Réf. : CE, 3° et 8° ch.-r., 29 décembre 2021, n° 433838, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A36227HM
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par Yann Le Foll
le 24 Janvier 2022
► Lorsque le juge est saisi d'une contestation de la sanction infligée à un fonctionnaire à raison de la dénonciation de faits de harcèlement moral, il lui appartient, pour apprécier l'existence d'un manquement à l'obligation de réserve, de prendre en compte les agissements de l'administration dont le fonctionnaire s'estime victime.
Principe. En vertu de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 N° Lexbase : L6938AG3, les fonctionnaires ne peuvent être sanctionnés lorsqu'ils sont amenés à dénoncer des faits de harcèlement moral dont ils sont victimes ou témoins. Toutefois, l'exercice du droit à dénonciation de ces faits doit être concilié avec le respect de leurs obligations déontologiques, notamment l'obligation de réserve à laquelle ils sont tenus et qui leur impose de faire preuve de mesure dans leur expression.
Lorsque le juge est saisi d'une contestation de la sanction infligée à un fonctionnaire à raison de cette dénonciation, il lui appartient, pour apprécier l'existence d'un manquement à l'obligation de réserve et, le cas échéant, pour déterminer si la sanction est justifiée et proportionnée, de prendre en compte les agissements de l'administration dont le fonctionnaire s'estime victime ainsi que les conditions dans lesquelles ce dernier a dénoncé les faits, au regard notamment de la teneur des propos tenus, de leurs destinataires et des démarches qu'il aurait préalablement accomplies pour alerter sur sa situation.
Rappel. Si la circonstance qu'un agent a subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement moral ne saurait légalement justifier que lui soit imposée une mesure relative à son affectation, à sa mutation ou à son détachement, elles ne font pas obstacle à ce que l'administration prenne, à l'égard de cet agent, dans son intérêt ou dans l'intérêt du service, une telle mesure si aucune autre mesure relevant de sa compétence, prise notamment à l'égard des auteurs des agissements en cause, n'est de nature à atteindre le même but (CE, 3° et 8° ch.-r., 19 décembre 2019, n° 419062, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6368Z8D et lire le commentaire de P. Bourdon, La mutation d’office d’un agent victime de harcèlement, Lexbase Public, février 2020, n° 574 N° Lexbase : N2235BYG).
Décision CE. Dès lors, en jugeant que l’agente avait manqué à son obligation de réserve en dénonçant, par un courriel formulé en des termes excessifs et adressé à un large cercle d'élus de la commune, le harcèlement moral dont elle s'estimait victime, sans prendre en compte les agissements que l’intéressée estimait avoir subis, la cour administrative d'appel de Lyon (CAA Lyon, 25 juin 2019, n° 17LY02345 N° Lexbase : A9327ZGK) a commis une erreur de droit.
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