Réf. : Cass. com., 26 février 2020, n° 18-19.737, FS-P+B (N° Lexbase : A79343GX)
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N2475BYC
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par Vincent Téchené
le 04 Mars 2020
► D’une part, selon l'article L. 626-34-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L3525ICK), le tribunal statue dans un même jugement sur les contestations relatives à l'application des articles L. 626-30 (N° Lexbase : L2846IXP) à L. 626-32 et sur l'arrêté ou la modification du plan, et les créanciers ne peuvent former une contestation que contre la décision du comité ou de l'assemblée dont ils sont membres, de sorte qu'un créancier titulaire d'obligations, membre de l'AUO, ne peut contester que l'adoption du projet de plan par cette assemblée et seulement lorsque les dispositions relatives à la constitution de cette assemblée, sa convocation, et les conditions de sa délibération telles que prévues par l'article L. 626-32 (N° Lexbase : L7303IZI) ne lui semblent pas avoir été correctement appliquées ;
► D’autre part, les créanciers obligataires sont sans intérêt à critiquer le rejet par la cour d'appel de leur demande fondée sur un abus de majorité lors du vote sur le projet de plan par l’AUO dès lors que, un tel abus ne relevant pas des contestations concernant la constitution de l’AUO, sa convocation ou les conditions de sa délibération, cette demande est irrecevable en application de l'article L. 626-34-1 du Code de commerce.
Tels sont les enseignements d’un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 26 février 2020 (Cass. com., 26 février 2020, n° 18-19.737, FS-P+B N° Lexbase : A79343GX).
L’affaire. La société faîtière d’un groupe international (la débitrice) a bénéficié, le 27 février 2017, d'une procédure de mandat ad hoc dans le cadre de laquelle elle a engagé des discussions avec ses principaux créanciers et actionnaires répartis en quatre groupes, dont celui des créanciers titulaires d'obligations à haut rendement dites obligations « High Yield » et celui des créanciers titulaires d'obligations convertibles en actions nouvelles ou existantes dites obligations Oceane. Le 14 juin 2017, la société a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, à la suite de quoi 14 procédures américaines dites de « Chapter 11 » ont été ouvertes aux Etats-Unis afin de mettre sous protection l'ensemble des actifs du groupe. Le 28 juillet 2017, le comité des établissements de crédits et assimilés et l'assemblée unique des obligataires (l'AUO) ont adopté respectivement à l'unanimité et à une majorité de 93,5 % le projet de plan de sauvegarde préparé par la débitrice et prévoyant notamment la conversion d'une grande partie de la dette obligataire en capital à un taux de conversion de 3,12 euros par action pour les obligations « High Yield » et de 10,26 euros pour les obligations Oceane et la possibilité pour les obligataires « High Yield » de souscrire à des émissions de titres. Le 4 août 2017, plusieurs créanciers obligataires, porteurs de 23 % des obligations Oceane, qui estimaient que le plan ne traitait pas équitablement les porteurs de dette « High Yield » et les détenteurs d'obligations Oceane, ont demandé au tribunal de rejeter le plan de sauvegarde comme étant contraire aux dispositions de l'article L. 626-32 du Code de commerce.
L’arrêt d’appel ayant notamment retenu l’irrecevabilité de la demande de rejet du plan, arrêté le plan de sauvegarde et rejeté les demandes fondées sur un abus de majorité, les créanciers obligataires « Oceane »ont formé un pourvoi en cassation.
La décision. La Haute juridiction, énonçant les précisions inédites précitées, rejette le pourvoi. Elle relève notamment que selon l’arrêt d’appel les créanciers obligataires contestataires ne contestaient ni la régularité de la tenue de l'AUO ou sa composition ni la régularité des votes mais contestaient la délibération de cette assemblée sur la modalité du plan de sauvegarde relative au traitement des porteurs d'obligations Oceane, qui serait, selon elles, différent de celui des porteurs d'obligations « High Yield » sans que cela soit justifié. Ainsi, les juges du fond en ont exactement retenu que, ce faisant, les créanciers obligataires faisaient indirectement appel du plan de sauvegarde lui-même et non de la délibération de l'AUO, en contestant un élément de fond du plan portant sur le remboursement des obligations selon leur nature, ce que les textes ne leur permettent pas (cf. l’Ouvrage «Entreprises en difficulté» N° Lexbase : E1575EUU).
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