L'obligation faite aux propriétaires fonciers allemands de tolérer la chasse sur leurs terres a imposé à ceux qui sont opposés à cette pratique pour des raisons éthiques une charge disproportionnée, tranche la CEDH dans un arrêt rendu le 26 juin 2012 (CEDH, 26 juin 2012, Req. 9300/07
N° Lexbase : A8160IPW). Le requérant est un ressortissant allemand, automatiquement membre de l'association de chasse locale en vertu de la loi fédérale allemande, et devant, pour cette raison, tolérer la pratique de cette activité sur son fonds. La Cour de Strasbourg considère que l'obligation de tolérer la pratique de la chasse sur ses terres constitue une ingérence dans l'exercice par l'intéressé de son droit au respect de ses biens. Dans un arrêt de Grande Chambre qui concernait la France (CEDH, 29 avril 1999, Req. 25088/94
N° Lexbase : A6231AX3), elle a conclu que le fait de contraindre les petits propriétaires fonciers à transférer leur droit de chasse sur leurs terres de sorte que des tiers pussent en faire un usage totalement contraire à leurs convictions faisait peser sur ces personnes une charge disproportionnée qui n'était pas justifiée au regard de l'article 1 du Protocole n° 1 à la Convention (
N° Lexbase : L1625AZ9). Cette solution a été confirmée dans une affaire qui concernait, cette fois, le Luxembourg (CEDH, 10 juillet 2007, Req. 2113/04
N° Lexbase : A8159IPU). La Cour observe que la loi fédérale allemande sur la chasse a, notamment, pour objectif la gestion du patrimoine cynégétique, qui vise elle-même à conserver des populations de gibier variées et en bonne santé. Elle n'est donc pas significativement différente des anciennes lois française et luxembourgeoise, qui poursuivaient des objectifs comparables. Par ailleurs, les différences entre les législations invoquées par le Gouvernement allemand et tenant à l'exclusion de certains territoires de l'obligation litigieuse ou du mode d'indemnisation du propriétaire du terrain ne sont pas concluantes. Enfin, la loi fédérale allemande sur la chasse ne permet pas de tenir compte des convictions éthiques des propriétaires opposés à cette pratique. Pour toutes ces raisons, la CEDH estime que les trois affaires comportent de nombreuses similitudes et adopte la même solution, à savoir que l'obligation de tolérer la chasse sur leurs terres impose aux propriétaires qui sont opposés à cette pratique pour des raisons éthiques une charge disproportionnée. Partant, il y a bien eu violation de l'article 1 du Protocole n° 1.
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