Lexbase Affaires n°161 du 31 mars 2005 : Contrats et obligations

[Jurisprudence] Les créanciers ne peuvent disposer, par la voie oblique, d'un bien du débiteur grevé d'une clause d'inaliénabilité

Réf. : Cass. civ. 1, 8 mars 2005, n° 03-20.968, Mme Françoise Chardonny, divorcée Bethe c/ Trésorier principal d'Orange, F-P+B (N° Lexbase : A2630DHU)

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le 01 Octobre 2012

Afin de répondre à la question de savoir si les créanciers du donataire ou du légataire peuvent, en raison de l'inaction de celui-ci, demander par la voie de l'action oblique l'autorisation d'aliéner le bien donné ou légué dans l'hypothèse dans laquelle il serait grevé d'une clause d'inaliénabilité, deux textes du Code civil doivent être pris en compte. D'une part en effet, l'article 900-1 du Code civil (N° Lexbase : L3542ABS), issu de la loi du 3 juillet 1971, subordonne la validité des clauses d'inaliénabilité affectant un bien donné ou légué à leur caractère temporaire et à l'existence d'un intérêt sérieux et légitime, tout en prévoyant que, même dans ce cas, "le donataire ou le légataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si l'intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s'il advient qu'un intérêt plus important l'exige". D'autre part, l'article 1166 du Code civil (N° Lexbase : L1268ABL), qui certes prévoit que "les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur", apporte tout de même une exception au jeu de l'action oblique en écartant du champ de celle-ci les droits et actions "exclusivement attachés à la personne" du débiteur. Par un arrêt, à paraître au Bulletin, de sa première chambre civile en date du 8 mars dernier, la Cour de cassation vient de confirmer une solution que nous avions eu l'occasion ici même de commenter : l'action en autorisation judiciaire d'aliéner, subordonnée à des considérations personnelles d'ordre moral et familial inhérentes à la donation, est exclusivement attachée à la personne du donataire, ce qui exclut qu'elle puisse être, sur le fondement de l'article 1166 du Code civil, exercée par le créancier du débiteur par la voie oblique (1). Il n'est pas utile de reprendre, ici, longuement la discussion et l'on renverra, pour l'essentiel, aux observations que nous avions déjà pu faire à ce sujet. On rappellera, cependant, et ce afin de bien marquer l'importance de la solution retenue, que, après quelques hésitations, suscitées, notamment, par un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 4 janvier 2000 et un autre de la première chambre civile du 11 janvier de la même année ayant tous deux admis la recevabilité d'une demande émanant d'un créancier du donataire (Cass. com., 4 janvier 2000, n° 96-16.205, Mme Emma Grousson, veuve Chareyron c/ M. Jean, Alain Réau N° Lexbase : A1854CMM, RJDA 2000, n° 453 ; Cass. civ. 1, 11 janvier 2000, n° 97-19.136, Mme Bourdin et autre c/ M Jumel, ès qualités de liquidateur de Mme Bourdin N° Lexbase : A8714AH9, Bull. civ. I, n° 3), la Haute juridiction était revenue à la solution qui avait du reste d'abord été la sienne en jugeant que l'action du donataire était subordonnée à des considérations personnelles d'ordre moral et familial inhérentes à la donation, donc attachée exclusivement à sa personne, de sorte qu'elle ne pouvait être exercée par le créancier par la voie oblique (Cass. civ. 1, 29 mai 2001, n° 99-15.776, M. Jean-Claude Thibault c/ M. Bernard Jumel N° Lexbase : A5587AT4, Bull. civ. I, n° 150, RTDCiv. 2001, p. 644, obs. Patarin, et p. 882, obs. Mestre et Fages ; comp., plus ancien, Cass. civ. 1, 8 juin 1963, JCP 1965, II, 14087, note R. Savatier, jugeant que l'action dont l'exercice est subordonnée à des considérations personnelles d'ordre moral ou familial ne peut être exercée par la voie oblique). Reprenant à nouveau cette solution, l'arrêt du 8 mars dernier a, au moins, le mérite de lever toute ambiguïté sur cette question.

David Bakouche
Professeur agrégé des Facultés de droit


(1) Cass. civ. 1, 16 novembre 2004, n° 02-12.268 c/ Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Paris et d'Ile-de-France, FS-P (N° Lexbase : A9405DDP) et notre commentaire La Cour de cassation confirme : les créanciers ne peuvent disposer, par la voie oblique, d'un bien du débiteur grevé d'une clause d'inaliénabilité, Lexbase Hebdo n° 145 du 2 décembre 2004 - édition affaires (N° Lexbase : N3706ABU).

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