Le Quotidien du 6 octobre 2022 : Actualité judiciaire

[A la une] Après le dossier Dupond-Moretti, l’affaire Kohler et vogue la galère pour le Gouvernement

Lecture: 5 min

N2832BZW

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[A la une] Après le dossier Dupond-Moretti, l’affaire Kohler et vogue la galère pour le Gouvernement. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/88676682-a-la-une-apres-le-dossier-dupondmoretti-laffaire-kohler-et-vogue-la-galere-pour-le-gouvernement
Copier

par Vincent Vantighem

le 19 Octobre 2022

Vivement le week-end ! Emmanuel Macron a, sans doute, dû se coucher avec cette pensée en tête, ce lundi 3 octobre, tant la journée fut rude. Elle a commencé, peu après 9 heures, par l’annonce du renvoi de son ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, devant la cour de justice de la République afin d’être jugé pour « prise illégale d’intérêts ». Le garde des Sceaux a immédiatement formé un pourvoi en cassation pour contester cet arrêt de renvoi, mais il sait, tout comme le chef de l’État, que sa position est désormais menacée.

 

En milieu d’après-midi, les commentateurs étaient d’ailleurs encore en train d’en débattre sur les plateaux de télévision quand France Info décida d’apporter sa pierre à l’édifice de fragilisation du Gouvernement en révélant la mise en examen d’Alexis Kohler. Le secrétaire général de l’Élysée, surnommé « Le vice-président » par certaines mauvaises langues, est, lui aussi sous le coup d’une procédure pour « prise illégale d’intérêts » instruite par deux magistrats parisiens. Sa mise en examen date, en fait, du 23 septembre, a confirmé, peu après, Jean-François Bonhert, le procureur national financier dans un communiqué.

 

Les actionnaires de MSC sont les cousins de sa mère

Âgé de 49 ans, Alexis Kohler, fidèle parmi les fidèles d’Emmanuel Macron, est mis en cause pour ses liens familiaux avec les actionnaires de l’opérateur de fret maritime MSC : les Aponte. Et pour cause, ce sont en fait des cousins de sa mère. On ne choisit pas sa famille. Et donc, cela ne poserait aucun problème si Alexis Kohler n’avait pas grenouillé, à plusieurs niveaux, dans ce milieu. D’abord entre 2010 et 2012 lorsqu’il a siégé au conseil d’administration du grand port maritime du Havre où il a pu superviser des contrats impliquant MSC. Puis, en 2016, en tant que directeur financier direct du croisiériste MSC. D’ailleurs, cela ne poserait toujours aucun problème si cet homme, réputé être une force de travail, n’avait pas pu influer sur les décisions des autorités françaises lorsqu’il était au cabinet de Pierre Moscovici puis à celui d’Emmanuel Macron au ministère de l’Économie. Avant de rejoindre l’Élysée quand son mentor devint président de la République, en 2017…

           

Mais voilà, la justice s’interroge sur ce drôle de mélange des fonctions dans la mesure où MSC est un client important des chantiers navals de Saint-Nazaire (STX). Au demeurant, c’est aussi pour cette raison qu’Alexis Kohler a été placé sous le statut de témoin assisté pour « trafic d’influence ». Dans un communiqué diffusé par son avocat, Éric Dezeuze, le haut fonctionnaire a toutefois fait savoir qu’il « conteste avec force avoir commis tout délit » pour ces faits qui remontent à plus de dix ans. Et qu’il compte sur la procédure pour pouvoir « démontrer son innocence ».

 

Une belle entaille dans l’édifice du PNF

Si cette affaire constitue une nouvelle fissure dans la coque du bateau gouvernemental, elle est aussi une belle entaille dans l’édifice du parquet national financier. Il y a un peu plus de trois ans, le PNF avait, en effet, classé sans suite une première enquête préliminaire, ouverte sur cette histoire après des révélations de Mediapart. À l’époque, le parquet estimait que les infractions étaient « insuffisamment caractérisées ». Ce n’est finalement que parce que l’association Anticor a déposé une plainte avec constitution de partie civile que deux juges ont été nommés et qu’Alexis Kohler a fini par être mis en examen. « Cela démontre que les juges sont encore indépendants, s’est réjouie Élise Van Beneden, présidente d’Anticor. C’est la preuve que l’action d’associations comme [la nôtre] est importante. »

 

Car ce dossier pose également la question de pressions du pouvoir exécutif sur son pendant judiciaire. En juin 2019, les enquêteurs de la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) avaient rendu un premier rapport laissant entendre que les faits étaient caractérisés, d’après l’association Anticor. Mais, ces éléments, le PNF avait finalement décidé de ne pas les retenir après avoir reçu une pièce de la défense d’Alexis Kohler. Et pas n’importe quelle pièce ! Un courrier manuscrit d’Emmanuel Macron adressé à son secrétaire général directement… « J’étais déjà informé de vos liens familiaux avec les actionnaires de contrôle de la société MSC ainsi que de la volonté que vous aviez exprimée de rejoindre cette entreprise », indiquait, notamment, le texte. Autrement dit : tout est sous contrôle ! Les deux juges d’instruction nommés sur ce dossier en ont donc décidé autrement.

 

Pour autant, rien ne justifie qu’il démissionne de son poste de secrétaire général. Peu après l’annonce de sa mise en examen, l’Élysée a, en effet, indiqué qu’il n’était pas envisagé qu’il quitte ses fonctions à ce stade, en dépit des récriminations de plusieurs figures de l’opposition et des associations qui luttent pour la probité en politique.

newsid:482832

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.