Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 (N° Lexbase : L3002LZ9)
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par Matthieu Toret, Avocat, cabinet Enerlex
le 04 Janvier 2021
Fiscalité énergétique • Taxes intérieures de consommation • Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité • Biocarburants
La loi de finances pour 2021 comporte plusieurs mesures impactant la fiscalité énergétique et environnementale, dont les principales concernent la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) et la taxe incitative relative à l’incorporation de biocarburants (TIRIB).
1 – Le régime de taxation de l’électricité. – La fiscalité énergétique française est essentiellement constituée des différentes taxes intérieures de consommation (les TIC) frappant les produits énergétiques consommés. Parmi lesquels, l’électricité qui supporte actuellement la TICFE, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE) et la taxe départementale sur la consommation finale d’électricité (TDCFE). A ces accises s’ajoute, naturellement, la taxe sur la valeur ajoutée dont le taux plein est applicable à l’électricité et le taux réduit à la livraison de l’électricité.
2 – La TICFE. - Prévue à l’article 266 quinquies C du Code des douanes (N° Lexbase : L8578LXY), la TICFE est une taxe dont la gestion, le recouvrement et le contrôle relèvent actuellement de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI).
Sa base imposable est constituée des quantités d’électricité livrée par un fournisseur à un consommateur final et des quantités d’électricité autoconsommées par un producteur, quelle que soit la puissance souscrite.
Son tarif de droit commun élevé – 22,5 euros par mégawattheure – est compensé par l’existence de nombreux taux réduits et exonérations en faveur des entreprises dont l’activité est énergivore.
Les activités couvertes par ces taux privilégiés sont essentiellement l’industrie lourde (métallurgie, chimie, minéralogie), les secteurs fortement exposés à la concurrence internationale ou aux fuites de carbone et plus généralement l’ensemble de l’industrie. Pour bénéficier de ces exonérations et taux réduits, les entreprises doivent accomplir des formalités administratives auprès de leurs fournisseurs et de l’administration des douanes.
3 – Les taxes locales sur l’électricité. – L’électricité livrée supporte également une fiscalité locale composée de la TCCFE et la TDCFE, dont l’assiette, à l’inverse de la TICFE, est constituée uniquement de l’électricité livrée sous une puissance maximale souscrite inférieure ou égale à 250 kilovoltampères (kVa). Dans la pratique ces taxes locales frappent l’électricité consommée par les ménages et les petites ou moyennes entreprises (PME). La gestion, le recouvrement et le contrôle de ces taxes sont assurés par les collectivités locales dont les organes délibérants (conseil municipal et conseil général) décident des tarifs résultant de l’application d’un coefficient multiplicateur à un tarif de base.
Les recettes générées sont affectées, non pas au budget général, mais directement à ceux des collectivités locales sur le territoire duquel l’électricité est acheminée. Cette situation impose pour les redevables de remplir jusqu’à plusieurs milliers de déclarations trimestrielles.
4 – Les objectifs de la réforme. – L’article 54 de la loi de finances pour 2021 vise à terme à regrouper les trois accises (TICFE, TDCFE et TCCFE) frappant l’électricité en une seule taxe dont la gestion serait confiée à la Direction générale des finances publiques (DGFIP).
Ce projet s’inscrit dans le cadre du processus d’unification du recouvrement des différentes taxes, actuellement partagées entre l’administration des douanes, les services des collectivités locales et les comptables publics, pour faire de l’administration fiscale, le guichet unique en matière d’électricité. Dans son exposé des motifs, le Gouvernement indique que cette réforme devrait également permettre aux consommateurs de mieux comprendre leur facture d’électricité.
5 – Le calendrier de la réforme. – Les objectifs décrits ci-dessus devraient être atteints en trois étapes, dont la dernière entrera en vigueur le 1er janvier 2023.
À compter du 1er janvier 2021 la TICFE, dont le tarif de droit est de 22,5 euros par mégawattheure, sera majorée d’une composante communale (l’ex. TCCFE) et d’une composante départementale (l’ex. TDCFE), dont les tarifs resteront fixés par la délibération des conseils municipaux et de conseils départementaux, avec, cependant, moins de marge de manœuvre pour les communes.
À compter du 1er janvier 2022, la gestion de la TICFE et de la part départementale sera confiée à la DGFIP, puis de nouveaux ajustements de tarifs de la TCCFE seront effectués.
Le 1er janvier 2023, la gestion de la part communale de la taxation sera également confiée à la DGFIP qui sera alors le guichet unique en matière d’accises applicables à l’électricité.
6 – La taxe incitative relative à l’incorporation de biocarburants. Parmi les taxes environnementales, la taxe incitative relative à l’incorporation de biocarburants (TIRIB) poursuit l’objectif d’imposer aux opérateurs du secteur pétrolier d’incorporer des carburants d’origine renouvelable dans les carburants fossiles qu’ils commercialisent. Pour ce faire, les essences et les gazoles mis à la consommation supportent la TIRIB, un impôt de quotité, dont le montant est diminué en proportion de la quantité de biocarburants incorporés. Pour 2021, les objectifs d’incorporation seront de 8,6 % pour les essences et de 8 % pour les gazoles et le tarif de 104 euros par hectolitre. Très concrètement, un opérateur justifiant que le gazole qu’il a commercialisé comportait au moins 8 % de carburants considérés comme renouvelables ne sera pas redevable de la taxe. Ces taux seront portés à 8,4 % et à 9,2 % en 2022.
7 – Création d’une nouvelle filière biocarburant. Outre un changement de dénomination, la TIRIB devenant la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports, la loi de finances pour 2021 prévoit un élargissement de l’assiette de la taxe (jusqu’à présent limité aux essences et aux gazoles) aux carburéacteurs (définis comme les produits identifiés aux indices 13 bis et 17 bis du tableau B de l’article 265 du code des douanes). Il s’agit des carburants utilisés pour les moteurs d’avions, qui supporteront la taxe au tarif de 125 euros par hectolitre, sauf s’ils comportent au moins 1% de biocarburants (objectif cible).
8 – Précisions relatives à la notion de biocarburants. – Le législateur exclut désormais de la liste des biocarburants pouvant venir en diminution des montants de taxe dus les produits à base d’huile de palme. Dans le même sens, l’énergie issue de la filière soja ne sera pas pris en compte pour les filières essence et carburéacteur et plafonnée à 0,7 % pour la filière gazole. Il s’agit ici de limiter le recours aux cultures destinées l’alimentation humaine et animale.
À l’inverse, pourront désormais être prises en compte dans le calcul du montant de taxe dû, l’électricité d’origine renouvelable fournie par les bornes de recharge ouvertes au public, ainsi que l’hydrogène d’origine renouvelable utilisée pour les besoins du raffinage.
9 – Entrée en vigueur différée de ces réformes. – L’article 58 de la loi de finances pour 2021 précise que ces ajustements en matière de taxation des carburants ne seront applicables qu’au 1er janvier 2022, à l’exception des mesures concernant l’hydrogène et l’électricité d’origine dont l’entrée en vigueur est reportée à 2023.
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