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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
le 27 Mars 2014
Et de s'apercevoir, Candide mais beaucoup moins optimiste, que le relèvement de la taxation des assureurs et la modification du régime des acomptes de l'impôt pour les grandes entreprises n'auront plus d'effet en 2014, que le rendement de la taxe sur les transactions financières, alpha et omega de la fiscalité moderne, n'est pas au rendez-vous et que les hausses d'impôt, programmées mais non encore effectives, ne devraient pas être aussi salvatrices que prévues compte tenu de la conjoncture économique. Par conséquent, à niveau de prélèvements obligatoires constant, l'Etat prévoit, d'ores et déjà, un manque à gagner de 6 milliards d'euros. Et, malgré les cris d'orfraie de la majorité parlementaire, les neurones du Service de législation fiscale sont donc en alerte maximale : il va falloir faire montre d'une créativité hors pair pour trouver ce qui n'a pas encore été taxé et /ou pour améliorer le rendement des impôts existants sans paraître confiscatoires aux yeux constitutionnels. Gouverner, c'est prévoir, comme disait l'autre...
Là où l'affaire se corse un peu plus, c'est quand on apprend, dans le même temps, et bien que le rapport de la Cour des comptes le soulignait dès juillet dernier, que l'Etat français va devoir débourser près de 9 milliards d'euros d'ici 2015 pour régler la note des contentieux fiscaux perdus devant la Cour de justice de l'Union européenne. La persévérance dans l'erreur fiscale n'aura non seulement pas payé, au regard de nombre de régimes fiscaux déclarés contraire au droit communautaire ces dix dernières années, mais elle plombera le budget de l'Etat au moment le plus critique. Cette enveloppe devrait satisfaire les créanciers de trois régimes condamnés par le juge européen : le contentieux relatif au régime des OPCVM, celui sur la taxe "Copé" compensant les pertes de recettes publicitaires de France Télévision et celui sur le précompte mobilier. Et le ministre de préciser que 20 % de la somme qui sera, sans doute ainsi réclamée -et dont Bercy sait le bien-fondé-, sera due au titre des intérêts moratoires... C'est dire que l'absence de coopération avec la Commission pour certifier la sécurité juridique d'un régime fiscal présente un coût non négligeable ; un coût que le ministre, dans sa grande sagesse, entend réduire par l'instauration d'un dialogue, voire d'une négociation plus ouverte et plus systématique avec Bruxelles. C'est ainsi que le Minefi a interpellé la Commission en amont, notamment, sur l'application du crédit d'impôt aux coopératives agricoles. Désamorcer les litiges pour éviter les bombes fiscales à retardement, tel serait le nouveau credo de Bercy... Encore que "se trop ériger en négociateur n'est pas toujours la meilleure qualité pour la négociation" enseignait le Cardinal de Retz.
La stabilité fiscale et la sécurité juridique sont plus que jamais au coeur des débats, face au tonneau budgétaire des Danaïdes et au supplice fiscal de Sisyphe.
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