Le Quotidien du 3 juin 2020 : Construction

[Brèves] L’inondation d’une cave, désordre de nature décennale

Réf. : Cass. civ. 3, 14 mai 2020, n° 19-10.921, F-D (N° Lexbase : A05373MT)

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la Commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 02 Juin 2020

► Une cave n’a pas vocation à être inondée ;

► l’inondation récurrente d’une cave est susceptible d’entraîner la mise en cause de la responsabilité civile décennale du constructeur.

Voici l’essentiel à retenir de l’arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, le 14 mai 2020 (Cass. civ. 3, 14 mai 2020, n° 19-10.921, F-D N° Lexbase : A05373MT).

La notion d’impropriété à destination n’en finit plus de faire parler d’elle. C’est principalement par ce truchement que le juge étend le champ d’application matériel de la responsabilité civile décennale, dont le constructeur est présumé responsable. Il ressort pourtant de la lettre de l’article 1792 du Code civil (N° Lexbase : L1920ABQ) que la responsabilité civile décennale du constructeur ne s’applique qu’aux cas les plus graves. Il faut, pour paraphraser cet article, que le dommage à l’ouvrage porte atteinte à sa solidité ou le rende impropre à sa destination. Le cas de l’atteinte à la solidité ne cause pas vraiment de difficulté, pour être une notion en apparence objective. Tel n’est pas le cas de l’impropriété à destination, dont l’appréciation, il faut le rappeler, relève du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. civ. 3, 11 mars 2008, n° 07-10.651, F-D N° Lexbase : A4036D7M). La Haute juridiction se limite à un contrôle de motivation. En théorie.

Le caractère subjectif de la notion d’impropriété à destination autorise toutes les extensions et l’arrêt rapporté en est une illustration supplémentaire. En l’espèce, pour rejeter les demandes sur le fondement de la responsabilité civile décennale des constructeurs, les juges d’appel avaient considéré que les infiltrations étaient localisées au plafond du séjour, d’importance modérée, qu’elles n’obéraient pas l’occupation du logement et que les difficultés rencontrées pour louer l’appartement ne résultaient que des désordres affectant la pièce créée dans la cave (CA Aix-en-Provence, 29 novembre 2018, n° 17/04432 N° Lexbase : A4966YNA).

La Haute juridiction censure. Après avoir constaté que la récurrence des désordres et l’importance du taux d’humidité relevé par l’expert dans la pièce située en rez-de-jardin, provoquées notamment par l’insuffisance du réseau d’évacuation des eaux pluviales, rendaient l’appartement et la cave, qui n’avaient pas vocation à être inondée, impropres à leur destination, les conseillers auraient dû en déduire le caractère décennal des dommages.

Cet arrêt peut paraître assez surprotecteur des intérêts du maître d’ouvrage/acquéreur. Il faut y voir un exemple, parmi d’autres, de la jurisprudence rendue dans le domaine de l’habitation. L’atteinte à la destination de l’ouvrage est encore plus souplement entendue au point finalement de correspondre à une atteinte à l’habitabilité de l’ouvrage (Cass. civ. 3, 29 octobre 2015, n° 14-21.456, F-D N° Lexbase : A5270NUQ). Tel est, notamment le cas des désordres qui affectent la ventilation ou le chauffage de l’ouvrage (pour exemple, Cass. civ. 3, 10 janvier 2012, n° 11-11.172, F-D N° Lexbase : A7941IAD) mais aussi des désordres d’infiltrations ou, plus généralement, ceux relatifs à l’étanchéité de l’ouvrage ainsi qu’en atteste l’espèce rapportée (pour exemple, Cass. civ. 3, 4 novembre 2010, n° 09-70.235, FS-P+B N° Lexbase : A5650GDM).

A imaginer la nécessité d’assurer une protection particulière à l’ouvrage dans le domaine de l’habitation, ce qui paraît déjà contestable (là où la loi ne distingue pas, inutile de distinguer), la cave devrait être exclue.

Le présent arrêt n’est, toutefois, pas un cas unique. La jurisprudence avait déjà eu l’occasion de trancher sur l’insalubrité des caves consécutives à des infiltrations d’eau par le radier (Cass. civ. 3, 13 février 2013, n° 11-20.729, FS-D N° Lexbase : A0407I8L).

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