La lettre juridique n°864 du 6 mai 2021 : Procédure pénale

[Brèves] Conditions indignes de détention : les détenus condamnés ne bénéficiaient d’aucun recours effectif

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-898 QPC, 16 avril 2021 (N° Lexbase : A55204P7)

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par Adélaïde Léon

le 05 Mai 2021

► Dans une décision sobrement référencée « Conditions d'incarcération des détenus II », le Conseil constitutionnel vient étendre aux détenus condamnés la solution dégagée dans sa décision du 2 octobre 2020 par laquelle la Haute juridiction avait fait obligation au législateur de garantir aux personnes placées en détention provisoire la possibilité de saisir le juge pour qu’il soit mis un terme à des conditions de détention indignes.

Rappel de la procédure. Le Conseil constitutionnel avait été saisi par le Conseil d’État (CE 5° et 6° ch.-r., 27 janvier 2021, n° 445873, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A57954DY) d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles 707 (N° Lexbase : L0664L4D), 720-1 (N° Lexbase : L4478K9Q), 720-1-1 (N° Lexbase : L0645LT3), 723-1 (N° Lexbase : L7687LPE), 723-7 (N° Lexbase : L7687LPE), et 729 (N° Lexbase : L7698LPS) du Code de procédure pénale.

Motifs de la QPC. Il était reproché au législateur d’avoir méconnu l’étendue de sa compétence en ne prévoyant pas de procédure imposant au juge de faire cesser des conditions indignes de détention auxquelles seraient exposées des personnes condamnées. Cette carence et les dispositions litigieuses méconnaitraient le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, celui de prohibition des traitements inhumains et dégradants ainsi que le droit à un recours juridictionnel effectif.

Étendue de la QPC. Le Conseil constitutionnel a considéré que la QPC portait sur le paragraphe III de l’article 707 du Code de procédure pénale relatif au retour progressif à la liberté des condamnés incarcérés en exécution d’une peine privative de liberté.

Décision. Les dispositions litigieuses sont déclarées contraires à la Constitution.

Le Conseil énonce qu’il se déduit de la lecture combinée du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6815BHU) et de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1363A9D) qu’il appartient aux autorités judiciaires et administratives de veiller à ce que la privation de liberté des personnes condamnées soit, en toutes circonstances, mise en œuvre dans le respect de la dignité de la personne. En outre, le Conseil précise qu’il incombe au législateur de garantir aux personnes condamnées la possibilité d’exercer devant le juge un recours permettant qu’il soit mis fin aux conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine.

La Haute juridiction constate ensuite que ni les dispositions du Code de justice administrative ni les dispositions dénoncées du Code de procédure pénale ne permettent de saisir un juge afin qu’il soit mis fin à des conditions indignes de détention.

Le Conseil affirme que le III de l’article 707 du Code de procédure pénale méconnait les exigences constitutionnelles précitées et le déclare contraire à la Constitution.

Les conséquences de la déclaration d’inconstitutionnalité. S’il était important de reconnaitre que les détenus condamnés ne disposaient d’aucun recours effectif pour faire cesser leurs conditions indignes de détention, la déclaration d’inconstitutionnalité ici faite a un impact limité puisque, comme le précise le Conseil, les dispositions concernées ne sont plus en vigueur dans leur rédaction contestée.

La loi n° 2021-403 du 8 avril 2021, tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention (N° Lexbase : L9830L3H) est en effet venu ajouter au III de l’article 707 du Code de procédure pénale une référence à l’article 803-8 du Code de procédure pénale lequel créé une procédure visant à faire reconnaitre et cesser l’existence de conditions indignes de détention affectant tant les détenus provisoires que les personnes condamnées.

Notons que les praticiens semblent encore sceptiques sur l’efficacité de l’article 803-8 du Code de procédure pénale et attendent que la pratique apporte la preuve de l’efficacité réelle de cette nouvelle procédure.

Pour aller plus loin :

  • v. A. Morineau, Huit ans de bataille pour la dignité des personnes détenues, de la CEDH au Conseil constitutionnel, Lexbase Pénal, novembre 2020 (N° Lexbase : N5309BYB) ;
  • v. M. Giacopelli, Le raz de marée du principe de dignité, Lexbase Pénal, novembre 2020 (N° Lexbase : N5183BYM).

 

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