et elle avait été extrêmement suivie… Le parquet national financier (PNF) envisage sérieusement de proposer une saison deux aux affaires d’emplois fictifs empoisonnant la vie de François Fillon. Avec cette fois-ci, les personnages de Maël et Caroline. Il s’agit de Maël Renouard et de Caroline Morard, deux ex-assistants parlementaires de l’ancien Premier ministre. Le PNF a en effet bouclé, fin-janvier, son enquête préliminaire les concernant. Une enquête qui pourrait, dans un avenir proche, déboucher sur un nouveau procès pour détournement de fonds publics pour l’ancien candidat de la droite à l’élection présidentielle de 2017.

C’est à cette époque que les ennuis judiciaires ont débuté pour François Fillon. On s’en souvient : à cette date, c’est le rôle d’assistante joué par Penelope, son épouse, qui avait fait exploser sa campagne pour l’accession à l’Élysée, après les révélations du Canard enchaîné. Mais, en parallèle, le parquet national financier avait décidé d’ouvrir une enquête préliminaire au sujet de deux autres assistants parlementaires de François Fillon : Maël Renouard et Caroline Morard. Avec toujours cette question en toile de fond : ont-ils servi les intérêts personnels de François Fillon alors qu’ils étaient rémunérés par l’Assemblée nationale lorsque celui-ci était député de Paris ?

Après trois ans d’enquête, dont les investigations avaient été confiées à l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), le parquet national financier vient donc de refermer le dossier et de l’envoyer aux avocats des principaux protagonistes afin qu’ils en prennent connaissance. Ceux-ci disposent désormais d’un court délai pour formuler des observations avant que le PNF ne tranche : procès pour détournement de fonds publics ou pas.

Un livre payé sur les fonds de l’Assemblée nationale

La question se pose clairement. Car les investigations semblent avoir montré que tout était en règle en ce qui concerne Caroline Morard. L’ancienne attachée de presse de François Fillon semble bien avoir effectué un travail d’assistante parlementaire pour son compte et celui de l’autre député (LR), Jérôme Chartier. Mais les choses apparaissent beaucoup plus compliquées, s’agissant de Maël Renouard. Écrivain et philosophe, cet homme a travaillé comme assistant parlementaire entre novembre 2013 et septembre 2015. Avec, visiblement, une seule mission sur sa fiche de poste : participer à l’écriture de Faire, le livre politique de François Fillon publié en 2015 et qui devait, alors, le mettre sur les rails d’une candidature à l’Élysée en 2017.

Le parquet national financier se demande si c’était bien un travail d’assistant parlementaire. Si, au fond, François Fillon n’aurait pas voulu publier le même livre, avec la même stratégie, s’il n’avait pas été député à ce moment-là. Le parquet national financier estime que si. Le problème, c’est que Maël Renouard a été rémunéré sur les fonds de l’Assemblée nationale pour faire cela. Et que l’opération s’est révélée, finalement, très juteuse pour François Fillon. Voyez plutôt : Maël Renouard a touché entre 60 et 70 000 euros pour ce projet de livre qui a rapporté, finalement, plus de 300 000 euros à François Fillon. Avec plus de 100 000 exemplaires vendus, Faire est l’un des livres politiques qui a le mieux marché en 2015…

Pour l’avocat de François Fillon, c’est « de l’absurdité »

De son côté, l’ancien élu de la Sarthe conteste toute manœuvre frauduleuse dans cette affaire. Dans un court communiqué, Antonin Lévy, l’avocat de François Fillon, a dénoncé les méthodes du parquet national financier. « Nous avons établi sans la moindre ambiguïté que François Fillon est le seul auteur du livre Faire. Ce livre est un ouvrage éminemment politique, écrit par un député, présentant ses idées politiques et ses combats alors qu’il était dans l’opposition. Un collaborateur parlementaire, comme cela est usuel, a contribué à la relecture et à la mise en forme de ce texte. Ces faits sont indéniables. Si le PNF considère maintenant qu’un député ne peut plus faire de politique, ce n’est pas de l’acharnement contre François Fillon, c’est de l’absurdité ! » Faut-il reprocher à un ancien député d’avoir utilisé son assistant parlementaire comme « nègre », scribe pour un projet de livre. « Il y a un débat juridique existant », admet une source proche du dossier.

Un débat et quelques questions… Car la défense de l’ancien Premier ministre se heurte à plusieurs éléments du dossier. D’abord, lors de l’enquête, il a prétendu que Maël Renouard n’avait pas été embauché que pour ce projet de livre. Mais l’intéressé a démenti. Et les seules preuves de son travail retrouvées par les policiers de l’OCLCCIF concernaient toutes ce livre. Ensuite, même s’il n’a fait que relire et mettre en forme le texte pendant deux ans, cela méritait-il un salaire de 60 à 70 000 euros payé par l’Assemblée nationale ? Les enquêteurs en doutent. D’autant qu’ils soupçonnent un projet mûrement réfléchi. Les auditions ont ainsi révélé que l’éditeur Albin Michel ignorait complètement que Maël Renouard était partie prenante de ce projet de livre. Il pensait que seul François Fillon en était l’auteur. Comme si quelque chose lui avait été caché…

Retiré de la vie politique depuis plus de cinq ans désormais, François Fillon peut, quoi qu’il en soit, s’attendre à des jours difficiles sur ce dossier. Condamné en appel, en mai 2022, à quatre ans de prison dont un an ferme, à 375 000 euros d’amende et à verser de lourds dommages et intérêts à l’Assemblée nationale dans l’affaire du « Penelopegate », il va, peut-être, devoir à nouveau prendre le chemin du tribunal judiciaire de Paris pour répondre, cette fois-ci du « Maëlgate ». La décision revient désormais au PNF. Elle sera connue dans les prochains mois.

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