Pour rappel, la clause d'accroissement, dite "tontine", ou encore "pacte tontinier", est le contrat par lequel deux ou plusieurs personnes font l'acquisition d'un bien en stipulant que celui-ci sera la propriété du dernier des survivants. L'économie de ce contrat peut-elle être remise en cause en cas de meurtre perpétré entre les tontiniers ? La Cour de cassation répond à cette question par la négative, en retenant que l'article 1178 du Code civil (
N° Lexbase : L1280ABZ), selon lequel "
la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement" est inapplicable au pacte tontinier. Tel est l'enseignement délivré par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 5 décembre 2012 (Cass. civ. 3, 5 décembre 2012, n° 11-24.448, FS-P+B
N° Lexbase : A5586IYK). En l'espèce, le 22 juillet 1994, M. T. et Mme C. avaient acquis une maison d'habitation par un acte comportant une clause d'accroissement. Mme C. était décédée le 8 août 2000, son décès étant la conséquence d'un crime imputé à M. T. qui avait lui-même mis fin à ses jours le 11 août 2000. Elle avait laissé pour recueillir sa succession Mme G. qui avait assigné Mmes T., venant à la succession de leur père, en paiement du montant de la vente de l'immeuble. Mme G. faisait grief à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Grenoble le 9 novembre 2010 (CA Grenoble, 1ère ch., 9 novembre 2010, n° 08/00917
N° Lexbase : A5033GKM), de constater que, par l'effet de la clause d'accroissement, M. T. était devenu rétroactivement seul propriétaire de l'immeuble et qu'elle avait perdu une chance d'hériter de l'immeuble égale à 50 % de sorte qu'elle avait droit à la moitié de son prix de vente (sur le fondement de l'article 1382 du Code civil
N° Lexbase : L1488ABQ). La décision est approuvée par la Cour suprême qui estime que, ayant relevé que M. T. et Mme C. avaient acquis une maison d'habitation avec clause d'accroissement, dite de tontine, et que cette clause conférait à l'acquéreur dernier vivant la propriété de l'immeuble tout entier à partir du jour de son acquisition, la cour d'appel en a exactement déduit, sans violer le principe de la contradiction, qu'il n'existait pas dans les rapports entre les parties un débiteur d'obligation et un créancier et que l'article 1178 du Code civil n'était pas applicable.
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