Réf. : Cass. civ. 2, 27 février 2020, n° 18-25.382 (N° Lexbase : A49733GB)
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par Charles Simon, Avocat au barreau de Paris,
le 19 Mars 2020
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rendu, le 27 février 2020, un arrêt de principe en matière d’exécution et de procédure (Cass. civ. 2, 27 février 2020, n° 18-25.382 N° Lexbase : A49733GB). Cet arrêt porte, en effet, la mention P+B+I, soit publié au bulletin et sur internet. Seule la publication au rapport annuel de la Cour de cassation manque donc pour en faire un arrêt de la plus haute importance.
Le litige à trancher naissait de la délivrance d’un commandement de payer sur la base de trois décisions liées entre elles, deux d’appel et une de cassation. Formellement, l’arrêt de la Cour de cassation aborde trois questions :
On ajoutera une quatrième et une cinquième questions, sous-jacentes dans ce litige :
Avant d’aborder ces questions, il est nécessaire de faire le point sur les faits (1), car cette affaire ne peut pas être comprise sans eux.
1. Le litige à tiroir entre Xerox et son comité social et économique
1.1. Le commandement de payer du 28 juillet 2016
Le 28 juillet 2016, le comité social et économique de la société Xerox (ci-après « le CSE ») a fait délivrer à celle-ci (ci-après « Xerox ») un commandement de payer fondé sur trois décisions différentes mais en réalité toutes liées entre elles :
1.2. Les deux procédures parallèles, au fond et à l’encontre du commandement
xerox a contesté le commandement de payer devant le juge de l’exécution qui l’a déboutée de toutes ses demandes le 30 novembre 2016. Elle a fait appel du jugement.
Parallèlement, elle a réglé « volontairement » au CSE les sommes apparaissant dans l’arrêt d’appel du 2 juin 2016, reprises dans le commandement de payer.
Il est vraisemblable que ce paiement « volontaire » ait en réalité été contraint par le fait que, dans la procédure concernant le fond du dossier, Xerox a également formé un pourvoi contre l’arrêt d’appel du 2 juin 2016. Or, à défaut de règlement, Xerox risquait une radiation de son pourvoi pour inexécution de la décision d’appel, en application de l’article 1009-1 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7859I4T).
En tout état de cause, à partir de fin 2016, deux procédures étaient en cours en parallèle :
Alors que les appels à l’encontre des décisions du juge de l’exécution sont habituellement traités rapidement, ce n’est que le 6 septembre 2018 que la cour d’appel a rendu sa décision sur celui à l’encontre de la décision du juge de l’exécution du 30 novembre 2016 (CA Paris, Pôle 4 Chambre 8, 6 septembre 2018, RG n°17/01010 (N° Lexbase : A4647X3I).
Cela est probablement dû au pourvoi parallèle dans la procédure concernant le fond du litige.
1.3. La cassation partielle du titre fondant le commandement
Ce pourvoi a en effet abouti à un arrêt du 25 octobre 2017 qui, logiquement, a de nouveau prononcé une cassation partielle. En effet, ainsi qu’il a été dit, l’arrêt d’appel du 2 juin 2016 fixant le montant des condamnations dues par Xerox n’avait pas tenu compte de la première cassation partielle à l’encontre de l’arrêt d’appel du 3 juillet 2014 retenant le principe des condamnations (Soc., 25 octobre 2017, n° 16-21.717, (N° Lexbase : A1400WX7).
C’est donc une annulation par voie de conséquence que la Cour de cassation a prononcée, au visa de l’article 625 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7854I4N) qui dispose en son deuxième alinéa que « la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ».
La Cour de cassation a encore rendu, le 24 janvier 2018, un arrêt interprétant son arrêt du 25 octobre 2017. Elle y a précisé les chefs de condamnations que la cassation partielle avait atteints et explicité leur chiffrage (Cass. soc., 24 janvier 2018, n°16-21.717, (N° Lexbase : A8592XBT).
1.4. La modification des demandes à l’encontre du commandement
Sur cette base, Xerox a modifié ses demandes devant la cour d’appel saisie de son recours à l’encontre de la décision du juge de l’exécution.
Elle a ainsi demandé à la cour d’appel :
La cour d’appel ne l’a pas suivie et l’a :
C’est la décision qui était soumise à la Cour de cassation.
La Cour de cassation a :
Pour en arriver à cette conclusion, la Cour de cassation a dû répondre aux trois questions énoncées plus haut.
2. A partir de quand le juge de l’exécution est-il compétent pour trancher un litige ?
Concernant la première question (le moment à partir duquel le juge de l’exécution est compétent pour trancher un litige), la solution que la Cour de cassation pose dans son arrêt du 27 février 2020 n’est pas nouvelle.
En effet, au visa des articles L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire (N° Lexbase : L7740LPD) et L. 221-1 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L5851IR7), elle juge que « si le commandement à fin de saisie-vente ne constitue pas un acte d’exécution forcée, il engage la mesure d’exécution et […] toute contestation portant sur les effets de sa délivrance relève des attributions du juge de l’exécution ». Cette position, ancienne, est constante (Cass. civ. 2, 16 décembre 1998, n° 96-18.255 N° Lexbase : A8004CHW; Cass. civ. 2, 27 avril 2000, n° 98-15.087 N° Lexbase : A0759C4U).
Elle est opportune, car elle permet de trancher, dès le commandement de payer, des questions telles que la disparition du titre fondant la saisie, comme ici, ou encore une éventuelle contestation sur les montants réclamés résultant, par exemple, d’une compensation (Cass. civ. 2, 18 février 2016, n°14-29.893, (N° Lexbase : A4499PZN). Ce d’autant plus que le commandement ouvre un délai de deux ans pour pratiquer la saisie (C. proc. civ. exécution, art. R. 221-5 N° Lexbase : L2250ITI). Le commandement peut donc rester suspendu au-dessus de la tête du débiteur pendant un temps certain, comme une épée de Damoclès. Il faut donc permettre au débiteur de sortir de l’incertitude le plus tôt possible.
Cette solution est aussi cohérente avec le régime adopté pour les délais de paiement à l’article 510 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1516LSX) : après signification d’un commandement, c’est le juge de l’exécution qui est compétent pour accorder des délais.
Pour déclencher la compétence du juge de l’exécution, encore faut-il toutefois que le commandement de payer soit un vrai commandement « à fin de saisie-vente » et pas une simple mise en demeure d’huissier déguisée en commandement de payer qui n’a aucune valeur procédurale particulière (Cass,.civ. 2, 22 juin 2017, n° 16-17.277, (N° Lexbase : A1207WKW). Le commandement de payer visant la clause résolution dans le cadre d’un contrat de bail n’est pas non plus le commandement déclenchant la compétence du juge de l’exécution (Cass. civ. 2, 23 juin 2011, n° 10-18.396, (N° Lexbase : A5407HUS).
La solution étant classique et la jurisprudence abondante, comment la cour d’appel a-t-elle pu se tromper en l’espèce ? Il semble que ce soit parce qu’elle a considéré que ce qui lui était demandé était la restitution de sommes que Xerox avait payées au CSE ; de plus en l’absence de mesure d’exécution forcée, le commandement de payer n’étant qu’un préalable à la mesure. Selon la cour d’appel, il n’y avait donc pas eu de contestation s’élevant à l’occasion d’une exécution forcée au sens de l’article L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire (N° Lexbase : L7740LPD).
Mais un commandement de payer avait bien été délivré avant le paiement, déclenchant la compétence du juge de l’exécution pour connaître des contestations relatives à l’exécution du titre. La cour d’appel avait donc fait fausse route en tenant compte du paiement des sommes avant toute saisie. Seul comptait le fait que ce paiement était intervenu après le commandement et sous toutes réserves puisque ledit commandement était contesté.
De façon proche, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de juger que la cour d’appel, statuant en tant que juge de l’exécution, était compétente pour entendre d’un appel sollicitant la restitution des sommes versées à la suite du paiement de la dette après la décision du juge de l’exécution (Cass. civ. 2, 14 novembre 2019, n°18-21.869, N° Lexbase : A6617ZYQ).
En l’espèce, la cour d’appel commetait donc une erreur en jugeant que Xerox n’était pas recevable à former des demandes de restitution devant elle, en tant que juge de l’exécution, après contestation du commandement puis paiement des sommes réclamées postérieurement à la décision du juge de l’exécution.
3. Quel devenir pour le commandement fondé sur un titre partiellement annulé?
Sur le deuxième point (le devenir du commandement fondé sur un titre partiellement annulé), la Cour de cassation fait encore preuve de classicisme mais la solution a le mérite de la clarté : « lorsqu'un titre exécutoire sur lequel est fondé un commandement à fin de saisie-vente est annulé partiellement, le commandement demeure valable à concurrence du montant de la créance correspondant à la partie du titre non annulée ».
En l’espèce, Xerox plaidait que, le deuxième arrêt d’appel du 2 juin 2016 visé dans le commandement ayant été annulé, le commandement était nul par voie de conséquence. Pour rappel et ainsi qu’il a été vu plus haut, le mécanisme de l’annulation par voie de conséquence est prévu à l’article 625 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7854I4N). Il pose la disparition implicite de tout ce qui découlait de la décision cassée, sans qu’une nouvelle décision ne soit nécessaire.
Mais l’annulation du deuxième arrêt d’appel du 2 juin 2016 n’étant que partielle, la Cour de cassation estime que l’annulation par voie de conséquence du commandement en découlant ne peut elle-même qu’être partielle. Le résultat est donc un simple cantonnement de la créance portée dans le commandement. Il faut en retirer les sommes correspondantes aux seuls chefs de l’arrêt que la Cour de cassation a cassés.
Toute chose égale par ailleurs, cette distribution de la nullité au sein d’un acte se rencontre dans d’autres hypothèses. C’est l’exemple de la notification d’un jugement qui remplit juridiquement deux fonctions : faire courir les délais de recours (C. proc. civ,. art.528 N° Lexbase : L6676H7E) et permettre l’exécution (C. proc. civ,. art. 503 N° Lexbase : L6620H7C). La notification qui n’indique pas les modalités de recours ne fait pas courir les délais mais elle reste valable pour permettre l’exécution (Cass. civ. 2, 14 février 2008, n° 06-20.988 N° Lexbase : A9223D4D).
Il s’en déduit donc que, en matière de procédure, si un acte remplit plusieurs fonctions ou si l'un de ses points est contesté mais est « séquable », l’acte peut n’encourir la nullité que pour la fonction ou la partie du point affectée d’un vice, l’acte restant valable pour le reste. Cette solution paraît saine.
4. Des demandes nouvelles formées en appel pour des faits survenus après la clôture des débats devant le premier juge sont-elles recevables ?
Sur le dernier point (la recevabilité de demandes nouvelles en appel pour des faits survenus après la clôture des débats devant le premier juge), la Cour de cassation juge que « la demande n'est pas nouvelle lorsqu'elle tend à faire juger une question née de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Ce n’est, ni plus ni moins, que la reprise de l’article 564 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0394IGP) qui dispose que « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour […] faire juger les questions nées de […] la survenance ou de la révélation d'un fait ». Cette solution semble évidente.
En l’espèce, le fait nouveau était la cassation partielle de l’arrêt d’appel du 2 juin 2016 fondant le commandement de payer. Cette cassation partielle est intervenue le 25 octobre 2017, soit après le jugement du juge de l’exécution du 30 novembre 2016 déboutant Xerox de sa demande d’annulation du commandement. Xerox était donc recevable à former une demande nouvelle de restitution devant la cour d’appel, sur la base de ce fait nouveau. En effet, et comme la Cour de cassation le rappelle, l’obligation de restitution résulte de plein droit de l’arrêt de cassation.
En définitive, cet arrêt de cassation ne semble poser que des solutions classiques, même s’il le fait avec une grande clarté. Mais son véritable intérêt pourrait résider dans la lumière qu’il jette sur un problème pratique, consistant à savoir comment gérer la modification partielle d’un titre, sous l’angle de :
5. La traitement pratique de l’annulation partielle d’un titre
En effet, au-delà du débat juridique qui a eu lieu devant la Cour de cassation, le cas d’espèce soulève un problème pratique. Le commandement litigieux visait, comme il a été vu, trois titres successifs :
On aurait pu penser que l’huissier, ayant connaissance des trois titres puisqu’ils servaient de fondement à son commandement, les aurait spontanément combinés.
Ce d’autant que l’article 625 du Code de procédure civile est clair : « la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé… ». L’arrêt de cassation du 31 mai 2016 aurait donc dû suffire pour interpréter l’arrêt d’appel du 2 juin 2016 et en extraire le montant des chefs de condamnation dont le principe, tiré de l’arrêt d’appel du 3 juillet 2014, avait été censuré par la Cour de cassation.
Ce n’est cependant manifestement pas ce que l’huissier a fait. Bien au contraire, il semble avoir réclamé à Xerox le paiement de l’intégralité des sommes figurant au dispositif du jugement de l’arrêt d’appel du 2 juin 2016. Il a ainsi fait une application littérale de ce titre, sans aucune interprétation. Comme si l’arrêt de cassation partielle du 31 mai 2016, pourtant visé dans son commandement, n’existait pas ou était de nul effet.
C’est de ce refus d’appliquer spontanément la règle de l’annulation par voie de conséquence à l’exécution de l’arrêt d’appel du 2 juin 2016 que le litige secondaire sur son exécution est né.
Et c’est manifestement pour couper court à tout litige ultérieur sur les sommes effectivement dues que la Cour de cassation a dû prendre un arrêt interprétatif le 25 octobre 2017, afin de préciser explicitement à la fois :
On est loin du principe posé à l’article 625 du Code de procédure civile selon lequel il n’est pas besoin d’une décision nouvelle pour appliquer la règle de l’annulation par voie de conséquence.
A l’issue de l’arrêt commenté, la façon de traiter en pratique les effets de la modification partielle d’un titre n’apparaît donc pas forcément plus claire : le bénéficiaire de cette modification a dû créer un contentieux secondaire et aller jusqu’en cassation afin d’obtenir un nouveau titre explicitant les effets de la modification, y compris en faisant une demande d’interprétation pour les chiffrer. Ce contentieux secondaire n’a, d’après les textes, pas lieu d’être, mais il a consommé ici le temps, l’argent et l’énergie des parties et encombré les tribunaux.
Peut-être la solution pratique aurait pu consister, pour Xerox, à mettre en cause l’huissier pour l’amener à revoir « spontanément » sa position. Car l’huissier a sans doute commis ici une faute en délivrant le commandement visant trois décisions différentes sans les coordonner.
En effet, la meilleure doctrine enseigne que, « en présence d’une difficulté d’exécution tenant à l’existence d’une disposition obscure dans le jugement (par exemple en cas de d’ambiguïté sur l’identité de la personne condamnée), l’huissier de justice engage sa responsabilité s’il ne saisit pas le JEX en vue de l’interprétation de la décision, avant d’entreprendre la mesure d’exécution (C. proc. exéc., art. L. 122-2 N° Lexbase : L5811IRN et R. 151-1 N° Lexbase : L2191ITC) ». [1] La Cour de cassation a déjà rappelé par le passé ce devoir de prudence de l’huissier confronté à une incertitude (Cass. civ. 1, 22 mars 2012, n°10-25.811 (N° Lexbase : A4230IGR).
Ici l’obscurité ne ressort pas d’une disposition d’un jugement unique mais de la combinaison des dispositions de deux jugements successifs. La difficulté est cependant la même et l’huissier, s’il se refusait à coordonner spontanément les différentes décisions et mettre en œuvre la règle de l’annulation par voie de conséquence, aurait donc dû refuser d’instrumenter sans avoir fait trancher au préalable la question par le juge de l’exécution. Le lui rappeler aurait peut-être pu l’amener à reconsidérer les termes de l’exécution, sans avoir à passer par un contentieux particulière lourd.
6. Le régime de l’obligation de restitution à la suite de la disparition d’un titre
Une dernière question concerne la restitution des sommes payées en exécution d’un jugement ultérieurement modifié. Cela constitue le miroir des conséquences de la cassation : les condamnations n’existant plus, la personne qui a bénéficié d’un paiement doit le rembourser.
Ici, la doctrine de la Cour de cassation est claire et elle est réitérée dans l’arrêt commenté : « l’obligation de restitution des sommes résulte de plein droit de l’arrêt de cassation partielle ». Cela signifie plusieurs choses :
L’infirmation en appel et le débouté de tout ou de partie des demandes de l’intimé, demandeur en première instance, suffit donc à fonder l’obligation de restitution des sommes perçues au bénéfice du premier jugement ainsi que la Cour de cassation l’a rappelé à de très nombreuses reprises (Cass. civ. 2, 20 juin 2019, n° 18-18.595, N° Lexbase : A9346ZEU ; Cass. civ. 2, 7 avril 2011, n° 10-18.691 N° Lexbase : A3673HND ; Cass. civ. 2, 11 mars 2010, n° 09-13.320, N° Lexbase : A1842ETE).
La cour d’appel de Toulouse l’a synthétisé de façon particulièrement claire (CA Toulouse, 16 septembre 2009, RG n°11/06178, N° Lexbase : A1648NXC ; 18 novembre 2015, n° 11/06178 N° Lexbase : A9997RI4) : « un arrêt infirmant un jugement portant condamnation au paiement d'une somme d'argent emporte de plein droit obligation de restitution des sommes versées en exécution du jugement réformé. La cour n'est pas tenue de statuer expressément sur la restitution des sommes versées en exécution du jugement. »
On comprend alors l’embarras de la cour d’appel de Paris, en l’espèce, statuant en tant que juge de l’exécution : Xerox lui demande d’ordonner la restitution de sommes versées au bénéfice de l’exécution de l’arrêt d’appel du 2 juin 2016 partiellement cassé. Mais Xerox bénéficie déjà d’un titre lui permettant de mettre en œuvre l’obligation de restitution : l’arrêt de cassation. Or, il n’est pas possible de délivrer deux titres pour une même obligation, sauf à violer l’autorité de chose jugée de la première décision.
Si donc l’irrecevabilité que la cour d’appel a opposée à la demande de restitution de Xerox, fondée sur l’absence de mesure d’exécution forcée et sur le caractère nouveau de la demande en appel, était juridiquement maladroite et a été sanctionnée par la Cour de cassation, le résultat pratique, c’est-à-dire le refus d’un second titre explicitant l’obligation de restitution, semble quant à lui juste.
Sur renvoi, le résultat pratique pourrait donc bien être le même : une irrecevabilité de la demande de restitution du fait de l’autorité de la chose jugée, dès lors que l’obligation de restitution résulte déjà de l’arrêt de cassation du 25 octobre 2017, interprété par celui du 24 janvier 2018. Tout au plus pourrait-il être demandé à la cour d’appel, statuant en tant que juge de l’exécution, de mettre un terme à la difficulté en fixant le montant de la créance de restitution.
Au final, les circonvolutions et le contentieux-fleuve auxquels cette affaire a donné lieu (nous avons laissé de côté une procédure de référé concernant la demande de restitution) montrent les difficultés pratiques que le caractère implicite à la fois de l’annulation par voie de conséquence et de l’obligation de restitution crée. Ce caractère implicite crée un flou propice à toutes sortes de contestations et à la naissance d’un contentieux secondaire qui paraît bien inutile.
[1] Guinchard (S., /s la dir.), Dalloz Action Droit et pratique de la procédure civile 2017|2018, Dalloz, 9e éd., 2016, 521.24.
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