Réf. : Cass. civ. 3, 11 mai 2022, n° 21-15.420, FS-B N° Lexbase : A56267WB
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N1540BZ3
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 19 Mai 2022
► La police peut prévoir la sanction applicable en cas de défaut de déclaration de chantier ; lorsque l’application de l’article L. 113-10 du Code des assurances est stipulée à titre de sanction, elle est exclusive de l’application de l’article L. 113-9 du même Code.
La sanction du défaut de déclaration d’un ou plusieurs chantier(s) par le constructeur à son assureur, dans le cadre de la police « RC travaux », n’en finit plus de générer des contentieux qui vont jusqu’en cassation. C’est dire les enjeux, la complexité et l’importance des réponses données par la Haute juridiction.
Tout d’abord, est, par principe, valable la clause de la police d’assurance qui stipule que la non-déclaration d’une mission, c’est-à-dire d’un chantier, constatée après sinistre, donne droit à l’assureur de refuser toute indemnité (v. notamment Cass. civ. 3, 6 décembre 2018, n° 17-25.957, F-D N° Lexbase : A7901YPC ; Cass. civ. 3, 13 juin 2019, n° 18-10.022, F-D N° Lexbase : A5707ZE4 et n° 17-31.042, F-D N° Lexbase : A5724ZEQ et Cass. civ. 3, 27 juin 2019, n° 17-28.872, FS-P+B+I N° Lexbase : A3080ZHK).
Une clause peut faire de la déclaration de chaque chantier une condition de garantie, laquelle autorise alors l’assureur à prendre une position de non-assurance (pour des exemples récents, Cass. civ. 3, 1er octobre 2020, n° 19-18.165, FS-P+B+I N° Lexbase : A70533W7 ; Cass. civ. 3, 5 mars 2020, n° 18-26.801, F-D N° Lexbase : A53693IP).
Ensuite, l’assureur peut appliquer un coefficient réducteur sur l’indemnité correspondant au pourcentage de prime sous-estimée à raison de la non-déclaration du chantier sur le fondement de l’article L. 113-9 du Code des assurances N° Lexbase : L0065AAN (pour exemple, Cass. civ. 3, 5 décembre 2019, n° 18-21.679, F-D N° Lexbase : A36813UU), même si cela conduit à réduire l’indemnité à zéro (Cass. civ. 3, 6 décembre 2018, n° 17-25.957, F-D N° Lexbase : A7901YPC).
Enfin, et cet article devrait être le seul applicable, l’article L. 113-10 N° Lexbase : L0068AAR sanctionne les erreurs dans les déclarations de l’assuré. La décision entreprise semble favoriser ce fondement, en énonçant que, lorsqu’elle est stipulée au contrat, même de façon implicite, c’est-à-dire sans citer l’article, elle prévaut sur la sanction de l’article L. 113-9 quand bien même celle-ci est explicitement stipulée. La solution mérite d’être saluée.
La présente espèce est une nouvelle illustration (pour un autre exemple, Cass. civ. 2, 26 novembre 2020, n° 18-10.190, F-P+B+I N° Lexbase : A156038B) de l’articulation de ces textes. La cour d’appel de Douai, aux termes d’un arrêt rendu le 18 février 2021, avait rejeté l’ensemble des demandes formées à l’encontre de l’assureur de l’architecte au motif que le chantier pris en litige n’avait pas été déclaré par ce dernier. Les maîtres d’ouvrage forment un pourvoi. Ils articulent que, lorsque l’application de l’article L. 113-10 du Code des assurances est stipulée dans un contrat d’assurance, elle est exclusive de l’application de l’article L. 113-9 du même Code.
Le pourvoi est rejeté. Les maîtres d’ouvrage n’ont pas soutenu que le contrat, sans faire expressément référence à l’article L. 113-10 précité, prévoyait une sanction reprenant en substance le mécanisme prévu par ce texte, ce qui aurait exclu que l’assureur puisse se prévaloir de la réduction proportionnelle d’indemnité prévue par l’article L. 113-9.
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