Lexbase Fiscal n°849 du 7 janvier 2021 : Fiscalité locale

[Focus] Focus sur les dispositions relatives à la fiscalité locale dans la loi de finances pour 2021

Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 (N° Lexbase : L3002LZ9)

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par Ludovic Lombard, Docteur en droit, Consultant en gestion de services publics, cabinet COGITE

le 04 Janvier 2021


Loi de finances • Fiscalité locale • Impôts de production • CVAE • CET


 

En matière de fiscalité locale, les dernières lois de finances avaient largement été orientées vers le contribuable, personne physique, dans le cadre de la suppression de la taxe d’habitation et d’une réforme plus globale de la fiscalité locale, au travers notamment de l’affectation totale de la taxe foncière au bloc communal. La loi de finances pour 2021 intègre pour sa part les objectifs du plan de relance, initié en raison de la crise connue au cours de l’année 2020. S’agissant de la fiscalité locale, il est donc surtout question de la baisse des impôts dits de production.

Les mesures relatives à la fiscalité locale dans la loi de finances pour 2021 sont de deux ordres. D’une part, l’accent est mis sur la diminution des impôts de production, qui s’inscrit dans la politique volontariste de l’État en matière de relance économique (I). D’autre part, et classiquement, diverses dépenses fiscales concernent les impôts locaux de manière plus sectorielles (II).

I – La mesure phare de la loi :  la diminution des impôts de production

Ainsi que l’expose le gouvernement dans l’exposé des motifs de la loi de finances, « présenté le 3 septembre dernier, le plan de relance de l’économie s’élève à 100 milliards d’euros qui seront engagés d’ici 2022. […] Le PLF 2021 porte l’essentiel des moyens additionnels en faveur de la relance sur le budget de l’État (86 milliards d’euros au total), avec en particulier : 36 milliards d’euros en autorisations d'engagement et 22 milliards d’euros en crédits de paiement sur la mission « Plan de relance » dès 2021 ; la baisse des impôts de production, qui représente 10 milliards d’euros en 2021 ; le nouveau Programme d'investissements d'avenir (PIA 4), qui mobilisera 11 milliards d’euros au titre du plan de relance » [1]. Ainsi, « le Gouvernement baisse significativement la fiscalité pesant sur la production en France. Le plan de relance prévoit une diminution de 20 milliards d’euros des impôts de production sur la durée du plan de relance, dont 10 milliards d’euros dès 2021 et ce de manière pérenne » [2].

Cette volonté affichée se traduit par une série de mesures fiscales destinées à favoriser les entreprises. Les principales mesures proposées par la loi de finances pour 2021 et relatives à la diminution des impôts locaux de production portent sur deux volets, à savoir la suppression de la part de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) attribuée aux régions (A) et la réduction pour moitié des impôts fonciers locaux (B).

A – La suppression de la part de CVAE attribuée aux régions

L’article 8 de la loi de finances pour 2021 procède à la suppression de la part de CVAE attribuée aux régions. Ainsi, le 3° de l’article 1599 bis du Code général des impôts (N° Lexbase : L7570LXN) est abrogé. Cet article disposait que « les régions perçoivent : […] 3° Une fraction égale à 50 % de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises […] ».

Cette suppression de la part de 50 % de CVAE attribuée a nécessité une adaptation du dispositif légal, et particulièrement des parts attribuées aux communes et aux départements ainsi que du taux de la CVAE, qui passe de 1,5 % à 0,75 % pour le taux plein. La diminution de moitié du taux est également prévue pour les dégrèvements de CVAE dont bénéficient les entreprises en fonction de leur chiffre d’affaires, ainsi que le prévoit l’article 1586 quater du CGI (N° Lexbase : L4420LCP).

Par ailleurs, il est notable que le plafonnement de la CET, prévu à l’article 1647 B sexies du CGI (N° Lexbase : L9144LKU), destiné à « assurer l’équilibre de la CET, en évitant qu’une entreprise dégageant une faible valeur ajoutée, mais disposant pour son activité de biens immobiliers fortement valorisés, n’acquitte une CET excessive » [3], s’établit à 2 % de la valeur ajoutée à compter de 2021, contre 3 % avant l’adoption de la loi de finances pour 2021, « pour éviter que les effets de la réduction de moitié de la CVAE ne soient neutralisés en tout ou partie »  [4] par une augmentation corrélative de cotisation foncière des entreprises.

Afin de compenser la diminution des ressources pour les régions, et pour respecter les obligations constitutionnelles, l’article 8 de la loi de finances pour 2021 prévoit d’affecter, en contrepartie de la suppression de la part régionale de la CVAE, une fraction de la TVA aux régions. Cette solution devient classique désormais, ayant déjà été retenue pour compenser la suppression de la taxe d’habitation et l’affectation corrélative de l’ensemble de la taxe foncière au bloc communal. En outre, et dans la mesure où les régions percevront en 2021 une part de TVA, la fraction de CVAE qu’elles devaient percevoir en 2021 au titre de l’année 2020 sera reversée à l’Etat.

B – La réduction pour moitié des impôts fonciers locaux

Dans la même logique de réduction des impôts de production, la loi de finances pour 2021 introduit des ajustements favorables aux établissements industriels dans le cadre des impôts fonciers. Ainsi, l’article 29 de la loi adapte le calcul de l’assiette de cotisation de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la cotisation foncière des entreprises pour les établissements industriels, à savoir la méthode comptable prévue à l’article 1499 du CGI (N° Lexbase : L0268HMU).

La rédaction de l’article 29 prévoit ainsi que les impôts fonciers des établissements industriels seront diminués de moitié, dans la mesure où les taux d’intérêt applicables au prix de revient des éléments des immobilisations industrielles seront diminués dans cette proportion.

En effet, et pour rappel, la méthode dite « comptable » destinée à établir la valeur locative des immobilisations industrielles est fondée sur l’évaluation de leur prix de revient, auquel est affecté un coefficient de revalorisation, tel que prévu à l’article 310 L de l’annexe II au CGI (N° Lexbase : L1495HNP).

Ces coefficients de revalorisation étaient de 8 % pour les terrains et les sols et de 12 % pour les constructions et installations. L’article 29 de la loi de finances élève au rang législatif les taux de revalorisation, en les intégrant à l’article 1499 du CGI, et les établit respectivement à 4 % et 6 %.

Afin de compenser la perte de recettes pour les collectivités territoriales concernées, l’article 29 de la loi de finances prévoit un prélèvement sur recettes de l’État, au bénéfice desdites collectivités. Un prélèvement similaire est également institué pour compenser les pertes de recettes des collectivités relatives à l’impact de la modification de la méthode comptable sur les taxes assises sur la valeur locative des établissements industriels, à savoir notamment la taxe GEMAPI, la taxe additionnelle spéciale annuelle de la région Île-de-France et les taxes spéciales d’équipement.

II – Les mesures sectorielles relatives aux autres impôts locaux

Outre la réduction des impôts de réduction dans le cadre du plan de relance, la loi de finances pour 2021 prévoit diverses dépenses fiscales plus sectorielles, relatives aux impôts fonciers (A), et à diverses autres taxes (B).

A – Les mesures relatives aux impôts fonciers

En matière de taxes foncières sur les propriétés bâties, le législateur établit, par l’article 126 de la loi de finances, une exonération au profit de l’État pour les immeubles mis à disposition des établissements publics d’enseignement supérieurs sur lesquels ont été consenti des titres constitutifs de droits réels.

B – Les mesures relatives à diverses autres taxes

L’article 141 de la loi de finances aménage le dispositif fiscal relatif à la taxe d’aménagement. Ainsi, il modifie tout d’abord l’article L. 331-3 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L4172LID), en permettant au département de financer, par le biais de cette taxe, l’acquisition de terrains pour les convertir en espaces naturels. Il transforme ensuite l’exonération facultative de taxe d’aménagement pour « les surfaces annexes, à usage de stationnement, aménagées au-dessus ou en-dessous des immeubles ou intégrées au bâti, dans un plan vertical », en exonération obligatoire, en introduisant cette mesure à l’article L. 331-7 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L4171LIC). Enfin, l’article L. 331-15 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L4167LI8) est modifié afin de faciliter les majorations de la part communale de la taxe d’aménagement, en élargissant les travaux pouvant les justifier et en supprimant l’exigence de proportionnalité, prévue jusqu’alors.

Par ailleurs, l’article 54 de la loi de finances intègre les trois taxes sur l’électricité en une taxe unique. Cette taxe unique sur la consommation finale d’électricité est composée d’une part communale et d’une part départementale. La loi de finances en précise les modalités de mise en œuvre. Notamment, le dispositif prévoit une uniformisation des tarifs, principalement en supprimant les deux tarifs les plus bas. Cette uniformisation se fera progressivement jusqu’en 2023.

En outre, l’article 136 de la loi de finances ajuste le dispositif relatif à la taxe sur les surfaces commerciales, affectée aux communes. Il étend les réductions de 20 % de la taxe à toutes les succursales dont la surface de vente est inférieure à 600 m2. Auparavant, la réduction n’était appliquée que pour les établissements dont la surface de vente était comprise entre 400 et 600 m2.

Enfin, il est notable que la loi de finances propose la suppression de certaines taxes à faible rendement. Ainsi, l’article 155 de la loi de finances procède à l’abrogation du versement pour sous-densité, prévu aux articles L. 331-35 (N° Lexbase : L2757KIX) et suivants du Code de l’urbanisme. Le législateur considère en effet que cette taxe « n’a été que très peu mis en place par les communes », et son « produit est extrêmement faible » [5]. De même, l’article 121 de la loi de finances abroge les taxes sur les convois, les inhumations et les crémations, prévues à l’article L. 2223-22 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L8783AAK).

 

[1] Projet de loi de finances pour 2021, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 28 septembre 2020, p. 16.

[2] Projet de loi de finances pour 2021, précit., p.18.

[3] Rapport fait au nom de la Commission des finances à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2021 modifié par le Sénat, 11 décembre 2020, p.60.

[4] Rapport fait au nom de la Commission des finances à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2021 modifié par le Sénat, 11 décembre 2020, p.63.

[5] Rapport fait au nom de la Commission des finances à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2021 modifié par le Sénat, 11 décembre 2020, p. 624.

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