Réf. : CA Colmar, 26 octobre 2020, n° 18/02468 (N° Lexbase : A95213YB)
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N5125BYH
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par Marie Le Guerroué
le 10 Novembre 2020
► Le décret du 27 novembre 1991 ne peut être considéré comme un texte de portée générale ; dès lors, la loi « Hoguet », par l'application de l'adage « Specialia generalibus derogant », ne permet pas à un agent immobilier d'être dispensé de la période de formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CA Colmar, 26 octobre 2020, n° 18/02468 N° Lexbase : A95213YB).
Faits/Procédure. Le conseil de l'Ordre de Colmar avait rejeté une demande d'admission à la prestation de serment et à l'inscription au tableau de l'Ordre des avocats car le demandeur n'était pas titulaire d'une maîtrise en droit ou d'un diplôme reconnu comme équivalant ne satisfaisant pas l'une des conditions impératives exigées par l'article 11 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), pour accéder à la profession d'avocat. Le demandeur ne justifiait pas remplir les conditions posées par la jurisprudence pour revendiquer la qualité de juriste d'entreprise au sens de l'article 98-3° du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID). L’intéressé a interjeté appel de cette décision.
Expérience professionnelle. La cour note qu’il résulte de l’entretien auprès du rapporteur de la commission du Barreau, que l’appelant a été gérant minoritaire et cadre salarié d’une immobilière de 1995 à 2012, depuis 2014, qu’il est président d’une SAS (une agence immobilière) et associé à 49 % avec son fils, qu'en sa qualité de dirigeant de personnes morales et de titulaire de la carte professionnelle d'agent immobilier il travaillait 70 heures par semaine et se consacrait à mi-temps à diverses activités juridiques de conseil et rédaction d'actes ; le droit étant sa passion bien qu'il ne soit pas titulaire d'une maîtrise en droit mais seulement inscrit en Master 1 Droit des Affaires à l'Université Paris I pour les années universitaires 2016/2017 et 2017/2018.
Caractère dérogatoire de la loi « Hoguet » (non). L’appelant soutient que l'application de la loi « Hoguet » (loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce N° Lexbase : L7536AIX), par l'application de l'adage « Specialia generalibus derogant » (les règles spéciales dérogent aux règles générales), lui permet d'être dispensé de la période de formation. L'appelant utilise l'adage pour affirmer que la loi précité et son décret d'application supplantent les règles générales et donc la loi de 1971, notamment, en insérant à la suite de l'article 54 sur les juristes en entreprise, l'article 59 reconnaissant la 'qualité' de juriste aux titulaires exploitant cette profession réglementée. Toutefois, selon la cour, le décret du 27 novembre 1991 ne peut pas être considéré comme un texte de portée générale, l'argumentation de l’appelant ne peut donc être admise.
Qualité de juriste d’entreprise (non). Par application des dispositions l'article 98, 3°, du décret du 27 novembre 1991, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein d'un service juridique d'une ou plusieurs entreprises, qui ont exercé leurs fonctions exclusivement dans un service spécialisé chargé dans l'entreprise des problèmes juridiques posés par l'activité de celle-ci. Or, l’appelant exerce les fonctions d'agent immobilier et dans le cadre de ses fonctions il n'est pas chargé de traiter des problèmes juridiques posés par l'activité des membres de son entreprise et ne traite que des problèmes juridiques extérieurs à l'entreprise qu'il gère. Il n'exerce pas ses fonctions au sein d'un service juridique spécialisé, à temps plein et dans le cadre d'un lien de subordination inhérent au contrat de travail. En sa qualité de gérant il ne peut revendiquer la qualité de juriste d'entreprise. Dans ces conditions, n'ayant pas la qualité de juriste d'entreprise il ne peut pas bénéficier de la dispense prévue à l'article 98, 3°, du décret du 27 novembre 1991.
Confirmation. La cour confirme la décision rendue par le conseil de l'Ordre de Colmar qui a rejeté la demande d'admission à la prestation de serment et à l'inscription au tableau de l'Ordre des avocats de l’appelant.
► Pour aller plus loin : V. ETUDE : Les passerelles, Les juristes d'entreprise dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, in La profession d’avocat (N° Lexbase : E43313RT). |
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