Réf. : Cons. const., décision n° 2020-834 QPC du 3 avril 2020 (N° Lexbase : A56893KW)
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par Yann Le Foll
le 08 Avril 2020
► Chaque établissement d'enseignement supérieur doit rendre compte des critères en fonction desquels ont été examinées les demandes d'inscription en premier cycle dans le cadre de « Parcoursup », cette communication pouvant comporter des informations relatives aux critères utilisés par les traitements algorithmiques éventuellement mis en œuvre par les commissions d’examen, lesquelles devront également être accessibles aux tiers à l’issue de la procédure nationale de préinscription et dans le respect de la vie privée des candidats.
Telle est la solution d’une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 3 avril 2020 (Cons. const., décision n° 2020-834 QPC du 3 avril 2020 N° Lexbase : A56893KW, sur renvoi de CE, 15 janvier 2020, n° 433296 N° Lexbase : A17513BH).
Objet de la QPC. Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 janvier 2020 par le Conseil d'Etat d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du dernier alinéa du paragraphe I de l'article L. 612-3 du Code de l'éducation (N° Lexbase : L5999LRM), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018, relative à l'orientation et à la réussite des étudiants (N° Lexbase : L4718LIL).
Ces dispositions prévoient que les candidats peuvent obtenir la communication des informations relatives aux critères et modalités d'examen ainsi mis en œuvre par les établissements ainsi que des motifs pédagogiques qui justifient la décision prise à leur égard. En revanche, elles excluent l'application de deux articles du Code des relations entre le public et l'administration (CRPA, art. L. 311-3-1 N° Lexbase : L4874LAR et L. 312-1-3 N° Lexbase : L4872LAP) relatifs à la communication et à la publicité des traitements algorithmiques utilisés comme fondement, exclusif ou partiel, d'une décision administrative individuelle (voir CE, 12 juin 2019, n° 427916 N° Lexbase : A2217ZET).
Contrôle des dispositions législatives faisant l'objet de la QPC. Par les dispositions contestées, le législateur a considéré que la détermination de ces critères et modalités d'examen des candidatures, lorsqu'ils font l'objet de traitements algorithmiques, n'était pas dissociable de l'appréciation portée sur chaque candidature. Dès lors, en restreignant l'accès aux documents administratifs précisant ces critères et modalités, le législateur a souhaité protéger le secret des délibérations des équipes pédagogiques au sein des établissements. Il a ainsi entendu assurer leur indépendance et l'autorité de leurs décisions. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d'intérêt général.
Une fois qu'une décision a été prise à leur égard, les candidats peuvent, à leur demande, obtenir la communication par l'établissement des informations relatives aux critères et modalités d'examen de leurs candidatures, ainsi que des motifs pédagogiques justifiant la décision de refus prise à leur égard. Ils peuvent ainsi être informés de la hiérarchisation et de la pondération des différents critères généraux établies par les établissements ainsi que des précisions et compléments apportés à ces critères généraux pour l'examen des vœux d'inscription. La communication prévue par ces dispositions peut, en outre comporter des informations relatives aux critères utilisés par les traitements algorithmiques éventuellement mis en œuvre par les commissions d'examen.
Réserve - une communication ne bénéficiant qu'aux candidats. Une fois la procédure nationale de préinscription terminée, l'absence d'accès des tiers à toute information relative aux critères et modalités d'examen des candidatures effectivement retenus par les établissements porterait au droit garanti par l'article 15 de la Déclaration de 1789 (N° Lexbase : L6813BHS) une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif d'intérêt général poursuivi, tiré de la protection du secret des délibérations des équipes pédagogiques.
Il juge que, dès lors, les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître le droit d'accès aux documents administratifs, être interprétées comme dispensant chaque établissement de publier, à l'issue de la procédure nationale de préinscription et dans le respect de la vie privée des candidats, le cas échéant sous la forme d'un rapport, les critères en fonction desquels les candidatures ont été examinées et précisant, le cas échéant, dans quelle mesure des traitements algorithmiques ont été utilisés pour procéder à cet examen.
Sous cette réserve d'interprétation, le Conseil constitutionnel juge que les limitations apportées par les dispositions contestées à l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs résultant de l'article 15 de la Déclaration de 1789 sont justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à cet objectif.
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